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The estimated recognition rate for this document is 98%.revue d'histoire moderne et contemporaine PubliĂ©e chaque trimestre par la SociĂ©tĂ© d'Histoire moderne et contemporaine avec le concours du Centre National de la Recherche Scientifique Directeurs honoraires f Charles H. POUTHAS, Roger PORTAL et Jean-Baptiste DUROSELLE Directeur Pierre MILZA RĂ©dacteurs en chef Jacques BOUILLON et Daniel ROCHE sommaire ÉTUDES Michel FONTENAY Corsaires de la foi ou rentiers du sol ? Les chevaliers de Malte dans le corso » mĂ©diterranĂ©en au XVIIe siĂšcle 361 Maurice VIRIÊUX L'Ă©lite lyonnaise sous la RĂ©gence 385 Marc VIGIE Le bagne des Philosophes 409 Annick PUYGRENIER Une intĂ©gration dĂ©licate Fribourg-en-Brisgau et l'État de Bade, 1806-1820 .. 434 Miche] DREYFUS Pacifistes socialistes et humanistes dans les annĂ©es trente 452 MÉLANGES François MARTIN et François PERROT Les populations de l'HĂŽtel-Dieu de Meaux Ă  la fin du XVIF siĂšcle 470 Asher COHEN Le peuple aryen » vu par le Commissariat gĂ©nĂ©ral aux questions juives 482 Paul RAMADIER RĂ©flexions, dĂ©cembre 1947 prĂ©sentĂ© par Dominique BORNE et Jacques BOUILLON .. 495 COMPTES RENDUS Annie MOLINIÉ-BERTRAND, AU siĂšcle d'or, l'Espagne et ses hommes. La population du royaume de Castille au XVIe siĂšcle Christian Hermann, 512 ; Dominique JULIA, Jacques REVEL et Roger CHARIIER Ă©d., Les universitĂ©s europĂ©ennes du xvr= au xviir= siĂšcle. Histoire sociale des populations' Ă©tudiantes Luce Giard, 513 ; Lucien JAUME, Hobbes et l'État reprĂ©sentatif moderne Yann Fauchois, 515 ; BenoĂźt MELY, Jean-Jacques Rousseau, un intellectuel en rupture Daniel Roche, 517 ; Georges BRUNEL, Boucher Guy Boquet, 519 ; AndrĂ© ENCREVÉ, Protestants français au milieu du XIXe siĂšcle. Les rĂ©formĂ©s de 1848 Ă  1810 François Laplanche 522 ; Pierre MILZA SOUS la direction de, Les Italiens en France de 1914 Ă  1940 Jean-Marc Delaunay, 524 ; MichĂšle COINTET-LABROUSSE, Vichy et le fascisme Isabel Broussard, 526. g SociĂ©tĂ© d'Histoire moderne et contemporaine, Paris, 1988 ABONNEMENTS Abonnement annuel 1987 4 numĂ©ros France 320 F + TVA 7 % = 343 F Étranger 360 F Chaque numĂ©ro sĂ©parĂ© 165 F Le numĂ©ro spĂ©cial 210 F Par courtiers France 360 F + TVA 7 % moins remise = 347 F Étranger 400 F Les abonnements doivent ĂȘtre rĂ©glĂ©s au de la SociĂ©tĂ© d'Histoire moderne, Paris 418-29, ou au TrĂ©sorier, M. Cointet, .4, square Émile-Zola, 75015 Paris. A partir du 1" mai 1988 39, rue Saint-Ferdinand, 75017 Paris. RÉDACTION DE LA REVUE Toute correspondance rĂ©dactionnelle destinĂ©e Ă  la Revue doit ĂȘtre adressĂ©e Ă  M. Jacques Bouillon, 104, avenue Saint-ExupĂ©ry, 92160 Antony. SOCIÉTÉ D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE La SociĂ©tĂ© d'Histoire moderne et contemporaine, fondĂ©e en 1901, se rĂ©unit Ă  la Sorbonne, d'octobre Ă  juin, le 1er dimanche de chaque mois. Les sociĂ©taires reçoivent la Revue et un Bulletin, qui publie le compte rendu des sĂ©ances, Ă©ditĂ©s avec le concours du et de la Ville de Paris. Se renseigner auprĂšs du SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral de la SociĂ©tĂ©, M. Boquet, 47, boulevard BessiĂšres, 75017 Paris. revue d'histoire moderne TOME xxxv JUILLET-SEPTEMBRE 1988 et contemporaine CORSAIRES DE LA FOI OU RENTIERS DU SOL ? LES CHEVALIERS DE MALTE DANS LE CORSO » MÉDITERRANÉEN AU XVIIe SIÈCLE Inscrite au plus ancien de l'histoire de la MĂ©diterranĂ©e, la violence sur mer apparut trĂšs tĂŽt Ă  ses riverains comme une ressource d'appoint fort apprĂ©ciable, voire, pour certaines collectivitĂ©s plus ou moins dĂ©shĂ©ritĂ©es, comme un moyen essentiel de subsister. A partir du VIIIe siĂšcle, la mer IntĂ©rieure devint en outre, et pour un millĂ©naire, le champ clos d'une rivalitĂ© entre la Croix et le Croissant qui offrait au brigandage maritime la plus efficace des couvertures idĂ©ologiques. Ainsi a pu se dĂ©velopper une forme spĂ©cifique du phĂ©nomĂšne corsaire que, d'un vieux terme empruntĂ© Ă  la lingua -franco., nous appellerons le corso mĂ©diterranĂ©en 1. Certes, d'autres formes ont coexistĂ©, par exemple une piraterie pure et simple, soeur du banditisme terrestre, et qu'on trouve Ă  l'Ă©tat endĂ©mique sur certains rivages grecs et dalmates jusqu'au dĂ©but du xrx' siĂšcle ; ou encore une vĂ©ritable guerre de course de type ponantin, Ă  laquelle se livraient pĂ©riodiquement les principales puissances maritimes de l'Europe. Mais ce qui donne son originalitĂ© tant Ă  l'espace mĂ©diterranĂ©en qu'Ă  la pĂ©riode considĂ©rĂ©e, c'est le corso. RelancĂ© par la conquĂȘte turque au XVe siĂšcle, Ă©levĂ© au rang d'une institution par certains États-corsaires » oĂč le public le disputait au particulier dans une sainte et profitable Ă©mulation, il permettait sous couvert d'une lutte intransigeante et perpĂ©tuelle pour la vraie foi de se livrer Ă  des rapines continuelles, non seulement sur l'infidĂšle mais encore sur tous ceux qui voulaient pactiser avec lui. Principaux acteurs, longtemps seuls connus des historiens, les Barbaresques ont toujours constituĂ© pour l'historiographie traditionnelle, le proto* proto* texte est celui d'une communication prĂ©sentĂ©e au colloque Les Ordres militaires dans la MĂ©diterranĂ©e occidentale xrr=-xvni siĂšcles », organisĂ© Ă  Madrid en mai 1982 par la Casa de Velasquez et l'Instituto Jeronimo de Zurita. Les actes devant en principe paraĂźtre dans le Revista de Studios Manchegos, j'avais diffĂ©rĂ© cette publication par Ă©gard pour les organisateurs. 1. Michel FONTEKAY et Alberto TENENÏI, C Course et piraterie mĂ©diterranĂ©ennes, de la fin du moyen Ăąge au dĂ©but du XDP siĂšcle », rapport au 15e Colloque international d'Histoire maritime San Francisco, 1975 dans Course et Piraterie, 2 vol. polycopiĂ©s, Paris, et pp. 87-134. 362 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE type-mĂȘme du pirate mĂ©diterranĂ©en 2. Depuis quelques annĂ©es toutefois, on redĂ©couvre qu'il y eut aussi un corso chrĂ©tien, peut-ĂȘtre plus diffus et protĂ©iforme, mais qui ne le cĂ©dait en rien, quant aux mĂ©thodes, au corso musulman 3. Parmi ses protagonistes, on trouve deux ordres militaires. L'un, rĂ©cent, a Ă©tĂ© créé spĂ©cialement dans ce but par le duc de Toscane, Cosme de MĂ©dicis, en 1561 les Chevaliers de Saint Etienne. L'autre est beaucoup plus ancien puisqu'il s'agit des Chevaliers-Hospitaliers de Saint Jean de JĂ©rusalem, appelĂ©s depuis Chevaliers de Rhodes et aujourd'hui Chevaliers de Malte », pour reprendre le titre d'un ouvrage cĂ©lĂšbre que leur a consacrĂ© l'abbĂ© Vertot en 1726 et qui rĂ©sume parfaitement l'Ă©volution d'un ordre religieux nĂ© en Terre Sainte vers 1100 comme ordre hospitalier, mais presque aussitĂŽt transformĂ© en ordre militaire pour dĂ©fendre les États latins d'Orient, puis conduit par son repli sur Chypre 1291 et ensuite sur Rhodes 1309 Ă  se dĂ©couvrir une vocation maritime, et finalement contraint de s'y consacrer exclusivement aprĂšs son installation Ă  Malte comme État souverain, feudataire du roi de Sicile, en 1530. C'est l'activitĂ© corsaire de cet Ordre que nous allons briĂšvement examiner, en essayant de prĂ©ciser Ă  la fois la place des chevaliers de Malte dans 2. CaractĂ©ristique Ă  cet Ă©gard un ouvrage qui fait autoritĂ© mais qui paraĂźt plus souvent citĂ© que lu Otto ECK, Seerauberei im Mittelmeer, Dunkle BlĂ tter EuropdĂŻscher Geschichte, Munich-Berlin, 1940. En rĂ©action Ă  cette lĂ©gende noire, une lĂ©gende rose est nĂ©e celle de Sir Godfrey FISHER, Barbary Legend, War, Trade and Piracy in North Africa, 1415-1830, Oxford, 1957. Plus nuancĂ©s le classique Salvatore BONO, I corsari barbareschi, Turin, 1964, et le rĂ©cent Ciro MANCA, Il modello di sviluppo economico dĂ©lie cittĂ  marittime barbaresche, Naples, 1982. 3. En dehors de quelques pages dans Paul MASSON, Histoire du commerce français dans le Levant au XVIIe siĂšcle, Paris, 1987, le phĂ©nomĂšne est restĂ© pratiquement inconnu jusqu'Ă  ce que Fernand BRAEDEL lui consacre dans sa MĂ©diterranĂ©e une part importante du chapitre intitulĂ© les formes de la guerre ». Depuis, Alberto TENENTI a montrĂ© dans Naufrages, corsaires et assurances maritimes 1592-1609. Paris, 1959, et Venezia e i corsari, 1580-1615, Bari, 1961, que les corsaires chrĂ©tiens avaient Ă©tĂ© aussi nĂ©fastes au commerce de Venise que les corsaires musulmans ; et Jean MATHIEX a soulignĂ© l'effet inhibiteur du corso maltais et toscan sur les Ă©conomies musulmanes dans Trafic et prix de l'homme en MĂ©diterranĂ©e », Annales 1954, pp. 157-167 et Sur la marine marchande barbaresque », Annales 1958, pp. 77-93. Plus rĂ©cemment. Peter EARIE, Corsairs of Malta and Barbary, Londres, 1970, nous a donnĂ© la premiĂšre Ă©tude sĂ©rieuse sur l'organisation de la course privĂ©e Ă  Malte. J'ai moi-mĂȘme, parallĂšlement Ă  cette contribution au colloque de Madrid, tentĂ© de prĂ©ciser l'impact du corso chrĂ©tien sur l'empire ottoman et de voir les rĂ©actions de celui-ci, Ă  l'occasion du colloque Économies mĂ©diterranĂ©ennes. Equilibres et intercommunications, xnP-xix* siĂšcles » organisĂ© Ă  AthĂšnes en septembre 1982 par le Centre de Recherches NĂ©o-HellĂ©niques ; le texte de cette communication, intitulĂ©e L'empire ottoman et le risque corsaire au XVEF siĂšcle », est paru dans les actes et dans la t. XXXII 1985, pp. 185-208. J'ai Ă©galement abordĂ©, de maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, quelques-unes des consĂ©quences du phĂ©nomĂšne corsaire sur les destinĂ©es de la mer IntĂ©rieure dans Los fenomenĂŽs corsarios en la periferizacion » del Mediterraneo en el siglo XVII », Desigualdad y dependencia, La periferizacion del Mediterraneo occidental S. XII-XIX, Actes du 1er SĂ©minaire d'histoire Ă©conomique et sociale de Murcie mai 1984, Murcie, 1986, pp. 116-121. Enfin, tout rĂ©cemment, j'ai prĂ©sentĂ© une communication sur La place de la course dans l'Ă©conomie portuaire d'aprĂšs l'exemple de Malte et des ports barbaresques » lors de la XIXe Settimana di Studi de l'Institut Francesco Datini mai 1987, dont les actes, I parti corne impresa economica secoli XIII-XVIII, sont sous presse. LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 363 le corso chrĂ©tien et ce que celui-ci a pu reprĂ©senter pour la Religion gĂ©rosolomitaine » 4. A peu d'exceptions prĂšs, tous les ouvrages traitant de la course antimusulmane s'inscrivent dans une tradition historiographique de type europĂ©o-centrique qui fait de l'Occident chrĂ©tien la norme de toute civilisation; mais, concernant les activitĂ©s des chevaliers de Malte ou celles de leurs Ă©mules stĂ©phanites, la bibliographie tourne Ă  l'hagiographie pure et simple. D'un cĂŽtĂ©, on a les pirates barbaresques peste plurisĂ©culaire », racaille de voleurs », avides seulement de lucre et de pillage » 5, Ă  la fois infidĂšles et barbares, ennemis de la vraie foi et de la civilisation. En face, les derniers des croisĂ©s » 6, qu'enflamme une gĂ©nĂ©reuse piĂ©tĂ©, animĂ©s d'un noble dĂ©sintĂ©ressement tel saint Georges terrassant le Dragon, ils ont engagĂ© une vraie chasse d'extermination contre la pieuvre aux tentacules multiples et multiformes » 7 et, sans trĂȘve ni merci, livrent une lutte hĂ©roĂŻque pour la Foi et la civilisation occidentale » 8. Comment, dans ces conditions, oublier les Ă©minents services que les membres de l'Ordre de Malte rendirent Ă  la cause de la chrĂ©tientĂ© et de la civilisation »? En laissant de cĂŽtĂ© tout jugement de valeur, on doit redresser un premier mythe Ă  propos du corso chrĂ©tien celui d'une contre-course dĂ©fensive liĂ©e au danger barbaresque, une sorte de police des mers destinĂ©e Ă  protĂ©ger les eaux de la chrĂ©tientĂ© contre la piraterie des corsaires d'Alger, Tunis ou Tripoli. D'abord parce que ce serait oublier l'antĂ©rioritĂ© dans ce domaine des Chevaliers-Hospitaliers. Comme le rappelle BrantĂŽme, peu suspect de leur ĂȘtre dĂ©favorable, Rhodes Ă©tait trĂšs-bien et commodĂ©ment situĂ©e pour faire de grandes prises sur la Turquie et sur la Syrie et sur les marchands qui trafiquaient de l'une Ă  l'autre » 10. Il est vrai que 4. A partir d'une recherche en cours sur Malte et la course chrĂ©tienne aux xvF, XVIF et xvnr 1 siĂšcles ». Pour certains fonds souvent citĂ©s, on utilisera les abrĂ©viations suivantes 1° Archives Nationales Ă  Paris, notamment sĂ©rie MI et dĂ©pĂŽts des Archives de la Marine Mar. et des Affaires Ă©trangĂšres ; 2° Archives de l'Ordre de Malte Ă  La Valette, notamment Libri bullarum, 211 volumes pour la pĂ©riode maltaise, 1530-1798 414 Ă  624 et Libri Conciliorum Status, 24 volumes du 20 avril 1623 au 1" juin 1798 255-278; 3° Archives des anciennes cours de justice Ă  La Valette, fonds Tribunal Armamentorum ; 4° Archivio di Stato Ă  Venise, essentiellement dans Collegio Relazioni les relations des ProvĂ©diteurs gĂ©nĂ©raux et des ProvĂ©diteurs de Candie, et dans Senato SĂ©crĂ©ta, les dĂ©pĂȘches du baile de Constantinople. 5. 0. ECK, op. cit., pp. 1 et 4. 6. Roderick CAVALIERO, The last of the Crusaders, Londres, 1958 sur les activitĂ©s maritimes de l'Ordre de Malte au xvnr siĂšcle. 7. Gino GUARNOERI, I cavalieri di Santo Stefano nelta storia dĂ©lia Marina Italiana, 3e Ă©dition, Pise, 1960, p. 148 ouvrage au demeurant trĂšs utile par ses riches appendices documentaires. 8. Ubaldino MORI-UBAIDINI, La Marina del Sovfano Militaire Ordine di San Giovanni di Gerusalemme di Rodi et di Malta, Rome, 1970, p. 535. 9. EugĂšne MANNIER, Les commanderies du Grand PrieurĂ© de France, Paris, 1872, p. V. 10. BRANTÔME, Grands capitaines français », OEuvres complĂštes de Pierre de Bourdeille seigneur de BrantĂŽme, publiĂ©es par L. Lalanne, Paris, 1869, t. V, p. 225. 364 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE l'Ordre, aprĂšs avoir Ă©tĂ© chassĂ© de Rhodes en 1522, est surtout engagĂ© au XVIe siĂšcle dans un combat dĂ©fensif. Appauvri par la perte de ses commanderies en Angleterre et en Allemagne du Nord Ă  la suite de la RĂ©forme, il doit consacrer toutes ses ressources Ă  la dĂ©fense de Malte, qui fait alors figure de boulevard de la chrĂ©tientĂ© » et dont l'hĂ©roĂŻque dĂ©fense en 1565 est le premier vrai coup d'arrĂȘt Ă  l'expansion ottomane en MĂ©diterranĂ©e. D'autre part, en cette Ă©poque oĂč le corso est l'une des formes favorites de la guerre d'escadre, les galĂšres gĂ©rosolomitaines sont presque toujours mobilisĂ©es au service du Roi Catholique ou de la SĂ©rĂ©nissime et ne sont guĂšre disponibles pour des courses autonomes. En fait, c'est donc seulement aprĂšs LĂ©pante, quand il retrouve une libertĂ© d'action, en gros Ă  partir des annĂ©es 1580, que le corso maltais acquiert sa vĂ©ritable dimension. Bien sĂ»r, on peut admettre qu'il s'agit au moins en partie d'une riposte d'ailleurs contemporaine des premiers exploits stĂ©phanites Ă  l'extraordinaire explosion corsaire qui mobilise tous les ports maghrĂ©bins depuis SalĂ© jusqu'Ă  Tripoli, au temps de la seconde fortune d'Alger » et des succĂšs de la piraterie anglo-nordique Ă  Tunis. Cependant, pour qu'on puisse Ă  juste titre considĂ©rer le corso chrĂ©tien comme une vĂ©ritable contre-course, il faudrait que ses activitĂ©s soient prioritairement, sinon exclusivement, dirigĂ©es contre des objectifs militaires soit les navires, soit les ports des corsaires ennemis et qu'elles aient, par consĂ©quent, comme cadre gĂ©ographique quasi-exclusif le bassin occidental de la MĂ©diterranĂ©e, ce qui est loin d'ĂȘtre le cas. Fernand Braudel avait dĂ©jĂ  montrĂ© qu'un rapide examen des prises faites par les galĂšres de Saint-Étienne suggĂ©rait un glissement d'activitĂ© depuis le bassin occidental vers les eaux levantines aprĂšs 1580n. PrĂ©cisons les choses en reprenant de plus prĂšs le registre des prises publiĂ© par Gino Guarnieri, mais pour les seules annĂ©es 1610-1617 qui donnent lieu Ă  des renseignements continus n. En huit ans, les StĂ©phanites ont pris dans les eaux chrĂ©tiennes, en gĂ©nĂ©ral autour de la Corse et de la Sardaigne, une douzaine de bĂątiments barbaresques deux galiotes, six brigantins, deux saettes, et deux bertons, vraisemblablement tous corsaires, sur lesquels ils ont fait au total 667 captifs c'est en somme la part de leur activitĂ© qui correspond authentiquement Ă  une mission de police des mers. De plus, six campagnes dans les eaux maghrĂ©bines leur ont permis la destruction ou la capture de douze autres bateaux cette fois visiblement des navires marchands, Ă  l'exception de deux galiotes et de faire 742 esclaves dont 479 dans l'attaque d'une place » terrestre lĂ  encore, on admettra que, s'agissant d'opĂ©rations contre le commerce ou le territoire des rĂ©gences berbaresques, il faille inscrire ce butin Ă  l'actif d'une contrecourse. Mais dans le mĂȘme temps, les galĂšres toscanes prenaient par six fois la route du Levant pour des croisiĂšres de course qui leur permettaient de piller 3 villes ou villages cĂŽtiers, d'arraisonner, de prendre ou de couler 49 bateaux dont, soit dit en passant, seulement cinq unitĂ©s corsaires ou militaires, le reste n'Ă©tant que saĂŻques, caramussals, barques ou 11. F. BRAUDEL, op. cit., II, p. 199. 12. G. GUARNIERI, op. cit., pp. 457-468. LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 365 autres bĂątiments de marchands orientaux, et de ramener 1114 esclaves au total, soit une moyenne de 200 par campagne. Il y a donc bien glissement gĂ©ographique, mais aussi changement de nature on passe d'une contrecourse dĂ©fensive au corso prĂ©dateur. L'Ă©volution, nous allons le voir, est encore plus nette pour la course maltaise, presqu'exclusivement tournĂ©e aprĂšs 1580 vers le pillage de la MĂ©diterrannĂ©e orientale. Mais, auparavant, il nous faut dire un mot sur la maniĂšre dont elle Ă©tait organisĂ©e. Pour ĂȘtre en mesure de mener conformĂ©ment Ă  son institut » une guerre permanente aux ennemis du nom chrĂ©tien », l'Ordre de Malte entretient au XVIe siĂšcle une escadre de galĂšres, rĂ©putĂ©es les meilleures de toute la MĂ©diterranĂ©e leur nombre, fixĂ© Ă  5 depuis 1596, passe Ă  6 en 1628, puis Ă  7 en 1651, et mĂȘme Ă  8 un bref moment dans les annĂ©es 1685-1690. L'Ordre leur adjoint parfois des vaisseaux de haut-bord au dĂ©but du siĂšcle, notamment jusque vers 1630, un ou deux galions lui permettent d'ĂȘtre opĂ©rationnel en toute saison. L'Ă©tude des instructions du Grand MaĂźtre aux capitaines et gĂ©nĂ©raux des galĂšres 13 montre que l'escadre outre des missions pacifiques comme le transport de hauts personnages, de marchandises, ou de fonds en espĂšces a trois types de missions belliqueuses 1° de brĂšves croisiĂšres de police des mers, Ă  la requĂȘte des vice-rois de Sicile et de Naples, Ă  l'occasion desquelles les galĂšres Ă  croix blanche patrouillent pendant deux Ă  trois semaines dans le canal de Malte et autour de la Sicile, ou bien en mer TyrrhĂ©nienne jusque vers Ponza ou la Sardaigne, ou encore sur les cĂŽtes sud de la Botte, jusqu'Ă  l'entrĂ©e du golfe » Adriatique ; 2° des jonctions », comme l'on disait Ă  l'Ă©poque, mettant les galĂšres gĂ©rosolomitaines Ă  la disposition d'une armĂ©e navale chrĂ©tienne, soit dans le cadre d'une entreprise » de l'Espagne ou de la France contre une RĂ©gence barbaresque, soit Ă  l'occasion des guerres de Candie ou de MorĂ©e entre Venise et les Turcs ; 3° enfin — et ce qui est de loin le plus frĂ©quent, le plus ordinaire, la mission-type en quelque sorte — corseggiare a danno d'infedeli, la guerre de course contre les cĂŽtes et le commerce musulmans en MĂ©diterranĂ©e orientale. Beaucoup d'historiens, sous l'argumentation que l'Ordre Ă©tait un État souverain, avec une politique et des motivations idĂ©ologiques, excluent ce type d'activitĂ©s navales du champ sĂ©mantique et de la thĂ©matique » corsaires 14. Pourtant, l'Ordre lui-mĂȘme ne s'embarrassait pas de tant de scrupules, ni sur le mot, ni sur la chose. Les instructions magistrales sont toujours on ne peut plus claires fare una scorribanda sur les cĂŽtes ennemies dans l'espoir di qualche buon effetto al profitto dĂ©lia nostra Sacra Religione et dĂ©lia Cristianita. Et n'entendons pas ce profit » au sens figurĂ© il s'agit bien ai qualche rica presa, di qualche guaĂąagno, en Ă©vitant soigneusement d'affronter les vaisseaux barbaresques ou les galĂšres de la Porte, sauf en cas de trĂšs nette supĂ©rioritĂ© numĂ©rique sinon il faudrait dĂ©crocher immĂ©diatement. MĂȘme au temps de la guerre de Candie, 13. EnregistrĂ©es dans les Libri bullarum, section Salviconductus et diversae scripturae », jusqu'en 1623, et ensuite dans les Libri Conciliorum Status cf. note 4. 14. En particulier O. Eac, op. cit., pp. 87-88. MĂȘme argumentation, quoiqu'en termes plus critiques et au bĂ©nĂ©fice du doute », dans P. EARLE, op. cit., pp. 106-107. 366 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE quand l'escadre maltaise se porte en principe chaque annĂ©e au secours des VĂ©nitiens contre la flotte ottomane, les instructions du Grand MaĂźtre prĂ©cisent toujours qu'il faudra tĂącher d'obtenir congĂ© du ProvĂ©diteur GĂ©nĂ©ral Ă  temps per fare una scorreria con qualche buon bottine e massimamente di numĂ©ro di schiavia. Certains contemporains Ă©taient d'ailleurs assez critiques Ă  l'Ă©gard de ce genre d'activitĂ©s. Ne parlons mĂȘme pas des VĂ©nitiens, qui accusent rĂ©guliĂšrement le corso chrĂ©tien d'ĂȘtre Ă  l'origine de tous leurs malheurs dans le Levant 16 ; mais le Saint-PĂšre en personne, supĂ©rieur de l'Ordre au spirituel, se montrait parfois trĂšs sĂ©vĂšre, et le dĂ©lĂ©guĂ© apostolique Ă©tait souvent chargĂ© de rappeler au Grand MaĂźtre qu'il serait plus utile Ă  la chrĂ©tientĂ© d'attaquer quelque place en Afrique, ce qui rappellerait les corsaires chez eux », plutĂŽt que d'insulter l'Archipel 17, car piller les biens et les navires des particuliers n'a jamais causĂ© de vĂ©ritables dommages Ă  la monarchie ottomane et ne sert qu'Ă  l'irriter sans lui faire de mal 18. Aux navires de l'Ordre s'ajoutaient ceux des armateurs privĂ©s pratiquant le cours sous pavillon maltais, selon une rĂ©glementation codifiĂ©e en 1605 dans le Statut des Armements et qui restera en usage jusqu'en 1798 K. Sous condition, en particulier, de ne porter tort ou dommage de quelque façon que ce soit aux chrĂ©tiens, ni dans leurs biens ni moins encore dans leur personne », et de verser au TrĂ©sor le diziĂšme de leurs prises pour droit d'amirautĂ©, ils recevaient du Grand MaĂźtre une lettre patente ad piraticam exerçandam » valable pour un voyage seulement », avec facultĂ© et licence de pouvoir faire la guerre aux ennemis de notre Sainte Foi sous la banniĂšre et insigne de notre Religion » 20. Ces patentes, toutes enregistrĂ©es dans les Libri bullarum de l'Ordre 21, constituent un bon indice de l'activitĂ© corsaire sous pavillon maltais, au moins dans les premiĂšres dĂ©cennies du xvir siĂšcle, quand les capitaines 15. Citations stĂ©rĂ©otypĂ©es toutes empruntĂ©es Ă  des instructions des annĂ©es 1580-1620 et 1650-1675. 16. Nombreuses rĂ©criminations des VĂ©nitiens Ă  ce sujet. Voir notamment Guglielmo BERCHET, Relazioni dei consoli veneti nella Soria, Venise, 1880, pp. 138-140 ; et surtout les relations des provĂ©diteurs de Candie Collegio relazioni, buste 80 et 82, la correspondance des consuls en Egypte Senato SĂ©crĂ©ta, Dispacci consoli », Cairo 2 et des bailes Ă  Constantinople Senato SĂ©crĂ©ta, Dispacci Constantinopoli » en particulier les lettres d'Alvise Contarini, 1638-1640 filze 119-121, Giacomo Querini, 1672-1675 filze 156-158 et Zuanne Morosini, 1675-1680 .filze 159-160. 17. Vincent BORG, Fabio Ckigi, Apostolic Delegate in Malta 1634-1639, an Ă©dition of his officiai correspondent, collection studi e Testi », n° 249, CitĂ© du Vatican, 1967, pp. 482483, lettre du 9 avril 1639. 18. Paolo PICCOUJMINI, Cbrrispondenza tra la corte di Roma e l'inquisitoire di Malta durante la guerra di Candia », Archivio storico italiano, 5e sĂ©rie, XLIX 1912, p. 41, lettre du 16 fĂ©vrier 1667. 19. National Library of Malta, ms. 152, dont on trouvera une analyse succincte et commode dans P. EARLE, op. cit., pp. 125-127. 20. On ne peut alourdir ce dĂ©veloppement de trop de prĂ©cisions, mais la question est en fait plus complexe. A certaines Ă©poques, le Grand MaĂźtre dĂ©livre en outre des patentes de course sous banniĂšre magistrale » ; il peut aussi lui arriver d'armer Ă  titre privĂ©. Dans l'exposĂ© on a confondu sous une mĂȘme rubrique tous ces corsaires avec ceux qui battaient pavillon de la Religion. 21. Section Salviconductus et diversae scripturae » cf. note 4. LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 367 revenaient rĂ©guliĂšrement Ă  Malte pour renouveler leurs commissions. C'est ainsi que, de 1600 Ă  1624, la chancellerie magistrale a expĂ©diĂ© 280 patentes de course, correspondant Ă  350 bĂątiments car certains armements comportent deux ou trois bateaux, soit une moyenne annuelle de 14 navires corsaires sous banniĂšre maltaise. Dans le second quart du siĂšcle, le rythme flĂ©chit sensiblement, mais l'indice cesse d'ĂȘtre aussi fiable, car l'habitude se prend de plus en plus d'hiverner dans l'Archipel ; l'Ordre finira mĂȘme par admettre que ses patentes restent valides cinq ans pour un mĂȘme capitaine. Dans les annĂ©es cinquante, la guerre de Candie, qui relance partout le corso chrĂ©tien, suscite Ă  Malte une vĂ©ritable fiĂšvre d'armements atteignant son apogĂ©e vers 1660-1675 Ă  ce moment-lĂ , on peut considĂ©rer qu'il y a chaque annĂ©e, quasi en permanence, 20 Ă  25 navires corsaires sous banniĂšre de la Religion, la plupart dans les eaux ottomanes. AprĂšs ce sommet, le corso maltais s'effondre dans le dernier quart du siĂšcle sur l'intervention du roi de France, que l'anarchie maritime en Levant gĂȘne alors dans sa politique de rapprochement avec les Turcs. Il renaĂźtra au dĂ©but du XVHP siĂšcle et, sous des formes un peu diffĂ©rentes qu'il serait trop long d'exposer ici, perdurera jusqu'Ă  l'occupation de l'Ăźle par Bonaparte, en 1798Z 2. La carte des prises dressĂ©es Ă  partir des registres de la Quarantaine de Malte 23 montre Ă  l'Ă©vidence que la MĂ©diterranĂ©e orientale est devenue au XVTF siĂšcle le champ exclusif de l'activitĂ© des corsaires chrĂ©tiens Ă  Malte. Deux secteurs gĂ©ographiques se distinguent assez nettement, la Barbarie d'une part, le Levant d'autre part, qui correspondent Ă  deux types d'armement trĂšs diffĂ©rents, en droit comme en fait. En droit, puisque les patentes du Grand MaĂźtre autorisent la course soit per le parti di Levant e Barbaria », soit pour la seule Barbarie, avec dĂ©fense de passer piu oltre dĂ©l capo di Buon AndrĂ©aℱ. Mais Ă©galement en fait, car cette distinction juridique a Ă©tĂ© imposĂ©e par des nĂ©cessitĂ©s pratiques et correspond au souci de ne pas laisser s'aventurer dans le Levant des forces trop faibles sur les rivages maghrĂ©bins proches de Malte, la course pouvait se pratiquer de maniĂšre artisanale, avec des Ă©quipages rĂ©duits, sur de petits bĂątiments de rame qui ne sortaient qu'Ă  la belle saison et rentraient souvent Ă  La Valette pour rafraĂźchir leurs forces ; dans le Levant au contraire, 22. La derniĂšre patente de course est expĂ©diĂ©e le 19 mai 1798 ; vingt jours plus tard, les premiĂšres voiles de l'ExpĂ©dition d'Egypte apparaissaient Ă  l'horizon de Malte. 23. 6526. Il ne s'agit pas de toutes les prises du corso chrĂ©tien, mais de celles mentionnĂ©es Ă  l'occasion du retour des corsaires Ă  La Valette donc uniquement le produit de leurs derniers pillages, plus quelques grosses prises faites en cours de campagne et amarinĂ©es » pour Malte. Au total 294 mentions de prises, dont 252 seulement ont pu ĂȘtre localisĂ©es, 19 autres Ă©tant dites sur les sĂšches de Barbarie » ce qui recouvre pratiquement tout le rivage des Syrtes, 19 faites en Levant », et 2 dans l'Archipel ». Pour l'essentiel, il s'agit de prises faites par des corsaires sous pavillon maltais 84 % ou par des corsaires maltais passĂ©s sous un autre pavillon aprĂšs 1675 9 %. Cf. M. FONTENAY, L'empire ottoman... », op. cit., pp. 188-189. Ce document vient d'ĂȘtre analysĂ© en dĂ©tail pour l'Ă©tude du commerce et des activitĂ©s portuaires de Malte Dominic CUTAJAR, The Malta Quarantine Shipping and Trade, 1654-1694, Mid-Med Bank Report and Accounts, 1987, Malte, 1988. 24. L'actuel Ras-al-Hilit, Ă  l'ouest de Derna, en CyrĂ©naĂŻque. 368 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE la course exigeait des Ă©quipages nombreux et des vaisseaux puissants, capables Ă©ventuellement d'affronter les rigueurs de l'hiver et les sultanes » de la Porte. Sur la carte, l'Archipel paraĂźt relativement indemne, ce qui est Ă  premiĂšre vue parfaitement normal puisque les capitaines s'engageaient sous serment et caution, Ă  ne jamais porter tort ou dommage Ă  des chrĂ©tiens. En fait les Grecs constituaient souvent les premiĂšres victimes du corso maltais d'abord parce qu'ils Ă©taient les principaux transporteurs maritimes de l'empire ottoman ; ensuite parce que l'Archipel Ă©tait devenu le lieu d'hivernage prĂ©fĂ©rĂ© des corsaires qui, Ă  cette occasion, mettaient en coupe rĂ©glĂ©e les insulaires, particuliĂšrement les schismatiques » pour lequels beaucoup de Latins n'avaient que haine et mĂ©pris 25. Écoutons Ă  ce propos le ba'Ă»e Querini De tous les corsaires qui infestent ces mers, les chrĂ©tiens sont les pires de tous peggiori degli uni e degli altri parce qu'ils dĂ©pouillent indiffĂ©remment tout le monde, sans Ă©gard Ă  rien s 26 ; ou encore le français La GuilletiĂšre La plupart des Francs qui viennent sur la cĂŽte de la GrĂšce n'y viennent que pour la ravager. Je ne sais pas s'il est mĂȘme permis de piller les infidĂšles et ce n'est pas Ă  moi de prononcer lĂ -dessus. Mais que n'ont pas tentĂ© les misĂ©rables Grecs de l'Archipel pour se mettre Ă  couvert des hostilitĂ©s de nos armateurs catholiques ? Ils ont envoyĂ© jusqu'Ă  Rome demander des sauvegardes, et obtenu des brefs du Pape adressĂ©s Ă  ces corsaires qui s'en sont moquĂ©s s 27. Certes les corsaires s'en moquaient, mais ils avaient gĂ©nĂ©ralement la prudence de taire leurs exactions en arrivant Ă  Malte ce qui explique certains silences de notre carte. Les chevaliers de Malte participaient au corso chrĂ©tien de deux façons comme profĂšs de l'Ordre, ils devaient tous un service militaire sur les galĂšres de Saint-Jean; en outre, certain d'entre eux pouvaient, Ă  titre privĂ©, pratiquer le cours, soit comme capitaine soit comme armateur. Religieux d'un ordre hospitalier et militaire, les chevaliers de Malte sont en principe tenus, par leur habit et leur profession, Ă  vivre selon les trois voeux de chastetĂ©, obĂ©issance et pauvretĂ©. De plus, pour prĂ©tendre accĂ©der chacun selon son anciennetĂ© Ă  l'une des dignitĂ©s de l'Ordre — cornmanderie, baillage, ou grand-prieurĂ© — il faut nĂ©cessairement cinq ans de rĂ©sidence au couvent » ce qui veut dire Ă  Malte et avoir effectuĂ© quatre caravanes complĂštes », de six mois chacune, sur l'un des bĂątiments de la Religion. Au XVIe siĂšcle on ne devait que trois caravanes ou 25. Sur ce point, que j'ai particuliĂšrement dĂ©veloppĂ© dans L'empire ottoman... », op. cit., pp. 191-194 et 200-203, voir Ă©galement Apostolos E. VACALOPOUIOS, The Greek Nation, 1453-1669. The cultural and economical Background of modem Greek Society, New-Brunswick, 1976, et l'excellente introduction de StĂ©phane Yerasimos Ă  Joseph PrnoN DB TOURNEFORT, Voyage d'un botaniste, collection Paris, 1982. 26. BAROZZI et BERCHET, Relazioni degli ambasciatori e bailli veneti a Costantinopoli, 2 tomes en un volume, Venise, 1873, II, p. 182. 27. GunxET DE LA GUILLETIÈRE, LacĂ©dĂ©mone ancienne et nouvelle, Paris, 1676, pp. 60-61. t-l 1 1 O t 1 I w OS o Ăźw h3 g Co ‱s ta 1 tu tu Ci § I 1 I tu 1 tu g co O I 1 ta. I co H-1 372 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE par soi-mĂȘme ou par le moyen d'autrui ». C'est aprĂšs que l'on eut portĂ© l'escadre de quatre Ă  cinq galĂšres, que la quatriĂšme caravane fut instituĂ©e vers 1600 ; il fut Ă©galement dĂ©cidĂ© que chacun devrait faire ses caravanes en personne et Ă  son rang d'anciennetĂ©, sans que l'on puisse se faire remplacer, ou Ă©changer son tour par commoditĂ© personnelle. Les caravanistes, au nombre de 20 Ă  25 par galĂšres, et jusqu'Ă  30 sur la capitane, contribuaient fortement Ă  l'efficacitĂ© militaire de l'escadre. En revanche, contrairement Ă  une lĂ©gende rĂ©pandue, trĂšs peu d'entre eux s'y formaient au mĂ©tier de marin. Comme le fait remarquer, en 1669, un officier français chargĂ© par Colbert d'un rapport sur les galĂšres de la Religion, les chevaliers font proprement la fonction de soldat ; mais comme ils ne cherchent dans le service que de faire les quatre caravanes que la Religion leur ordonne pour mĂ©riter des commanderies et qu'ils n'ont la plupart aucune envie de s'attacher Ă  la mer, ne sachant encore Ă  quoi leurs parents les destinent, ils ne s'appliquent en aucune façon au mĂ©tier. On voit par expĂ©rience que ceux Ă  qui Sa MajestĂ© donne de l'emploi dans ses galĂšres en savent trĂšs peu en y entrant ; les plus habiles ne font point de difficultĂ© de l'avouer, s'excusant sur le grand nombre, qui empĂȘche qu'on ne s'attache Ă  les instruire, et sur ce que dans les mauvais temps, oĂč il y a le plus Ă  apprendre pour ce qui regarde la navigation, on les oblige de demeurer sous couverte, et enfin sur ce que les pilotes et comitĂ©s, fatiguĂ©s de leurs questions, ne les Ă©coutent pas ; ils pourraient ajouter sur ce qu'ils se dĂ©bauchent les uns les autres, et qu'ils ne se passent le temps qu'Ă  jouer en naviguant, et qu'Ă  se promener quand ils sont dans les ports s 28. La valeur de l'escadre tenait surtout Ă  ses bas-officiers, aux Ă©quipages et aux chiourmes, et chacun savait Ă  Malte que les galĂšres de la Religion Ă©taient plutĂŽt sous la conduite et sous le commandement de leurs pilotes et comitĂ©s que sous celles des capitaines et du GĂ©nĂ©ral » ; au reste cette place Ă©minente se donnait Ă  la faveur, sans que le talent y fĂ»t pour rien » 29. Un certain nombre de chevaliers semblent cependant avoir apprĂ©ciĂ© cette vie Ă  la fois aventureuse et monotone dont Bertrand de LuppĂ©-GarranĂ© a laissĂ© le savoureux rĂ©cit dans ses MĂ©moires et Caravanes 30. Reçu dans l'Ordre en 1597, il Ă©tait arrivĂ© Ă  Malte en 1604 pour remplir les devoirs de son Ă©tat. Ayant normalement fait ses deux premiĂšres caravanes en 1605, il tomba malade Ă  la fin de la troisiĂšme, au mois de mai suivant, ce qui l'obligea aprĂšs son rĂ©tablissement Ă  ne prendre sa quatriĂšme caravane qu'en janvier 1610 Ă  cause que ceux Ă  qui elle touchait devant moi la voulaient prendre, comme il Ă©tait bien juste ». Se trouvant dĂ©soeuvrĂ©, il dĂ©cide alors de s'embarquer avec quelques autres chevaliers comme volontaires » sur le petit galion de la Religion pour un voyage de course qui les fait bourlinguer de fĂ©vrier Ă  juillet 1608 sur toutes les cĂŽtes de la MĂ©di28. MĂ©di28. Mar., B 7 209, MĂ©moire sur les galĂšres de la Religion de Malte par Deviviers, capitaine d'une des galĂšres du Roi ». 29. Ibidem et Comte de SAIOT-PROEST, MĂ©moires. RĂšgnes de Louis XV et de Louis XVI, publ. par le comte de la Barante, Paris, 1929, p. 12. 30. MĂ©moires et caravanes de J. B. de LuppĂ©-GarranĂ©, publ. par le comte de LUPPÉ, Paris, 1856, pp. 77-131. LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 373 terranĂ©e orientale. Visiblement la chose ne lui dĂ©plait pas ; aprĂšs sa quatriĂšme caravane, on le voit rempiler Ă  l'occasion d'un manque d'effectifs et faire, en 1611-1612, une cinquiĂšme puis une sixiĂšme caravane, plus deux voyages comme volontaire. Par consĂ©quent, au cours des neufs annĂ©es de son sĂ©jour maltais, notre chevalier aura Ă©tĂ© plus de 500 jours Ă  la mer, sans compter les frĂ©quents voyages en Sicile pour la subsistance de l'escadre, et aura participĂ©, comme caravaniste ou volontaire Ă  dix campagnes trois jonctions » avec l'armĂ©e du Roi Catholique — Ă  quoi la Religion pouvait difficilement se soustraire — et sept campagnes de course trois en Levant, quatre en Barbarie ayant procurĂ© au total un butin de 550 esclaves et une dizaine de bateaux, plus une douzaine d'autres abandonnĂ©s ou coulĂ©s. De toutes ses campagnes, Bertrand de LuppĂ©-GarranĂ© semble n'avoir rapportĂ© que des souvenirs, un peu de gloire et des Ă©tats de services pour sa carriĂšre future, mais pas d'autre profit matĂ©riel que le petit grappillage plus ou moins tolĂ©rĂ© aprĂšs l'assaut. Aussi la plupart des chevaliers ayant quelque vocation maritime prĂ©fĂ©raient-ils courir Ă  leur compte sur un armement privĂ©. Parmi les 483 corsaires ayant battu pavillon maltais au xvir siĂšcle et qui sont rĂ©capitulĂ©s dans les tableaux 1 et 2, 183 seulement Ă©taient membres de l'Ordre 31 ; mais cette proportion, en apparence modeste 38 '% , ne doit pas tromper. Il y avait nous l'avons vu, deux types d'activitĂ© corsaire un corso artisanal sur les sĂšches de Barbarie » qu'on pouvait entreprendre avec un brigantin de 8 ou 9 bancs, deux douzaines d'hommes, un pierrier et quelques mousquetons, le tout pour une mise-hors » de 1500 Ă  2000 Ă©cus ; et d'autre part la grande course » dans les mers du Levant, laquelle exigeait au bas mot, vers 1660, Ă©cus pour un vaisseau de 10 canons et 20 pierriers avec 100 ou 120 marins et soldats. Bien entendu, les profits Ă©ventuels Ă©taient Ă  la hauteur des investissements respectifs dans les eaux barbaresques oĂč l'on ne rencontrait, sauf exception, qu'un menu fretin de petits caboteurs type sandal, londro, carabo chargĂ©s de mĂ©chantes robes », le meilleur butin qu'on pĂ»t espĂ©rer c'Ă©tait des esclaves ; les mers du Levant, en revanche, Ă©taient le domaine des riches prises aux dĂ©pens de la caravane d'Alexandrie », dont les saĂŻques pansues, chargĂ©es Ă  ras-bord de riz, de lin, de sucre, de cafĂ©, constituaient la proie idĂ©ale, celle qui pouvait rapporter d'un coup, sur le marchĂ© maltais, ou Ă©cus. Or l'on constate que 92% des patentes expĂ©diĂ©es Ă  des membres de l'Ordre sont Ă©tablies per le parti di Levante, ce qui n'est le cas que de 48% seulement des patentes accordĂ©es aux autres corsaires que nous appellerons laĂŻcs » pour les diffĂ©renciers des religieux gĂ©rosolomitains ; en d'autres termes, les laĂŻcs, pour moitiĂ© au moins, Ă©taient de petits artisans du corso, alors que presque tous les religieux, essentiellement des chevaliers, exerçaient dans le cadre de la grande entreprise corsaire. 31. D'aprĂšs un fichier Ă©tabli Ă  partir des 758 lettres patentes ad piraticam exercendam enregistrĂ©es de 1600 Ă  1699 dans les Libri Bullarum cf. notes 4 et 20, ci-dessus. Des confrontations avec des sources parallĂšles conservĂ©es pour des pĂ©riodes plus brĂšves permettent d'Ă©tablir qu'on repĂšre avec cet instrument entre 93 et 99 % des corsaires, selon les Ă©poques. 374 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Encore faut-il distinguer parmi les chevaliers ceux pour qui le corso n'a Ă©tĂ© qu'une activitĂ© occasionnelle, un dĂ©rivatif Ă  l'ennui de leur sĂ©jour maltais ils sont un jour partis, dans un rĂȘve de gloire et de butin, niais ont vite abandonnĂ©, faute de moyens, faute de succĂšs, ou parce qu'un destin plus reluisant les attendait ailleurs. A l'opposĂ©, on a le petit noyau des corsaires de vocation, en tout cas de profession Ă  peine une cinquantaine de noms pour tout le siĂšcle, qu'on voit renouveler leur patente, repartir plusieurs fois en campagne et qui, une fois retirĂ©s s'ils ne sont pas morts avant, car la chose peut arriver, mĂȘme si c'est moins frĂ©quent qu'on ne le croit gĂ©nĂ©ralement, continuent de s'intĂ©resser au corso soit comme armateurs, soit comme procureur d'un jeune chevalier corsaire. Alexandre de Benque par exemple, chevalier de la langue de Provence depuis 1597, reçoit sa premiĂšre lettre en mars 1616 ; douze ans plus tard, il court encore le Levant, aprĂšs avoir obtenu sept patentes successives. Claude de la Richardie, lui, a fait ses dĂ©buts en fĂ©vrier 1651 Ă  l'Ăąge de vingt-sept ans, comme second du chevalier de Bouliers, son collĂšgue de la langue d'Auvergne ; il lui succĂšde en 1654, reprend son armement en 1659, et ne rentre Ă  Malte aprĂšs sa derniĂšre campagne qu'en juillet 1664. Quant Ă  Jacques de la Barre Hautepierre, chevalier angevin reçu en 1653 dans la langue d'Aquitaine, il obtient sa premiĂšre patente de course en fĂ©vrier 1663 Ă  cette Ă©poque, il n'a qu'un pĂ©tache de quelques canons et 80 hommes, avec lequel, l'annĂ©e suivante, aux Gozze de Gandie, il tombe aux mains des Tripolins Ă  la suite d'un combat acharnĂ© oĂč il reste demi-mort. ÉchangĂ© aprĂšs quatre ans de captivitĂ©, il reprend la mer en avril 1670 sur un vaisseau de 30 piĂšces et 170 hommes, et s'illustre aux cĂŽtĂ©s des cĂ©lĂšbres frĂšres ThĂ©mĂ©ricourt en pillant la caravane d'Alexandrie. Quatre ans plus tard, on le retrouve Ă  la tĂȘte d'une conserve de 30 bĂątiments, choisi pour chef et directeur par tous les corsaires chrĂ©tiens du Levant », et n'hĂ©sitant pas Ă  publier une sorte de cartel, mettant au dĂ©fi le capitan-pacha d'oser le rencontrer ; mais, selon le baile de Venise, il est surtout trĂšs occupĂ© Ă  piller et butiner les pauvres Grecs de l'Archipel» 32. En tous cas, il ne rentre Ă  Malte qu'en juillet 1677 aprĂšs quinze ans d'aventures maritimes et seulement parce que le Grand MaĂźtre, sur les instances de la France, vient d'interdire le corso du Levant. Tous ces professionnels de la course ne travaillaient pas nĂ©cessairement avec leurs propres capitaux. Quelquefois on voit deux chevaliers se mettre d'accord pour commander alternativement, pendant six mois ou un an, un bateau qu'ils ont armĂ© Ă  frais communs. Mais la situation la plus frĂ©quente est celle de la commandite le corsaire apporte sa compĂ©tence et une part du capital, le reste Ă©tant fourni par les armateurs Ă  tout risque », en quelque sorte les propriĂ©taires-actionnaires de l'entreprise, et par des armateurs-cambistes » qui sont seulement des intĂ©ressĂ©s » Ă  l'entreprise, Ă  la fois obligataires dans la mesure oĂč ils sont remboursĂ©s prioritairement, et prĂȘteurs Ă  la grosse aventure puisqu'ils touchent un intĂ©rĂȘt de l'ordre de 30%, sauf s'il y a sinistre, auquel cas ils perdent tout. 32. Senato SĂ©crĂ©ta, Dispacci Coslantinopoli, filza 157, f° 468, lettre du 1er juillet 1674. LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 375 Tableau 1 LES CORSAIRES SOUS BANNIÈRE DE MALTE AU XVIIe SIÈCLE Langues de l'Ordre tĂŽt. , , , =—=——= relig. Mes. totaI % Prov. Auv. Fr. It. Arag. Cast. OM gĂ©n- religchevaliers religchevaliers 6 26 6 1 62 33,5 1600-1624 servants d'armes 7 13 1 12 6,5 total 30 7 29 7 1 74 111 185 40 chevaliers 18 4 10 1 1 34 25 1625-1649 servants d'armes 7 7 1 15 11 total 25 4 17 2 1 49 88 137 36 chevaliers 12 13 15 3 1 1 45 40 1650 1674 servants d'armes 6 14 11 10 total 18 14 19 3 1 1 56 57 113 50 chevaliers 1 2 1 4 8,3 lfi_j- ,„„_ servants d'armes 0 0 total 1 2 1 4 44 48 8,3 chevaliers 54 23 53 10 3 2 145 30 1600-1699 servants d'armes 20 2 14 2 38 8 total 74 25 67 12 3 2 183 300 483 38 Tableau 2 ORIGINE DES CORSAIRES SOUS BANNIÈRE DE MALTE AU XVIIe SIÈCLE origines connues = ong- TOT. Fr. It. IbĂ©r. Malt. Gr. Daim. Flam. tĂŽt. mcreligieux mcreligieux 166 12 5 183 183 en % 90,5 6,5 3 100 laĂŻcs 79 19 4 116 13 3 1 235 65 300 en % origines connues. 34 8 2 49 5 1,5 0,5 100 total des corsaires 245 31 9 116 13 3 1 418 65 483 en % origines connues. 59 7,5 2 28 3 1 — 100 376 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE A la limite, le capitaine pouvait inĂȘme n'apporter que sa compĂ©tence et n'avoir aucun fonds dans l'entreprise en novembre 1674, au dĂ©part des deux vaisseaux commandĂ©s par le chevalier Claude de Varadier, un acte est dressĂ© prĂ©cissant que celui-ci n'a en rien participĂ© de ses deniers audit armement, lequel a coĂ»tĂ© Ă©cus, entiĂšrement fournis par les armateurs » et que par consĂ©quent il ne pourra prĂ©tendre Ă  autre rĂ©munĂ©ration que la solita gioia de 11 '% des prises, nettes du droit d'amirautĂ© 33. Au premier rang des grands armateurs du corso on retrouve gĂ©nĂ©ralement des chevaliers, et presque toujours les mĂȘmes. Il s'agit le plus souvent d'anciens corsaires qui ont rĂ©ussi dans le mĂ©tier et rĂ©investi une partie de leur gain sur des armements toujours plus nombreux et plus importants. C'est le cas, par exemple, du Limousin François Hugon du Prat qui a fait le cours sur son propre vaisseau de 1653 Ă  1658 avant de le confier Ă  son frĂšre Claude pour pouvoir se consacrer aux affaires, et qu'on retrouve quelques annĂ©es plus tard participe » dans cinq armements diffĂ©rents. MĂȘme profil de carriĂšre pour le normand Eustache Bernart d'Avernes il a couru le Levant de 1658 Ă  1662, puis confiĂ© lui aussi son vaisseau Ă  son jeune frĂšre Guillaume, et en 1674, non seulement il est intĂ©ressĂ© dans plusieurs armements pour de multiples petites sommes, mais il est armateur aux trois-quarts des deux vaisseaux de Varadier citĂ©s plus haut ; sa fortune et son sens des affaires lui permettront d'ailleurs de terminer sa carriĂšre dans le poste hautement lucratif de Receveur de l'Ordre pour le Grand PrieurĂ© de France Ă  Paris. Ces grands affairistes du corso, qui dominent le marchĂ© des armements, ne travaillent Ă©videmment pas avec leurs fonds propres. GrĂące Ă  leur rĂ©putation et au crĂ©dit dont ils jouissent, ils Ă©largissent la gamme de leurs possibilitĂ©s en empruntant autour d'eux par contrat de change maritime Ă  30%, Ă  la fois dans le milieu cosmopolite et un peu interlope du nĂ©goce maltais, et surtout chez leurs collĂšgues de l'Ordre, qui, mĂȘme lorsqu'ils ne participent pas personnellement au corso, rĂ©pugnent rarement Ă  placer quelques Ă©cus dans une spĂ©culation que tous le monde s'accorde Ă  considĂ©rer comme honorable, fructeuse, et d'autant moins risquĂ©e que l'on aura pris soin de rĂ©partir ses mises sur diffĂ©rents armements. C'est ainsi qu'en 1671 le chevalier Jacques de Verdelin partageait avec son frĂšre Michel et deux autres chevaliers provençaux l'armement Ă  tout risque du vaisseau la Madonna dĂ©lia Concetlione; mais il y avait Ă©galement soixante autres personnes intĂ©ressĂ©es Ă  l'armement comme cambistes Ă  30 % 34. Ce ne sont d'ailleurs pas seulement les courses des chevaliers qui sont ainsi financĂ©es mais Ă©galement celles de la plupart des corsaires laĂŻcs. Quand il s'agit de Maltais ou de Siciliens qui, au xvir siĂšcle, font un peu figures de prolĂ©taires du corso, on trouve gĂ©nĂ©ralement derriĂšre chaque armement un pool d'armateurs Ă  tout risque », oĂč des membres de l'Ordre tiennent la premiĂšre place, quand ils ne sont pas les seuls. En 1660 par exemple, sur les sept Maltais ayant obtenu une patente pour la Barbarie, six Ă  coup sĂ»r et probablement le septiĂšme sont commanditĂ©s en tout ou partie par une dou33. dou33. Tribunal Armamentorum, Regislri actorum originaliwn, vol. 4, f° 64. 34. Ibid., Registri stipplicariim et sententiarum, vol. 1, ff° 312-313. LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 377 zaine de chevaliers, dont Hugon du Prat, que nous connaissons dĂ©jĂ , et d'autres chevaliers-corsaires », mais Ă©galement sept chevaliers italiens, deux allemands et un portugais, qui n'ont eux-mĂȘmes jamais pratiquĂ© la course 35. Au dĂ©but du siĂšcle, quand le capitaine n'Ă©tait pas membre de l'Ordre, c'Ă©tait souvent l'armateur qui faisait la demande de banniĂšre et son nom figure alors sur la lettre patente avec celui du capitaine dans 80% des cas c'est un chevalier ou un servant d'armes, et le plus souvent il n'a jamais pratiquĂ© le cours personnellement. Il faut donc conclure que la course maltaise, au moins jusqu'en 1675, est entiĂšrement dominĂ©e par les chevaliers, qui se rĂ©servent personnellement le secteur le plus noble, celui de la grande course en Levant, mais qu'on retrouve Ă©galement comme commanditaires du corso plus artisanal et roturier pratiquĂ© sur les cĂŽtes de Barbarie. Cette Ă©troite mainmise laisse Ă  penser que la course devait ĂȘtre d'un bon rapport. Toutefois, dans ce domaine, il faudra se contenter d'impressions car les sources sont assez dĂ©ficientes. Épave unique en son genre dans les archives du Tribunal des Armements, un Registro dĂ©lie prese permet de dresser la liste de tout ce qui a Ă©tĂ© rapportĂ© Ă  Malte pour ĂȘtre vendu Ă ll'incanto pendant les trois annĂ©es 1660 Ă  1662 s* — au total 20 bateaux, 620 esclaves, piastres en espĂšces, et quelques tonnes de marchandises diverses, le tout pour une valeur de Ă©cus monnaie de Malte, soit une moyenne de Ă©cus par an, correspondant Ă  livres tournois ou piastres de huit, l'Ă©quivalent de trois tonnes d'argent fin. Mais ce chiffre, s'il fixe un ordre de grandeur, ne reprĂ©sente ni les prises totales du corso ni le profit de l'entreprise corsaire. Pour connaĂźtre l'ensemble de ce qui a Ă©tĂ© pris, il faudrait comptabliser tout ce qui Ă©tait consommĂ© directement par les Ă©quipages qui, Ă  cette Ă©poque, restaient souvent partis deux ou trois ans et se rafraĂźchissaient » en provisions, apparaux et munitions sur les prises qu'ils faisaient en Levant ou sur le dos des Grecs de l'Archipel ; prendre en compte Ă©galement le produit des rançons immĂ©diates, obtenues sur place en faisant banniĂšre blanche; et enfin apprĂ©cier Ă  sa juste valeur l'Ă©norme fraude universellement pratiquĂ© au dĂ©triment des armateurs et des droits du prince. Pour calculer le profit corsaire, il faudrait ĂȘtre en mesure de dresser un vĂ©ritable compte d'entreprise, avec d'un cĂŽtĂ© les capitaux engagĂ©s, et sous quelles formes, de l'autre le produit net aprĂšs liquidation des prises, paiement de l'amiragliato et des nombreux frais annexes. La chose n'est pas impossible pour le XVIIIe siĂšcle, mais infaisable pour le xvrr. Une Ă©vidence en tout cas s'impose, la course est un jeu de poker quelquesuns rĂ©ussissent de beaux coups, mais la trĂšs grande majoritĂ© est faite de gagne-petit et de perdants. Pour gagner il faut Ă  la fois des fonds, de l'audace et de la chance. Sur les vingt-six corsaires ayant participĂ© aux prises vendues en 1660-1662, il y avait quatorze chevaliers et douze laĂŻcs 35. Ibid., Registri actorum originalium, vol. 2 Ă  4, passim. 36. Ibid., Registro dĂ©lie prese, 1659-1663, dont on n'a retenu que trois annĂ©es complĂštes, 1660-1662. 378 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE dont six Maltais on ne s'Ă©tonnera pas que ces derniers, avec leurs petits armements, n'aient rapportĂ© que 5% des prises en valeur et les autres laĂŻcs 15 %, alors que les chevaliers s'adjugeaient 80 % du total. Ce qui ne veut d'ailleurs pas dire que chacun d'eux, au bout du compte et tous frais payĂ©s, ait touchĂ© une trĂšs forte somme ; mais pour les plus chanceux ce pouvait ĂȘtre quelques milliers d'Ă©cus — en gros le revenu d'une des meilleures commanderies de l'Ordre, de celles qu'on ne pouvait obtenir, Ă  moins de puissantes protections, que lorsque les dents vous manquent Ă  la bouche» 37. Dans ces conditions on comprend l'attrait du corso sur les jeunes chevaliers, mĂȘme s'il y avait peu d'Ă©lus parmi tous les appelĂ©s. La course privĂ©e a pu ĂȘtre une spĂ©culation rentable; mais jamais en tout cas celle que l'Ordre pratiquait institutionnellement. Certes, il est arrivĂ© que les galĂšres de Malte fassent de trĂšs beaux butins. En 1605, unies avec l'escadre stĂ©phanite, elles infligent Ă  la caravane d'Alexandrie une perte que l'ambassadeur de France Ă  Constantinople estime Ă  deux millions d'or »3S ; mĂȘme s'il y a quelque emphase, mĂȘme si le chiffre inclut les navires coulĂ©s, il a bien dĂ» rester quelques centaines de milliers d'Ă©cus pour la Religion. En 1673, la prise de quatre vaisseaux turcs, conjointement avec des corsaires de Savoie, de Malte et de Monaco, rapporte Ă  la seule Religion plus de piastres en riz, lin et cafĂ© 39. Cependant ce sont lĂ  des butins exceptionnels. En annĂ©e normale le produit des prises sans compter les esclaves directement affectĂ©s aux chiourmes est estimĂ© Ă©cus vers 1630, ce qui est trĂšs loin de payer les frais d'entretien de l'escadre, Ă©valuĂ©s Ă  cette date Ă  Ă©cus sur un budget de Dans ces conditions, pourquoi la Religion continuait-elle le corso ? On aura remarquĂ© que jusque-lĂ  nous avons surtout naviguĂ© dans les eaux orientales de la MĂ©diterranĂ©e, et j'aurais scrupule Ă  ĂȘtre demeurĂ© si longtemps hors du cadre gĂ©ographique initialement prĂ©vu, si la rĂ©ponse Ă  cette question ne devait nous ramener en Occident pour conclure. MalgrĂ© les pertes subies en Angleterre et en Allemagne du fait de la RĂ©forme, l'Ordre restait un trĂšs grand propriĂ©taire foncier. Au dĂ©but du xvrT siĂšcle, il possĂšde environ 500 commanderies en Espagne, France et Italie, plus une soixantaine d'autres dans le Saint-Empire, dont les liens avec le couvent » Ă©taient relativement distendus carte 4. D'aprĂšs 37. Nouvelle Relation du Voyage et description exacte de l'isle de Malthe dans l'estat oĂč elle est Ă  prĂ©sent... par un gentilhomme françois, Paris, 1679, p. 136. 38. Jean de GONTAUT-BIRON, Ambassade en Turquie... 1606 Ă  1610, t. II, Correspondance diplomatique et documents inĂ©dits publiĂ©s par le comte ThĂ©odore de Gontaut-Biron, Paris, 1889, p. 16. 39. Cf. Bartolomeo DAL POZZO, Hisloria dĂ©lia sacra Religione miXitare di San Giovanni gerosolomitano, 2 vol., VĂ©rone-Venise, 1703-1715, et Senato SĂ©crĂ©ta, Dispacci Costantinopoli, filza 157, ff° 164 et 217, lettres des 22 juillet et 11 aoĂ»t 1673. 40. BibliothĂšque Vaticane, fonds Barberini Latino, ms. n° 5036, rn S e tn O 3 k o tu tu tri -s Q O S tn S >-. S tu LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 381 382 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE l'estime de 1583, confirmĂ© en 1612 Ă  quelques nuances prĂšs, l'Ordre Ă©value ses revenus fonciers Ă  Ă©cus 41 l'Ă©quivalent en gros de deux tonnes d'or ou vingt-cinq tonnes d'argent, soit la moitiĂ© du quint royal » dans les arrivĂ©es annuelles de mĂ©taux prĂ©cieux Ă  SĂ©ville ! Toute cette richesse Ă©tait partagĂ©e trĂšs inĂ©galement entre les quelque 1700 chevaliers, 150 servants d'armes et 150 chapelains qui constituaient l'ensemble des frĂšres de l'Ordre Cf. cartes 5 et 6. PrĂšs d'un chevalier sur trois, environ un servant d'armes ou chapelain sur cinq, pouvaient ĂȘtre casĂ©s dans une des commandeiies avec un revenu moyen de 1400 Ă©cus par an pour les premiers et de 300 pour les seconds, mais une diffĂ©rence extrĂȘme de un Ă  cinq cents entre le plus humble des frĂšres chapelains et le Grand-Prieur de France, dignitaire le plus richement pourvu de l'Ordre. Ces bĂ©nĂ©ficiaires d'une commanderie reversaient au Commun TrĂ©sor » 15 Ă  20 % de leur revenu sous la forme de responsions » constituant les rentrĂ©es ordinaires de la Religion. Avec ces ressources, heureusement grossies d'un important casuel » dĂ©pouilles, annates, vacants, etc., l'Ordre devait faire face Ă  la dĂ©fense de l'Ăźle et Ă  l'entretien des galĂšres, tout en pourvoyant Ă  la subsistance d'environ 4 ou 500 religieux qui rĂ©sidaient Ă  Malte dans les auberges » des diffĂ©rentes Langues 42. Cette immense fortune fonciĂšre, concentrĂ©e dans un trĂšs petit nombre de mains puisque finalement 4 Ă  500 personnes s'en partageaient le plus clair de revenus, pouvait exciter bien des convoitises — on l'avait vu avec les sĂ©cularisations en Angleterre et en Allemagne. Tant que Malte avait Ă©tĂ© le boulevard de la chrĂ©tientĂ© contre le pĂ©ril ottoman, l'Ordre pouvait aisĂ©ment justifier sa richesse par les services rendus au bien commun. Mais au xvrr siĂšcle, si le colosse turc n'est pas encore devenu l'homme malade de l'Europe, s'il reste Ă©ventuellement redoutable dans les plaines du Danube, il ne fait plus autant peur en MĂ©diterranĂ©e. C'est pourquoi l'Ordre a besoin du corso pour lĂ©gitimer son existence. Pour garder sa raison d'ĂȘtre aux yeux de l'Europe chrĂ©tienne, il lui faut sans cesse prouver qu'il est encore utile, qu'on a toujours besoin de lui. Au dĂ©but il a surtout mis l'accent sur l'idĂ©al de croisade, servi en cela par la reviviscence de ce nrythe et par l'atmosphĂšre militante de la contre-rĂ©forme catholique au siĂšcle des saints » l'adversaire, alors, c'est l'infidĂšle, le mahomĂ©tan, l'ennemi du nom chrĂ©tien. Plus tard, aprĂšs la crise de la 41. On a une idĂ©e assez prĂ©cise de la richesse fonciĂšre des chevaliers de Malte Ă  travers l'Europe par le biais de la fiscalitĂ© intĂ©rieure de l'Ordre. Chaque commanderie versait au Commun TrĂ©sor des responsions » correspondant en principe au cinquiĂšme de ses revenus. A plusieurs reprises on a rĂ©visĂ© la valeur vraie » qui servait d'assiette Ă  l'impĂŽt de la Religion, par une estime gĂ©nĂ©rale » de tous les biens de l'Ordre. Celle de 1583, lĂ©gĂšrement remaniĂ©e et complĂ©tĂ©e pour l'Allemagne en 1598 et 1612 a servi durant tout le XVEF siĂšcle. C'est Ă  partir de cette source qu'on a dressĂ© les cartes 4, 5 et 6, extraites d'un travail en cours sur les revenus fonciers de l'Ordre de Malte en Europe du XVF au xvnr° siĂšcle, dont une partie a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© publiĂ©e dans La France d'Ancien RĂ©gime. Études rĂ©unies en l'honneur de Pierre Goubert, Toulouse, 1984, pp. 259-271, sous le titre Le revenu des Chevaliers de Malte en France d'aprĂšs les estimes » de 1533, 1583 et 1776 ». 42. Sur les problĂšmes financiers de la religion, cf. Alisen HOPPEN, The Finances of the Order of St John of JĂ©rusalem in the sixteenth and seventeenth centuries », European Studies Review II, 1970, pp. 103-120. LES CHEVALIERS DE MALTE CORSO » MÉDITERRANÉEN, XVII' S. 383 conscience europĂ©enne » quand l'argument de la croisade, Ă  l'aube des LumiĂšres, sera trop anachronique, l'Ordre changera d'adversaire ce ne sera plus l'Islam en tant que tel qu'on dĂ©signera comme ennemi, mais le seul mauvais musulman, le pirate barbaresque, hostile Ă  la civilisation autant qu'Ă  la chrĂ©tientĂ©. En somme, pour survivre, l'ancienne milice du Christ est prĂȘte, au xvnr siĂšcle, Ă  se transformer en police de l'Europe marchande, et certains de ses membres les plus cyniques ne seraient pas loin, dans cette voie, de vouloir jouer au pompier pyromane Pour ce qui est de donner chasse aux Barbaresques, peut-ĂȘtre que si nous avions eu autant de politique que de zĂšle, nous ne les aurions pas poussĂ© si vivement, car nous en sommes venus Ă  les dĂ©truire », constate, un peu abusivement mais en tout cas avec regret, un grand dignitaire de l'Ordre en 172843. En d'autres termes, cela veut dire que le corso n'aura peut ĂȘtre Ă©tĂ© pour l'Ordre de Malte — c'est-Ă -dire la fine fleur de l'aristocratie europĂ©enne — qu'une maniĂšre de garantir sa position de seigneur foncier en lĂ©gitimant par un service rendu, selon la vieille Ă©thique fĂ©odale, la rente perçue sur ses paysans d'Aragon ou de Sicile, de Castille ou d'Ile-de-France, de Portugal ou de Lombardie. On le voit, nous sommes bien ramenĂ©s finalement au cadre gĂ©ographique de la MĂ©diterranĂ©e occidentale et Ă  l'interrogation qui est au coeur de nos travaux, sur la nature et le rĂŽle des ordres militaires dans l'histoire de la chrĂ©tientĂ© occidentale. Car si la course avait le bassin oriental de la MĂ©diterranĂ©e pour champ d'action, ses acteurs venaient tous de l'Ouest, et c'est Ă  juste titre que les VĂ©nitiens les appelaient des Ponentini. En ce sens, elle s'intĂšgre dans un processus de reconquĂȘte par l'Occident de l'espace maritime levantin, dont les Francs et les Latins avaient Ă©tĂ© plus ou moins Ă©vincĂ©s Ă  la fin du XVe siĂšcle, au moment de la conquĂȘte ottomane 44. Parmi ces Ponentins, les Français Ă©taient largement majoritaires, et plus encore qu'il n'y paraĂźt dans le tableau 2, car une bonne partie des corsaires dits maltais » Ă©taient des rĂ©gnicoles du TrĂšs^ChrĂ©tien, mariĂ©s et installĂ©s Ă  Malte, ou des Français de souche naturalisĂ©s pour la circonstance. Au reste, les Turcs le savaient pertinement, et ce problĂšme a pĂ©riodiquement envenimĂ© les relations de la France avec la Porte au cours du xvrr siĂšcle, jusqu'Ă  ce que Louis XIV se dĂ©termine Ă ' interdire Ă  ses sujets de courir sous pavillon de Malte. Cette dĂ©cision a d'ailleurs entraĂźnĂ© dans l'Ăźle, Ă  partir des annĂ©es 1675-1679, non seulement une crise du corso mais une vĂ©ritable mutation qui apparaĂźt parfaitement sur le tableau 1. Pourquoi, jusqu'Ă  cette Ă©poque, la course maltaise est-elle entiĂšrement dominĂ©e par les chevaliers français ? et pourquoi si peu de leurs collĂšgues italiens, encore moins d'espagnols ? Les raisons, je crois, sont surtout idĂ©ologiques et sociologiques. Jusque-lĂ , nous avons surtout parlĂ© de la course en termes d'investissement, de profit, de gain, d'intĂ©rĂȘt matĂ©riel — qu'il s'agisse de l'Ordre ou des corsaires privĂ©s — mais il n'est pas sĂ»r qu'elle ait toujours Ă©tĂ© vĂ©cue ainsi. Pour des cadets de noblesse souvent nourris de 43. B III 484, lettre du bailli de Froulay, gĂ©nĂ©ral des galĂšres de Malte au comte de Maurepas, 29 dĂ©cembre 1728. 44. C'est du moins ce que j'ai essayĂ© de dĂ©montrer dans L'empire ottoman... », op. cit., pp. 204-208. 384 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE romans de chevalerie, encore tout imprĂ©gnĂ©s de mentalitĂ© et d'idĂ©aux issus du moyen Ăąge, la course est le dernier refuge d'une Ă©thique que, pour faire bref, nous qualifierons de fĂ©odale. Elle est la chance, une derniĂšre fois offerte, de pouvoir donner force coups d'Ă©pĂ©e en l'honneur du Christ et peut-ĂȘtre de s'enrichir, en tout cas sans dĂ©choir le profit corsaire, fait de butins », de rançons », n'est-il pas anobli en quelque sorte par un vocabulaire tout droit hĂ©ritĂ© de la guerre fĂ©odale ? C'est une maniĂšre, pour la noblesse, de persĂ©vĂ©rer dans son ĂȘtre en prolongeant au coeur des temps modernes un genre de vie libre et batailleur fondĂ© sur un systĂšme de valeurs anachronique ; c'est l'occasion d'Ă©chapper aux normes d'une sociĂ©tĂ© de plus en plus policĂ©e et contraignante, de faire la nique Ă  l'absolutisme et Ă  la raison d'État. Plus que toute autre, l'aristocratie française devait ĂȘtre sensible Ă  cet appel de l'aventure et de la croisade. Elle n'avait pas, comme l'espagnole, un Nouveau Monde oĂč vivre son rĂȘve hĂ©roĂŻque et brutal », et pas non plus d'ordres militaires nationaux domestiquĂ©s », permettant de passer comme insensiblement des vieilles structures mĂ©diĂ©vales au service du Prince. C'est en France que l'encagement monarchique avait le plus Ă©touffĂ© les libertĂ©s fĂ©odales. Son souverain Ă©tait en outre le seul Ă  pratiquer ouvertement avec le Turc une politique d'entente dont rougissaient beaucoup de consciences chrĂ©tiennes. C'est tout ce complexe de sentiments et de ressentiments qu'expriment admirablement les pages que BrantĂŽme a consacrĂ©es Ă  ces braves et vaillants chevaliers maltais qui ne sont mieux assistĂ©s des princes chrĂ©tiens ». Qu'on relise en particulier son portrait du grand maĂźtre Jean de La Valette, qui espĂ©rait induire Ă  se croiser et armer contre les Turcs » tous les princes chrĂ©tiens, surtout le roi de France, son roi naturel », et qui, déçu dans cet espoir, pour entretenir sa magnificence, libĂ©ralitĂ© et splendeur, s'avisa d'armer deux galĂšres Ă  soi outre celles de la Religion et en fit capitaine M. de RomĂ©gas ». HĂ©ros de lĂ©gende dont la geste se chantait jusque dans les chiourmes turques comme jadis chez les Maures les exploits du Cid, RomĂ©gas a montrĂ© sa valeur et sa vaillance en beaucoup de beaux combats, butins et belles prises faites au profit de la Religion, et du sien aussi, car il a fait bourse et argent en banque ; aussi, bien fol est celui qui s'oublie, et qui a la main Ă  la pĂąte, n'en prend, comme l'on dit ». DĂ©jĂ  dĂ©suet au temps de BrantĂŽme, ce type d'engagement devenait de plus en plus anachronique au xvir siĂšcle, mĂȘme si la guerre de Candie a pu lui rendre un second souffle. La facilitĂ© avec laquelle les chevaliers français se sont plies Ă  l'interdiction royale de faire le cours est trĂšs rĂ©vĂ©latrice on dirait presque qu'ils n'attendaient que cela. Au moment oĂč Colbert construit de toutes piĂšces une flotte de galĂšres sous banniĂšre fleurdelisĂ©e, au moment oĂč le Roi Soleil s'installe Ă  Versailles, le seul avenir qui s'ouvre Ă  la jeunesse nobiliaire de France c'est celui d'officier ou de courtisan. Il y a dĂ©sormais plus d'honneur, de gloire et de profit Ă  servir le roi qu'Ă  servir le Christ. Michel FONTENAY, UniversitĂ© de Paris I. 45. BRANTÔME, op. cit., t. V, p. 236. L'ÉLITE LYONNAISE SOUS LA RÉGENCE Les travaux rĂ©cents et considĂ©rables consacrĂ©s au Lyon d'Ancien RĂ©gime ont visĂ© Ă  Ă©clairer, conformĂ©ment aux prĂ©occupations actuelles, la sociĂ©tĂ© dans sa masse, avec une attention spĂ©ciale aux plus misĂ©rables, longtemps nĂ©gligĂ©s par une histoire gĂ©nĂ©rale d'ossature politique 1. Mais le poids et l'intĂ©rĂȘt des sources persistent Ă  valoriser l'Ă©tude des Ă©lites. Une problĂ©matique sociale comprĂ©hensive peut d'ailleurs la relier tout naturellement au souci prĂ©sent de comput, de sĂ©rie et d'exhaustivitĂ© dans la mesure des influences et de leurs limites. C'est l'attrait d'un rapport inĂ©dit, datĂ© de janvier 1719, signalĂ©, semble-t-il, Ă  ce jour seulement par Franklin Ford et conservĂ© Ă  la bibliothĂšque MĂ©janes d'Aix-enProvence 2. Cet anonyme a le caractĂšre d'un rapport de police dans le sens large du temps il tient Ă  la fois de l'enquĂȘte administrative, travail usuel d'intendant, et du rapport actuel de renseignements gĂ©nĂ©raux 3. On sait que la valeur personnelle du rĂ©dacteur dĂ©termine la qualitĂ© de ce genre de sources, en l'absence ordinaire de confrontations possibles 4. Elle paraĂźt ici suffisante Ă  Ă©clairer utilement l'Ă©quilibre institutionnel de la ville et gĂ©nĂ©ralitĂ© de Lyon, ses caractĂšres sociaux et ses tensions politiques, que nous envisagerons dans cet ordre. 1. Maurice GARDEN, Lyon et les Lyonnais au XVIIIe siĂšcle, 1970, Paris. — Jean-Pierre GUTTON, La sociĂ©tĂ© et les pauvres, l'exemple de la gĂ©nĂ©ralitĂ© de Lyon 1534-1789, 1971, Paris. — Richard GASCON, Grand commerce et vie urbaine au XVIe siĂšcle, Lyon et ses marchands, 1971, Paris et La Haye. — Pierre LÉON, GĂ©ographie de la -fortune et structures sociales Ă  Lyon au XIXe siĂšcle, 1974, Lyon. Direction d'AndrĂ© LATREILLE, Histoire de Lyon et du Lyonnais, 1975, Toulouse. 2. Ms 565, pp. 79 Ă  100. Franklin FORD, Robe and Sword, the regrouping of the French aristocracy after Louis XIV, 1953, Cambridge Mass., pp. 205 et 260. 3. Et plutĂŽt du second genre par sa forme Je distingue chaque sujet par un numĂ©ro particulier en chiffre romain afin que, si j'ai l'occasion de parler d'eux dans mes lettres, je puisse les dĂ©signer simplement par leur numĂ©ro. Je n'emploie point les nos 1, 2 et 11, Ă  cause de la conformitĂ© que les caractĂšres romains et italiques ont entre eux. » Pour FORD, l'auteur est un agent secret du futur cardinal Dubois ». 4. Nous avons des recoupements. D'une façon gĂ©nĂ©rale on peut renvoyer Ă  la Correspondance littĂ©raire et anecdotique entre M. de Saint-Fonds et le prĂ©sident Dugas, 1711-1739, publiĂ©e et munie d'un index par William POIDEBARD, 1900, Lyon. Au MĂ©moire sur le gouvernement de Lyon 1697, par l'intendant Lambert D'HERBIGNY, Ă©ditĂ© et annotĂ© par Marie CHAVANNES, 1902, Lyon. Enfin Ă  divers rĂ©pertoires et nobiliaires citĂ©s infra. 386 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Tableau 1 statistique de l'influence "3 M s o 9 3 ' 8 Ă« 5 os a "S ft .o 'o > 'o L, c 'o ^ *o 2 '" ÂŁ " o oe I a S c a3 m n o H H 17 SBuBoO^ÏÏ "S e> M w » O^OugOs O .§ g Nombre notices total 79 11 34 13 11 3 2 5 Nombre notices catalogue particulier» 39 4 13 10 2 3 2 5 Effectifs globaux des catĂ©gories .... 97 300 35 45 Note sur les effectifs globaux ClergĂ© total des chapitres dont un membre apparaĂźt honoraires et habituĂ©s exclus, d'aprĂšs le MĂ©moire d'Herbigny, pp. 49 et 54. Nobles Évaluation, d'aprĂšs le nombre de familles donnĂ© par ledit MĂ©moire p. 19, pour 1697 325, et par H. de Jouvencel pour 1789 271 dans l'assemblĂ©e de la noblesse de la SĂ©nĂ©chaussĂ©e de Lyon en 1789, citĂ© par Garden, p. 388. Ville Consulat et trente officiers de la 1" classe Vial, ottvr. cit., n° 16. Monnaies MĂ©m. Herbigny, p. 72. L'auteur dĂ©finit lui-mĂȘme sa dĂ©marche Dans les conjonctures prĂ©sentes, j'ai cru devoir travailler Ă  faire connaĂźtre les principaux sujets des provinces oĂč l'on me fait l'honneur de m'employer et quoique ces sujets paraissent d'eux-mĂȘmes peu considĂ©rables, comme ils peuvent cependant servir de rameaux aux diffĂ©rentes branches des partis que les malintentionnĂ©s fomentent pour troubler la tranquillitĂ© de l'État, je m'applique non seulement Ă  examiner leurs discours et leurs dĂ©marches, mais je cherche encore Ă  dĂ©mĂȘler leurs talents, leur humeur et les liaisons qu'ils ont entre eux et avec les personnes suspectes, et c'est sur l'attention de ces diffĂ©rents points que j'ai formĂ© les portraits que je donne ici. Je commence par ceux des personnes qui tiennent quelque rang ou qui se distinguent de quelque maniĂšre dans la ville de Lyon et dans son voisinage. Le tableau 1 peut servir Ă  donner en forme d'estimation numĂ©rique un Ă©tat des forces rĂ©elles qui s'exercent dans le cadre formel des institutions existantes. Le nombre de personnes qui paraissent mĂ©riter le plus d'attention et qu'on peut... regarder comme suspectes », mentionnĂ©es Ă  nouveau dans un rĂ©capitulatif terminal, permet d'affiner la pesĂ©e, malgrĂ© l'optique plus limitativement policiĂšre de ce second relevĂ© 5. Ces chiffres et leur rapport Ă  l'effectif total des groupes concernĂ©s, tel que d'autres sources permettent de l'Ă©valuer, nous fournissent une statistique de rinfluence dont il est illusoire naturellement d'exagĂ©rer la valeur 5. Mais, comme j'ai mis peut-ĂȘtre dans ce mĂ©moire des choses peu nĂ©cessaires pour le fait prĂ©sent qui est celui de la conspiration, j'y joins un catalogue particulier qui indique, entre les sujets dont je fais les portraits, les noms de ceux qui me paraissent mĂ©riter le plus d'attention et les raisons qui les peuvent rendre suspects. » L'ÉLITE LYONNAISE SOUS LA RÉGENCE 387 absolue, mais qu'on ne peut s'interdire d'utiliser parce qu'elle n'atteint pas la perfection 6. L'originalitĂ© lyonnaise, bien connue sur le plan institutionnel et social, se dĂ©finit par le dĂ©faut de parlement et d'universitĂ©, malgrĂ© une masse dĂ©mographique humaine, la seconde de France, et par la prĂ©dominance des intĂ©rĂȘts matĂ©riels sur les prĂ©occupations politiques. La composition de l'Ă©lite influente, reflĂ©tĂ©e par le tableau, minore Ă  premiĂšre vue le rĂŽle des marchands. Mais l'observateur inclut dans le cercle de l'esprit mercantile bien plus que les cinq nĂ©gociants 7 La noblesse a un petit nombre pur et si mĂȘlĂ© Ă  la marchandise qu'elle est plus touchĂ©e des affaires de commerce que des affaires d'État, elle est actuellement plus sensible Ă  l'arrĂȘt des billets de banque qu'Ă  la dĂ©claration de guerre contre l'Espagne et qu'aux diffĂ©rents intĂ©rĂȘts des grands et des princes. Les magistrats et les bourgeois sont dans la mĂȘme disposition et les uns et les autres n'ayant pour principal objet de leurs souhaits et de leurs craintes que ce qui peut faire fleurir ou dĂ©truire le commerce, ils ne sont que lĂ©gĂšrement touchĂ©s de tout le reste. La cour des monnaies, qui n'a pas 20 ans d'Ăąge, fait bien pauvre figure» 8 malgrĂ© son rang souverain et son existence unique en province. BridĂ©e par le consulat, elle ne se hisse guĂšre au-dessus du rang subalterne d'un prĂ©sidial avec lequel elle est significativement unie. Rien d'Ă©quivalent avec la position dominante occupĂ©e dans leurs villes par les parlements de Toulouse et de Grenoble sur lesquels des enquĂȘtes du mĂȘme genre nous renseignent quelques mois plus tĂŽt 9. Sont ici citĂ©s cinq des prĂ©sidents, outre le premier, dont trois exercent cumulativement les lieutenances gĂ©nĂ©rale, criminelle et particuliĂšre du prĂ©sidial, quatre conseillers, l'avocat et le procureur gĂ©nĂ©raux. C'est en tant que membre du clergĂ© qu'apparaĂźt de plus un conseiller-clerc, et chez les officiers de la ville un conseiller-lai et un prĂ©sident le prĂ©vĂŽt des marchands. Plus encore, silence est fait sur les officiers du bureau de finances et ceux des autres juridictions de cette ville » qui sont des sujets sur lesquels il est inutile de parler ici »9bis. On lit incidemment qu'un habile 6. Objet privilĂ©giĂ© de la Science politique ». L'optique du rĂ©dacteur est celle de la classe politique » des hauts administrateurs parisiens Pierre GOUBERT, L'Ancien RĂ©gime, t. II, Les pouvoirs, 1973, Paris. — Roland MOUSNIER, Les institutions de la France sous la monarchie absolue, t. I, SociĂ©tĂ© et État, t. II, Les organes de l'État et la sociĂ©tĂ©, 1974 et 1980, Paris, des maĂźtres des requĂȘtes qui regardent de haut les gros bourgeois de province et dont parle M. GARDEN Ă  propos d'un mĂ©moire de l'intendance, de 1745, fort critique Ă  l'Ă©gard du consulat lyonnais ouv. cit., p. 498. 7. Vocabulaire parisien le mot nĂ©gociant s'emploie peu au dĂ©but du siĂšcle Ă  Lyon. 8. GARDEN, p. 508, MĂ©moire d'Herbigny, pp. 70-2 et 76. La cour est Ă©rigĂ©e en 1704. D'aprĂšs François BLUCHE et Pierre DURYE L'anoblissement par charges avant 1789, 1962, La Roche-sur-Yon, pp. 22 et 31 et contrairement Ă  l'ouvrage de NIEPCE que suit GARDEN, l'anoblissement qu'elle procure n'est que graduel, Ă  l'instar de celui des trĂ©soriers de France du bureau de finances de la ville, alors que le parlement de Dombes et l'Ă©chevinat de Lyon donnent la noblesse au premier degrĂ©, aprĂšs vingt et deux annĂ©es d'exercice respectivement. 9. Notre article, Une enquĂȘte sur le parlement de Toulouse en 1718, Annales du Midi, 1975, pp. 37-65. 9bis. Le bureau de Lyon a moins de fonctions qu'aucun autre, la juridiction du domaine lui manquant, parce qu'en Lyonnais et Beaujolais le roi n'a point de domaine et qu'en Forez la juridiction en appartient au bailliage » fient, cit., p. 83. 388 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE nĂ©gociant a achetĂ© Ă  son fils, petit sujet, une charge de trĂ©sorier de France ». Le clergĂ© ne brille pas beaucoup, malgrĂ© le rang primatial de l'archevĂȘchĂ© et la richesse des chanoines-comtes de Lyon du chapitre Saint-Jean, qui se prĂ©tendent volontiers encore, au xviiP siĂšcle, conjointement ou concurremment souverains de la ville 10. On retient, avec l'archevĂȘque et ses deux grands vicaires, dont l'un est en mĂȘme temps doyen de Saint-Jean et l'autre obĂ©ancier de Saint-Just 11, quatre comtes de Lyon dont deux dignitaires grand custode et chamarier et deux curĂ©s ou custodes de Sainte-Croix, paroisse sise dans l'Ă©difice cathĂ©dral 12. En outre, les collĂ©giales de Saint-Paul et d'Ainay n'apparaissent qu'avec un seul Ă©lĂ©ment distinguĂ© chacune, chamarier et simple chanoine respectivement. Commandant dans la province et sĂ©nĂ©chal de Lyon en tĂȘte, les nobles non magistrats surprennent par leur nombre Ă©levĂ© trente-quatre notices, dont beaucoup mentionnent Ă  cĂŽtĂ© du chef de la maison des frĂšres et des fils. Le cas lyonnais s'insĂšre mal dans le schĂ©ma de F. Ford du regroupement de l'aristocratie française, aprĂšs Louis XIV, autour des cours souveraines qui s'en constituent le pivotu. M. Garden a montrĂ© l'apparent paradoxe de la richesse lyonnaise une grande fortune nobiliaire dans la capitale des nĂ©gociants » 14. Faut-il dĂ©noncer une roture vĂ©ritable, dĂ©finie socialement, sous la nobilitĂ© juridique de parvenus rĂ©cents au second ordre ? Nous verrons pourtant que la carriĂšre militaire prĂ©domine et que le genre de vie du gentilhomme campagnard y est frĂ©quent. On doit accroĂźtre le paradoxe en rapprochant de ce fort groupe d'Ă©pĂ©e la masse du peuple » non portĂ©e au tableau et placĂ©e Ă  l'autre extrĂ©mitĂ© de l'Ă©chelle sociale. ÉclipsĂ©e Ă  premiĂšre vue aussi par la bourgeoisie marchande, elle recĂšle une force toute physique qui s'impose au politique soucieux d'ordre public A l'Ă©gard du peuple, comme il est trĂšs nombreux Ă  Lyon, il mĂ©rite selon moi plus d'attention que les autres corps de cette ville, surtout le petit peuple, dans lequel je comprends les ouvriers et les manoeuvres des manufactures et des marchands. La force pure, rĂ©glĂ©e et lĂ©gale, motive la place accordĂ©e aux trois officiers d'artillerie » de l'arsenal et aux deux responsables de la police, 10. Trente-deux chanoines-comtes, dont 8 dignitaires. Ils ont 1. de rente et le double pour les dignitaires. L'archevĂȘchĂ© vaut 1. MĂ©m. cit., pp. 49-53, avec de longs dĂ©tails. Lyon est siĂšge provincial des JĂ©suites et des Capucins. 11. Le chapitre de saint Just est le premier aprĂšs celui de saint Jean et parce que celui-ci fait bande Ă  part, l'obĂ©ancier, premier dignitaire de saint Just, marche Ă  la tĂȘte du clergĂ© et porte la parole » MĂ©m., p. 53. 12. L'Ă©glise de Saint-Étienne servit de cathĂ©drale. On en a Ă©levĂ© deux autres Ă  ses cĂŽtĂ©s, dont l'une, sous l'invocation de saint Jean, est la cathĂ©drale depuis plus de cinq siĂšcles. Dans l'autre, qu'on nomme Sainte-Croix, se font les fonctions curiales. Ces trois Ă©glises ainsi jointes ensemble n'en sont en quelque façon rĂ©putĂ©es qu'une. Le service s'y fait Ă  la mĂȘme heure souvent. Pour le faire, le clergĂ© des trois se trouve rĂ©uni dans le choeur de saint Jean MĂ©m., p. 49. 13. Ouv. cit., p. 21. 14. Les apports au mariage des familles nobles forment prĂšs de la moitiĂ© des apports globaux. Les apports moyens des nobles sont pour l'ensemble du siĂšcle voisins de 1., trois fois ceux des nĂ©gociants, et l'Ă©cart grandit dans le siĂšcle GARDEN, pp. 380 et 390-1. L'ÉLITE LYONNAISE SOUS LA RÉGENCE 389 rĂ©cemment Ă©toffĂ©e par l'institution du lieutenant Ă  cĂŽtĂ© du prĂ©sident » 15, Il n'en demeure pas moins que l'essentiel de l'influence dĂ©crite s'exerce au niveau des rouages de l'institution municipale. Le nombre des officiers de la ville », distinguĂ©s du premier niveau, se retrouve presque intĂ©gralement dans celui des dangereux » potentiels du rĂ©sumĂ©, de la mĂȘme façon que l'effectif plus restreint des officiers de police et des nĂ©gociants. Ces derniers d'ailleurs dĂ©pendent statutairement du consulat ou en sortent personnellement un prĂ©vĂŽt des marchands et deux Ă©chevins indiquĂ©s sur les sept. Nous avons donc le corps de ville proprement dit prĂ©vĂŽt des marchands et quatre Ă©chevins. Puis des officiers municipaux de la premiĂšre classe 16 l'avocat gĂ©nĂ©ral, les secrĂ©taires et le receveur. Enfin les chefs de la milice bourgeoise capitaine de la ville, lieutenant de la compagnie d'arquebusiers, capitaine de la campagnie de cinquante hommes du guet, major, puis, classĂ© avec eux, le grand prĂ©vĂŽt de la marĂ©chaussĂ©e du Lyonnais 17. Deux institutions, pourtant personnalisĂ©es et supĂ©rieures au consulat par le rang et le ressort, ne se manifestent par aucune notice 18 l'intendant, complĂštement passĂ© sous silence, aurait pu faire l'enquĂȘte, dont il partage en tout cas le dessein en permanence ; en second heu, le gouverneur, que le prĂ©cĂ©dent n'a pas du tout ramenĂ© Ă  un rĂŽle dĂ©coratif Ă  Lyon. Tout le document s'emploie Ă  dĂ©tecter son influence omniprĂ©sente la moitiĂ© des notices contiennent une mention sur ce point. Le rĂ©gent et Dubois s'emploient alors Ă  ruiner la polysynodie et Ă  Ă©venter les complots des grands qui l'animaient. La conspiration dite de Cellamare vient, en dĂ©cembre, d'ĂȘtre publiquement dĂ©noncĂ©e. Le gouvernement a Heu de craindre les cabales du marĂ©chal-duc. MalgrĂ© la mort du grand roi, son ami d'enfance, et en dĂ©pit de l'impopularitĂ© de ses dĂ©faites, 15. L'arsenal dĂ©pĂŽt d'artillerie au bord de la SaĂŽne, rive gauche. Le bureau de police, créé en 1572, a six juges et un prĂ©sident, ordinairement pris dans le prĂ©sidial. La lieutenance, Ă©rigĂ©e en office en 1699, fut rendue Ă  la nomination de la ville en 1700 MĂ©m., p. 67 et 78-9. 16. EugĂšne VIAL, Les officiers et employĂ©s municipaux, Revue d'histoire de Lyon, 1911, pp. 325-42. RĂ©partition depuis 1679 des officiers et commis qui dĂ©pendent de la ville en quatre classes. Une bonne trentaine dans la premiĂšre, dont la nomination doit ĂȘtre entĂ©rinĂ©e par le gouverneur. Ce nombre rĂ©duit Ă  une douzaine en 1753. Sur le corps de ville GARDEN, pp. 488 et 395-501 ; MĂ©m., pp. 97-8 et 101 ; A. KLEINCLAUSZ, t. II de l'Histoire de Lyon, 1948, Lyon, pp. 54-9. L'institution fonctionne dans le cadre des rĂ©formes fondamentales de 1595 et 1603 ainsi que du CĂ©rĂ©monial public de l'hĂŽtel de ville de Lyon », de 1680, vĂ©ritable loi municipale selon GARDEN, car elle rĂšgle une matiĂšre essentielle pour l'esprit du temps. Description de la cĂ©rĂ©monie annuelle de la Saint-Thomas pour Ă©lire deux Ă©chevins dans le Mercure Galant de janvier 1709. 17. Sur ces compagnies MĂ©m., pp. 65-9 et GARDEN, pp. 522-8, qui en dĂ©crit la sclĂ©rose et l'effacement ». Elles ont surtout un rĂŽle d'apparat et de bombance. La compagnie franche du rĂ©giment lyonnais et les cinquante hommes du guet assurent l'essentiel de la surveillance nocturne. Le remplacement est un aspect de la dĂ©crĂ©pitude des pennonages » dont les trente-cinq chefs de quartiers, Ă©crit l'auteur des notices de 1719, les capitaines penonts, ne sont pas fort accrĂ©ditĂ©s sur l'esprit des peuples et n'ont pas grande autoritĂ© dans leurs quartiers, ainsi j'ai cru qu'il Ă©tait inutile d'en parler » ils doivent garder les portes la nuit. Capitaine de la ville chef de la milice des pennonages et des deux cents arquebusiers dĂ©chargĂ©s de garde et du guet, mais sujets Ă  faire cortĂšge au consulat». Le major prend tous les soirs le mot du gouverneur et le donne Ă  la garde. 18. Omises aussi les charges de recteurs des hĂŽpitaux et juges de la conservation qui font partie du cursus honorum vers l'Ă©chevinat GARDEN, p. 497. 390 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Villeroy, qui fut au conseil de rĂ©gence, est assimilĂ© Ă  l'Important» Beaufort dans l'exaltation frondeuse reviviscente que relate Saint-Simon avec une intense minutie 19. Celui-ci a forgĂ©, au coin de son style, une description souvent citĂ©e de l'exceptionnelle influence du gouverneur dans sa capitale et de la permanence remarquable de la charge dans sa famille, qui va se perpĂ©tuer au siĂšcle des lumiĂšres. En ses dĂ©buts, le souvenir n'est pas perdu des quarante ans de rĂšgne, sous Louis XIV, de Camille de Neuville, qui, nommĂ© en 1653, cumula l'archevĂȘchĂ© et le gouvernement. Le marĂ©chal François, son neveu, malgrĂ© son absence habituelle sous la rĂ©gence Dubois l'y assignera Ă  rĂ©sider en 1722, demeure pour la ville le courtisan intercesseur obligĂ©. Par dĂ©doublement, en ce temps, l'archevĂȘque est son fils. InĂ©gal Ă  son rang, il ne soutient en aucune façon son caractĂšre, il est bon et affable sans distinction pour les personnes avec qui il n'a rien Ă  dĂ©mĂȘler, mais souvent vif et emportĂ© sans raison avec ceux qui l'approchent, il est inĂ©gal dans ses amitiĂ©s... nullement capable d'aucune affaire d'importance... on peut dire qu'on a de la considĂ©ration pour ce prĂ©lat que par rapport Ă  sa maison» 20. L'accession Ă  l'Ă©chevinat dĂ©pend du marĂ©chal, y ĂȘtre passĂ© vaut pour une prĂ©somption d'adhĂ©sion Ă  sa clientĂšle 2I. Cela vaut encore Ă  la date du rapport le premier Ă©chevin Jannon doit ĂȘtre trĂšs attachĂ© Ă  M. le marĂ©chal Ă  qui il doit la place qu'il occupe ». Le poste du receveur de la ville, Gautier, lui donne de grandes liaisons avec le marĂ©chal». Le Major de la ville lui est intimement attachĂ©... est sa crĂ©ature... nommĂ© depuis peu, M. du Fresne est capable par son poste et par ses talents de se rendre maĂźtre absolu de la populace de cette ville». Enfin, les PĂ©richon, pĂšre et fils, secrĂ©taires, d'une naissance obscure, sont dans l'intime confiance de M. le marĂ©chal de Villeroy, soit pour ses affaires particuliĂšres, soit pour toutes les affaires de la ville. Ce sont eux qui ont proprement son autoritĂ© sous le voile du conseil que ceux qui sont en charge sont assujettis de prendre d'eux. Leur crĂ©dit dans le public est grand, cependant il n'est fondĂ© que sur la confiance dont ils sont honorĂ©s par le marĂ©chal 22. On trouve huit fois des rapports neutres, notamment chez les officiers de l'arsenal qui relĂšvent du prince des Dombes, et dans une fraction de la noblesse, cliente d'autres grands, ou bien retirĂ©e et indĂ©pendante. Six cas de mĂ©sentente ou de mĂ©sestime l'avocat de la ville, M. de Grange Blanche, 19. Ernest LAVTSSE, Histoire de France, t. VIII, vol. 2, par H. CARRÉ, Le rĂšgne de Louis XV, 1909, Paris. — SAINT-SIMON, Ă©d. Arthur DE BOISIISLE, Ă  partir de l'imposante rubrique . D'ailleurs, la peine doit Ă©galement ĂȘtre utile au condamnĂ©, elle n'est salvatrice que si elle lui offre la possibilitĂ© de se corriger. Or, ce n'est pas son corps qui peut amener un coupable Ă  renoncer Ă  ses instincts fautifs, mais son Ăąme. Si le corps relĂšve de l'ordre naturel, l'Ăąme relĂšve de l'ordre social. La collectivitĂ© doit donc s'attacher en prioritĂ© Ă  l'aspect moral de la peine ; Que le chĂątiment frappe l'Ăąme plutĂŽt que le corps », propose Mably 41. Cependant, tout est liĂ©, et la cohĂ©rence du systĂšme envisagĂ© est admirable puisque tout ceci nous ramĂšne Ă  l'exploitation Ă©conomique du coupable. La morale bourgeoise de l'effort commande Ă  cette volontĂ© de faire de la pĂ©nalitĂ© une pĂ©dagogie rĂ©demptrice. Forcez les hommes au travail, vous les rendrez honnĂȘtes gens », s'exclame Voltaire 42. Ainsi, le travail forcĂ© d'utilitĂ© publique, dĂ©pouillĂ© des souffrances physiques inutiles et, par consĂ©quent, injustes, mais caractĂ©risĂ© par la souffrance morale rĂ©sultant de la privation de la libertĂ©, corrige le coupable autant qu'il le punit. Tout cela cependant n'Ă©tait pas suffisant. Philpin de PiĂ©pape avait d'ailleurs notĂ© que la peine des galĂšres-bagne ne correspondait qu'Ă  peu prĂšs aux voeux des rĂ©formateurs. Lacroix, lui-mĂȘme, considĂ©rait qu'il 36. Op. cit., p. 106. 37. Idem, p. 286. PASTORET, op. cit., p. 14, Ă©crit Le respect pour les hommes veut que le supplice soit doux ». MABLY, pourtant partisan de la peine de mort, partage cette opinion dans son ouvrage De la lĂ©gislation, Tome IX des OEuvres complĂštes, Londres, 1789, p. 329 Les chĂątiments doivent ĂȘtre doux ». 38. ThĂ©orie des loix criminelles, p. 158. 39. Op. cit., p. 292. Voir Ă©galement HOLBACH, op. cit., Tome I, p. 127 et Tome II, p. 6 sqq. 40. BERNARDI, op. cit., p. 39. Voir aussi LACRETELLE, RĂ©flexions sur la Justice criminelle, p. 130. La notion de vengeance est unanimement rejetĂ©e. 41. Op. cit., p. 325. 42. Commentaire sur le livre des dĂ©lits et des peines, p. 52. 418 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE serait possible de rendre leur esclavage plus utile, et pour eux, et pour l'État ». Brissot, dans son Discours sur les moyens d'adoucir la rigueur des loix pĂ©nales, dĂ©finissait le supplice Ă  substituer selon lui Ă  la peine capitale comme devant concilier l'intĂ©rĂȘt de l'État avec les droits du coupable. De nouvelles perspectives Ă©taient ainsi ouvertes Ă  la lĂ©gislation criminelle. On la perçoit dĂ©sormais comme un reflet du degrĂ© de civilisation des peuples. Lisez nos codes, lisez nos livres de jurisprudence, et souvent vous vous croirez encore dans l'ignorance des temps gothiques ». Tous partagent ce sĂ©vĂšre point de vue de Lacretelle 43. La lĂ©gislation française devait ĂȘtre adaptĂ©e Ă  la civilisation du xviir siĂšcle, c'est-Ă -dire, pour les philosophes, ĂȘtre dĂ©terminĂ©e par le climat tempĂ©rĂ©, les moeurs douces, la religion celle de la charitĂ© et du pardon, le caractĂšre national celui de l'honneur, le gouvernement monarchique donc modĂ©rĂ©. Ces catĂ©gories — qui doivent beaucoup Ă  Montesquieu — dĂ©finissent la sociabilitĂ© des individus, et, au-delĂ , le contrat social. Ce dernier ne repose pas sur la force mais sur une morale universelle, c'est-Ă -dire sur l'expĂ©rience de la conduite des hommes en sociĂ©tĂ©. La pĂ©nalitĂ©, pour ĂȘtre efficace ou plus exactement utile et juste 44, doit puiser sa substance dans les principes de cette morale sociale qui n'est rien d'autre qu'une morale de l'État 45. Pastoret rĂ©sume tout ceci Les vrais principes de la lĂ©gislation ne sont que ceux de la Raison et de la Morale Universelle consacrĂ©e par l'autoritĂ© publique s 46. La peine sera ainsi associĂ©e Ă  la notion de sensibilitĂ© » 47. La nouvelle lĂ©gislation criminelle, appuyĂ©e sur la Raison des philosophes qui s'affirme en cela comme un accord parfait de l'esprit et du coeur, se prĂ©sente sous la forme d'une philanthropie codifiĂ©e respectant la sensibilitĂ© caractĂ©risant tout ĂȘtre social et l'humanitĂ© qui organise les relations entre les ĂȘtres sociaux. Pour HelvĂ©tius et surtout d'Holbach, rendre la justice c'est d'abord aimer les hommes ce qui correspond Ă  une nĂ©cessitĂ© vitale car aimer autrui, c'est s'aimer soi-mĂȘme 43. Dans son Essai sur le MĂ©rite et 43. Op. cit., p. 158. 44. PHTLPIN DE PTEPAFE, op. cit., p. 345. Voir aussi DUERICHE DE VALAZE, op. cit., p. 282 Les loix civiles d'un pays indiquent le genre de vie qu'ils mĂšnent ses habitants. Leurs loix criminelles et surtout leurs loix pĂ©nales devraient donner une juste idĂ©e de leurs moeurs ». La vĂ©ritĂ© dans le systĂšme des LumiĂšres est toujours fondĂ©e sur l'utilitĂ©, de mĂȘme ce qui est juste. 45. HOLBACH La politique naturelle, d'Ëthocratie et HELVÉTIUS De l'Homme sont les thĂ©oriciens les plus accomplis de cette morale d'Ă©tat. 46. Op. cit., p. 15. FILANGIERI, La science de la lĂ©gislation 1780, Paris, 1786, recommande Ă©galement Des loix qui doivent ĂȘtre mises en rapport avec des principes de morale communs Ă  tous les hommes ». Les rapports entre la lĂ©gislation et la morale ont toujours Ă©tĂ© une des grandes prĂ©occupations des penseurs du xrai* siĂšcle. Dans ses ConsidĂ©rations sur les moeurs du siĂšcle, Londres, 1759, p. 8, DUCLOS affirmait Chez les peuples policĂ©s, les moeurs perfectionnent les loix, et quelquefois y supplĂ©ent ». MONTESQUIEU, dans L'Esprit des loix Livre VI, chapitre 9, avait demandĂ© aux lĂ©gislateurs de s'appliquer Ă  donner des moeurs aux citoyens. 47. HELVÉTIUS, op. cit., p. 397. Il se demande d'ailleurs, p. 237 c Si l'on peut fonder la morale sur d'autres principes que celui de l'utilitĂ© publique ». 48. MABLY, op. cit., p. 292 Le lĂ©gislateur hait les dĂ©lits, mais il plaint les coupables ». Voir aussi note 45. LE BAGNE DES PHILOSOPHES 419 la Vertu, Diderot dĂ©finit l'homme sensible comme Ă©tant celui chez qui la sympathie active Ă©tymologiquement la participation Ă  la souffrance d'autrui est la plus dĂ©veloppĂ©e. Il ne faut donc ni juger, ni traiter autrui du haut d'une vertu dominatrice, absolue, rigide. La justice philanthropique qui dĂ©coule de ce postulat est conforme Ă  la nature humaine et obĂ©it Ă  cette pĂ©dagogie moralement salvatrice 49. Ce rapport de la peine Ă  la morale et Ă  la sensibilitĂ© lui confĂšre Ă©galement une valeur d'enseignement Ă  l'Ă©gard des autres citoyens. La puissance de la pĂ©nalitĂ© ne rĂ©side plus dans les manifestations terrorisantes de la cruautĂ© mais dans sa capacitĂ© d'amender la collectivitĂ©. En exposant pour la premiĂšre fois la notion de droit social du condamnĂ©, les philosophes manifestent leur intention de faire de la pĂ©nalitĂ© une forme de dialogue social. La philanthropie, dans un sens large, est une amitiĂ© dĂ©sintĂ©ressĂ©e pour l'espĂšce humaine 50. L'homme n'appartient plus Ă  lui-mĂȘme, il est un bien de la sociĂ©tĂ© » 51. Philosophie du corps, la pensĂ©e rationalisante est aussi une philosophie de l'individu. Parce qu'il est la partie constituante d'un tout, il est un bien social. Le problĂšme est de rendre conciliable l'autonomie individuelle mue par la raison avec les clauses normatives et astreignantes du pacte social. Dans l'intĂ©rĂȘt bien compris des deux parties, il doit y avoir dialogue entre le citoyen et la collectivitĂ©; chacun Ă©tant dĂ©terminĂ© par un rĂ©seau cohĂ©rent de droits et de devoirs. Or, avant de commettre sa faute, le coupable Ă©tait un citoyen comme les autres. Celle-ci entraĂźne la dĂ©sapprobation publique qui prive un citoyen de la considĂ©ration, de la confiance que la sociĂ©tĂ© avait pour, lui et qui lui fait perdre cette fraternitĂ© qui existe entre les membres d'un mĂȘme Ă©tat » 52. Dans certains cas — trĂšs rares — la gravitĂ© du crime ou la personnalitĂ© du criminel nĂ©cessitent pour les abolitionnistes une condamnation Ă  perpĂ©tuitĂ©, pour les autres une condamnation Ă  mort 53. Mais le plus souvent, la dĂ©chĂ©ance n'est pas telle qu'on ne puisse plus considĂ©rer 49. BECCARIA Ă©crit en effet C'est dans les sentiments du coeur humain qu'il faut chercher l'origine des peines et le fondement du droit de punir ». MABLY, op. cit., p. 272 Ce n'est point en Ă©touffant les sentiments d'humanitĂ© que la nature nous a donnĂ©s que vous contraindrez les hommes Ă  devenir meilleurs ». BEAGASSE, Discours sur l'humanitĂ© des juges dans l'administration de la justice criminelle, SX., p. 9 Le magistrat qui chĂ©rit la justice n'oublie donc jamais qu'il faut aimer les hommes ». 50. Georges GUSDORF dans Les principes de la pensĂ©e au siĂšcle des LumiĂšres, Paris, 1971, p. 366, observe que cette gĂ©nĂ©ralisation humanitariste apparaĂźt comme un des aspects de l'universalitĂ© de la Raison. Or, La philosophie des LumiĂšres voit dans la Raison le dĂ©nominateur commun de tous les hommes de bonne volontĂ© ». 51. SERVAK, op. cit., p. 276. 52. BECCARIA, op. cit., p. 143. 53. BRISSOT, ThĂ©orie des loix criminelles, p. 65, dĂ©clare que les condamnĂ©s Ă  perpĂ©tuitĂ© sont ceux qu'on dĂ©sespĂšre de pouvoir rendre aux devoirs de la sociabilitĂ©, et dont la libertĂ© serait funeste au repos et Ă  la tranquillitĂ© publique ... ; ceux qui ayant Ă©tĂ© condamnĂ©s pour un temps Ă  la servitude publique seraient retombĂ©s dans de nouveaux crimes aprĂšs en ĂȘtre sortis ». DIDEROT, dans ses Notes sur le traitĂ© des dĂ©lits et des peines, remarque que les Parlements de France ne condamnent que trois cents individus par an, ce qui est peu, selon lui, par rapport au nombre de condamnations total et plus encore par rapport Ă  la population du Royaume. 420 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE le coupable comme un membre de la collectivitĂ© M. La condamnation aux travaux publics Ă  temps reçoit donc la mission de prĂ©parer la rĂ©intĂ©gration dans le corps social, et ceci pour plusieurs raisons. D'abord, le coupable est conçu gĂ©nĂ©ralement comme un ĂȘtre perfectible. Comme tous les hommes, il est un ĂȘtre sensible » 55, il est naturellement bon 56. Le forçat, rendu Ă  la libertĂ©, aprĂšs avoir expiĂ© son crime, peut devenir un homme de bien » s 7. Le voleur est susceptible de devenir meilleur s 58. Pastoret rĂ©sume l'opinion quasi gĂ©nĂ©rale en affirmant que le fautif ne peut se racheter que par la sociĂ©tĂ© » 59. Les philosophes retrouvent la notion de pardon hĂ©ritĂ©e du veux fonds judĂ©o-chrĂ©tien que la pĂ©nalitĂ© de l'Absolutisme ignorait 60. Il est d'autant plus piquant que Mably doute cependant de la perfectibilitĂ© du forçat, rejoignant ainsi le scepticisme de Rousseau Ă  ce sujet II n'y a pas quinze jours, je rencontrais une bande malheureux qu'on envoyait aux galĂšres ; et je vous rĂ©ponds que jamais spectacle ne fut moins propre Ă  servir d'exemple et d'instruction. Ils chantaient de toutes leurs forces, s'ils n'avaient pas mendiĂ©, si je n'avais pas vu leur chaĂźne, je crois que j'aurai enviĂ© leur sort 61. Pastoret lui rĂ©pondra directement Je l'ai vu aussi cette chaĂźne de malheureux qu'on tramait Ă  la captivitĂ© .... Si quelques-uns, l'oeil fixe, le front audacieux, semblaient dĂ©fier le mĂ©pris, presque tous, la tĂȘte penchĂ©e, les yeux baissĂ©s, le front pĂąle et humiliĂ©, craignaient de lire dans nos regards une proscription nouvelle 62. Pour beaucoup, le coupable est Ă©galement un malade que la punition doit guĂ©rir. L'homme n'est point mĂ©chant, il le devient comme il devient malade », affirme Voltaire 63. L'individu est en effet en proie naturellement Ă  des passions et Ă  des dĂ©sirs que les lois de la sociĂ©tĂ© arrĂȘte sans les dĂ©truire »M. Tous ne rĂ©sistent pas Ă  ce terrible levain, d'autant que si il est certain que ces dispositions naturelles, dont l'homme n'est pas le maĂźtre, contribuent grandement Ă  le dĂ©terminer, soit au bien, soit au mal ..., tout nous dĂ©montre que c'est bien plus Ă  leurs mauvaises institutions et Ă  leur ignorance qu'Ă  leurs dispositions naturelles que les hommes sont redevables 54. Pour BECCARIA, op. cit., p. 143, la peine n'est pas une vengeance contre un citoyen. LACROIX, op. cit., pense que A l'exception de quelques individus chez lesquels le vol est une passion, un besoin irrĂ©sistible, la plupart des hommes civilisĂ©s ne s'y livrent que par nĂ©cessitĂ© J>. 55. BECCARIA, op. cit., p. 106. 56. Voir notamment BRISSOT, Les moyens d'adoucir la rigueur des loix pĂ©nales en France, p. xv. On retrouve aussi cette idĂ©e chez HOLBACH, VOLTAIRE, LACRETELLE, etc. 57. VREMEIL, op. cit., p. 54. 58. BRISSOT, op. cit., p. 87. 59. PASTORET, op. cit., p. 15. 60. Il Ă©tait normal que la sociĂ©tĂ© traditionnelle ne se souciĂąt pas de pardonner puisque cela Ă©tait le rĂŽle de Dieu et du Roi. 61. Op. cit., Livre III, chapitre III. 62. Op. cit., p. 97. 63. Dictionnaire philosophique, article mĂ©chant. 64. LACRETELLE, op. cit., p. 14. Cette idĂ©e est frĂ©quemment exposĂ©e. Voir notamment HOLBACH, op. cit.. Tome I, p. 116 sqq ; VATTEL l'exprimait dĂ©jĂ  en 1758, Le droit des sens, Leyde, p. 65. LE BAGNE DES PHILOSOPHES 421 des passions fatales, des crimes, des vices, des faiblesses dont ils sont affligĂ©s. Si les passions des hommes sont naturelles, le mauvais usage de ces passions est contraire Ă  sa nature s. La sociĂ©tĂ© porte ainsi sa part de responsabilitĂ© dans l'origine de la criminalitĂ© dont les principales causes — hormis les dĂ©sĂ©quilibres de la nature humaine — sont les inĂ©galitĂ©s et l'oppression du plus grand nombre, la dĂ©gĂ©nĂ©rescence des moeurs, la mauvaise Ă©ducation et pour certains le manque de religion l'imperfection des lois, l'ignorance dans laquelle on laisse le peuple a. Ainsi, la revalorisation de l'individu passe par sa dĂ©culpabilisation et le partage des torts avec la collectivitĂ©. On le voit, si les principes utilitaristes de la peine des galĂšres Ă©taient aisĂ©ment amĂ©nageables, il n'en allait pas de mĂȘme avec certains de ses corrĂ©lats juridiques et idĂ©ologiques. Lacroix considĂšre que dans le contexte de l'Ă©poque, chaque forçat libĂ©rĂ© est une bĂȘte fĂ©roce rendue Ă  la libertĂ© » 67. Le bagne ne remplissait pas, tel qu'il Ă©tait, une mission essentielle — et cela motivait un reproche majeur qu'on lui faisait — parce que tous les forçats n'y Ă©taient pas Ă©gaux en droits ni en devoirs et parce que le personnel y obĂ©issait Ă  une autre conception de la pĂ©nalitĂ© Un des grands inconvĂ©nients attachĂ©s Ă  la souverainetĂ©, c'est de ne pouvoir descendre du haut de sa grandeur Ă  tous les soins de son empire, d'ĂȘtre forcĂ© d'en rejeter une partie sur des sujets que l'habitude de la tyrannie et l'espĂšce d'hommes qu'ils commandent a nĂ©cessairement endurcis. Malheur Ă  celui de ces esclaves auquel il resterait encore quelque idĂ©e de son origine. Il faut qu'il s'abyme dans l'oubli de tous principes, de toutes maximes, et qu'il ne voie que sa chaĂźne... C'est de son industrie, de sa bassesse qu'il peut espĂ©rer quelque adoucissement Ă  sa misĂ©rable condition. Le plus Ă  plaindre de tous est celui qui ayant exercĂ© une profession honorable, a dĂ©daignĂ© ce que le prĂ©cepteur de l'Emile a grand soin de faire apprendre Ă  son Ă©lĂšve. Le prĂȘtre, l'homme de loi, le cultivateur que leur malheur ou leur faiblesse ont fait descendre dans cet Ă©tat d'abjection, sont rĂ©duits Ă  nettoyer nos ports ou les hĂŽpitaux, Ă  transporter des fardeaux, tout le jour ils sont exposĂ©s aux intempĂ©ries de l'air, tandis que l'artisan, le compagnon travaillent paisiblement chez un maĂźtre et reviennent le soir au bagne avec leur salaire. Ils ne s'aperçoivent souvent, pendant le cours de leur esclavage, de leur sort que par l'habit qu'ils portent le jour, et par l'asile odieux oĂč ils passent la nuit. Ne serait-il pas Ă  dĂ©sirer que ces diffĂ©rences fussent plus Ă©clairĂ©es et moins dĂ©pendantes du caprice ou du hasard ? . 65. HOLBACH, op. cit., Tome I, p. 117. HELVÉTIUS dĂ©veloppe un point de vue quelque peu diffĂ©rent, op. cit., p. 112 De ce que l'homme est sociable, on en a conclu qu'il Ă©tait bon. On s'est trompĂ© ». 66. L'argument est autant Ă©conomique que politique. Ce sont les crises Ă©conomiques et les tensions sociales qui, pour beaucoup, sont Ă  l'origine du vagabondage et de la mendicitĂ©. Des auteurs comme l'AbbĂ© MALVATJX, Des moyens de dĂ©truire la mendicitĂ© en France ..., ChĂąlons, 1782, ou l'AbbĂ© LECLERC DB MONTLINOT, Quels sont les moyens de dĂ©truire la mendicitĂ© en ..., Lille, 1779, prĂ©voient comme remĂšde la diffusion d'une aisance gĂ©nĂ©rale parmi le peuple ». Celui qui a goĂ»tĂ© le plaisir de coucher dans un lit est bien moins tentĂ© d'aller solliciter bonnement la permission de se vautrer sur le fumier d'une ferme ». Voir aussi l'opinion du Bourgeois MERCIER, page 193 du prĂ©sent ouvrage. 67. Op. cit., addition au mot galĂšre. 68. Ibidem. 422 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Et l'auteur de regretter le temps des galĂšres oĂč tous les condamnĂ©s, obligĂ©s de ramer, Ă©taient confondus dans une stricte Ă©galitĂ© 69. Au-delĂ  des confusions et de la mauvaise connaissance Ă©vidente des rĂ©alitĂ©s du bagne de la Marine 70, on s'aperçoit que le principe de l'Ă©galitĂ© dans la peine est fondamental chez les rĂ©formateurs puisqu'il s'oppose Ă  l'inĂ©galitĂ© sociale. Autre point capital reprochĂ© au bagne, c'est le total dĂ©sintĂ©rĂȘt pour la rĂ©insertion sociale du condamnĂ© Souvent, lorsqu'un de ces misĂ©rables a passĂ© six ou neuf annĂ©es dans les emplois les plus vils, on le dĂ©tache de sa chaĂźne et on le laisse gagner en libertĂ© l'endroit du royaume oĂč il veut aller se fixer ; s'il n'a pas le moyen d'Ă©changer l'habit qui dĂ©cĂšle son chĂątiment, il va traĂźnant sa honte et sa misĂšre de village en village, effrayant sur les routes et dans les forĂȘts le voyageur qui se dĂ©tourne Ă  sa rencontre. S'il a pu prendre les vĂȘtements du sujet vulgaire, il arrive inconnu, isolĂ©, dans un ville, cherchant les moyens d'exister, mais quel est le maĂźtre qui le prendra Ă  son service ou lui fournira de l'ouvrage, sans s'embarrasser de savoir d'oĂč il vient, ce qu'il a fait ? Si on le questionne, le trouble de ses rĂ©ponses vagues le rendra encore plus suspect. Il a autrefois volĂ© par paresse, par dĂ©bauche, aujourd'hui il volera par besoin. Comme l'empreinte dont il est flĂ©tri l'expose Ă  perdre la vie s'il tombe une seconde fois sous la main de la justice, il fait de plus grands efforts pour Ă©viter la fin dont il est menacĂ©. L'assassinat lui est devenu pour ainsi dire nĂ©cessaire. Il dĂ©fend ses jours en attaquant ceux des autres. C'est ainsi que les prĂ©cautions que l'on prend contre le crime tournent Ă  son aggrandissement. L'expĂ©rience confirme ce que j'avance, de dix galĂ©riens remis en libertĂ©, il n'y en a peut-ĂȘtre pas trois qui n'aient depuis mĂ©ritĂ© d'ĂȘtre pendus ?i. Lacroix, qui se veut ici le porte-parole du courant rĂ©formateur propose personnellement deux solutions. Une fois son crime expiĂ© par des annĂ©es de servage », il faut, pour assurer sa propre conservation et ne plus troubler la tranquillitĂ© publique, que l'ancien forçat puisse travailler. S'il possĂšde de l'argent, il devra obligatoirement acheter une terre oĂč il le voudra et la travailler le restant de ses jours sous l'inspection du ministĂšre public »y 2. Si au contraire, il est indigent, l'Ă©tat lui fournira du travail. C'est Ă  nouveau le long plaidoyer sur le thĂšme des chemins Ă  entretenir, des canaux Ă  percer, des forĂȘts Ă  essarter, etc. Le salaire qu'il lui versera lui permettra d'acheter la terre nĂ©cessaire Ă  son Ă©tablissement. Aie donc le courage d'ĂȘtre laborieux et honnĂȘte homme, tu seras du moins assurĂ© d'achever les jours que la nature te destine ». On observera que si dans ce projet, l'influence physiocratique est dominante, la confiance dans l'ancien forçat n'est pas absolue. La rĂ©insertion sociale se veut plus Ă©conomique que morale puisque l'ex-dĂ©tenu est placĂ© en libertĂ© surveillĂ©e. Bernardi effectue les mĂȘmes constats que Lacroix mais il propose des solutions plus conformes aux concepts des philosophes 69. LACROIX confinne ainsi son ignorance des rĂ©alitĂ©s des galĂšres. Cf. chapitre X du prĂ©sent ouvrage que BSMFORD, Fighting ships and prisons, Mineapolis, 1975, et MASSOÏJ, Les galĂšres de France de 1481 Ă  1871, Paris, 1983. 70. Cf. P. W. BAMFORD, Fighting ships and prisons, 1973 et note 32. 71. Cf. notre Ă©tude ' Justice et sociĂ©tĂ© au xvm* s., le cas de la peine des galĂšres » dans Histoire, Économie et SociĂ©tĂ©, 1985, n° 3. 72. Op. cit. Pour l'argent des forçats, voir ouvrage. Les condamnĂ©s peuvent en effet en gagner en travaillant Ă  l'arsenal et dans le port. Les condamnĂ©s Ă  temps peuvent aussi faire des hĂ©ritages. LE BAGNE DES PHILOSOPHES 423 Le condamnĂ©, aprĂšs avoir subi son chĂątiment momentanĂ© ... va traĂźner ailleurs des jours que le besoin, le dĂ©faut des ressources, l'opprobe et l'avillissement livrent absolument Ă  l'habitude du crime. Il rejoint Brissot pour qui on doit avoir attention de les occuper pendant qu'on les tient dans l'esclavage Ă  des travaux qu'ils puissent continuer lorsqu'ils aurant recouvrĂ© la libertĂ©. Autrement, ils ne seront pas meilleurs qu'auparavant, et c'est lĂ  une des raisons pour lesquelles ceux qui sortent des galĂšres viennent pour l'ordinaire pĂ©rir sur l'Ă©chafaudli. Si peu d'auteurs, en fait, proposent des solutions concrĂštes c'est parce qu'ils ont tous conscience que la rĂ©insertion globale est un phĂ©nomĂšne global, commandĂ© par sa dimension morale. Le problĂšme essentiel Ă  rĂ©soudre avant de ses soucier des modalitĂ©s pratiques et Ă©conomiques Ă©tait celui de l'infamie attachĂ©e Ă  la peine. L'infamie, Ă  laquelle est directement associĂ©e la flĂ©trissure, embarrasse et divise les rĂ©formateurs, moins au niveau du principe qu'Ă  celui de son application. Le principe est en effet conforme au caractĂšre de la nation française — qui pour tout le monde, rappelons-le, est l'honneur — mais aussi Ă  la sociabilitĂ© de l'individu. Que le lĂ©gislateur soit assez habile pour profiter des qualitĂ©s sociales que la nature nous a donnĂ©es ..., qu'il travaille Ă  nous rendre honteux de nos fautes » 74. L'infamie, corrective, n'est pas moins puissante que la douleur physique ou la captivitĂ© pour apprendre Ă  un coupable Ă  se gouverner par le sentiment de l'honneur et de la vertu » 75. Elle est aussi dissuasive et Voltaire se persuade qu'en rendant les chĂątiments plus honteux et moins cruels on diminuera la criminalitĂ© 76. Enfin, l'infamie du coupable contribue Ă  donner des moeurs aux autres citoyens, Ă  condition que, comme le souligne Beccaria, l'infamie que la loi inflige corresponde Ă  celle que la sociĂ©tĂ© attache Ă  certaines actions s 77. Deux autres conditions sont nĂ©cessaires pour que le principe soit dĂ©finitivement acceptĂ©. En vertu du postulat selon lequel la peine ne doit concerner que le coupable, l'infamie doit ĂȘtre exclusivement personnelle et ne pas s'Ă©tendre Ă  la famille du condamnĂ©. Elle reçoit seulement pour fonction de susciter un remords salvateur chez le coupable et de donner une leçon de morale aux autres. Elle ne doit pas ĂȘtre Ă  l'origine d'un prĂ©jugĂ© social qui serait un obstacle Ă  la rĂ©insertion intĂ©grale de l'exforçat dans la collectivitĂ©. Le jeune Robespierre, dans un Discours couron73. couron73. des toix criminelles, page 65. 74. MABLV, op. cit., p. 325. DDFRICHE DE VALAZE, op. cit., p. 312 L'honneur est un ĂȘtre moral qui doit son existence Ă  la sociĂ©tĂ© ; c'est un bien qu'elle peut donner et qu'elle peut par consĂ©quent ĂŽter, ainsi l'infamie est une peine conforme Ă  la nature de la sociĂ©tĂ© ». HELVÉTIUS, op. cit., p. 235, remarque cependant Dans un gouvernement sage, le supplice de la honte suffirait seul pour contenir le citoyen dans son devoir ». 75. PASTORET, op. cit., p. 121, rejoint ainsi MABLY. Il ajoute 17. Cf. note 14. DaE Freiburg aĂŻs das erste und bleibende Denkmal der Herzoge von ZĂąhringen nach 587 Jahren wieder an jenes erlauchteste Stammhaus zuriickkehre, dem es sein Daseyn, seine Griindung und Begabung, und unter der begliickenden hundertjahrige Regierung jenes erhabene Mannstammes so vielen Flor zur verdanken hatte, dass es auch unter allen Zeitveranderunge den Namen der Hauptstadt des Breisgaues fiihren und behangte durfte. » 444 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Cette dĂ©lĂ©gation espĂ©rait ainsi sauvegarder les intĂ©rĂȘts municipaux. En effet, il ne faisait plus aucun doute que la sĂ©paration de la Maison d'Autriche Ă©tait d'autant plus douloureuse qu'elle ne marquait pas seulement un changement de souverain elle signifiait le dĂ©licat passage d'une rĂ©gion jouissant d'une certaines autonomie Ă  l'intĂ©rieur d'un État possĂ©dant une certaine unitĂ© et ne semblant de prime abord guĂšre dĂ©sireux de laisser continuer Ă  s'Ă©panouir les traditions qui s'Ă©taient Ă©tablies tout au long du rĂšgne des Habsbourg. On connaissait certes, par ouĂŻ-dire, Charles-FrĂ©dĂ©ric comme un doux souverain dĂ©sireux de procurer le bienĂȘtre Ă  ses sujets, qui avait supprimĂ© le servage en 1783, mais l'on s'inquiĂ©tait vivement de la situation religieuse de la rĂ©gion Ă  l'intĂ©rieur de l'État nouvellement créé, notamment en ce qui concernait les deux cloĂźtres de Sankt-Blasien et de Sankt-Peter. En effet, l'empereur François d'Autriche avait laissĂ© entendre aux religieux de ces deux cloĂźtres qu'il les prendrait sous sa tutelle au cas oĂč l'existence de leur Ă©glise respective viendrait Ă  ĂȘtre menacĂ©e Ă  l'intĂ©rieur du Brisgau. On connaissait en rĂ©alitĂ© le plan que le Margrave Charles-FrĂ©dĂ©ric avait Ă©laborĂ© en 1784 dĂ©jĂ  et qui projetait de fermer les cloĂźtres, contribuant alors Ă  faire trembler plus d'un religieux mĂȘme au-delĂ  des frontiĂšres de l'État. D'autre part, cette mesure de faveur Ă©manant de l'Autriche avait peut-ĂȘtre pour autre objectif de renforcer les idĂ©es religieuses et de reconduire sur le droit chemin les brebis Ă©garĂ©es » qui pensaient Ă  ce moment-lĂ  souvent plus Ă  ouvrir des auberges ou quelque autre lieu de distraction et de beuveries plutĂŽt qu'Ă  prier. De son cĂŽtĂ©, Charles-FrĂ©dĂ©ric avait dĂ©cidĂ© de procĂ©der Ă  la fermeture des cloĂźtres et des abbayes de la rĂ©gion et il menait fermement une politique de sĂ©cularisation, ce qui amena les prĂȘtres Ă  rĂ©flĂ©chir aux propositions que leur avait faites le monarque autrichien. Le prĂȘtre Ignaz Speckle 18 demeura dans la rĂ©gion fribourgeoise car les moines qu'il dirigeait refusaient de quitter le pays. En revanche, le prĂȘtre Berthold Rottler choisit de rejoindre cette offre avec trente des moines bĂ©nĂ©dictins de Sankt-Blasien et il adressa auprĂšs du Gouvernement badois une demande d'Ă©migration. Il est naturel que le souverain badois n'ait pas apprĂ©ciĂ© ce comportement, pourtant il fut bien obligĂ© d'accorder cette requĂȘte et d'autoriser les moines Ă  quitter leur abbaye pour s'Ă©tablir dans la vallĂ©e de Lavant, en Carinthie. 18. Le prĂȘtre Ignaz Speckle avait dĂ©jĂ  eu l'occasion de faire la connaissance de CharlesFrĂ©dĂ©ric bien avant que celui-ci ne devĂźnt possesseur du Brisgau. Le souverain badois avait visitĂ© le cloĂźtre de Sankt-Peter en 1773 et il avait pu lire les documents dont l'historien strasbourgeois Schbpflin s'Ă©tait servi pour rĂ©diger son ouvrage d'historiographie badoise. Il avait par la suite ordonnĂ© au prĂȘtre de bien vouloir lui remettre en mains propres les documents renfermĂ©s dans la bibliothĂšque du cloĂźtre. Ignaz Speckle obĂ©it, dans l'espoir sans doute que Charles-FrĂ©dĂ©ric ferait un Ă©tat d'exception pour son cloĂźtre au cas oĂč il deviendrait le souverain du Brisgau et procĂ©derait Ă  la sĂ©cularisation des Ă©tablissements religieux de la rĂ©gion. Toutefois il ne jouit par la suite pas plus de la protection espĂ©rĂ©e du margrave qu'il ne revit les documents en question. Ses espoirs ne furent pas exaucĂ©s et ce ne fut manifestement qu'Ă  regret qu'il resta au pays, se conformant Ă  la volontĂ© des moines dont il avait la charge. FRIBOURG-EN-BRISGAU ET L'ÉTAT DE BADE, 1806-1820 4Ab A Fribourg, l'on Ă©tait Ă©galement rĂ©servĂ© quant Ă  cette dĂ©cision gouvernementale car, mĂȘme si la situation y Ă©tait quelque peu diffĂ©rente, il n'en restait pas moins vrai que la sĂ©cularisation causait une vĂ©ritable hĂ©morragie en ce qui concernait les biens que renfermaient les cloĂźtres. Les pertes matĂ©rielles furent notamment considĂ©rables pour le patrimoine culturel de la rĂ©gion, car les prĂ©cieux livres exposĂ©s dans les bibliothĂšques des cloĂźtres furent soit brĂ»lĂ©s, soit remis entre les mains des religieux autrichiens qui accueillirent leurs collĂšgues des environs de Fribourg. La position des citoyens du Brisgau face Ă  leur nouveau Gouvernement Ă©tait, par voie de consĂ©quence, nĂ©gative et la population semblait dans l'ensemble bien déçue de devoir obĂ©ir aux autoritĂ©s Ă©tablies Ă  Karlsruhe, le centre politique du nouvel État badois. Les habitants de la rĂ©gion se sentaient en effet encore de nombreuses attaches culturelles et bien des liens familiaux avec les milieux autrichiens Ă  cet Ă©gard, la dĂ©cision que le souverain Charles-FrĂ©dĂ©ric prit d'engager ses troupes dans les guerres de coalition en 1809 allait ĂȘtre l'un des Ă©lĂ©ments dĂ©favorables fondamentaux pour l'intĂ©gration dans son État d'une population Ă©trangĂšre». En engageant ses soldats contre les troupes placĂ©es auparavant au service des Habsbourg, les autoritĂ©s badoises entamaient une vraie lutte fratricide. Il suffit de dire que le Brisgau avait longtemps servi l'Autriche et que dans les milieux intellectuels oĂč les Ă©changes universitaires entre professeurs et Ă©tudiants Ă©taient nombreux aussi bien que dans tous les autres milieux de la sociĂ©tĂ© fribourgeoise, l'on avait assistĂ© Ă  bien des mariages entre Brisgoviens et Viennois. Toutefois, il est important de souligner ici que l'isolement gĂ©ographique de l'avant-poste de l'Autriche antĂ©rieure avait progressivement contribuĂ© Ă  ce que le Brisgau avait en fin de compte une vision erronĂ©e de la vraie situation politique de la capitale viennoise envers ses anciens territoires des Vorlande». Nous verrons bientĂŽt jusqu'Ă  quel point Fribourg vivait dans un monde de rĂȘves, escomptant un impossible retour Ă  la couronne autrichienne. Mais auparavant il me semble nĂ©cessaire de mettre l'accent sur le fait que l'Autriche avait bien d'autres problĂšmes plus importants Ă  rĂ©soudre que celui du Brisgau au cours du Vormarz ». Au dĂ©but du XIXe siĂšcle, sur le plan Ă©conomique, alors que le blocus continental venait d'ĂȘtre Ă©tabli, lors des guerres napolĂ©oniennes, François d'Autriche se vit dans l'obligation de chercher Ă  introduire par des voies autres que celles des avant-postes situĂ©s du cĂŽtĂ© occidental les matiĂšres premiĂšres dont son État avait le plus besoin. Il dĂ©tourna alors ses regards du Brisgau pour favoriser la conjoncture Ă©conomique d'autres États situĂ©s Ă  l'est du pays, la Hongrie pour ne citer ici qu'un exemple. Elle entreprit alors une politique d'expansion vers le Danube, sur lequel elle fit le transport et le commerce de produits orientaux tels que le cafĂ©, l'huile, les Ă©pices et le coton 19. 19. Voir HUNYADI, durant l'annĂ©e et 500 %> au cours du mois de juin. L'annĂ©e 1652 est la plus perturbĂ©e, les registres sont tenus de façon confuse et cumule la famine, la maladie et la guerre qui ravage les campagnes. Relativement peu de personnes meurent Ă  l'hĂŽtel-Dieu. La proportion est de 132 %>, ce qui est trois fois plus environ que pour l'ensemble de la population française mais nettement moins qu'Ă  l'hĂŽtel-Dieu de Provins, comparable sur de nombreux points Ă  celui de Meaux, 164 %> Ă  la fin du xvir siĂšcle 9. Plus remarquable est la diminution de la mortalitĂ©, alors que le nombre moyen des entrĂ©es augmente 166 °/ro au cours de la pĂ©riode 1628-1655 et 105 °/oe au cours de la pĂ©riode 1716-1761, tandis qu'Ă  Provins la mortalitĂ© stagne pratiquement de la fin du xviF Ă  la fin du xviir siĂšcle 164 et 159 %o. L'effort entrepris Ă  Meaux pour amĂ©liorer l'hygiĂšne et le confort l'installation d'une apothicairie et de l'eau courante vers 1720, le remplacement des lits en bois par des lits en fer Ă  partir de 1750, la bonne 8. Ibidem. 9. Meaux et Provins sont deux villes de mĂȘme taille, situĂ©es dans des rĂ©gions cĂ©rĂ©aliĂšres et proches d'une cinquantaine de kilomĂštres. HUBER R., La population de Provins, 1540-1792 », Revue d'histoire et d'archĂ©ologie de l'arrondissement de Provins, n° 127, 1973. MARTIN F., PERROT F., article citĂ©. LES POPULATIONS DE L'HÔTEL-DIEU DE MEAUX, FIN XVII' S. 473 rĂ©putation dont jouit l'Ă©tablissement en matiĂšre d'obstĂ©trique dĂšs avant les annĂ©es 1760 trouve ainsi sa rĂ©compense 10. La rĂ©partition des entrĂ©es cumulĂ©es par mois montre un profil particulier. Juin est le mois des plus faibles entrĂ©es 5,7 % des entrĂ©es annuelles, aoĂ»t est le mois des plus fortes entrĂ©es 13,1 °/o des entrĂ©es annuelles. Le minimum se situe pendant les travaux des champs, le maximum aprĂšs. La pĂ©riode de la soudure n'est pas, sauf exception synonyme de crise, une pĂ©riode de fortes entrĂ©es. Cette relation entre la rĂ©partition des entrĂ©es et le rythme des travaux des champs s'accentue au cours des xvir et xviiF siĂšcles. Le creux de juin et juillet montre que les travaux des champs sont la principale source de travail ; les entrĂ©es se gonflent brusquement dĂšs le mois d'aoĂ»t et diminuent ensuite rĂ©guliĂšrement pour se stabiliser de novembre jusqu'au printemps, avant de chuter en juin. A la fin du xvir siĂšcle, les moissons s'achĂšvent aprĂšs le 15 aoĂ»t en 1697, annĂ©e fraĂźche, elles se dĂ©roulent du 15 aoĂ»t au 8 septembre Ă  Varredes, village proche de Meaux, et en 1694 comme en 1706, annĂ©es sĂšches et bonnes, elles sont achevĂ©es le 15 aoĂ»tu. Les dĂ©cĂšs sont Ă©galement les plus faibles pendant la soudure, illustrant Ă  nouveau la richesse et la bonne gestion de l'Ă©tablissement ; les maximums sont en hiver. Quand HiĂŽ tel-Dieu reçoit en une annĂ©e personnes en 1694 ou 158 en 1686, la population n'est plus la mĂȘme la couche de population touchĂ©e s'Ă©largit, en temps de crise, des groupes les plus pauvres vers d'autres moins dĂ©favorisĂ©s d'habitude. De mĂȘme, quand 273 personnes sont reçues en 1687 et 295 en 1695, dans quelle mesure ces deux groupes sont-ils comparables, le second Ă©tant composĂ© des rescapĂ©s de la crise de 16931694 ? La clientĂšle de l'Ă©tablissement connaĂźt des changements. Entre le dĂ©but du xvir siĂšcle et la fin du xvnr, compte tenu notamment de la conjoncture, sur un terme long des Ă©volutions se dessinent. C'est pour mettre en valeur cette double Ă©volution que certaines annĂ©es ont Ă©tĂ© plus particuliĂšrement Ă©tudiĂ©es 1687, 1689, 1693, 1694, 1695 forment un cycle ; partant d'annĂ©es calmes, l'Ă©tude des consĂ©quences d'une crise sur la population assistĂ©e est possible. En contrepoint, l'annĂ©e 1628, la plus ancienne et la plus lisible n, et l'annĂ©e 1702, moment calme du dĂ©but du xvnr siĂšcle et seule annĂ©e oĂč l'Ă©tat matrimonial a Ă©tĂ© systĂ©matiquement enregistrĂ©, permettent de dĂ©crire ces populations sur trois quarts de siĂšcle. Les personnes reçues Ă  lliĂŽtel-Dieu reflĂštent bien la façon dont la population rĂ©agit aux difficultĂ©s du temps dans la mesure oĂč l'assistance dispensĂ©e par l'Ă©tablissement est sans exclusive. D'aprĂšs les statuts, seuls les malades contagieux doivent ĂȘtre refusĂ©s, et encore cela n'est-il pas toujours observĂ©. Il n'y a pas de critĂšre gĂ©ographique d'entrĂ©e, le nombre de places est illimitĂ© si la capacitĂ© d'accueil est d'environ cent personnes, celle-ci est souvent dĂ©passĂ©e et jamais personne n'a Ă©tĂ© refusĂ©, l'assistance 10. LALLEMAND L., Histoire de la charitĂ©, t. IV, Les temps modernes, Paris, 1910-1912. 11. DESBORDES La chronique villageoise de Varredes, Seine-et-Marne. Un document sur la vie rurale des XVIIe et XVIIIe siĂšcles, Paris, sans date. 12. Les bas de pages des registres des annĂ©es 1626 et 1627 sont dĂ©tĂ©riorĂ©s. De plus de 1626 Ă  1630, les descriptions des vĂȘtements portĂ©s par les pauvres sont prĂ©cises et systĂ©matiques. 474 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE est immĂ©diate pour celui qui se prĂ©sente Ă  la porte et la rĂ©ception est pleine d'attention toilette, vĂȘtements propres, nourriture abondante, secours religieux... L'hĂŽtel-Dieu de Meaux pĂ©rennise la tradition mĂ©diĂ©vale de la charitĂ©. De son cĂŽtĂ©, l'hĂŽpital gĂ©nĂ©ral, fondĂ© en 1667, n'accueille que les pauvres habitant Meaux depuis trois ans et le nombre de places est limitĂ© Ă  cent ou cent cinquante personnes, suivant les possibilitĂ©s de gestion. Surtout, pour ĂȘtre acceptĂ©, il faut suivre une procĂ©dure administrative demande d'admission, financement du sĂ©jour..., ĂȘtre vivement recommandĂ© par une personnalitĂ© et, le plus souvent, le dĂ©lai d'admission est de plusieurs mois au moins. II. — DÉFINITION DES TROIS POPULATIONS Dans les registres d'entrĂ©es, le religieux chargĂ© de l'admission Ă  l'hĂŽtelDieu note l'origine gĂ©ographique de l'arrivant en inscrivant le plus souvent 80 % des cas un nom de paroisse et de diocĂšse. Il est presque certain qu'on dĂ©signe ici le lieu de baptĂȘme et non de rĂ©sidence. On ne sait donc pas, surtout pour ceux qui ne sont pas originaires de la rĂ©gion meldoise, par quels dĂ©tours ils sont arrivĂ©s Ă  rhĂŽtel-Dieu. En 1628, 70 % des personnes reçues viennent d'au-delĂ  du diocĂšse de Meaux ; 50 °/o Ă  la fin du xvir siĂšcle, mais 30 % seulement en 1693-1694. Durant cette crise, l'hĂŽtelDieu secourt davantage de gens stables originaires de la ville de Meaux ou des paroisses rurales du diocĂšse. En fonction de l'origine gĂ©ographique des gens reçus, on peut donc distinguer trois populations venant de la ville mĂȘme, des paroisses rurales du diocĂšse — deux populations stables — ou de diocĂšses plus lointains — population instable. Cette origine, la stabilitĂ© ou l'instabilitĂ© dĂ©finissent des besoins d'assistance de natures diffĂ©rentes. Les comportements de chacune, leurs composantes dĂ©mographiques sont distincts. a Les urbains la population meldoise. Pendant les sept annĂ©es Ă©tudiĂ©es plus Ă  fond Ă  titre d'Ă©chantillon 1628, 1687, 1689, 1693, 1694, 1695, 1702, 661 personnes dĂ©clarent ĂȘtre originaires de la ville de Meaux. C'est un peu plus de 20 % des malades reçus en moyenne, tandis qu'ils sont moins de 12 % en 1628 et 37 % en 1695, au lendemain de la crise, annĂ©e de faibles entrĂ©es. Saint-Nicolas, la plus grande paroisse de Meaux, fournit Ă  elle seule un tiers des malades de la ville. b Les ruraux la population rurale du diocĂšse de Meaux. En pĂ©riode normale, les ruraux n'excĂšdent pas le quart des malades prĂ©sents Ă  l'hĂŽtel-Dieu. Ils arrivent d'une des paroisses du diocĂšse, petits villages ou petits bourgs qui gravitent dans la sphĂšre d'influence de la capitale diocĂ©saine. De Chauconin, Villenoy, Varredes, Penchard, Dammartin, Coulommiers ou d'ailleurs, c'est un recrutement de proximitĂ©, une LES POPULATIONS DE L'HÔTEL-DIEU DE MEAUX, FIN XVII' S. 475 population sous influence » qui peut aussi s'adresser aux petits Ă©tablissements locaux disposant de quelques lits. La proportion des ruraux croĂźt considĂ©rablement pendant la crise frumentaire de 1693-1694. Leur nombre est multipliĂ© par plus de 6 par rapport aux annĂ©es normales, tandis que la population totale n'augmente que de trois Ă  quatre fois. La crise Ă©conomique oblige surtout les ruraux proches de la ville Ă  recourir au systĂšme d'assistance urbain. La banlieue » de Meaux, lieu de production cĂ©rĂ©aliĂšre, secrĂšte plus d'assistĂ©s que la ville mĂȘme, comme si les paysans ne pouvaient profiter des fruits de leur travail et de leur rĂ©colte accaparĂ©s trĂšs tĂŽt par les nĂ©gociants. Les populations urbaines bĂ©nĂ©ficient du flux des cĂ©rĂ©ales qui se dirigent des campagnes vers les villes mĂȘme en pĂ©riode de famine, parce que le pouvoir d'achat urbain est globalement plus Ă©levĂ©, parce que les circuits de distribution contraignants privilĂ©gient la ville consommatrice aux dĂ©pens de la campagne productrice. Les paysans producteurs de grains, travailleurs de la terre, ne possĂšdent pas assez d'argent pour acheter des cĂ©rĂ©ales au prix fort ils sombrent dans la misĂšre et affluent trĂšs tĂŽt Ă  l'hĂŽtel-Dieu. Le mois d'aoĂ»t 1693 marque une rupture trĂšs nette on passe d'une moyenne de 30 Ă  40 entrĂ©es par mois Ă  une moyenne de 80 Ă  100. Brusquement les entrĂ©es sont multipliĂ©es par plus de deux. La disette ne s'installe pas progressivement mais dĂšs la rĂ©colte achevĂ©e, les stocks constituĂ©s et les prix fixĂ©s sur les marchĂ©s. Ce n'est pas le manque effectif de grains qui crĂ©e la disette, mais le manque supposĂ© Ă  venir en fonction de la faible rĂ©colte qui fait monter les prix considĂ©rablement. Les petits travailleurs salariĂ©s de la terre, dont beaucoup n'ont peut-ĂȘtre pas trouvĂ© d'emploi pour la moisson du fait du peu de grains Ă  rĂ©colter, sont les premiĂšres victimes de la chertĂ©. Le divorce entre la production et la consommation est total. On ne consomme pas dans les campagnes les fruits que l'on rĂ©colte, on ne peut consommer que l'Ă©quivalent de la rĂ©munĂ©ration du travail. Cette rĂ©munĂ©ration est d'autant plus faible que la rĂ©colte est peu abondante 13. Cet afflux des ruraux meldois confirme la gĂ©nĂ©ralisation de l'Ă©conomie de marchĂ© dans cette partie du Bassin Parisien aux dĂ©pens de l'Ă©conomie de subsistance et la suprĂ©matie du pouvoir d'achat des villes. La demande solvable oriente les flux marchands et consacre la domination de la ville sur la campagne, du centre sur la pĂ©riphĂ©rie, ce qui rappelle Ă©tonnamment la situation qui prĂ©vaut actuellement au plan mondial pour certains produits. L'hĂŽtel-Dieu, par l'Ă©tendue et la dispersion de ses biens fonciers, Ă©chappe Ă  cette hausse des prix pour ses revenus en nature et diminue ses risques de mauvaises rĂ©coltes, celles-ci Ă©tant souvent trĂšs localisĂ©es. Par contre, il participe au prĂ©lĂšvement des richesses sur la campagne, qu'il redistribue en ville. 13. MEUVEET J., Le problĂšme des subsistances Ă  l'Ă©poque de Louis XIV, Paris, 1977, p. 179-180. 476 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE c Les migrants la population non originaire du diocĂšse de Meaux. Les sources hospitaliĂšres sont muettes sur les causes des migrations. L'errance comme vie ou comme moyen de survie, c'est ce qui rassemble tous ceux qui ne sont pas nĂ©s au pays meldois. Si dans l'ensemble ils reprĂ©sentent 45 % des entrĂ©es, ils sont 71 % en 1628 et un tiers durant la crise de 1693-1694, et un peu plus de 50 % en 1702. Leur proportion est plus faible pendant la crise, mĂȘme si leur nombre s'accroĂźt. Cette population semble moins affectĂ©e par celle-ci, Ă  moins que les perspectives de mauvaises rĂ©coltes ne limitent les dĂ©placements vers le grenier Ă  blĂ© de la capitale. Ces Ă©trangers au diocĂšse de Meaux viennent surtout des rĂ©gions limitrophes. La rĂ©gion d'Ile-de-France avec les Ă©vĂȘchĂ©s de Paris, Senlis, Sens et Chartres reprĂ©sente environ 8 % de l'ensemble des gens reçus durant les annĂ©es 1687, 1689, 1693, 1694, 1695, dont plus de 5 % pour le seul diocĂšse de Paris. La Champagne, toute proche, reprĂ©sente plus de 5 % des arrivĂ©es. La Marne qui passe Ă  Meaux fait de cette ville une halte apprĂ©ciĂ©e sur la route de Paris. Plus de 8 % des personnes viennent de Picardie, les zones les plus au sud diocĂšse de Soissons Ă©tant les plus reprĂ©sentĂ©es. La rĂ©gion de Beauvais est Ă©galement bien prĂ©sente, sans ĂȘtre au contact direct de la rĂ©gion meldoise, les voies de communication de Beauvais Ă  Paris passant Ă  l'ouest de Meaux. Le nombre significatif de personnes venant du nord et de l'est du Bassin Parisien Senlis, Beauvais, Laon, Noyon souligne l'influence de l'hĂŽtel-Dieu dans cette zone, tandis que l'ouest et le sud ne sont pas si sensibles Ă  cette influence. Le trĂšs gros Ă©vĂȘchĂ© de Sens, au sud de celui de Meaux, fournit deux fois moins de malades que celui de Soissons ou mĂȘme celui de Beauvais. Les Normands Ă©galement sont bien reprĂ©sentĂ©s, prĂšs de 3 % du total Ă  la fin du xvir* siĂšcle la Normandie, c'est surtout le diocĂšse de Rouen, le plus au nord de la rĂ©gion, jouxtant les limites occidentales de la Picardie. Un axe nord-ouest - sud-est est assez sensible, allant de Rouen Ă  Meaux en passant par les rĂ©gions de Beauvais et de Senlis les Ă©vĂȘchĂ©s parmi les mieux reprĂ©sentĂ©s s'y trouvent. Le rĂŽle de Paris apparaĂźt clairement dans l'ensemble des flux migratoires. Toutes les rĂ©gions situĂ©es au-delĂ  de Paris par rapport Ă  Meaux sont peu prĂ©sentes Ă  l'hĂŽtel-Dieu. C'est sur la capitale que se concentrent les flux rĂ©guliers ou diffus. La comparaison entre les populations reçues dans les hĂŽtels-Dieu de Meaux et de Provins Ă  la mĂȘme Ă©poque l'atteste. A Provins, les gens arrivent surtout du sud de Paris les rĂ©gions traditionnelles d'Ă©migration du sud de la Loire Limousin, Auvergne, Savoie, y sont toujours mieux reprĂ©sentĂ©es, tandis que Meaux rassemble des gens venus du nord essentiellement. C'est ainsi que la Champagne est pratiquement coupĂ©e en deux. A Provins, prĂšs de 20 % de la population dĂ©clare ĂȘtre nĂ©e en Champagne. Sur les Champenois, 392 viennent du Bassigny, rĂ©gion la plus Ă©loignĂ©e Ă  l'est de Provins. Presque tous les autres viennent du sud de la Champagne et des environs de Troyes. Les rĂ©gions septentrionales n'envoient que quelques individus. Or, Ă  Meaux, c'est LES POPULATIONS DE L'HÔTEL-DIEU DE MEAUX, FIN XVIIe S. 477 l'inverse 70 % des Champenois sont originaires du nord, des diocĂšses de Reims et de ChĂąlons-sur-Marne, et 30 % du sud, des diocĂšses de Langres et de Troyes. Cette rĂ©partition de la Champagne en deux sous-ensembles reprĂ©sentĂ©s de façon inverse Ă  Meaux et Ă  Provins marque l'existence de deux routes de migrations de la Champagne vers Paris. L'une suit la vallĂ©e de la Marne par Meaux et l'autre longe en partie la vallĂ©e de la Seine et traverse Provins 14. Paris joue donc un rĂŽle attractif certain pour toute la France, ce que montre l'exemple ci-dessus et la croissance de la ville Ă  cette Ă©poque. Mais l'attrait de la capitale n'est pas la seule cause des migrations. La Brie est elle-mĂȘme une zone d'immigration temporaire Ă  l'Ă©poque des moissons le recrutement des travailleurs de la terre pour la rĂ©gion meldoise s'Ă©tend sur le quart nord-est de la France et se prolonge vers la Normandie. Ce recrutement des saisonniers est donc sĂ©lectif. Des appariements se dessinent entre certaines rĂ©gions d'envoi et certaines rĂ©gions d'accueil qui entretiennent des rapports commerciaux » rĂ©guliers de main-d'oeuvre. Ce sont presque toujours les mĂȘmes rĂ©gions d'exportation qui enverraient leurs travailleurs vers les mĂȘmes rĂ©gions d'importation. Des liens se sont ainsi créés, ne serait-ce que par la rĂ©gularitĂ© des cycles agraires. Ceci est certain pour les relations entre la Brie et la Champagne comme la comparaison entre Meaux et Provins l'a montrĂ©e, la Champagne est un rĂ©servoir de main-d'oeuvre pour la Brie, mais qu'en est-il pour la Picardie ? C'est une rĂ©gion de cĂ©rĂ©aliculture avec de gros besoins en main-d'oeuvre, or les Picards migrent rĂ©guliĂšrement en Brie. Peut-on dĂ©celer, Ă  ce propos, l'amorce d'une distinction qui s'est accentuĂ©e au xviF siĂšcle entre les deux rĂ©gions ? Le travail des moissonneurs en Brie se pratiquait Ă  la faucille et nĂ©cessitait une abondante main-d'oeuvre rĂ©quisitionnĂ©e Ă  cet effet. C'est par la Picardie au contact de la Flandre que s'introduit l'usage de la faux, en France, au xviir siĂšcle. Jean MeuvretI 5 signale cette modification technique fondamentale car elle diminue considĂ©rablement les besoins de main-d'oeuvre. La faux n'est-elle pas introduite dĂšs la fin du xvir siĂšcle en Picardie, libĂ©rant une partie des travailleurs locaux et les rendant disponibles pour l'Ă©migration vers la Brie ? On remarque aussi que les trĂšs nombreux saisonniers venus de l'Yonne vers la Brie, Ă  la fin du xviiF siĂšcle, en sont absents un siĂšcle plus tĂŽt 16. Le schĂ©ma gĂ©nĂ©ral est donc le suivant Ă  l'hĂŽtel-Dieu, on rencontre une forte reprĂ©sentation de population rĂ©gionale urbaine ou rurale dont la part varie en fonction des accidents conjoncturels, une prĂ©sence marquĂ©e des rĂ©gions limitrophes de Meaux, surtout du nord et de l'est, et une faible reprĂ©sentation des rĂ©gions situĂ©es au-delĂ  de Paris sud et ouest. Cette carte des origines gĂ©ographiques a changĂ© au cours du siĂšcle les populations Ă©trangĂšres au diocĂšse Ă©taient largement majoritaires en 1628, leur part diminue Ă  l'avantage des populations stables qui consti14. consti14. C, article citĂ©. 15. MEUVRET J., op. cit., p. 181. 16. CHÂTELAIN A., Les migrants temporaires en France de 1800 Ă  1914. Histoire Ă©conomique et sociale des migrants temporaires des campagnes françaises au XIXe siĂšcle et dĂ©but du XXe siĂšcle, UniversitĂ© Lille III, 1977, p. 1 et suivantes. 478 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE tuent, surtout pendant la pĂ©riode la plus aiguĂ« de la crise, la majoritĂ© des pauvres accueillis Ă  la fin du XVIIe siĂšcle. d La coupure de l'Ă©tĂ© les entrĂ©es selon les mois et les origines gĂ©ographiques. Les pauvres n'entrent pas Ă  l'hĂŽtel-Dieu selon le mĂȘme rythme. Les trois populations ne frĂ©quentent pas l'Ă©tablissement avec la mĂȘme intensitĂ© selon les pĂ©riodes de l'annĂ©e. Pourtant une similitude est frappante la pĂ©riode du dĂ©but de l'Ă©tĂ© marque le moment de la plus faible frĂ©quentation, juin et juillet sont des mois creux; cela se vĂ©rifie sur l'ensemble de l'annĂ©e et pour les trois populations. Autre similitude la remontĂ©e trĂšs brutale des entrĂ©es dĂšs le mois d'aoĂ»t. L'Ă©tĂ© est donc coupĂ© en deux une saison de faibles entrĂ©es et une pĂ©riode de fortes entrĂ©es. Cela a Ă©tĂ© soulignĂ©, la saison des travaux des champs est celle des plus faibles entrĂ©es Ă  l'hĂŽtel-Dieu. Ceci est vrai pour la population rurale comme pour la population urbaine, bien qu'Ă  un degrĂ© moindre. En aoĂ»t et septembre, par contre, les entrĂ©es augmentent une fois les bras libĂ©rĂ©s du travail; le mouvement d'affluence est net surtout pour les Ă©trangers au diocĂšse qui frĂ©quentent l'Ă©tablissement plus qu'Ă  tout autre moment. L'effort fourni par les moissonneurs dans des conditions souvent difficiles se solde par de grandes fatigues, l'hĂŽtel-Dieu offre alors une halte apprĂ©ciĂ©e. La maison est ouverte, la nourriture satisfaisante et l'administration peu regardante sur les motifs des entrĂ©es. Les entrĂ©es de la population sont donc ainsi rythmĂ©es. Pendant l'hiver, elles se situent prĂšs de la moyenne, elles diminuent pendant le printemps pour chuter en juin et juillet. La remontĂ©e en aoĂ»t est brutale puis la courbe rejoint progressivement la normale Ă  la fin de l'automne. Il en va diffĂ©remment pour les personnes originaires du diocĂšse le maximum d'entrĂ©es se situe en hiver. Les urbains arrivent autant en hiver qu'au printemps, tandis que les ruraux se rĂ©partissent diffĂ©remment creux du dĂ©but de l'Ă©tĂ©, trĂšs forte hausse dĂšs aoĂ»t et septembre, diminution puis Ă  nouveau fortes entrĂ©es en hiver. Leur rythme d'entrĂ©e associe leur origine rurale et le fait qu'ils sont domiciliĂ©s dans la zone d'influence directe de l'Ă©tablissement. Lors de la crise, seulement le printemps est une pĂ©riode de fortes entrĂ©es pour tous. Les entrĂ©es des citadins ont Ă©tĂ© fortes dĂšs septembre 1693, quelques semaines aprĂšs la rĂ©colte, les plus pauvres se sont rĂ©fugiĂ©s trĂšs tĂŽt Ă  l'hĂŽtel-Dieu. La population rurale a subi le choc avec un certain dĂ©calage, les fortes entrĂ©es se produisent en octobre. Pour les Ă©trangers au diocĂšse, le moment crucial se prĂ©sente au printemps 1694. Pendant la crise, les trois populations prĂ©sentent des rĂ©actions diffĂ©rentes, traduites par des variations dans leur frĂ©quentation de l'hĂŽtel-Dieu. III. — DÉMOGRAPHIE DES TROIS POPULATIONS a La mortalitĂ©. Face Ă  la mort, les trois populations rĂ©agissent diffĂ©remment. La plus touchĂ©e est la population rurale du diocĂšse qui fournit 40 % des personnes LES POPULATIONS DE L'HÔTEL-DIEU DE MEAUX, FIN XVII' S. 479 dĂ©cĂ©dĂ©es Ă  l'hĂŽtel-Dieu pour 32 % des entrĂ©es au cours des sept annĂ©es Ă©tudiĂ©es. La population Ă©trangĂšre au diocĂšse prĂ©sente deux pourcentages trĂšs proches 42 % des dĂ©cĂšs et 45 % des entrĂ©es. Les citadins sont les plus Ă©pargnĂ©s respectivement 18 et 23 %. Pour cinq annĂ©es la population rurale dĂ©tient le record de mortalitĂ©. Elle est dĂ©passĂ©e en 1628 par les urbains et les Ă©trangers, et en 1689 par les Ă©trangers seuls. En pĂ©riode normale, les citadins sont plus affectĂ©s que les Ă©trangers Ă  cause de la structure par Ăąge de leur population ils sont en moyenne plus vieux. Quand on Ă©limine la mortalitĂ© due Ă  la crise, la population Ă©trangĂšre meurt moins Ă  l'hĂŽtel-Dieu 114 °/oo que les urbains de Meaux 134 %o» et surtout moins que les ruraux du diocĂšse 213 %»‹ Mais dĂšs que les difficultĂ©s surviennent, ces mĂȘmes citadins sont mieux protĂ©gĂ©s. De juillet 1693 Ă  juin 1694, la mortalitĂ© des trois populations passe respectivement Ă  262 %o, 227 %i et 318 %> ; les plus atteints restent toujours les travailleurs de la terre domiciliĂ©s Ă  proximitĂ© immĂ©diate de la ville. b Hommes et femmes. La population reçue est largement masculine plus de 80 % d'hommes en 1628, mais toujours plus de 40 % de femmes Ă  partir de 1693. Pendant les pĂ©riodes difficiles, les femmes frĂ©quentent davantage l'hĂŽtel-Dieu et au plus fort de la crise de 1693-1694, durant les mois de mai et de juillet 1694, il entre plus de femmes que d'hommes. Du point de vue de la rĂ©partition entre les sexes, les trois populations offrent des originalitĂ©s. Ce sont en fait trois ensembles diffĂ©rents. Les femmes reprĂ©sentent 55 % de la population originaire de Meaux, 44 % des ruraux et 21 % des voyageurs venus d'origines plus lointaines. Si les femmes sont largement majoritaires dans la population meldoise, est-ce parce que l'Ă©tablissement accepte les femmes enceintes ? En fait les accouchements et les actes de baptĂȘmes sont rares, mais de nombreuses mĂšres accompagnent leurs enfants en bas Ăąge. La population rurale Ă©volue avant la crise de 1693-1694, elle est surtout masculine, aprĂšs les femmes sont plus nombreuses 1695-1702. La composition des deux populations stables se rapproche. Les hommes restent toujours majoritaires dans la population migrante, mĂȘme si les femmes atteignent 40 % de l'effectif pendant les mois difficiles de janvier Ă  mai 1694. Ce grand nombre de femmes rĂ©duites Ă  l'errance est la mesure de la profondeur de la blessure de la crise dans le tissu social. Leur rĂ©sistance est plus grande jusqu'Ă  un certain point au-delĂ  duquel le comportement fĂ©minin s'identifie au comportement masculin. Elles arrivent Ă  l'hĂŽtel-Dieu quand il n'y a plus de nourriture, de ressources, de mari ni d'espoir Ă  l'extĂ©rieur elles y sont plus dĂ©racinĂ©es que les hommes. c Les Ăąges. La tendance Ă  arrondir les Ăąges est trĂšs nette et les tranches multiples de 5 ou 10 sont toujours plus fournies que les autres. C'est une population jeune le groupe des 13 - 32 ans compose environ 480 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE 50 % de l'ensemble et les personnes ĂągĂ©es de 48 ans et plus 21 % seulement. Les jeunes sont plus souvent des hommes et la moyenne d'Ăąge des femmes est plus Ă©levĂ©e de 13 Ă  27 ans, 70 % des malades sont des hommes. Les pyramides des Ăąges des populations urbaines et rurales sont presque identiques, ce qui souligne le poids de l'Ă©tablissement sur le rĂ©seau d'assistance locale. Mais la population d'origine lointaine est beaucoup plus jeune. La tranche d'Ăąge des 13-32 ans reprĂ©sente chez les urbains, les ruraux et les Ă©trangers respectivement 44,1 %, 46,8 % et 59,7 % ; de leur cĂŽtĂ©, les plus de 48 ans sont 24,4 %, 24,4 /o et 16,8 %. La population d'origine meldoise est normalement rĂ©partie selon les tranches d'Ăąges seuls les petits enfants sont sous-reprĂ©sentĂ©s, les migrants sont surtout des jeunes actifs et la population rurale est un cas intermĂ©diaire nĂ©anmoins trĂšs proche des urbains. La crise provoque une modification de la pyramide elle est prĂ©cĂ©dĂ©e d'une forte poussĂ©e des jeunes les 8-27 ans sont 53 % de 1689 Ă  1693-1694, puis 48 % en 1695 et 31 % en 1702. C'est Ă  la faveur de la crise que ces jeunes trouvent une place dans la sociĂ©tĂ©, ce qui leur permet d'avoir moins recours Ă  l'assistance. La part des plus de 28 ans augmente alors Ă  l'hĂŽtel-Dieu 12 % de 28-37 ans jusqu'en 1693-1694, 18 % ensuite. d L'Ă©tat matrimonial. Cette information est, en gĂ©nĂ©ral, trĂšs rare et ne permet que de confirmer certaines observations. Pendant la crise de 1693-1694, il entre plus de femmes mariĂ©es 41 % que de veuves 31 %, tĂ©moignage de la perturbation des familles. Seule l'annĂ©e 1702 permet une Ă©tude complĂšte, l'Ă©tat matrimonial Ă©tant indiquĂ© avec soin pour chacun. La forte proportion des cĂ©libataires 60 % des hommes et 50 % des femmes reflĂšte bien la jeunesse de la population. Il y a pourtant parmi les Ă©trangers au diocĂšse 12 % de cĂ©libataires de plus de 30 ans. Deux fois plus de veuves que de veufs, c'est une constante des documents dĂ©mographiques d'Ancien RĂ©gime 17. La solitude est un critĂšre d'entrĂ©e, d'autant que parmi les gens mariĂ©s aucun couple ne se prĂ©sente. Les trois populations sont trĂšs semblables. Les cĂ©libataires sont toujours les plus nombreux pour les Meldois, les ruraux et les Ă©trangers 52 %, 51,6 %, 57 % et les veufs les moins nombreux respectivement 19 %, 20,8 %, 14,1 %. L'importance des gens mariĂ©s respectivement 28,5 %, 27,4 %, 28,3 %, dans la mesure oĂč l'information est exacte souligne, surtout pour les gens venus de loin, que cette qualitĂ© n'exclut pas les grands dĂ©placements. Faute de connaĂźtre l'origine gĂ©ographique des conjoints, on ne sait s'il faut nuancer l'endogamie villageoise si souvent remarquĂ©e ou seulement noter que plus du quart des personnes entreprenant de longs voyages sont mariĂ©es, attirĂ©es par la grande ville voisine ou par une zone rurale pourvoyeuse d'emploi. 17. GOUBERT P., provinciaux aux XVII' siĂšcle, Paris, 1977, p. 59. LES POPULATIONS DE L'HÔTEL-DIEU DE ME AUX, FIN XVII' S. 481 CONCLUSION Cette Ă©tude a permis d'identifier trois populations aux caractĂšres trĂšs diffĂ©rents qui appartiennent — faut-il le souligner — au monde de la pauvretĂ©. Une population urbaine domiciliĂ©e Ă  proximitĂ© directe de l'hĂŽtel-Dieu. Sa rĂ©partition par Ăąge est assez conforme Ă  une population normale, les femmes Ă©tant plus nombreuses que les hommes. La frĂ©quence de ses entrĂ©es au cours de l'annĂ©e n'est pas directement dĂ©pendante du cycle des travaux des champs, mĂȘme si la frĂ©quentation diminue pendant l'Ă©tĂ©. Sa rĂ©action Ă  la crise est nettement liĂ©e Ă  son pouvoir d'achat trĂšs faible. Une population rurale domiciliĂ©e dans le diocĂšse de Meaux. Les hommes sont lĂ©gĂšrement plus nombreux que les femmes ; les jeunes sont les mieux reprĂ©sentĂ©s, mĂȘme si les vieux ne sont pas nĂ©gligeables. Ces ruraux subissent la crise de la façon la plus violente leurs entrĂ©es et leur mortalitĂ© s'accroissent fortement Ă  ce moment. Une partie rĂ©agit Ă  la crise comme les urbains en se dirigeant assez tĂŽt Ă  l'hĂŽtel-Dieu septembre, octobre, mais c'est surtout pendant le printemps que leur afflux est massif. L'Ă©tablissement est leur seul recours. Les Ă©trangers au diocĂšse sont le plus souvent Ă  la recherche de travail. Le meilleur de leurs reprĂ©sentants est un jeune d'une vingtaine d'annĂ©es, cĂ©libataire, travaillant en Brie en juin, juillet et dĂ©but aoĂ»t. Il vient ensuite Ă  l'hĂŽtel-Dieu refaire ses forces avant de reprendre la route. Mais il y a aussi quelques cĂ©libataires ĂągĂ©s et des gens mariĂ©s venus seuls. Leur frĂ©quentation de l'Ă©tablissement n'est pas trĂšs diffĂ©rente en pĂ©riode de crise en pĂ©riode normale. La double fonction de l'hĂŽtel-Dieu apparaĂźt donc clairement. Il est le lieu privilĂ©giĂ© de distribution de soins mĂ©dicaux » pour la population demeurant aux alentours, mais il n'est qu'un des Ă©lĂ©ments du rĂ©seau d'assistance pour la population migrante qui se dĂ©place d'un tel Ă©tablissement Ă  un autre. François MARTIN et François PERROT. LE PEUPLE ARYEN », VU PAR LE COMMISSARIAT GÉNÉRAL AUX QUESTIONS JUIVES Durant les quatre annĂ©es que s'est maintenu le Gouvernement de Vichy, le terme aryen » fut considĂ©rĂ© comme l'antonyme de l'expression race juive». Telles Ă©taient les expressions utilisĂ©es par l'antisĂ©mitisme raciste. En juillet 1940 la dĂ©faite portait les antisĂ©mites français au pouvoir »*, Ă©crit Henri Michel. Ce pouvoir, en effet, pratiquait une politique antisĂ©mite. Cependant, le gouvernement n'Ă©tait en fait ni totalement indĂ©pendant ni uniforme dans son antisĂ©mitisme. L'Ă©tat de dĂ©pendance que les autoritĂ©s allemandes d'occupation exerçaient sur le Gouvernement de Vichy dĂ©passait sans doute les limites de la zone occupĂ©e », bien que cette dĂ©pendance ne soit pas pourtant totale, mĂȘme aprĂšs novembre 1942. La lĂ©gislation sur la question juive » et la direction de l'administration, de la Police nationale et du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives Ă©taient indiscutablement entre les mains du Gouvernement de Vichy. Bien que l'influence allemande se fasse constamment sentir, l'origine française de l'antisĂ©mitisme de Vichy est bien Ă©tablie 2. Par ailleurs, le caractĂšre de l'antisĂ©mitisme et l'influence allemande sont extrĂȘmement liĂ©s. A cĂŽtĂ© de l'antisĂ©mitisme traditionnel dit d'État », un autre plus extrĂ©miste, raciste et parfois opportuniste se dĂ©veloppait, se propageant tout particuliĂšrement Ă  Paris sous la poussĂ©e allemande et atteignait dĂ©jĂ  des organismes d'État tel que le Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives. Quels Ă©taient la composition et le rĂŽle politique de l'opinion publique pendant ces quatre annĂ©es de semi-indĂ©pendance 3 ? Contrairement Ă  une relativement large connaissance de la politique gouvernementale sous Vichy et l'occupation, on sait peu de choses de l'opinion publique en France. On Ă©prouve une difficultĂ© systĂ©matique Ă  dĂ©terminer ce qu'Ă©tait l'attitude des Français envers les Juifs ; en effet, tous les moyens d'expression habituels tels que partis politiques, journaux libres, littĂ©rature, radio, théùtre et cinĂ©ma indĂ©pendants, sondages d'opinion, font dĂ©faut. Le rĂ©gime autoritaire interdit toute possibilitĂ© 1. Henri MICHEL, Vichy annĂ©e 40, Paris, 1966, p. 141. 2. Joseph BnxiG, Le Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives 1940-1944, 3 vs, Paris 1955, 1957, 1960; Michael R. MARRUS, Robert O. PAXTON, Vichy et les Juifs, Paris, 1981. 3. Henri AMOUROUX, La grande histoire des Français sous l'occupation, Paris. PEUPLE ARYEN » ET LE COMMISSARIAT G' AUX QUESTIONS JUIVES 483 d'expression d'une opinion publique libre, bien qu'il s'y intĂ©ressĂąt attentivement, et que sa politique en fĂ»t influencĂ©e. Une quantitĂ© incroyable de lettres et de tĂ©lĂ©grammes interceptĂ©s ainsi que des Ă©coutes tĂ©lĂ©phoniques en sont le tĂ©moignage. Marrus et Paxton, dans leur livre, Vichy et les Juifs, utilisent les rapport des prĂ©fets pour Ă©tablir quelle Ă©tait l'opinion publique Ă  l'Ă©gard des Juifs. Ils arrivent Ă  la conclusion que pendant les deux premiĂšres annĂ©es de Vichy, une hostilitĂ© largement rĂ©pandue Ă  l'Ă©gard des Juifs, Ă  la fois authentique et propre au pays » se dĂ©veloppait. La plupart des rapports examinĂ©s de la zone non occupĂ©e font preuve des commentaires sur l'afflux des rĂ©fugiĂ©s juifs supplĂ©mentaires venus de la zone occupĂ©e, et sur l'hostilitĂ© prononcĂ©e que suscitent les nouveaux venus ». AprĂšs avoir dĂ©crit quelques protestations connues, telles celles du Pasteur Boegner, de RenĂ© Gillouin, de Paul Claudel et des premiers numĂ©ros de TĂ©moignage ChrĂ©tien clandestins, ils concluent Jusqu'aux rafles massives de l'Ă©tĂ© 1942, la dĂ©nonciation ouverte de l'antisĂ©mitisme de Vichy ne dĂ©passa guĂšre les quelques exemples que nous venons de citer. » En zone occupĂ©e, ils constatent que l'Ă©toile jaune provoqua la premiĂšre rĂ©sistance de quelque ampleur, ouverte et manifestĂ©e, Ă  la persĂ©cution anti-juive en France» 4. Ces quelques manifestations publiques ou plutĂŽt leur absence peuvent-elles tĂ©moigner de l'opinion publique ? Faute de preuves, il est difficile de soutenir le contraire, mais le doute subsiste. Dans un colloque organisĂ© par le Centre de Documentation Juive Contemporaine, tĂ©moins et chercheurs participants expriment des opinions semblables. Les choses ont changĂ© le jour oĂč on a vu ces Juifs avec des Ă©toiles », dit le tĂ©moin LĂ©o Hamon. L'ancien rĂ©sistant, Claude Bourdet, explique A l'Ă©poque, nous [les rĂ©sistants] n'avions pas le sentiment que les Juifs Ă©taient plus menacĂ©s que les autres ennemis du nazisme » 5. D'autres chercheurs qui divisent l'Ă©poque en deux pĂ©riodes distinctes dressent un tableau semblable. Jean-Marie Mayeur constate que, pour les Églises, le printemps de 1942 constitue un incontestable tournant ». Claude LĂ©vy va dans le mĂȘme sens, quoique en le nuançant quelque peu La RĂ©sistance non communiste est passĂ©e au cours de cette annĂ©e de 1942 d'une dĂ©sapprobation ... au souci d'aider Ă  soustraire les persĂ©cutĂ©s Ă  leurs persĂ©cuteurs » 6. Serge Klarsfeld analyse l'Ă©poque des rafles en zone non occupĂ©e en aoĂ»t 1942 A travers les rapports des prĂ©fets rĂ©gionaux et dĂ©partementaux, on relĂšve un mĂ©contentement Ă  peu prĂšs unanime des Français de zone libre. C'est grĂące Ă  ce mĂ©contentement, Ă©crit-il, renforcĂ© par les protestations des chefs des Églises, que Laval a modifiĂ© sa politique anti-juive qui s'est avĂ©rĂ©e impopulaire » 7. Sans pouvoir contester une quasi-unanimitĂ©, on ne peut pas Ă©viter de se demander quelle est l'origine de ces contestations si coordonnĂ©es et si 4. MARRUS, PAXTON, op. cit., pp. 169, 172, 193. 5. Georges WELLERS, AndrĂ© KASPI, Serge KLARSFELD eds., La France et la Question Juive 1940-1944, Actes du Colloque du Centre de Documentation Juive Contemporaine 10 au 12 mars 1979, Paris, 1981, pp. 125, 375. 6. Ibid., pp. 148-299. 7. Serge KLARSFELD, Vichy-Auschwitz, Paris, 1983, pp. 163-165. 484 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Ă©videntes Ă  partir de l'Ă©tĂ© 1942. Peut-ĂȘtre sont-elles nĂ©es sous la pression d'une opinion publique muselĂ©e mais nĂ©anmoins existante durant les deux premiĂšres annĂ©es du rĂ©gime de Vichy. Les survivants juifs, rĂ©sistants et autres tĂ©moins connus, offrent un point de vue philosĂ©mite sur les Ă©vĂ©nements. Les prĂ©fets, corps par trop hĂ©tĂ©rogĂšne, prĂ©tendent prĂ©senter des rapports objectifs, mais ne peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s ni entiĂšrement comme philosĂ©mites ni entiĂšrement comme antisĂ©mites. Le point de vue des antisĂ©mites français sur l'opinion publique reste presque totalement inconnu. Le Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives Ă©tait une crĂ©ation du gouvernement français qui devait exĂ©cuter les dĂ©cisions prises en haut-lieu en la matiĂšre. Cet organisme antisĂ©mite par vocation avait pour seule raison d'ĂȘtre la persĂ©cution des Juifs. Les fonctionnaires du Commissariat reprĂ©sentaient la tendance la plus extrĂ©miste. Cet extrĂ©misme raciste qui se manifestait dĂ©jĂ  sous le premier Commissaire, Xavier Vallat, devint vite une caractĂ©ristique dominante sous Darquier de Pellepoix Ă  partir de mai 1942. Les inspecteurs du Commissariat, ces antisĂ©mistes professionnels dont la persĂ©cution des Juifs Ă©tait la vocation et le gagne-pain nous ont laissĂ© dans leurs rapports ce qui leur paraissait ĂȘtre l'attitude du peuple aryen ». Ces rapports ne sont en aucun cas des tĂ©moignages objectifs » sur l'Ă©tat d'esprit de l'Ă©poque. Au contraire, ils sont les apprĂ©ciations de personnes fortement intĂ©ressĂ©es Ă  prĂ©senter un tableau tendancieux, mais non sans fondement. Ils seront un Ă©lĂ©ment qui nous servira Ă  nuancer ou affiner notre jugement sur l'ensemble des rapports entre Juifs et Aryens » durant les diffĂ©rentes pĂ©riodes de l'Ă©poque de Vichy. DĂ©jĂ  les premiĂšres rafles du 14 mai et des 20-22 aoĂ»t 1941, Ă  Paris, sont Ă  l'origine de rapports de la PrĂ©fecture de Police et des Renseignements GĂ©nĂ©raux 8. La PrĂ©fecture constate une rĂ©action mitigĂ©e de la population parisienne mais, dans les rapports des Renseignements GĂ©nĂ©raux qui analysent l'opinion publique par arrondissement, on discerne une distinction nette que font les Parisiens entre Juifs immigrĂ©s et Juifs français. IndiffĂ©rents au sort des premiers, ils sont navrĂ©s par l'arrestation des autres. Les rapports du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives pour l'annĂ©e 1941 sont rares, mais se multiplient au dĂ©but de 1942. Ils tĂ©moignent du dĂ©veloppement et de l'expĂ©rience accumulĂ©e par cet organisme depuis sa crĂ©ation, le 29 mars 1941, et surtout Ă  partir de la crĂ©ation de la Police aux Questions Juives, en aoĂ»t 1941. Dans le rapport de presse que la Police aux Questions Juives en zone occupĂ©e a prĂ©parĂ© pour la semaine du 22 au 28 mars 1942, les rĂ©dacteurs ont beaucoup Ă  reprocher Ă  cette presse lĂ©gale. La presse, selon ce rapport, n'influence pas suffisamment l'opinion dans la direction voulue, elle se livre surtout Ă  des attaques contre tel ou tel Juif en particulier » et non pas contre les Juifs en gĂ©nĂ©ral ». La Police aux Questions Juives attend d'une presse dirigĂ©e par l'occupant un soutien plus efficace dans l'exĂ©cution de la politique anti-juive dont il veut ĂȘtre le principal insti8. insti8. pp. 19, 27-28. PEUPLE ARYEN » ET LE COMMISSARIAT G' AUX QUESTIONS JUIVES 485 gateur. La Police aux Question Juives ne peut ĂȘtre indiffĂ©rente Ă  la rĂ©alisation de cette tĂąche ; elle y est, au contraire, intĂ©ressĂ©e au premier chef. Elle se heurte, en effet, Ă  l'incomprĂ©hension et mĂȘme Ă  l'hostilitĂ© du peuple aryen, qui entrave trop souvent son action... » 9. Dans le rapport suivant, les mĂȘmes constatations et raisonnements se poursuivent Il est indĂ©niable qu'aucune politique juive ne pourra ĂȘtre menĂ©e activement si l'opinion publique n'est pas Ă©clairĂ©e et si les dĂ©cisions qui interviennent ne sont pas admises par la masse comme une mesure de sauvegarde » 10. Les attaques contre ce peuple aryen » jugĂ© trop indiffĂ©rent Ă  la question juive se poursuivent toujours plus enflammĂ©es. Il faut continuer Ă  dĂ©plorer que la Police aux Questions Juives se heurte Ă  l'incomprĂ©hension du peuple aryen et mĂȘme Ă  son hostilitĂ© » u. Les agents de la Police aux Questions Juives s'aident, dans la rĂ©daction de leurs rapports, de la presse et de leur expĂ©rience mais Ă©galement des postes de renseignement et de surveillance » que chaque dĂ©lĂ©gation locale a installĂ©s et d'une sĂ©vĂšre surveillance postale, tĂ©lĂ©phonique et tĂ©lĂ©graphique » u. Leurs critiques se font de plus en plus virulentes et viennent renforcer celles de la presse et de la population, ainsi que celles d'organismes tels que les Tribunaux et les UniversitĂ©s. Les Tribunaux français, surtout ceux de la zone sud, trop clĂ©ments aux rĂ©fractaires juifs aux yeux du Commissariat aux Questions Juives, sont aussi sujet Ă  ses attaques. Un travail plus Ă©laborĂ© sur l'attitude des tribunaux envers les Juifs pendant l'occupation nous fait dĂ©faut. Nous ne pouvons qu'apprĂ©cier les tĂ©moignages partiels provenant du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives. En mai 1942, le Tribunal d'Aix-enProvence condamna quinze Juifs Ă  100 francs d'amende pour dĂ©faut de dĂ©claration. A Toulon, un autre Juif fut condamnĂ© Ă  seulement » 1200 francs d'amende pour hausse illicite » ; un troisiĂšme, Ă  Grasse, dut endurer deux mois de prison pour falsification de carte d'identitĂ© ». En aoĂ»t 1943, dans la mĂȘme ville, treize Juifs furent condamnĂ©s Ă  une amende allant de 200 Ă  600 francs et de quinze jours Ă  trois mois de prison avec sursis pour manque de mention Juif » sur leurs cartes d'identitĂ© 13. Ces sentences sont citĂ©es comme exemples par les dĂ©lĂ©guĂ©s du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives qui veulent dĂ©montrer l'extrĂȘme clĂ©mence des tribunaux français et leur attitude philosĂ©mite. 9. Archives Nationales F 7-14-887, Rapport de presse n° 3. Ces rapports hebdomadaires sont prĂ©parĂ©s par le chef de la Police aux Questions Juives Ă  l'intention du SecrĂ©taire gĂ©nĂ©ral pour la Police Ă  Vichy. 10. Ibid., Rapport n° 4. 11. Centre de Documentation Juive Contemporaine — LXXXIX — 15 a, rapport n° 5. 12. AJ 38-3596, rapport de Lyon datĂ© du 25 mars 1942; AJ 38-258, DĂ©lĂ©guĂ© dĂ©partemental du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives pour l'Indre, 11 dĂ©cembre 1941. 13. AJ 38-3814. De nombreux rapports critiquent les tribunaux ; voir AJ 38-258 ; AJ 38-261, AJ 38-262, AJ 38-265. En dĂ©cembre, le dĂ©lĂ©guĂ© du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives Ă  Marseille Ă©crit Notre lĂ©gislation est dĂ©truite en grande partie par les dĂ©cisions des Tribunaux... J>, AJ 38-289, du 4 dĂ©cembre 1942. Un rapport dĂ©taillĂ© de Toulouse, du 26 novembre 1943, relate l'attitude pro-juive des Tribunaux correctionnels de la rĂ©gion et de la PrĂ©fecture », LXXXIX-109. 486 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Les UniversitĂ©s sont Ă©galement critiquĂ©es. Comme pour les Tribunaux, les sources Ă  notre disposition ne permettent pas de tirer des conclusions gĂ©nĂ©rales sur l'attitude des UniversitĂ©s dans l'application de la loi de numĂ©ros clausus mais, dans certains cas, il ne fait pas de doute qu'elles ont tentĂ© de rĂ©sister Ă  l'application de cette loi contraignante. Le Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives se plaint de l'attitude projuive de certains milieux universitaires » M. Plus directement, l'UniversitĂ© de Strasbourg, repliĂ©e Ă  Clermont-Ferrand, est accusĂ©e de mauvaise volontĂ© » qui, tout en dĂ©passant les limites fixĂ©es Ă  3 % d'Ă©tudiants juifs, refuse de communiquer la liste de ces Ă©tudiants au Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives 15. Dans un rapport du 3e Bureau de l'État Major, rĂ©digĂ© d'aprĂšs des sources de la Gendarmerie, en octobre 1941, la situation des Juifs alsaciens et Ă©trangers concentrĂ©s en Dordogne, est analysĂ©e en dĂ©tail. Ils sont dĂ©crits comme gĂ©nĂ©ralement humbles, obsĂ©quieux et diplomates Ă  l'Ă©gard des autoritĂ©s ». Le rapport poursuit L'attitude de la population va de l'indiffĂ©rence Ă  la haine, en passant par tous les degrĂ©s rĂ©serve, antipathie, mĂ©pris, dĂ©goĂ»t, animositĂ©, hostilitĂ©. Tout le monde leur reproche leur paresse, leur Ă©goĂŻsme, leur platitude ' ils ne pensent qu'Ă  manger'. Ce qui suffit dĂ©jĂ  Ă  expliquer les rĂ©actions du public Ă  leur Ă©gard »I 6. Dans un autre rapport de janvier 1942 sur l'attitude envers les Juifs d'Alsace repliĂ©s en Dordogne, il est indiquĂ© que Bien des gens qu'on ne saurait taxer d'antisĂ©mitisme rĂ©clament, non sans raison semblet-il, l'astreinte au travail des israĂ©lites valides et la rĂ©vision des allocations » 17. A la mĂȘme date, Joseph Antignac, le dĂ©lĂ©guĂ© Ă  Limoges le plus douĂ© et le plus violemment antisĂ©mite de la Police aux Questions Juives, se plaint de l'Amicale de Volontaires Étrangers en Dordogne. Parmi ses 88 membres, cette organisation compte 51 Juifs. Cet exposĂ© dĂ©montre la nĂ©cessitĂ© d'interdire cette association qui porte un tort Ă©norme Ă  la LĂ©gion Française des Combattants et qui est au surplus un repaire de Juifs » 18. Rien ici sur l'attitude envers des Juifs en gĂ©nĂ©ral. En revanche, dans un des rapports suivants, on peut lire sur les Juifs que leur propagande n'a jamais Ă©tĂ© si forte. Leur rĂ©sistance s'affermit chaque jour davantage. De nombreux aryens, pour des raisons diverses et bien dĂ©cevantes, les soutiennent de plus en plus comme il a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dit dans un prĂ©cĂ©dent rapport, nous glissons vers l'Ă©tat d'esprit qui divisa les Français lors de l'affaire Dreyfus » 19. Des points de vue diffĂ©rents dĂ©crivent des situations dissemblables, Ă  la mĂȘme date, et Ă©galement en Dordogne. 14. AJ 38-3596, Vichy, le 2 mars 1942. Voir Ă©galement Pascal ORY, L'UniversitĂ© française face Ă  la persĂ©cution antisĂ©mite », La France et la Question Juive, pp. 79-94. 15. AJ 38-248, AJ 38-3618. 16. AJ 38-265, rapport du 14 novembre 1941. 17. AJ 38-265, rapport du Chef de la Censure Principale de PĂ©rigueux », le 19 janvier 1942. 18. AJ 38-261, rapport n° 64, du 15 janvier 1942. 19. AJ 38-258, rapport du 26 mai 1942. PEUPLE ARYEN » ET LE COMMISSARIAT G1 AUX QUESTIONS JUIVES 487 De Dijon, qui Ă©tait en zone occupĂ©e, le dĂ©lĂ©guĂ© de la Police aux Questions Juives remarque avec consternation que l'AbbĂ© ClĂ©mencet, aumĂŽnier du LycĂ©e de Dijon, aurait fait dire une messe pour la libĂ©ration du jeune Bigio, qui est Juif B 20. Tout ceci, avant les arrestations de l'Ă©tĂ© 1942. En juillet-aoĂ»t 1942 ont lieu les grandes vagues de rafles et de dĂ©portations qui marquent profondĂ©ment l'opinion publique. Les Juifs arrĂȘtĂ©s sont de tout Ăąge, des deux sexes, et les arrestations s'accompagnent d'inutiles brutalitĂ©s. Ces rafles Ă©veillent les premiĂšres protestations, pour des raisons humanitaires, de la part d'Ă©vĂȘques et d'archevĂȘques français, contre les dĂ©portations et leur brutalitĂ©. Le personnel du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives ne semble pas avoir Ă©tĂ© influencĂ© par les protestations des chefs de l'Église catholique. Les archives ne mentionnent aucune dĂ©mission ou mĂȘme hĂ©sitation au sein de ces policiers. Par contre, Ă  Nice par exemple, les agents de la Police aux Questions Juives protestent contre l'influence nĂ©faste» que les dĂ©clarations publiques de Mgr SaliĂšge et Mgr Gerlier portent Ă  l'exercice de leurs fonctions On assiste donc Ă  ce moment Ă  un revirement en leur faveur de l'opinion publique demeurĂ©e jusqu'Ă  prĂ©sent indiffĂ©rente. ... Bien que se livrant au marchĂ© noir sur une large Ă©chelle et constituant la principale cause de rarĂ©faction des denrĂ©es, les juifs ont rĂ©ussi Ă  s'attirer les sympathies de la population qu'ils affament. Notre service est entravĂ© par l'hostilitĂ© que nous rencontrons... 21. A Nice, Mgr RĂ©mond, qui ne s'est pourtant publiquement jamais proclamĂ© en faveur des Juifs, s'obstine Ă  interdire toute vĂ©rification de registres Ă  la Section d'EnquĂȘte et de ContrĂŽle » hĂ©ritiĂšre de la Police aux Questions Juives, l'empĂȘchant ainsi de vĂ©rifier les certificats de baptĂȘmes. Mgr RĂ©mond, avant mĂȘme l'occupation de Nice par les troupes en novembre 1942, sera la bĂȘte noire du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives MalgrĂ© les marques d'attachement qu'il prĂ©tend donner Ă  la personne du MarĂ©chal et Ă  la cause de la RĂ©volution Nationale, il est de notoriĂ©tĂ© publique qu'en rĂ©alitĂ© il se fait champion de la dĂ©fense des Juifs. ... AprĂšs un tel ostraciscisme qui, par ordre de Monseigneur RĂ©mond, frappe nos services, nous estimons que les Juifs auront toutes facilitĂ©s pour se procurer de faux certificats de baptĂȘmes. ... On peut affirmer qu'on assiste Ă  une sorte de coalition pour la dĂ©fense des Juifs, dont la position se renforce de jour en jour 22. Le tableau qui ressort des rapports des autres dĂ©lĂ©gations est fort semblable On peut hardiment affirmer que tous les Juifs sans exception, tant Ă©trangers que naturalisĂ©s ou français d'origine, sont anti-nationaux, anti-gouvernementaux, anglophiles, gaullistes, communistes, sympathisants des francs-maçons. Une association comme l' [Union GĂ©nĂ©rale des IsraĂ©lites de France] est Ă  coup sĂ»r nuisible Ă  tous points de vue dans le pays et travaille en dessous 20. AJ 38-1152, rapport du dĂ©lĂ©guĂ© Ă  Dijon, aprĂšs l'arrestation de 25 Juifs, le 26 fĂ©vrier 1942. 21. AJ 38-244, Rapport de de Nice, le 30 septembre 1942. 22. Ibid., voir Ă©galement AJ 38-243 soulignĂ© par nous. 488 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE contre la RĂ©volution Nationale. ... On peut affirmer qu'un pourcentage trĂšs faible d'aryens est anti-juif, sauf si personnellement il en a souffert. ... Fonctionnaires Nombreux sont ceux qui, trĂšs haut placĂ©s dans les prĂ©fectures, mairies, police nationale, propagande, etc., favorisent les Juifs. Mais des noms ne seront fournis qu'aprĂšs vĂ©rification de faits et ne seront pas envoyĂ©s par la poste^. Le rapport fait aussi mention de personnes privĂ©es qui apportent leur aide Ă  des Juifs. La propriĂ©taire d'un hĂŽtel de Perpignan a cachĂ© derniĂšrement quatre Juifs dans sa chambre». Le directeur de la Caisse RĂ©gionale du CrĂ©dit Agricole est un pro-juif acharnĂ© qui a accueilli un enfant juif, faisant croire qu'il a Ă©tĂ© sĂ©parĂ© de sa famille envoyĂ©e en Moravie ». Le Colonel de Buissy, PrĂ©sident de l'Amicale des EngagĂ©s Volontaires Étrangers, aurait rĂ©ussi, depuis dĂ©but septembre, Ă  Ă©viter Ă  150 Juifs d'ĂȘtre dĂ©portĂ©s une enquĂȘte est en cours sur cet officier supĂ©rieur. Certains supĂ©rieurs de couvents ont abritĂ© et abritent encore un certain nombre de Juifs ». Pareilles rĂ©criminations sont nombreuses. A Lyon, la situation rapportĂ©e ressemble fortement Ă  celle de Nice. Une vive opposition s'est manifestĂ©e au lendemain des premiĂšres rafles effectuĂ©es dans la ville et dans la rĂ©gion lyonnaise » 24. A Marseille, un peu plus tard il ne se passe pas un jour sans qu'un consul ne vienne dĂ©fendre un naturalisĂ© juif plus ou moins rĂ©cent, mais Juif ; qu'un attachĂ© de cabinet ou un chef de service de la prĂ©fecture, ou qu'une personnalitĂ© de Marseille n'intervienne en faveur d'un type Ă©patant», mais Juif 25. Par contre, le dĂ©lĂ©guĂ© de Limoges peint un tableau diffĂ©rent Les populations se plaignent toujours de cet afflux d'indĂ©sirables, qui contribuent par leur conduite Ă  augmenter les difficultĂ©s de ravitaillement. Ils pratiquent toujours impunĂ©ment le marchĂ© noir, c'est le principal grief qui leur est reprochĂ©. La majoritĂ© approuve certainement la mesure prise derniĂšrement contre les juifs Ă©trangers 26. Limoges n'est pas la seule ville oĂč l'on se plaigne de cet afflux d'indĂ©sirables ». La Haute-Savoie a aussi sa part de protestations antijuives. Une lettre du maire de SamoĂ«ns Ă  laquelle plusieurs propriĂ©taires, commerçants et artisans joignent leurs signatures, exprime la mĂȘme aversion. Des hĂŽteliers de Chamonix et de MĂ©gĂšve se plaignent Ă©galement que des Juifs rĂ©pugnants remplissent les hĂŽtels » 27. Le rapport de Vichy, d'octobre, condense ainsi sept rapports bisemestriels rĂ©gionaux de la zone non occupĂ©e Le Haut-ClergĂ© en tĂȘte, une grande partie de la population française s'Ă©lĂšve contre les mesures prises fin aoĂ»t dernier ; le peuple de France ne connaĂźt rien Ă  la question juive... 28. 23. AJ 38-244, rapport de de Montpellier, le 30 septembre 1942. 24. Ibid., Rapport du de Lyon, le 30 septembre 1942. 25. AJ 38-243. 26. Ibid., Rapport du de Limoges, le 30 septembre 1942. 27. AJ 38-3598, transmis par le dĂ©lĂ©guĂ© pour la Haute-Savoie Ă  Vichy. 28. AJ 38, rapport du Directeur du en zone non occupĂ©e. Vichy, le 6 octobre 1942. PEUPLE ARYEN » ET LE COMMISSARIAT G' AUX QUESTIONS JUIVES 489 Le pasteur Marc Boegner, PrĂ©sident de la FĂ©dĂ©ration Protestante de France, donne lui aussi bien du fil Ă  retordre au Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives. Son activitĂ© en faveur des Juifs est certaine et connue ». Ses pas sont suivis, son courrier interceptĂ© et son tĂ©lĂ©phone placĂ© sous Ă©coute. Une lettre interceptĂ©e, provenant d'un fidĂšle de BessĂšges Gard, contient de sĂ©vĂšres critiques Ă  l'Ă©gard du pasteur et tĂ©moigne des rĂ©actions engendrĂ©es par sa protestation publique Je suis membre de la LĂ©gion et je suis volontaire de la RĂ©volution Nationale. ... Je suis Ă  l'heure actuelle considĂ©rĂ© comme un persĂ©cuteur des Juifs et comme un ĂȘtre inhumain. Tous ceux qui, comme moi, ont voulu suivre le MarĂ©chal, sont frappĂ©s d'ostracisme 29. Les rapports sur la Haute-Savoie ne sont pas uniformes et les agents du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives soupçonnent, entre autre, que les Juifs ont Ă©tĂ© prĂ©venus par la PrĂ©fecture» avant les rafles. En dĂ©cembre, le sermon de l'Ă©vĂȘque d'Annecy, pour la fĂȘte de NoĂ«l, demandant de prier pour les enfants sĂ©parĂ©s de leur mĂšre et pour les mĂšres sĂ©parĂ©es de leurs enfants » est soigneusement enregistrĂ©. Les rapports font mention de la liste des fonctionnaires qui aident des Juifs Ă  franchir clandestinement la frontiĂšre suisse, ceux qui coopĂšrent et approuvent l'activitĂ© du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives, et ceux qui font preuve de mauvaise volontĂ© » — comme le clergĂ© et un prĂ©fet Ă  qui l'on reproche que les dossiers des Juifs », dans les sous-prĂ©fectures et prĂ©fectures, auraient Ă©tĂ© vidĂ©s de toutes sic ! les piĂšces compromettantes des intĂ©ressĂ©s a 30. Les rapports d'octobre 1942 traitent intensivement de la question qui nous prĂ©occupe l'attitude des Français devant la politique anti-juive de Vichy. On pouvait difficilement garder secrĂšte la dĂ©portation massive de Juifs dans les deux zones de juillet Ă  septembre 31. Les rapports rĂ©digĂ©s en octobre dĂ©crivent les rĂ©actions engendrĂ©es par ces dĂ©portations. Contrairement aux rapports prĂ©cĂ©dents, on Ă©crit Ă  Limoges Le clergĂ© français, toujours animĂ© de sentiments d'humanitĂ©, est dans l'ensemble nettement hostile aux mesures envisagĂ©es ou dĂ©jĂ  prises en zone non occupĂ©e contre les israĂ©lites ». Le plus souvent, ces rapports accusent le clergĂ© et l' de crĂ©er une atmosphĂšre pro-juive afin d'empĂȘcher les dĂ©portations Si le clergĂ© donne l'approche de faire marche arriĂšre en ce qui concerne ses interventions pour les Juifs, il n'en demeure pas moins leur soutien primordial, et ses dĂ©marches auprĂšs des Pouvoirs publics continuent. L' dĂ©ploie une activitĂ© insoupçonnĂ©e. ... Le service Social des Étrangers de l' ne donne, sous aucun prĂ©texte, Ă  la prĂ©fecture, les listes d'israĂ©lites inscrits sur leur contrĂŽle, ceci dans le but de retarder, voire mĂȘme faire Ă©chouer les mesures d'expulsion... 32. 29. AJ 38-289, lettre datĂ©e du 13 octobre 1942. 30. AJ 38-3596 un rapport sur l'affaire Ernst - AJ 38-244, p. 8, Montpellier janvier 1943. 31. Entre le 22 juillet et le 30 septembre 1942, 36 094 Juifs furent dĂ©portĂ©s Serge KLAESFELD, Le MĂ©morial de la dĂ©portation des Juifs de France, Paris, 1978, Tableau chronologique des convois de dĂ©portation ». 32. AJ 38-244, rapport de Limoges du 16 octobre et de Vichy du 20 octobre 1942. 490 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Ce rapport contient Ă©galement une attaque ouvertement exprimĂ©e contre le Gouvernement Français, source de leur propre pouvoir. Cette sorte de critiques deviendra caractĂ©ristique de nombreux dĂ©lĂ©guĂ©s du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives qui ne cachent pas leur hostilitĂ© au Gouvernement de Vichy considĂ©rĂ© trop clĂ©ment dans sa politique contre les Juifs. Le rapport de Montpellier reproche Ă  l' de placer des Juifs Ă  la campagne; cette organisation est considĂ©rĂ©e comme nĂ©faste » et et qui n'aurait jamais dĂ» voir le jour ». Les complices » ici sont les AmĂ©ricains dont les efforts de sauvetage sont notoires s'emploient actuellement Ă  faire sortir les Juifs des camps ces organisations ne devraient pas ĂȘtre autorisĂ©es en France 33, affirme-t-on. Le rapport de Clermont-Ferrand souligne des aspects typiques de l'attitude des Français - Les aryens commencent Ă  s'inquiĂ©ter, Ă  l'approche de l'hiver, de l'activitĂ© des Juifs pour subvenir Ă  leur alimentation. ... Le Français Ă©tant, par dĂ©finition, esclave de son ventre, il y aurait intĂ©rĂȘt Ă  exploiter ces Ă©lĂ©ments pour la propagande anti-juive 34. Le mĂ©contentement des agents du Commissariat se transforme quelquefois en rĂ©bellion quand la politique française leur semble entraver celle des occupants Les autoritĂ©s allemandes prenaient sous leur contrĂŽle et leur juridiction les Juifs ressortissants allemands, c'est-Ă -dire les Juifs Ă©trangers originaires des pays sous administration allemande TchĂšques, Polonais, Russes, etc. Dans cette rĂ©gion, je sais de bonne source que, par ordre de M. le PrĂ©fet RĂ©gional, de nombreux dossiers de Juifs Ă©trangers et surtout allemands ont Ă©tĂ© dĂ©truits, tant dans les prĂ©fectures qu'Ă  la Police nationale. Au cas oĂč pareils ordres me seraient donnĂ©s par M. le PrĂ©fet RĂ©gional, reprĂ©sentant ici du Chef du Gouvernement dont nous dĂ©pendons, je me refuserai Ă  toute destruction de piĂšces ou de dossiers, jusqu'au reçu d'ordres Ă©manant de vous 35. Dans un rapport du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives de 1943, on peut lire d'un cĂŽtĂ© que certains Administrateurs Provisoires ne cachent pas leur intention de dĂ©missionner. Des huissiers, Ă  Lyon, semblent hĂ©siter de plus en plus Ă  accepter les missions qui leur sont confiĂ©es par le Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives ». D'un autre cĂŽtĂ©, malgrĂ© de nombreux cas particuliers d'aide Ă  des Juifs, le clergĂ© catholique garde depuis quelque temps une attitude plus rĂ©servĂ©e Ă  l'Ă©gard du problĂšme juif R 36. Par contre, Ă  Bordeaux, on enregistre une recrudescence de l'aide apportĂ©e aux Juifs, qui augmente parallĂšlement Ă  la rĂ©sistance aux occupants et surtout Ă  la rĂ©sistance au 33. Ibid., rapport de Montpellier du 31 octobre 1942. 34. Ibid., rapport de Clermont-Ferrand du 30 octobre 1942. 35. AJ 38-230, rapport de Toulouse du 15 dĂ©cembre 1942. 36. AJ 38-244, rapport de Vichy du 8 mars 1943. PEUPLE ARYEN » ET LE COMMISSARIAT G' AUX QUESTIONS JUIVES 491 Jamais, depuis 1939, les tenants de l'ancien rĂ©gime, ne se sont montrĂ©s plus insolents qu'aujourd'hui dans toute la rĂ©gion; quant aux Juifs, la plupart et les plus nocifs ont pris leurs prĂ©cautions » et se croient dĂ©sormais Ă  l'abri de toute mesure sĂ©rieuse contre eux. Ils comptent de plus en plus de sympathisants ou de complices dans toutes les branches de la sociĂ©tĂ©, grĂące surtout Ă  une trĂšs habile propagande tendant les faire passer pour une catĂ©gorie de Français persĂ©cutĂ©s par l'envahisseur et ceux qui travaillent Ă  leur solde » 37. Il semble, selon les rapports des inspecteurs du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives, que l'aide apportĂ©e aux Juifs par la population française ne cesse de croĂźtre et de devenir plus audacieuse durant l'annĂ©e 1943. A la fin juillet, Ă  Nedde Haute-Vienne, par exemple, la population force une trentaine de Juifs Ă  ĂȘtre relĂąchĂ©s », tandis qu'Ă  Peyrat-le-ChĂąteau, le maire empĂȘche la police d'embarquer dix Juifs » 38. De semblables cas se multiplient et les rapports donnent parfois l'impression que ce sont les agents du Commissariat qui sont pourchassĂ©s et non les Juifs. Dans leur angoisse », les inspecteurs ne cessent de coter » le niveau de collaboration ou rĂ©sistance qu'ils rencontrent dans l'exercice de leurs fonctions. Ainsi, Ă  Agen, ils notent PrĂ©fecture une majoritĂ© pro-juifs ; Gendarmerie, Milice bon ! ». Puis ils ajoutent encore la majoritĂ© de la population est pro-juive » 39. En 1944, ces rapports, trĂšs nombreux, sont presque unanimes pour dĂ©plorer » l'attitude de la population. On peut estimer Ă  environ 90 % le nombre d'Aryens pro-juifs x 40. Du point de vue du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives, la propagande anti-juive » s'est rĂ©vĂ©lĂ©e complĂštement inefficace Le clergĂ© continue, comme dans le passĂ©, Ă  dĂ©sapprouver, sous prĂ©texte de christianisme, les lois en vigueur contre les Juifs. ... La plus grande partie des aryens continue Ă  faire preuve d'un philosĂ©mitisme exagĂ©rĂ©. Ceux-ci sont persuadĂ©s que les lois en vigueur contre les pauvres Juifs » sont imposĂ©es par les AutoritĂ©s d'Occupation et qu'il faut leur faire Ă©chec. Notre contrĂŽle sur la population juive reste inexistant, Ă©tant donnĂ© leur dĂ©placement et leur camouflage avec la complicitĂ© de la quasi-totalitĂ© de la population aryenne 41. Les rapports de la Police aux Questions Juives et du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives constituent une prĂ©cieuse source de renseignements sur les opinions et les attitudes non exprimĂ©es ouvrtement par les Français. Les agents du Commissariat sont extrĂȘmement intĂ©ressĂ©s, donc sensibles Ă  cet Ă©tat d'esprit latent. Ils ne s'intĂ©ressent qu'aux Juifs. Dans ce sens il est Ă  regretter, pour la recherche, qu'ils manquent de renseignements plus prĂ©cis sur la situation Ă  la fin de 1940 et au dĂ©but 37. LXXXIX-181, rapport de Bordeaux du 15 avril 1943. 38. Ibid., CCXIV, rapport du 1" septembre 1943. 39. Ibid., CCXIV-41, rapport de Toulouse du 21 aoĂ»t 1943. 40. Ibid., rapport de Montpellier du 1er aoĂ»t 1944. 41. AJ 38-244, Rapport de Vichy du 30 novembre 1943 le mĂȘme XXXIV-110. 492 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE de l'annĂ©e 1941. Mais, Ă  partir de la fin de 1941, ils donnent dĂ©jĂ  un tableau d'ensemble de l'attitude des Français avant que les dĂ©portations commencent. Toutefois, une chose est claire ces rapports contredisent la thĂšse d'une opinion publique française hostile ou indiffĂ©rente avant les rafles de l'Ă©tĂ© 1942. Le point de vue des agents du Commissariat diffĂšre de celui d'autres sources par leur attitude surtout envers les Français neutres ». Il va de soi que ce groupe englobe la plus grande masse de Français. Pour les autres, cette neutralitĂ© est une preuve d' indiffĂ©rence » face aux persĂ©cutions et, pour les agents du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives, un manque de coopĂ©ration, une preuve d' incomprĂ©hension » et mĂȘme d'hostilitĂ©. Il faut prĂ©ciser que les agents du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives ne sont pas les principaux exĂ©cuteurs des arrestations, mais leur rĂŽle Ă©tait surtout de dĂ©finir qui Ă©tait considĂ©rĂ© lĂ©galement Juif, d'enquĂȘter sur les cas de dĂ©clarations non prĂ©sentĂ©es, de dĂ©signer les affaires juives », etc. MĂȘme dans ces conditions, un manque de coopĂ©ration peut, dans certains cas, ĂȘtre considĂ©rĂ© comme un acte de soutien, une aide passive envers les Juifs et une rĂ©elle entrave Ă  la politique anti-juive. Par contre, il faut souligner que les rapports n'enregistrent presque pas de support actif et volontaire de la part de la population au Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives et assez rarement de la part d'autres organismes d'État. Ce manque de coopĂ©ration active, qui apparaĂźt si souvent dans presque tous les rapports, devait donc ĂȘtre assez important. Il est Ă  noter que la situation des Juifs en France diffĂšre selon qu'ils sont Juifs immigrĂ©s ou Juifs français et que les Français en sont tout Ă  fait conscients. Bien que celle des immigrĂ©s soit nettement pire que celle des Juifs français, cette neutralitĂ©, tout au moins pour la pĂ©riode d'avant les grandes rafles de l'Ă©tĂ© 1942, est plutĂŽt nĂ©gative envers les immigrĂ©s, mais sympathisante envers les israĂ©lites français. Ce n'est pas la gravitĂ© de la situation qui fixe l'opinion publique, mais plutĂŽt une sorte de solidaritĂ© nationale de la part de la population française. Cette attitude est une rĂ©ussite partielle de l'assimilation qui contrebalance l'Ă©chec qu'elle a connu devant la lĂ©gislation vichyssoise. La plupart des rapports datent d'aprĂšs aoĂ»t 1942 et la distinction nationale fait place Ă  une assistance motivĂ©e par des considĂ©rations humanistes. Les rapports dĂ©montrent clairement une intensification de la rĂ©sistance Ă  l'antisĂ©mitisme Ă  la suite des rafles, dĂ©portations et des protestations des chefs de l'Église, soutenant ainsi les recherches faites jusqu'Ă  ce jour. En mĂȘme temps, certaines questions concernant ces dĂ©clarations publiques restent encore Ă  Ă©claircir. Il n'est peut-ĂȘtre pas surprenant que les chefs des Églises n'aient nullement influencĂ© les antisĂ©mites français. Par contre, l'impact des dĂ©clarations sur les Français neutres » et inactifs mentionnĂ©s prĂ©cĂ©demment est trĂšs important. On trouve Ă©galement des renseignements prĂ©cieux sur le rĂŽle des gens d'Église qui n'ont jamais fait de dĂ©clarations publiques contre la lĂ©gislation antisĂ©mite ni mĂȘme contre les rafles et les dĂ©portations. Le PEUPLE ARYEN » ET LE COMMISSARIAT G' AUX QUESTIONS JUIVES 493 cas de Mgr RĂ©mond, archevĂȘque de Nice, ne peut reprĂ©senter qu'une partie de ces ecclĂ©siastiques ; l'attitude de chaque Ă©vĂȘque devrait ĂȘtre Ă©tudiĂ©e dans son propre diocĂšse. Les attitudes ne sont pas uniformes, mais les rapports des agents du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives font souvent mention de l'ostracisme » qui les frappe, et ils disent que le clergĂ© dans son ensemble » leur est hostile. Il ne fait aucun doute que la rĂ©action des ecclĂ©siastiques dĂ©passe de loin les dĂ©clarations. MalgrĂ© les nombreux tĂ©moignages qui rapportent l'Ă©tablissement de certificats de baptĂȘme antidatĂ©s ou du sauvetage d'enfants juifs cachĂ©s dans des couvents, les rapports du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives suggĂšrent que l'aide des Églises aux Juifs sous toutes ses formes est encore loin d'ĂȘtre pleinement explorĂ©e. D'une façon inattendue apparaĂźt, dans ces rapports, l'Union GĂ©nĂ©rale des IsraĂ©lites de France Cet organisme, créé par Vichy, est trĂšs souvent critiquĂ©, surtout par les survivants juifs qui l'accusent mĂȘme de collaboration avec Vichy et avec l'occupant. Le Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives ayant le contrĂŽle direct des activitĂ©s de l' les informations rassemblĂ©es ici ne reprĂ©sentent qu'une infime partie des renseignements fournis par les dossiers du Commissariat sur cet organisme. Selon le Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives, l' exerçait une influence nĂ©faste » sur l'opinion publique et entravait les efforts du Commissariat. L' n'est pas notre sujet, mais Ă  ce qu'il paraĂźt, son rĂŽle dans la crĂ©ation d'une opinion publique pro-juive n'a pas Ă©tĂ© suffisamment Ă©tudiĂ© et notre connaissance en ce domaine reste encore Ă  approfondir 42. Il est certain que l'afflux des Juifs venus de la zone occupĂ©e a créé un mĂ©contentement antisĂ©mite dans diffĂ©rentes rĂ©gions frontaliĂšres telles que le Limousin ou la Dordogne. Ce mĂȘme phĂ©nomĂšne se produisit aussi dans d'autres rĂ©gions de forte concentration juive telle que la rĂ©gion niçoise et la Haute-Savoie. Cette hostilitĂ© Ă©tait authentique et typique Ă  la France, et rĂ©pandue dans tout le pays Ă  un degrĂ© variĂ©. Mais elle n'a jamais Ă©tĂ© la seule attitude des Français envers la question juive » dans ces rĂ©gions et encore moins dans d'autres. Une constatation d'ordre gĂ©nĂ©ral concerne ce qu'on appelle le tournant » de l'opinion publique en Ă©tĂ© 1942. Il est incontestable que les rafles ont suscitĂ© une forte rĂ©action de l'opinion publique, amplifiĂ©e par les chefs des Églises qui, jusqu'alors, n'avaient pas rĂ©agi devant la persĂ©cution des Juifs. Mais cette opposition ouverte n'Ă©tait pas deus ex machina », sans signes prĂ©curseurs ou sans racines. Les rapports du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives parlent aussi du revirement », tout en contredisant leurs rapports prĂ©cĂ©dents, datant d'avant les protestations ecclĂ©siastiques. Il s'agit plutĂŽt d'une amplification ou d'une extĂ©riorisation des sentiments que d'un vĂ©ritable tournant ». S'il en est ainsi, il est Ă©galement probable que la hiĂ©rarchie 42. Sur l' Maurice RAJFUS, Des Juifs dans la Collaboration, Paris, 1980 ; Yerachmiel Richard COHEN, The Jewish Leadership in France Ăąuring World War II, Thesis submitted for the Degree Doctor of Philosophy », Hebrew University, JĂ©rusalem, 1981. 494 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE catholique Ă©tait consciente de cette opinion publique et mĂȘme Ă©tait influencĂ©e par elle dans ces interventions publiques. N'est-il pas possible que les Princes de l'Église Ă©taient dans ce cas plutĂŽt poussĂ©s d'en bas » dans leurs interventions en faveur des Juifs ? Tant qu'on n'a pas de rĂ©ponse dĂ©finitive venant des recherches basĂ©es sur les archives ecclĂ©siastiques, c'est une hypothĂšse Ă  retenir. Claude LĂ©vy a formulĂ© trĂšs justement ce qu'a Ă©tĂ© le passage d'une dĂ©sapprobation... au souci d'aider », c'est-Ă -dire d'une sympathie passive Ă  une participation active. J'accepte volontiers cette formule tout en l'Ă©largissant et en l'appliquant plus aux Français en gĂ©nĂ©ral qu'aux seuls rĂ©sistants. Certains signes avant-coureurs dĂ©crits dans les rapports du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives se dessinaient dĂ©jĂ  dans l'opinion publique et annonçaient un changement qui, sans cela, aurait Ă©tĂ© trop rapide et peu comprĂ©hensible. L'historien peut rarement accepter des attitudes si rĂ©pandues sans vouloir en rechercher les origines. L'existence d'une opinion publique non-antisĂ©mite ne peut pas ĂȘtre mise en doute, son ampleur est difficilement dĂ©finissable. Peut-on dĂ©finir l'origine sociale, politique ou idĂ©ologique de ceux qui s'opposaient Ă  un antisĂ©mitisme raciste ? Les Juifs sont souvent associĂ©s, dans les rapports du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives, aux gaullistes, aux communistes et Ă  tout ennemi, quel qu'il soit, de la RĂ©volution Nationale. Les opposants Ă  l'antisĂ©mitisme sont associĂ©s plutĂŽt avec les Églises. Dans l'atmosphĂšre sympathisante de Vichy envers la religion, les gens du Commissariat GĂ©nĂ©ral aux Questions Juives n'auraient jamais osĂ© s'attaquer aux catholiques si cela n'Ă©tait pas bien fondĂ©. Par contre, avant l'Ă©tĂ© 1942, les rĂ©sistants ne considĂ©raient pas les Juifs plus menacĂ©s que les autres ennemis du nazisme ». Ceci en dĂ©pit du fait que les Juifs français Ă©taient fortement reprĂ©sentĂ©s au sein de la RĂ©sistance. A partir de 1943, la composition des antiracistes devient plus gĂ©nĂ©rale. Les sources prĂ©sentĂ©es ici ne nous fournissent pas une rĂ©ponse nette, mais il semble qu'en premier lieu les philosĂ©mites, ou plutĂŽt les antiracistes, se trouvaient parmi les chrĂ©tiens. Un long chemin a Ă©tĂ© parcouru en France depuis l'Ă©poque de l'Affaire Dreyfus 43. L'influence de l'opinion publique sur un rĂ©gime autoritaire pose toujours des problĂšmes aux chercheurs. Cela s'applique aussi Ă  Vichy et Ă  la question juive », et l'Ă©nigme n'a pas encore Ă©tĂ© complĂštement dĂ©nouĂ©e. Mais il paraĂźt clair que les antisĂ©mites au pouvoir », sous le Gouvernement de Vichy, avaient Ă  subir, en plus de l'influence allemande et celle des antisĂ©mites-racistes français, une influence supplĂ©mentaire, celle des Français non-antisĂ©mites. C'est leur opinion qui a eu une influence dĂ©cisive sur la politique gouvernementale. Asher COHEN, Strochlitz Institute of Holocaust Studies, UniversitĂ© de Hdifa. 43. Églises et chrĂ©tiens dans la DeuxiĂšme Guerre Mondiale, 2 vs., Lyon, 1978, 1982. RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 Le 19 novembre 1947, le gouvernement Ramadier dĂ©missionne, remplacĂ© le 22 par celui de Robert Schuman. Depuis son investiture, le 21 janvier prĂ©cĂ©dent, le prĂ©sident socialiste du Conseil a affrontĂ© une pĂ©riode dramatique, engagement dans la guerre d'Indochine, crise malgache, dĂ©veloppement d'un vaste mouvement de grĂšves, Ă©viction des ministres communistes du gouvernement, acceptation par la France du plan Marshall, montĂ©e de la double opposition communiste et gaulliste. Quelques semaines aprĂšs son dĂ©part de la prĂ©sidence du Conseil, Paul Ramadier rĂ©dige ces quelques notes trente pages manuscrites, avec, par endroits, d'assez nombreuses ratures, concernant essentiellement, outre quelques affinements de la formulation, une plus grande prĂ©cision dans les chiffres et indices citĂ©s ; ce texte existe aussi dans une forme dactylographiĂ©e avec, en haut de la premiĂšre page, la mention dĂ©cembre 1947 » qui ne figure pas sur le manuscrit mais qui, sur le dactylogramme, semble de la main de Paul Ramadier lui-mĂȘme la lecture du document confirme d'ailleurs la fiabilitĂ© de cette date. Dans ces quelques pages, le prĂ©sident Ramadier analyse avec luciditĂ© les donnĂ©es de la vie politique française Ă  la fin de 1947, mettant l'accent moins sur les responsabilitĂ©s des mois passĂ©s que sur les perspectives de l'Ă©mergence d'une troisiĂšme force » qu'exprimaient aussi, peu auparavant, le discours de LĂ©on Blum du 16 octobre et une dĂ©claration du le 12 novembre. En mĂȘme temps, le prĂ©sident Ă©voque les perspectives syndicales au moment oĂč se dessinent l'Ă©clatement de la et la naissance de Il consacre enfin la majeure partie de ces notes 23 pages du manuscrit aux questions de salaires et surtout aux difficultĂ©s du ravitaillement, Ă  la fois devant la situation difficile de la France et en fonction des problĂšmes posĂ©s par l'aide Marshall celui que les Français ont, lorsqu'il Ă©tait en 1944-1945 ministre du Ravitaillement, cruellement brocardĂ© sous le nom de RamadiĂšte », reste profondĂ©ment prĂ©occupĂ© des problĂšmes de la vie quotidienne dans un pays oĂč la ration journaliĂšre de pain Ă©tait tombĂ©e Ă  250 grammes le 1" mai 1947, 200 grammes le 27 aoĂ»t, oĂč subsistaient les tickets de rationnement et oĂč un marchĂ© noir devenu ostentatoire rendait plus sensible que jamais la misĂšre criante des classes populaires urbaines. 496 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Nous avons voulu prĂ©senter ce document sans notes infrapaginales il se suffit Ă  lui-mĂȘme. Nous remercions M. Claude Ramadier de nous avoir fait connaĂźtre ces notes de son pĂšre et de nous autoriser Ă  les publier*. Dominique BORNE et Jacques BOUILLON. [dĂ©cembre 1947] L'ouvrier gagne trop peu. C'est un fait certain et qui s'aggrave. Les salaires sont au coefficient 650, tandis que l'indice des prix alimentaires au dĂ©tail s'Ă©lĂšve Ă  1318 en novembre. En avril, les salaires Ă©taient Ă  440 ; les prix de dĂ©tail Ă  886. Sans doute l'indice des prix de dĂ©tail ne traduit-il pas exactement les prix de la vie, pas plus d'ailleurs que l'indice des salaires qui ne tient pas un compte exact des salaires rĂ©els. Il est mĂȘme probable que l'Ă©cart entre le salaire rĂ©el et l'indice s'est accentuĂ© au cours du semestre, les augmentations de salaire inconnues des statisticiens se multipliant pendant les pĂ©riodes de trouble social ; il est aussi probable que les prix de dĂ©tail Ă©taient en juin plus Ă©levĂ©s que ne l'exprimait l'indice, plus comprimĂ© par les taxations que le prix rĂ©el de la vie. Mais, aprĂšs toutes ces corrections, d'ailleurs fort difficiles Ă  chiffrer, le fait reste certain il y a entre l'accroissement des salaires et l'accroissement des prix une marge intolĂ©rable. L'ouvrier dĂ©clare qu'il ne peut plus vivre et assurer le revenu de sa famille. Il demande une augmentation de salaire. On marchande, on discute, mais on finit toujours par accorder quelque chose. C'est insuffisant d'ailleurs pour combler l'Ă©cart entre le niveau des salaires et celui des prix, puisqu'en dĂ©finitive, la revendication ouvriĂšre est de 25 %, tandis que l'Ă©cart dĂ©passe 100 %. Et il est bien Ă©vident que mĂȘme au cas de la victoire, l'ouvrier n'obtiendra pas entiĂšre satisfaction. Mais cette satisfaction constitue-t-elle un avantage sĂ©rieux ? Sans doute, aussitĂŽt l'avantage obtenu, l'Ă©cart entre les prix et le salaire sera rĂ©duit et l'on peut admettre que cet avantage subsistera quelques semaines. Mais, en pĂ©riode d'inflation, l'expĂ©rience prouve qu'il n'est pas durable. Elle a Ă©tĂ© maintes fois renouvelĂ©e au cours de ces derniĂšres annĂ©es. En 1944, l'augmentation des salaires qui a suivi la libĂ©ration a Ă©tĂ© trĂšs rapidement absorbĂ©e par la hausse des prix avril 1944 salaires 156 ; prix de dĂ©tail, 274 ; octobre 1944 salaires 205 ; prix de dĂ©tail, 291. Les arrĂȘtĂ©s Parodi de mars 1945 qui ont prescrit la remise en ordre des salaires ont portĂ© l'indice Ă  276 au mois d'avril 1945 et Ă  303 en octobre, tandis que les prix de dĂ©tail atteignaient 325 en avril, 355 en mai, 393 en juin, 398 en juillet, 406 en aoĂ»t, 453 en septembre, 460 en octobre. En juillet 1946, la confĂ©rence du Palays-Royal [sic] a portĂ© l'indicesalaire Ă  332 et Ă  413 en octobre, tandis que les prix atteignaient 576 en juillet, 730 en aoĂ»t, 785 en septembre, 866 en octobre, 856 en dĂ©cembre. * Un colloque Paul Ramadier, organisĂ© par le Centre d'histoire de l'Europe du xx= siĂšcle aura lieu les 8 et 9 dĂ©cembre 1988 Ă  la Fondation nationale des Sciences politiques. RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 497 Les grĂšves de mai Ă  juillet 1947 ont trouvĂ© l'indice des salaires Ă  440 en avril ; l'arrĂȘtĂ© Daniel Mayer du 22 aoĂ»t, relĂšve les salaires d'avril de 11 % et l'indice se trouve ainsi portĂ© Ă ... Pendant ce temps, l'indice des 39 articles paru, de 837 en avril, Ă  886 en mai, Ă  935 en juin, Ă  965 en juillet, Ă  1068 en aoĂ»t, Ă  1157 en septembre, Ă  1268 en octobre, Ă ... en novembre. Une seule exception peut ĂȘtre enregistrĂ©e et il s'agit de l'expĂ©rience Blum. L'augmentation des salaires fut faible elle porta seulement sur les traitements publics et sur le minimum vital. L'indice des salaires qui Ă©tait de 428 en janvier, est passĂ© Ă  440 en avril. Mais il faut souligner que l'indice Ă©tabli par le ministĂšre du travail ne tient pas compte des traitements publics sur lesquels a portĂ© le principal effort. Au mĂȘme moment, nous voyons le prix de dĂ©tail, encore hĂ©sitant en janvier 856, se stabiliser en fĂ©vrier 858 et descendre nettement en mars 838 et en avril 837. Il est vrai que l'indice retient surtout des prix taxĂ©s et qu'il enregistre seul la principale hausse qui s'est produite pendant cette pĂ©riode, celle de la viande. Sans doute une Ă©tude plus poussĂ©e et plus proche du rĂ©el donnerait-elle un chiffre un peu moins optimiste. En tout cas, pendant cette pĂ©riode de quatre mois, il n'y a pas eu de hausse importante du coĂ»t de la vie. L'augmentation de salaires, modeste et partielle, de janvier et de fĂ©vrier, n'a pas contrariĂ© sensiblement l'effet psychologique du mot d'ordre lancĂ© par LĂ©on Blum le 31 dĂ©cembre. Les hausses de salaires agissent incontestablement sur les prix. Mais cette poussĂ©e peut ĂȘtre attĂ©nuĂ©e ou renforcĂ©e par les facteurs psychologiques dans une proportion considĂ©rable. Il est impossible de dĂ©terminer exactement l'intensitĂ© des facteurs psychologiques. Nous constatons qu'en mai - juillet 1947, l'influence des grĂšves en a accru l'effet d'une maniĂšre trĂšs importante. Nous la voyons en juillet 1946 se dĂ©clencher assez lentement et ne prendre d'importance qu'aprĂšs deux mois environ. Par contre, l'effet de la hausse des salaires fut freinĂ©, en octobre 1944 par les prĂ©lĂšvements sur la circulation rĂ©sultant de l'emprunt de la LibĂ©ration. De mĂȘme, les mesures restrictives des prix appuyĂ©es par un fort mouvement d'opinion ont freinĂ© la hausse en 1944 et l'ont annulĂ©e en janvier 1947. Les effets retardateurs ne se sont produits que trĂšs irrĂ©guliĂšrement, dans une mesure impossible Ă  dĂ©finir et sans proportion avec leur cause. Par contre, nous pouvons mesurer les rĂ©percussions mĂ©caniques des augmentations de salaires. Sur les produits industriels, elles agissent directement par l'accroissement des prix de revient, dans des proportions qui varient suivant la quantitĂ© de travail qui entre dans chaque produit. Sous un rĂ©gime de taxation gĂ©nĂ©ralisĂ©e, cette action est parfois freinĂ©e par une rĂ©vision des marges ; elle s'Ă©largit assez peu sous l'influence des facteurs psychologiques et notamment, de l'augmentation du pouvoir d'achat. Les achats des ouvriers ne sont orientĂ©s que dans une faible proportion vers les produits industriels. Sur les produits agricoles, il en est tout autrement. L'ouvrier dĂ©pense actuellement 70 '% de son salaire en denrĂ©es alimentaires, c'est-Ă -dire pour la quasi-totalitĂ© en produits agricoles. La prime de 1 500 F par mois qui vient d'ĂȘtre accordĂ©e Ă  un million de salariĂ©s ou de fonctionnaires reprĂ©- 498 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE sente en gros 180 milliards de nouveaux instruments d'achat jetĂ©s dans la circulation monĂ©taire, dont quelque 126 milliards seront employĂ©s Ă  acheter des vivres. Si l'on accorde une augmentation globale de 25 % Ă  ce million de parties prenantes, la masse des nouveaux instruments de paiement s'Ă©lĂšve Ă  plus de 400 milliards et celle qui sera employĂ©e Ă  l'achat de produits agricoles Ă  280. RapportĂ©e Ă  la valeur des produits alimentaires sur le marchĂ©, la masse supplĂ©mentaire destinĂ©e Ă  leur achat sera de 10 % environ dans le premier cas, de 20 % dans le second. Cet accroissement de la demande se traduira fatalement par une hausse de prix. Il n'en pourrait ĂȘtre autrement que si l'offre grandissait au moins dans la mĂȘme proportion. Or, cela est impossible au dĂ©but de l'hiver les rĂ©coltes sont faites, le bĂ©tail est Ă  l'Ă©table et non plus Ă  l'engrais ; la production laitiĂšre diminue sous l'effet du froid et du dĂ©ficit alimentaire. Il ne pourrait y avoir d'espoir que dans l'importation or, la crise du dollar interdit toute prospective de ce cĂŽtĂ©. On ne pourra maintenir le niveau actuel des achats de produits essentiels qu'au prix de grosses difficultĂ©s et peut ĂȘtre au risque d'irrĂ©gularitĂ© dans les arrivages. L'offre de produits alimentaires ne sera donc pas accrue, mais diminuĂ©e suivant le rythme saisonnier. La consĂ©quence normale est donc la hausse. Elle sera au bout de quelques semaines au moins Ă©gale au pourcentage aux proportions dĂ©gagĂ©es plus haut. Elle sera vraisemblablement trĂšs supĂ©rieure. Car, il est facile de discerner les Ă©lĂ©ments psychologiques qui vont agir la hausse par ellemĂȘme provoque une rĂ©tention; le vendeur d'un produit qui augmente conserve la marchandise, dans l'attente d'un prix plus Ă©levĂ©. Il faut Ă©videmment que la marchandise puisse ĂȘtre conservĂ©e. Mais, c'est le cas pour la plus grande partie des marchandises d'hiver. La seule exception est celle du lait frais ; encore est-il possible d'en transformer une plus grande part en beurre et en fromage. On peut supposer aussi qu'aprĂšs les gelĂ©es et la saison d'engraissement des porcs, il restera un gros stock de pomme de terre ; vers le mois de mars, il n'est pas exclu que les cultivateurs seront pressĂ©s de les Ă©couler. Mais ce sont lĂ  des faits assez rares. Il faut attendre avril pour voir arriver les primeurs, l'huile d'arachide de la nouvelle rĂ©colte sĂ©nĂ©galaise, pour que la production laitiĂšre se relĂšve, juin pour trouver les premiĂšres rĂ©coltes de l'annĂ©e et les premiĂšres bĂȘtes des herbages. Jusque lĂ , les marchĂ©s seront pĂ©niblement approvisionnĂ©s la tentation est trop grande pour qu'il n'y ait pas une rĂ©tention importante. Elle peut en particulier provoquer en janvier et fĂ©vrier une certaine crise du pain. A ce facteur dĂ©jĂ  puissant peut s'ajouter une espĂšce de panique monĂ©taire, dont la poussĂ©e est vraiment impondĂ©rable. Suivant les circonstances et les rĂ©actions collectives, son influence peut ĂȘtre modĂ©rĂ©e ou considĂ©rable. La politique du gouvernement sera sans doute assez dĂ©terminante ; mais il faut se garder de croire que ce facteur est le seul ni le plus important. On peut discerner quatre Ă©lĂ©ments importants qui influenceront l'Ă©volution du sentiment public et en particulier du sentiment paysan. Le premier est certainement le sort de l'aide amĂ©ricaine. Le plan Marshal [sic} aurait pu produire en juillet un effet psychologique favora- RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 499 ble. Il a Ă©tĂ© entourĂ© de trop de discussions et de trop de dĂ©lais pour que l'opinion ait ressenti une secousse favorable. Mais son Ă©chec plongerait le peuple français dans un profond marasme. L'Ă©volution de la situation internationale est trop complexe pour que l'opinion et en particulier l'opinion rurale y porte un vĂ©ritable intĂ©rĂȘt. Un accord sur des points essentiels, voire un accord complet et dĂ©finitif serait sans doute accueilli avec beaucoup trop de scepticisme pour qu'un effet favorable se produise rapidement ; il ne se dĂ©velopperait qu'avec les consĂ©quences heureuses qui en dĂ©couleraient et par consĂ©quent, lentement et progressivement. Mais une rupture spectaculaire, mĂȘme si elle ne devait pas ĂȘtre dĂ©finitive produirait une impression profonde et dĂ©sespĂ©rante. Les grĂšves retentissent trĂšs loin dans l'opinion rurale et y provoquent un sentiment redoutable d'inquiĂ©tude. On nĂ©glige leurs rĂ©sultats l'effet mĂ©canique de l'augmentation des salaires n'est nullement proportionnel Ă  l'angoisse vĂ©ritable qu'elles font naĂźtre, dĂšs qu'elles atteignent une certaine ampleur. Les Ă©vĂ©nements de mai - juillet l'Ă©tablit [sic] ils ont jetĂ© le trouble dans l'esprit paysan. L'imagination anxieuse a trouvĂ© dans les mouvements ouvriers un commencement de subversion politique et sociale. Peu importe qu'en dĂ©finitive le travail ait repris, qu'une lassitude se soit manifestĂ©e chez les ouvriers. Importe-t-il mĂȘme que le gouvernement ait pu par des mesures Ă©nergiques assurer l'ordre ? Ce n'est pas sĂ»r si du moins les foyers d'agitation n'ont pas Ă©tĂ© dispersĂ©s. On peut supposer que l'Ă©crasement du parti communiste sous des sanctions draconniennes produirait un effet salutaire de soulagement et de confiance. Encore ne faudrait-il pas qu'une action clandestine de quelque envergure survĂ©cĂ»t Ă  cet anĂ©antissement public. L'action clandestine serait plus redoutĂ©e que l'action ouverte. On ne pourrait espĂ©rer une rĂ©action contraire que si la dĂ©saffection et la dĂ©sorganisation communistes Ă©taient Ă©tablies d'une maniĂšre visible. L'Ă©chec des grĂšves de novembre a-t-il Ă©tĂ© assez visible ? L'impression de soulagement qui se manifeste ces jours-ci provient plutĂŽt du retour espĂ©rĂ© Ă  une vie normale que de la libĂ©ration du cauchemar communiste. On peut se demander s'il n'est pas nĂ©cessaire que le succĂšs soit confirmĂ©, soit par un effondrement Ă©lectoral, soit plutĂŽt par une scission de la en tout cas, par un signe Ă©vident de l'affaiblissement communiste. Actuellement, l'hypothĂšque n'est pas complĂštement levĂ©e et l'opinion craint que l'assaut se renouvelle. Les uns se rĂ©servent par peur des reprĂ©sailles, les autres redoutent les pertes matĂ©rielles. Au point oĂč nous sommes, ce problĂšme politique continue Ă  poser trĂšs lourdement sur le relĂšvement de la monnaie. Une autre crainte complĂ©mentaire de celle-ci, est celle de l'instabilitĂ© politique. Le gouvernement ne serait pas stable, ni la majoritĂ© sur laquelle il repose. Ce n'est pas tant parce que ce gouvernement et cette majoritĂ© sont de coalition. C'est encore moins Ă  cause de l'assaut communiste on sait au contraire que l'attaque de l'extrĂȘme gauche soude la coalition. C'est en rĂ©alitĂ© Ă  cause du Gaullisme *. L'intergroupe gaulliste a dĂ©jĂ  manifestĂ© sa mĂ©fiance au gouvernement Schumann [sic] dĂšs sa constitution la prĂ©sence * Ici, en marge du manuscrit, la mention 500 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE de deux radicaux adhĂ©rents au et d'un troisiĂšme dont le penchant est connu n'a servi de rien dĂšs le premier jour. La rĂ©pugnance a Ă©tĂ© vaincue pendant toute la durĂ©e de l'agression communiste. Elle reviendra certainement, le calme retrouvĂ©. De mĂȘme la propagande orale du gĂ©nĂ©ral a Ă©tĂ© suspendue, non point arrĂȘtĂ©e. Il subsiste donc un foyer d'opposition irrĂ©ductible, qui jette sur la soliditĂ© du gouvernement des lueurs inquiĂ©tantes. Le danger est accru du fait que le gaullisme a remportĂ© une victoire aux Ă©lections municipales, que l'opinion a forcĂ© la valeur de cette victoire et qu'il semble reprĂ©senter l'Ă©tat le plus rĂ©cent de l'opinion. Ce ne serait peut ĂȘtre pas de trĂšs grande importance parlementaire, si cette victoire n'avait fortement retenti sur le Il attribue son Ă©chec Ă  la migration d'une importante fraction de ses Ă©lecteurs vers le mouvement gaulliste. Plus encore, il sent l'Église hĂ©sitante, sinon la jeune Église, du moins l'Église officielle qui a acceptĂ© le sans enthousiasme, et certaines congrĂ©gations qui mĂ©nagent toutes les possibilitĂ©s de l'avenir. Le est un peu, en face du gĂ©nĂ©ral, dans l'Ă©tat d'esprit oĂč se trouvaient les socialistes en face des communistes une version qui confine Ă  la peur, mais une peur qui paralyse. C'est cet Ă©tat d'esprit qui a provoquĂ© ma dĂ©mission-. Il laisse les rĂ©publicains populaires du type Schumann sans dĂ©fense devant les attaques possibles du C'est lĂ  qu'est la faiblesse de l'Ă©quilibre actuel des forces. Il est Ă  peine besoin d'ajouter que le gaullisme a disloquĂ© le Rassemblement des Gauches au point de l'annuler. La majoritĂ© actuelle n'a d'existence qu'avec la permission du Gaullisme et naturellement sous son contrĂŽle. Cependant, cette existence prĂ©caire est sans doute plus nocive au contrĂŽleur qu'au contrĂŽlĂ©, si du moins le gouvernement est efficace. Le gouvernement Schumann [sic] vient d'Ă©tablir la possibilitĂ© pour le rĂ©gime parlementaire de surmonter une crise grave, tandis que le gĂ©nĂ©ral de Gaulle renonçait Ă  son discours de Chaillot et attendait dans le rang l'effet des efforts de Moch et de Daniel [Mayer]. Ceci ne fait pas disparaĂźtre la prĂ©caritĂ© de la majoritĂ© qui se trouve derriĂšre le gouvernement ; mais le libĂšre en partie de la protection menaçante dont le couvrait le gĂ©nĂ©ral. L'hypothĂšque gaulliste n'est pas plus levĂ©e que l'hypothĂšque communiste ; mais elle est au moins aussi attĂ©nuĂ©e. Sans doute la possibilitĂ© de la TroisiĂšme Force s'est-elle rapprochĂ©e. La tentative Blum a montrĂ© que, mĂȘme couverte du manteau de son prestige, la notion d'une coalition de dĂ©fense rĂ©publicaine contre toutes les attaques n'avait pas encore fait son chemin. Les socialistes ne sont pas encore complĂštement libĂ©rĂ©s de l'hypnose dans laquelle les tenaient les communistes. Le CongrĂšs de Lyon a marquĂ©, plus fortement que les rĂ©unions antĂ©rieures du parti la volontĂ© catĂ©gorique de rupture. Il subsiste encore cependant un certain nombre de noyaux atteints gravement et surtout socialistes et communistes continuent Ă  vivre ensemble Ă  l'intĂ©rieur de la La grĂšve a, il est vrai, fortement opposĂ© la majoritĂ© et la minoritĂ© du bureau confĂ©dĂ©ral, les dirigeants communistes et Forces OuvriĂšres. Les * En italique, les passages soulignĂ©s par l'auteur dans le manuscrit. RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 501 injures ont commencĂ© Ă  pleuvoir sur les tĂȘtes les plus vĂ©nĂ©rĂ©es ; Jouhaux lui-mĂȘme n'y a pas Ă©chappĂ©. Sur plusieurs points de l'Ă©chiquier syndical postiers, chemin de fer, mĂ©tro etc., des organisations dissidentes ou autonomes se sont créées. La classe ouvriĂšre a marquĂ© par une sorte de rĂ©sistance passive qu'elle refusait d'accepter les mots d'ordre politiques sous le couvert syndical. Mais la scission n'est pas consommĂ©e. D'elle par dessus tout dĂ©pend la libĂ©ration du Parti Socialiste de l'emprise communiste. Le mythe de l'unitĂ© ouvriĂšre est encore puissant et les procĂ©dĂ©s de contrainte, de terreur produisent leur plein effet. Le cours des Ă©vĂ©nements peut changer toutes les perspectives. Si les communistes continuent leur campagne violente, si Ă  la grĂšve ouverte succĂšde la grĂšve perlĂ©e, si l'on retrouve en maintes circonstances les traces de l'intervention Ă©trangĂšre, les yeux achĂšveront de s'ouvrir et le courage renaĂźtra. Si de Gaulle reparaĂźt sur la scĂšne et tente de pousser ses avantages avec rĂ©solution, ou si les communistes marquent un rĂ©pit et retrouvent une noix de miel, tout ce qui a Ă©tĂ© acquis est compromis. C'est en tout cas le problĂšme syndical qui est la clĂ© du problĂšme socialiste. Et la porte n'est pas ouverte. Le second Ă©lĂ©ment de la TroisiĂšme Force, qui est l'Ă©lĂ©ment radical, est mĂ©langĂ© aux Ă©lĂ©ments gaullistes dans un conglomĂ©rat pour tout dire assez friable. Au sein du parti radical, les deux courants, le rĂ©publicain et le gaulliste, sont complĂštement distincts. Il y a peu de contacts entre eux ni communautĂ© de pensĂ©e, ni communautĂ© d'action ; la pratique des votes divisĂ©s y est la rĂšgle et la principale concession Ă  la discipline ne consiste dans l'abstention de l'une des fractions. La seule solidaritĂ© est Ă©lectorale le nombre des Ă©lecteurs radicaux ne permet plus de choix. Quelques personalitĂ©s [sic], comme celle d'Herriot, survivent Ă  la disparition des militants, des organisations, de l'opinion radicale et de son rayonnement. Les autres se font des majoritĂ©s de rencontre, qui varient suivant la gĂ©ographie politique, mais que domine un regret de la TroisiĂšme RĂ©publique. Le credo radical est une oraison funĂšbre. Sans doute les vrais radicaux, rĂ©publicains indiscutables et courageux, rĂ©sistent et rĂ©sisteront sans compromis au Gaullisme ; ils se sentent aujourd'hui mal Ă  l'aise dans leur groupe. Vraisemblablement ils auraient rompu, s'ils ne craignaient le ridicule de la faiblesse ; car ils ne resteraient qu'une poignĂ©e, pour la plupart ĂągĂ©s et dĂ©pourvus de clientĂšle Ă©lectorale. Ce ne serait pas un schisme, mais un suicide, une sorte de hara-Mri pour l'honneur de la RĂ©publique. Quant aux gaullistes ou Ă  ceux qui en sont devenus sans conviction les Ă©lus, il ne faut bien entendu pas compter sur eux. En rĂ©alitĂ©, je crois avoir tirĂ© du Parti Radical le maximum d'efficacitĂ© possible, en le faisant entrer au Gouvernement et en solidarisant les votes de vrais radicaux avec la nouvelle majoritĂ© rĂ©publicaine. Ne parlons pas de l' qui, Ă  part quelques vieux socialistes indĂ©pendants, est le vĂ©ritable siĂšge parlementaire du gaullisme. Quant au ce fut le groupe le plus fidĂšle Ă  mon gouvernement, le plus dĂ©vouĂ© Ă  la RĂ©publique, le plus rĂ©solu Ă  rejeter les communistes, dĂšs lors que ceux-ci se soumettaient Ă  l'obĂ©dience russe, jusqu'Ă  leur dĂ©faite Ă©lectorale d'octobre. Depuis lors, le dĂ©sarroi s'est mis dans ses rangs. Une 502 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE gauche et une droite se sont dĂ©gagĂ©es la premiĂšre considĂ©rant le passĂ© rĂ©cent avec un regret, peut ĂȘtre attĂ©nuĂ© par le souvenir de novembre et de l'Ă©chec de Georges Bidault Ă  la prĂ©sidence ; la seconde, nettement conservatrice, et Ă©lue par des conservateurs, dominĂ©e par l'hypnose gaulliste. Mais les deux fractions ont Ă©prouvĂ© la nĂ©cessitĂ© de souder Ă©troitement pour traverser le passage difficile. L'axe fut naturellement dĂ©placĂ© vers la droite, c'est-Ă -dire vers une politique qui refuse de s'opposer catĂ©goriquement au gaullisme, aussi bien que d'y adhĂ©rer, qui sourit aux gaullistes tiĂšdes pour les attirer dans une majoritĂ© rĂ©publicaine et met l'accent sur l'action contre le communisme. C'est la politique du gouvernement Schumann [sic] singuliĂšrement simplifiĂ©e, il faut le dire, par l'agression bolchevik, mais qui, l'attaque finie, restera uniquement orientĂ©e vers le redressement financier, sans connaĂźtre d'ennemi Ă  droite. Ce tableau ne laisse pas d'espoir Ă  une tentative de majoritĂ© rĂ©publicaine, ni mĂȘme Ă  une majoritĂ© dont les contours seraient nets et la consistance solide. Fatalement, la place est Ă  un gouvernement Schumann [sic] louvoyant Ă  travers les Ă©cueils ; car il ne suffit pas de n'avoir pas d'ennemis Ă  droite pour que la route ne soit pas bordĂ©e d'embĂ»ches. Cela ne veut pas dire que l'heure de la TroisiĂšme Force ne viendra pas. L'attitude indĂ©cise de Schumann [sic], une sympathie supposĂ©e pour le dĂ©tourneront et amortiront les attaques gaullistes contre le gouvernement. La bataille engagĂ©e par le communisme et Ă  demi perdue par lui, enlĂšveront au gaullisme l'avantage qu'il tirait de l'aversion populaire contre le communisme. Et chaque heure qui s'Ă©coule ralentit et Ă©tale le mouvement lancĂ© par quelques manifestations Ă©clatantes. DĂ©jĂ  l'Ă©toile du gĂ©nĂ©ral baisse sur l'horizon lentement, insensiblement, du fait qu'on ne parle plus de lui, qu'il n'apparaĂźt plus comme le sauveur suprĂȘme aux Ă©lecteurs affolĂ©s par la peur. Si une nouvelle attaque Ă©chouait encore, si le redressement monĂ©taire s'amorçait aprĂšs le vote du plan Marshal [sic] les perspectives seraient changĂ©es. Et si en pleine bataille contre le communisme ou en plein redressement monĂ©taire, une intrigue gaulliste s'amorçait, elle ne pourrait trouver de succĂšs que par des complicitĂ©s, d'autant plus improbables que son succĂšs serait alĂ©atoire. D'autre part, supposons la scission syndicale rĂ©alisĂ©e ; le parti socialiste devient le mĂŽle oĂč se briseront les lames communistes. Sa position retrouve dans la bataille sociale ce que lui a fait perdre le dĂ©placement de l'axe parlementaire. Justement parce qu'il a tenu bon, parce qu'avec Moch et Daniel [Mayer] il a Ă©tĂ© aux postes exposĂ©s de la bagarre, il peut s'adresser avec autoritĂ© au pays, devenir le fo3'er vers lequel convergeront les ardeurs rĂ©publicaines. Cela suppose une action concordante du Parti, du groupe parlementaire, des ministres socialistes, l'oubli de certains flirts, l'excision des noyaux communistes, une propagande active, pĂ©nĂ©trant profondĂ©ment les masses et soutenue par une presse parisienne et rĂ©gionale de grande expansion. Le succĂšs n'arrivera qu'Ă  condition que par ailleurs les Ă©vĂ©nements parlementaires et politiques donnent Ă  la notion le sentiment que le rĂ©gime parlementaire est efficace, qu'il ne perd pas son temps en intrigues, qu'il assure la stabilitĂ© gouvernementale et le redressement monĂ©taire. RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 503 II est donc possible de concilier la stabilitĂ© et la rĂ©sistance. Mais il faut aussi reconnaĂźtre que ce n'est actuellement qu'une Ă©ventualitĂ©. Les difficultĂ©s ne sont pas insolubles, mais elles sont considĂ©rables. La situation politique reste l'un des alĂ©as les plus certains du redressement Ă©conomique et financier. Quels que soient les obstacles, le choix ne nous est pas offert il n'y a pas pour la France d'autre issue que d'entreprendre ce redressement et de le mener Ă  bien. Faute de quoi, elle retombera dans le dĂ©sordre avec la perspective d'une phase gaulliste, et, au cas d'Ă©chec du gĂ©nĂ©ral, d'une phase communiste, sans compter les risques que comporte la situation internationale. En l'Ă©tat actuel, quelles sont les mĂ©thodes que doit employer le gouvernement pour restaurer la monnaie ? Le problĂšme des salaires et des prix est mis Ă  tort au premier plan. Ce n'est pas une cause, c'est un effet. Sans doute dans le circuit infernal, l'effet devient cause Ă  son tour. Il n'en est pas moins vrai que ce n'est pas en l'attĂ©nuant que l'on attĂ©nuera le mal, ni surtout qu'on le fera disparaĂźtre. Tout au plus adoucira-t-on les rĂ©percussions sociales et politiques et les effets secondaires que l'accroissement des prix et des salaires entraĂźne. Cela ne veut pas dire qu'il faut renoncer Ă  toute action immĂ©diate sur les prix. Mais il ne faut y recourir que pour Ă©carter des consĂ©quences sociales graves et non dans l'espoir de placer toute l'Ă©conomie sous un commandement arbitraire qui en annulant par la volontĂ© de l'autoritĂ© publique les consĂ©quences d'une cause croirait supprimer la cause elle-mĂȘme. Il faut donc renoncer Ă  tout contrĂŽle des prix, qui ne porterait aucune consĂ©quence sociale importante. Les petits produits de faible consommation ou de luxe doivent ĂȘtre laissĂ©s libres ainsi que tous les produits de l'industrie ou de l'agriculture dont le prix n'a pas d'incidence apprĂ©ciable sur le coĂ»t de la vie. Il faut Ă©galement renoncer aux contrĂŽles inefficaces. Ils sont nombreux et paraissent toujours vexatoires. Le contrĂŽle efficace doit s'Ă©tendre Ă  tout le cycle de la rĂ©partition ; il comporte quatre Ă©lĂ©ments la collecte chez le producteur, le transfert au compte d'un organisme public ou semi-public, la distribution aux consommateurs sous le lien de titres de rationnement, la taxation Ă  tous les Ă©chelons. On a tentĂ© de dissocier ces Ă©lĂ©ments on a toujours abouti Ă  un Ă©chec. Pleven avait imaginĂ© en juin 1945 de taxer les produits au dernier stade de la distribution. C'est sur cette base que le contrĂŽle des prix de la viande a fonctionnĂ© pendant deux ans ; cependant sous cette correction, depuis octobre 1946, que le Ministre du ravitaillement ou les PrĂ©fets, dĂ©lĂ©guĂ©s Ă  cet effet, pouvait procĂ©der Ă  l'achat prioritaire du bĂ©tail achetĂ© trop cher. Tout contrĂŽle s'est Ă©vanoui, les prix n'ont pas cessĂ© de monter ; le rationnement a disparu. On est en rĂ©alitĂ© parvenu Ă  un vĂ©ritable rĂ©gime de libertĂ©, Ă  peine contrĂŽlĂ© dans les cas les plus scandaleux et les plus visibles. 504 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Quand il a Ă©tĂ© impossible d'Ă©tablir un organisme intermĂ©diaire entre le circuit initial et le circuit final, le contrĂŽle a toujours Ă©chouĂ©. Tel fut le cas des lĂ©gumes et des fruits frais, dont le caractĂšre pĂ©rissable exclut tout transfert intermĂ©diaire. Quand le rationnement s'effondre ou est disproportionnĂ© Ă  la production contrĂŽlĂ©e ou collectĂ©e, on aboutit au mĂȘme rĂ©sultat. Tout le systĂšme est dĂ©truit. Tel fut par exemple le cas des textiles l'inflation des points textiles Ă  laquelle procĂ©da Marcel Paul en 1946 conduisit Ă  un tel dĂ©sordre qu'il fallut supprimer le rationnement et qu'il n'y a plus en fait de contrĂŽle des prix. Le contrĂŽle ne peut ĂȘtre maintenu que dans les cas oĂč les quatre Ă©lĂ©ments peuvent ĂȘtre rĂ©unis. Ils sont assez facilement rĂ©alisables pour les principaux produits de la grande industrie. Leur rĂ©union est au contraire trĂšs difficile quand les producteurs sont dispersĂ©es et nombreux. Il en est ainsi notamment pour l'agriculture et c'est justement de la hausse des produits agricoles que l'on souffre le plus. On est cependant parvenu dans quelques cas Ă  des rĂ©sultats satisfaisants pour certaines denrĂ©es agricoles. C'est actuellement encore le fait du blĂ© et des produits laitiers. Dans d'autre cas oĂč le systĂšme a cependant Ă©tĂ© appliquĂ© strictement jusque'n 1945, les rĂ©sultats furent plus discutables la viande par exemple, malgrĂ© la rĂ©quisition, ne fut jamais collectĂ©e que trĂšs partiellement. En 1943, les commissions d'achat ne parvinrent pas Ă  acquĂ©rir tonnes, tandis que les cuirs livrĂ©s Ă  collecte rĂ©vĂ©laient un abattage de prĂšs de La raison s'en trouvait dans l'insuffisance de l'organisme intermĂ©diaire ; dans l'espĂšce, c'Ă©tait le GARV groupement d'achat et de rĂ©partition des viandes. Il acquĂ©rait thĂ©oriquement la viande, la payait et se faisait rembourser par les bouchers ; mais la manutention Ă©tait, sauf dans les grandes villes, faite en pratique par ces mĂȘmes bouchers, qui pouvaient ainsi Ă©chapper facilement au contrĂŽle. D'autre part, les commissions d'achat fonctionnaient dans un climat dĂ©favorable, au milieu de l'hostilitĂ© paysanne et leur rendement Ă©tait trĂšs mĂ©diocre. De mĂȘme pour les pommes de terre, la mĂ©diocritĂ© de la collecte, confiĂ©e en fait Ă  des ramasseurs, ne permit jamais de rĂ©unir que des tonnages trĂšs infĂ©rieurs aux besoins. Cependant, l'organisme intermĂ©diaire, pommes de terre, oignons, aulx avait Ă©tĂ© remarquablement organisĂ© et fut bien gĂ©rĂ©, malgrĂ© quelques influences fĂącheuses. Pourrait-on revenir Ă  une application plus large du systĂšme ? Ce n'est sans doute pas impossible, pourvu que l'on se maintienne dans des limites prudentes. C'est ce que j'ai fait pendant l'Ă©tĂ© 1947 pour les approvisionnements saisonniers de viande. L'achat en France et l'importation nous ont permis d'acquĂ©rir tonnes, qui ont Ă©tĂ© frigorifiĂ©es. Des contrats ont Ă©tĂ© passĂ©s pour la livraison en hiver de tonnes de bĂ©tail gras ; ces contrats comportaient d'une part la garantie contre la baisse au-dessous du du prix d'achat du bĂ©tail maigre, d'autre part, la fourniture d'aliments du bĂ©tail tourteaux de coprah et de palme, son, caroube, cĂ©rĂ©ales secondaires non panifiables en tout quintaux. Ainsi se trouve constituĂ© un RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 505 stock de tonnes qui doit permettre de rĂ©partir dans les grands centres urbains 200 gr par semaine du 1" janvier au 1" juillet. Cependant, l'exĂ©cution de ce programme pose un problĂšme dĂ©licat qui n'est pas rĂ©solu. La ration de 200 grammes par semaine est celle qui Ă©tait en vigueur pendant le premier semestre 1947 et qui d'ailleurs n'a Ă©tĂ© servie que trĂšs irrĂ©guliĂšrement. Elle est trĂšs infĂ©rieure Ă  la consommation moyenne de ces derniers mois, qui a dĂ©passĂ© Ă  Paris un kilo par semaine et par habitant depuis le mois de septembre. Sans doute cette consommation est trĂšs irrĂ©guliĂšrement rĂ©partie ; mais il est hors de doute que la consommation de l'ouvrier qui accomplit un effort physique normal atteint cette moyenne ou s'en rapproche beaucoup. La Ă©value la ration nĂ©cessaire Ă  770 gr et la CFTC Ă  700 grammes. La fixation de la consommation Ă  200 grammes qui eĂ»t Ă©tĂ© acceptĂ©e facilement au printemps 1947, apparaĂźtra en janvier ou fĂ©vrier 1948 comme une rĂ©duction pĂ©nible et qui appelle une compensation. D'autre part, si l'on taxe la viande et si on la rationne, le marchĂ© de la Villette ne joue plus son rĂŽle directeur sa fonction n'est plus qu'une fonction matĂ©rielle de rĂ©ception et de distribution conformĂ©ment aux principes fixĂ©s par l'administration qui donne les ordres d'expĂ©dition aux producteurs, fixe les droits des consommateurs et par consĂ©quent, ceux des bouchers dĂ©taillants, qui sont fonction des inscriptions reçues ou des tickets remis. Le marchĂ© proprement dit sera dĂ©samorcĂ© et ne sera plus qu'un organe d'exĂ©cution entre les mains de l'administration. Les inconvĂ©nients du systĂšme sont faciles Ă  inventorier a — La ration est trop faible pour l'ouvrier habituĂ© depuis l'Ă©tĂ© Ă  une consommation quatre fois plus Ă©levĂ©e. Les consommateurs chercheront Ă©videmment ailleurs le complĂ©ment dont ils ont besoin. b — Les marchands de bestiaux, privĂ©s de l'activitĂ© rĂ©guliĂšre qui consistait Ă  approvisionner la Villette, rechercheront une activitĂ© latĂ©rale et continueront Ă  parcourir les foires et les Ă©tables rurales pour y acheter le cheptel disponible et approvisionner les consommateurs insuffisamment ravitaillĂ©s. c — Les Ă©leveurs, qui ont en hiver peu de bĂ©tail Ă  vendre et qui d'ailleurs sont engagĂ©s par les contrats d'engraissement, seront cependant tentĂ©s pendant la premiĂšre partie du semestre, jusqu'en mars, Ă  se dĂ©barrasser de toutes les bĂȘtes qu'ils ne pourront pas nourrir et qu'ils ne sont pas tenus conventionnellement de livrer. Ce seront en gĂ©nĂ©ral des bĂȘtes de rĂ©forme, vieilles et maigres, sauf dans les rĂ©gions oĂč les aliments du bĂ©tail seront relativement abondants, par exemple dans les contrĂ©es betteraviĂšres oĂč les pulpes offrent encore une nourriture facile Ă  trouver. Les besoins latĂ©raux seront certainement trĂšs supĂ©rieurs aux ressources non engagĂ©es. On peut donc s'attendre Ă  une hausse des prix assez importante. d — Si le marchĂ© de la Villette a Ă©tĂ© dĂ©samorcĂ©, son rĂ©amorçage en juin ou juillet se fera avec quelque difficultĂ©. Il faut s'attendre Ă  ce moment Ă  une hausse importante, pour attirer les vendeurs. Le fait s'est produit Ă  trois reprises pendant le premier semestre 1947. Il ne manquera pas de se renouveler. 506 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Deux procĂ©dĂ©s peuvent permettre de parer Ă  ces inconvĂ©nients. Le premier consisterait Ă  importer la quantiĂ© manquante, soit 2 Ă  tonnes de viande congelĂ©e. On pourrait alors laisser fonctionner le marchĂ© de la Villette ; on n'aurait mĂȘme pas besoin de rationner la population des grands centres. L'Ă©quilibre rĂ©tabli sur le marchĂ© par l'apport Ă©tranger suffirait Ă  maintenir les prix. Les consommateurs trouveraient autant qu'ils ont trouvĂ© en aoĂ»t ou en septembre ; les marchands de bestiaux poursuivraient leur activitĂ© normale sans ĂȘtre aiguillonnĂ©s par une demande pressante des acheteurs ; les Ă©leveurs, moins sollicitĂ©s, ne pourraient pas pousser Ă  la hausse; le marchĂ©, qui n'aurait pas Ă©tĂ© dĂ©samorcĂ©, reprendrait progressivement Ă  partir de juin son activitĂ© normale. Tous les inconvĂ©nients s'Ă©vanouiraient sans difficultĂ©. Le seul problĂšme — et il est de taille — est de savoir si ces importations sont possibles. Peut-on trouver dans le monde les deux ou trois cent mille tonnes nĂ©cessaires ? Si on les trouvait, pourrait-on les payer ? je crains que la rĂ©ponse ne soit nĂ©gative sur les deux points. Les États-Unis, le Canada, l'Australie et l'Argentine sont les seuls pays qui puissent fournir des quantitĂ©s considĂ©rables ; il faut y ajouter un tonnage apprĂ©ciable de porcs danois. A dĂ©faut de chiffres rĂ©cents et complets, je note que la Grande-Bretagne a achetĂ© par des contrats Ă  assez longue durĂ©e, la presque totalitĂ© de la production argentine, que les ont entrepris une campagne pour restreindre la consommation nationale. Seuls les porcs danois et peut ĂȘtre les moutons australiens offrent-ils une ressource nouvelle, qui ne soit pas dĂ©jĂ  absorbĂ©e par la consommation britannique. Il faudrait pour qu'il y eĂ»t des disponibilitĂ©s que la faim des devises l'eĂ»t emportĂ© en Angleterre sur la faim de viande. Je ne crois pas que les restrictions aient pu faire apparaĂźtre sur le marchĂ© mondial un excĂ©dent aussi important que celui dont nous aurions besoin pour une action massive. Par contre, on peut admettre la possibilitĂ© de trouver de 20 Ă  tonnes au Danemark, en Australie, en Argentine et aux États-Unis. Une part importante de ce tonnage sera en porc et en mouton. Sans doute aussi y aura-t-il un pourcentage apprĂ©ciable en conserves, qui s'intĂšgrent mal dans le marchĂ© français de la viande, le consommateur y rĂ©pugnant. Quant au problĂšme des devises, je le crains insoluble. En septembre et octobre, nous n'avons pu couvrir par les ressources en dollars dont nous disposions que les cĂ©rĂ©ales, le charbon et les matiĂšres grasses ce fut presque un drame, quand il fallut y ajouter quelques matiĂšres premiĂšres indispensables Ă  l'industrie et dont le coĂ»t ne reprĂ©sentait qu'un peu plus de dix millions de dollars. Fin octobre, les accords nous donnaient si peu que l'on hĂ©sitait Ă  acheter en novembre tonnes de charbon. Les perspectives de l'aide immĂ©diate » Ă©taient Ă  peine plus larges et elles se sont sensiblement retrĂ©cies en passant de l'Administration au SĂ©nat, du SĂ©nat Ă  la Commission du CongrĂšs. On ne dĂ©passera certainement pas 110 Ă  120 millions de dollars par mois et il est peu probable que le plan dĂ©finitif pour l'annĂ©e 1948 soit beaucoup plus large. Les fournitures essentielles et les services Ă  rĂ©munĂ©rer Ă  l'Ă©tranger absorberont certainement les deux tiers. RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 507 Le bĂ©tail ou la viande Ă  importer entrera en concurrence avec les matiĂšres premiĂšres de l'industrie textiles, cuirs, produits catalyseurs » et les dĂ©penses d'Ă©quipement. Il sera certainement impossible de trouver chaque mois les dix millions de dollars nĂ©cessaires avant janvier, trĂšs difficile de janvier au vote du plan Marshal [sic] et sans doute encore difficile, et en tous cas, beaucoup moins utile aprĂšs l'adoption dĂ©finitive du projet. Je ne crois pas, jusqu'Ă  plus ample informĂ©, que ce programme d'importation soit rĂ©alisable dans une proportion efficace. Mais, j'admets volontiers que, s'il Ă©tait rĂ©alisable, il serait de beaucoup supĂ©rieur Ă  la solution Ă  laquelle on est conduit Ă  son dĂ©faut. Cette solution est d'une orthodoxie dirigiste totale, si l'on veut qu'elle soit efficace. La collecte a Ă©tĂ© faite par les SociĂ©tĂ©s Nationales de congĂ©lations ou d'engraissement, soit par l'achat en foire du cheptel Ă  congeler, soit par la souscription des contrats. Les sociĂ©tĂ©s Nationales forment l'organe Ă©cran qui rassemble les ressources et dirige leur rĂ©partition. Le rationnement assure le contrĂŽle de la distribution. Le systĂšme est complet pour les grands centres urbains. Mais il ne satisfait pas entiĂšrement les besoins des habitants de ces centres et il laisse en dehors de son empire les autres habitants, c'est-Ă -dire les trois autres quarts de la population. Dans le secteur desservi, c'est-Ă -dire pour dix millions d'habitants, le rationnement insuffisant crĂ©e le risque d'un important marchĂ© noir. Il n'est pas difficile de faire parvenir du bĂ©tail sur pied aux abords de la RĂ©gion Parisienne ou dans la zone rurale du Pas-de-Calais, de l'abattre clandestinement Ă  la campagne et de faire parvenir les quartiers jusqu'au centre des agglomĂ©rations. La surveillance ne peut s'exercer qu'aux entrĂ©es de Paris, de Lyon, de Marseille, de Bordeaux ; elle est inefficace sur les grandes routes, toujours doublĂ©es par des chemins de faible importance. Elle exigerait pour ĂȘtre continue, un effectif plus Ă©levĂ© que celui dont dispose actuellement le contrĂŽle Ă©conomique, soit au moins 2 000 hommes coĂ»tant 400 millions et dont le recrutement ne pourrait pas ĂȘtre instantanĂ©. Pratiquement, il faudrait se limiter au quart de cette dĂ©pense on trouverait sans doute 500 hommes parmi les auxiliaires congĂ©diĂ©s et on pourrait les encadrer avec des fonctionnaires dĂ©gagĂ©s des cadres. Ces mesures devraient ĂȘtre complĂ©tĂ©s par une surveillance des restaurants, que peuvent faire la police Ă©conomique parisienne et le contrĂŽle Ă©conomique. Mais, il ne faut pas s'attendre Ă  une rĂ©pression parfaitement efficace et un marchĂ© noir assez onĂ©reux subsistera pour les restaurants — grands ou petits — la clientĂšle fortunĂ©e et les coopĂ©ratives d'usines. Ce marchĂ© noir serait facilement ravitaillĂ© par les dĂ©partements producteurs, si la vente et la circulation du bĂ©tail y Ă©taient 'libres. Il ne faut pas qu'il puisse ĂȘtre expĂ©diĂ© des rĂ©gions libres vers les rĂ©gions rationnĂ©es, Ă  l'exception, bien entendu, des tĂȘtes de bĂ©tail expĂ©diĂ©es en exĂ©cution des contrats d'engraissement. Le mĂ©canisme existe toute expĂ©dition de bĂ©tail doit ĂȘtre accompagnĂ©e d'un titre de transport dĂ©livrĂ© par l'autoritĂ©. Il suffit de suspendre la dĂ©livrance de ces titres et de procĂ©der Ă  l'achat prio- 508 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE ritaire du bĂ©tail expĂ©diĂ© en fraude. La suspension doit s'appliquer aussi bien au bĂ©tail de boucherie qu'au bĂ©tail d'Ă©levage qui sont indiscernables. Chaque dĂ©partement se trouve ainsi condamnĂ© Ă  l'autarcie pour le semestre d'hiver. Mais il se peut que la production de certains dĂ©partements reste excĂ©dentaire, mĂȘme aprĂšs les prĂ©lĂšvements effectuĂ©s au profit des grands centres, et que d'autres soient gĂȘnĂ©s. On parera Ă  ces inconvĂ©nients en accordant aux dĂ©partements dĂ©ficitaires un contingent mensuel pour Ă©viter une invasion dĂ©sordonnĂ©e d'acheteurs sur les marchĂ©s fournisseurs, il serait bon que le contingent soit mis Ă  la disposition d'une mutuelle de boucheurs ou d'un petit nombre d'acheteurs agréés. Ce systĂšme, assez simple et qui rĂ©duit au minimum les surveillances en Ă©vitant d'exposer des dĂ©clarations ou des formalitĂ©s nouvelles, sĂ©pare trĂšs nettement le secteur rationnĂ© des secteurs libres, morcelĂ©s eux-mĂȘmes de maniĂšre Ă  empĂȘcher la reconstitution d'un marchĂ© national pendant le semestre d'hiver. Il se heurtera Ă  certaines rĂ©sistances. Tout d'abord celle des consommateurs des grands centres qui trouveront la ration trop exiguĂ« et s'indigneront d'ĂȘtre rationnĂ©s tandis qu'on se goberge dans les trois quarts de la France. Ensuite, celle des marchands de bestiaux qui, Ă  Paris, seront mis en vacances pour six mois, et en province seront rĂ©duits Ă  un petit trafic local. Enfin, celle des agriculteurs qui se plaindront des obstacles mis au commerce du bĂ©tail d'Ă©levage, surtout au printemps oĂč l'on achĂšte bĂȘtes de trait et vaches amouillantes. Le principal inconvĂ©nient reste la disparition totale du marchĂ© national dont le rĂŽle rĂ©gulateur s'est nettement dĂ©veloppĂ© au cours du dernier semestre et en particulier, depuis octobre. En juin, quand il faudra le reconstituer, la besogne sera ardue elle s'accompagnera de dĂ©sordres dans les achats et d'une hausse trĂšs sensible des prix. Il n'est pas certain que cette hausse n'annule complĂštement les efforts accomplis pendant l'hiver pour maintenir les prix dans des limites raisonnables. On peut cependant espĂ©rer que l'apport sur le marchĂ© d'un certain contingent de marchandise importĂ©e serait de nature Ă  amortir la poussĂ©e spĂ©culative qui ne manquera pas de se manifester. Il faudrait par compte que pendant cette pĂ©riode de transition la ration des grands centres urbains fĂ»t maintenue, quoique les prohibitions de circulation fussent levĂ©es. Si l'on trouve ce systĂšme trop compliquĂ© et que l'on redoute les consĂ©quences du mĂ©contentement produit, on peut imaginer un rĂ©gime intermĂ©diaire. Il consisterait Ă  tenter sous une forme corrigĂ©e une nouvelle expĂ©rience de double secteur, mais en isolant complĂštement les deux secteurs. Le marchĂ© libre subsisterait avec son organisation actuelle et poursuivrait son rĂŽle. Mais la viande provenant du plan de congĂ©lation et des contrats d'engraissement ne sera pas versĂ©e au circuit du marchĂ© libre. CollectĂ©e par les SociĂ©tĂ©s Nationales, elle sera conduite par elle jusqu'Ă  une centrale Ă©tablie dans chaque grande ville, oĂč elle sera rĂ©partie entre un certain nombre de boutiques. Ces boucheries devront ĂȘtre spĂ©cialisĂ©es et ne livrer que la viande du secteur rationnĂ©; contre tickets et au prix fixĂ©. RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 509 Elles seront choisies de maniĂšre Ă  assurer le service d'un secteur soit sur la demande des bouchers, soit, en cas d'insuffisance, par voie de rĂ©quisition. Elles devront ĂȘtre soumises Ă  une surveillance prĂ©cise de maniĂšre que le prix et le rationnement y soient exactement observĂ©s, mais aussi que l'on n'y vende pas ouvertement ou clandestinement d'autres marchandises et notamment pas de viande provenant du secteur libre. Cette organisation peut ĂȘtre rĂ©alisĂ©e pratiquement sans grosse difficultĂ©. Elle sĂ©pare le secteur libre du secteur contrĂŽlĂ© autant qu'il est possible et Ă©chappe dans une certaine mesure aux reproches adressĂ©s au systĂšme du double secteur. Il s'en faut cependant que le systĂšme soit complĂštement Ă  l'abri de toute critique. Une riche Ă©numĂ©ration suffira pour en faire ressortir les lacunes 1° — le marchĂ© libre, mal approvisionnĂ©, subira une forte pression de la demande non satisfaite, le secteur rationnĂ© ayant pris une proportion des ressources plus fortes que la proportion des besoins auxquels il pourvoira. D'oĂč une hausse des prix Ă  la Villette qui peut ĂȘtre plus forte que celle qui se serait produite sur un marchĂ© entiĂšrement libre. 2° — cette hausse aura sa rĂ©percussion sur les prix du marchĂ© rationnĂ©, puisque le bĂ©tail livrable en vertu de contrats d'engraissement est vendu au prix du marchĂ© libre. 3° — elle fixera le prix de base sur lequel partiront les prix d'Ă©tĂ© et les portera Ă  un niveau supĂ©rieur Ă  ceux de 1947. 4° — il n'est pas exclu que des fuites se produisent entre le secteur libre et le secteur rationnĂ©, soit au stade de gros oĂč la surveillance est difficile, soit au stade de dĂ©tail oĂč elle est plus stricte, mais oĂč cependant une part du lot de chaque bouche ne sera pas vendue, les rationnaires ne pouvant payer ou au contraire prĂ©fĂ©rant s'approvisionner entiĂšrement au marchĂ© libre. Les rĂ©sultats seront donc moins favorables qu'on ne peut le penser et l'on retrouvera bon nombre des inconvĂ©nients du double secteur. C'est pourquoi mes prĂ©fĂ©rences vont au systĂšme prĂ©cĂ©dent, malgrĂ© les difficultĂ©s d'application qu'il comporte. Ainsi il est possible, bien que difficile de rĂ©tablir partiellement un rĂ©gime approvisionnement dirigĂ© en viande. Mais, il faut noter qu'il a fallu faire voter une loi, qui a Ă©tĂ© obtenue difficilement, que cinq mois ont Ă©tĂ© nĂ©cessaires pour constituer un stock frigorifiĂ© qui Ă  la fin dĂ©cembre atteindra environ tonnes seulement dont prĂšs de la moitiĂ© provenant de l'importation, que les contrats d'engraissement sont encore Ă  peine souscrits et que les aliments du bĂ©tail disponibles seront tout juste suffisants pour tenir les engagements pris. Et encore ce dernier point appelĂŻe-t-il quelques rĂ©serves et motive-t-il quelques inquiĂ©tudes. Pourrait-on Ă©tendre le rĂ©gime dirigĂ© Ă  toute la France et Ă  toute l'annĂ©e? Techniquement, cette extension n'est pas possible avant plusieurs mois. L'organisation nĂ©cessaire ne pourrait pas ĂȘtre en place avant le second semestre de l'annĂ©e. 510 REVUE D'HISTOIRE MODERNE ET CONTEMPORAINE Elle implique la reconstitution d'un rĂ©seau d'acheteurs, qu'il s'agisse de commission, de nĂ©gociants agréés ou d'agents de l'État le problĂšme est Ă  peu prĂšs le mĂȘme. Il restera trĂšs difficile de restaurer ce systĂšme. On se ralliera sans doute Ă  l'idĂ©e de commerçants agréés, agissant sous le contrĂŽle d'un reprĂ©sentant de la d'une part, d'agents spĂ©cialisĂ©s de l'autre. Les trois personnages Ă©galement difficiles Ă  trouver. Il est Ă  craindre que la sĂ©lection entre les diverses candidatures ne puisse s'exercer et que ce personnel ne soit encore plus mĂ©diocre en 1945 et cependant, sa mĂ©diocritĂ© et son inefficacitĂ© furent alors les meilleurs arguments pour leur suppression. Il faudra d'autre part resserrer la surveillance sur les centres d'abattage ruraux, qui n'ont jamais Ă©tĂ© pratiquement surveillĂ©s et par oĂč se produit une Ă©vasion considĂ©rable. L'obligation de tuer dans des tueries dĂ©signĂ©es n'a pas Ă©tĂ© abrogĂ©e ; mais le crĂ©dit qui servait Ă  payer les contrĂŽleurs a Ă©tĂ© supprimĂ© en juillet. Les agents chargĂ©s de ce contrĂŽle peuvent d'ailleurs ĂȘtre les mĂȘmes que ceux qui surveilleront les achats. Cette rĂ©organisation n'est certainement pas la plus compliquĂ©e. Il n'y a pas cependant Ă  se dissimuler que ce contrĂŽle ne pourra ĂȘtre assez vigilant pour mettre un obstacle sĂ©rieux aux abus. Il faudra rĂ©tablir des GARVA ou l'organisation de mutuelles pour assurer dans chaque dĂ©partement la rĂ©partition des bĂȘtes entre les bouchers, au prorata des inscriptions ou des tickets, gĂ©rer la trĂ©sorerie des achats, facturer la viande aux dĂ©taillants et assurer le recouvrement des prix. Bien entendu ce mĂ©canisme exige le renforcement des sections techniques de la viande dans chaque Direction DĂ©partementale du Ravitaillement, la rĂ©organisation du Service central ; ces organes administratifs ne devront pas seulement surveiller le contrĂŽle des achats, des abattoirs et de la rĂ©partition, mais encore Ă©tablir et gĂ©rer avec l'aide d'une SociĂ©tĂ© Nationale ou d'un nĂ©gociant agréé les plans nationaux d'Ă©changes interdĂ©partementaux, qui constituent la partie la plus dĂ©licate du systĂšme et cependant, la plus importante, puisque c'est de leur exĂ©cution que dĂ©pend l'approvisionnement des grandes villes. II n'y a certes rien qui soit techniquement impossible dans ce programme. Mais, il suppose un dĂ©lai d'au moins six mois pour sa rĂ©alisation, l'embauchage d'un millier d'agents de bonne qualitĂ©, sans que cependant leur avenir soit garanti et le vote de crĂ©dits budgĂ©taires qui peuvent varier entre 300 et 500 millions. Le rĂ©sultat dĂ©pend essentiellement de la qualitĂ© du personnel recrutĂ© et du climat psychologique qui serait créé autour de cette initiative. Ce climat risque d'ĂȘtre franchement mauvais. L'hostilitĂ© violente des marchands de bestiaux et des chevillards est assurĂ©e. Elle se manifestera par des intrigues et des campagnes de presse. L'opposition qui s'est manifestĂ©e contre le plan d'engraissement du bĂ©tail en est un gage certain. L'opposition des bouchers sera moins vive et moins dĂ©terminĂ©e. Elle sera surtout de principe et tendra Ă  rĂ©server l'avenir. Mais le sort du boucher n'est pas trĂšs diffĂ©rent, quelque soit le rĂ©gime adoptĂ©. Il dĂ©pend plus de la marge qui lui est consentie que de la mĂ©thode d'approvisionnement. RÉFLEXIONS DE PAUL RAMADIER, DÉCEMBRE 1947 511 Par contre, les Ă©leveurs et les organisations agricoles seront des adversaires farouches du systĂšme. Ils refuseront tout concours et ne se plieront que sur la menace. Encore feront-ils par ruse ou par rĂ©sistance tout ce qui sera en leur pouvoir pour empĂȘcher l'Ă©tablissement du rĂ©gime. Le consommateur ne sera pas favorable parce qu'il sera rationnĂ© mĂȘme pendant le semestre d'Ă©tĂ© et que cette ration sera trĂšs infĂ©rieure Ă  celle que lui assure le rĂ©gime actuel. Il sera plus sensible Ă  une diminution de ration qu'Ă  une diminution de prix. Quant au rĂ©sultat, il peut ĂȘtre excellent sur les prix, Ă  condition que la taxe soit maintenue au-dessus du prix de revient et que l'on ne tente pas de provoquer une baisse considĂ©rable. En somme, il est possible en partant des cours atteints sur le marchĂ© libre, c'est-Ă -dire dans les foires, au mois de juillet, d'obtenir une baisse saisonniĂšre de 10% et de revenir en hiver au cours de l'hiver dernier, sous rĂ©serve qu'il ne se produise pas pendant cette pĂ©riode une hausse gĂ©nĂ©rale des prix. Si elle se produisait, il devait en ĂȘtre tenu compte dans l'Ă©tablissement des prix d'hiver. Pour la quantitĂ©, c'est tout autre chose. En 1943, sur un abattage total de tonnes, l'organisation qui fonctionnait alors dans les meilleures conditions techniques et sous l'autoritĂ© dictatoriale de Vichy, renforcĂ©e par celles Allemands, la collecte n'a pu rĂ©unir que tonnes, dont furent fournis Ă  l'armĂ©e allemande et rĂ©partis Ă  la population française. Un tiers a Ă©tĂ© abattu clandestinement. Ce rĂ©sultat est le rĂ©sultat optimum qui puisse ĂȘtre atteint. Nous sommes fort Ă©loignĂ©s d'ailleurs des conditions de 1943 l'opinion est braquĂ©e contre le dirigisme ; la presse sera acharnĂ©e et crĂ©era une justification satisfaisante pour tous les candidats la fraude ; les marchands de bestiaux, les Ă©leveurs, les consommateurs seront unanimes contre l'administration. La fraude sera sensiblement plus forte. Il faudra une rigoureuse campagne devant l'opinion et une surveillance trĂšs active pour que l'on se rĂ©signe Ă  ce rĂ©gime de restriction. Si l'on parvient Ă  collecter la moitiĂ© de la viande de boucherie, le rĂ©sultat sera considĂ©rable. Il est vrai que le cheptel est presque reconstituĂ© Ă  l'exception du bĂ©tail gras de l'hiver encore dĂ©ficitaire. On peut Ă©valuer la viande de boucherie produite dans l'annĂ©e Ă  quelque tonnes, dont pourraient ĂȘtre imparties au circuit lĂ©gal. La ration moyenne pour 42 millions d'habitants serait de 20 kilos par an environ, soit 400 grammes par semaine. Elle varierait suivant les saisons entre 200 et 600 grammes, en y comprenant la charcuterie et les abats, qui ont toujours Ă©tĂ© en pratique soumis Ă  un rĂ©gime de rationnement diffĂ©rent. Cette ration correspondrait Ă  la moitiĂ© de la consommation moyenne d'avant guerre, mais avec une rĂ©partition trĂšs diffĂ©rente qui permettait autrefois Ă  la population ouvriĂšre de consommer le double de la population rurale. Le rationnement Ă©tablit l'Ă©galitĂ© et l'abattage clandestin permet au paysan de consommer plus que le citadin. ; ; j Ăź \$\}g\ [Paul RAMADIER.] COMPTES RENDUSAnnie RENDUSAnnie AU siĂšcle d'or, l'Espagne et ses hommes. La population du royaume de Castille au XVI' siĂšcle, Paris, Éd. Economica, 1985, 445 p. L'Espagne de Philippe II fut l'avant-garde europĂ©enne du progrĂšs de l'État, et donc de l'administration. Ceci lui vaut le privilĂšge de possĂ©der les recensements les plus complets, les plus prĂ©cis, les plus fiables, que les archives europĂ©ennes possĂšdent avant le xviir siĂšcle. Seul l'Empire chinois Ă  l'apogĂ©e de chaque dynastie offre une telle aubaine. La thĂšse d'Annie MoliniĂ©-Bertrand est la conclusion d'une oeuvre monumentale, fruit de quinze ans de travail. Dans l'ordre mĂ©thodique l'Édition du recensement de 1591, l'Atlas de la population du royaume de Castille en 1591, son Étude cartographique i. Et puisque le fameux recensement distingue la noblesse et le clergĂ©, les deux articles publiĂ©s dans la Revue d'Histoire Économique et Sociale ; Le clergĂ© », puis les hidalgos dans le royaume de Castille Ă  la fin du xvr siĂšcle. Aproche cartographique » 2. Ce nouveau livre d'Annie MoliniĂ©-Bertrand intĂ©resse donc au premier chef les historiens dĂ©mographes. Il constitue encore un rapport capital de l'École française Ă  l'historiographie hispanique. Le public français sera peut-ĂȘtre dĂ©routĂ© par une approche fort diffĂ©rente de celle des Ă©tudes dĂ©mographiques avec lesquelles il est familiarisĂ©. Les sources ne permettaient guĂšre de privilĂ©gier la dynamique conjoncturelle des phĂ©nomĂšnes. Les recensements donnent la vision figĂ©e du rapport des hommes Ă  l'espace Ă  un moment donnĂ©, mais avec une exhaustivitĂ© qui leur confĂšre d'emblĂ©e valeur de radiographie structurelle d'un pays entier. Vision figĂ©e... relativement. L'auteur a utilisĂ© tous les recensements du xvr siĂšcle, et la chance a voulu que les plus complets se placent aux deux termes chronologiques 1528-36, 1591. De sorte que l'Ă©volution sĂ©culaire enrichit l'analyse de la coupe majeure le grand recensement de la fin du rĂšgne de Philippe II, Ă  la veille de la dĂ©crue dĂ©mographique ; unique et insurpassĂ© avant la seconde moitiĂ© du xvrir siĂšcle. En outre, les agents qui l'ont rĂ©alisĂ© ne se sont pas contentĂ©s de dĂ©nombrer les hommes. Une foule de notations tĂ©nues prĂ©cise le statut juridique des localitĂ©s, dĂ©crit les terroirs et les activitĂ©s. MalgrĂ© tout, l'avalanche de tableaux suivis de sobres commentaires qui constituent la substanoe du livre, a le lyrisme de la presse financiĂšre. La rigueur scrupuleuse de l'auteur, son mĂ©pris manifeste des modes parisiennes en matiĂšre de sciences humaines, ne font rien pour aguicher le lecteur. L'esprit scientifique et exigeant y trouvera son compte la cuisine est frugale, mais savoureuse. Le plat principal, c'est bien entendu l'analyse dĂ©mographique rĂ©gionale sur les 378 000 km2 du royaume de Castille pp. 65 Ă  315. Elle se dĂ©veloppe sur trois axes les effectifs la population, leur distribution par localitĂ©s classĂ©s suivant la taille le peuplement, l'Ă©volution sĂ©culaire. L'inĂ©gale qualitĂ© des sources confĂšre une inĂ©gale prĂ©cision aux rĂ©sultats, sur l'un ou l'autre des axes ou des 1. Édition du recensement de 1591, Madrid, Inst. Nac. de la Estadfstica, 1984 ; Atlas de la population du royaume de Castille en 1591. Univ. de Caen, Éd. Economica, 1976 ; La population du royaume de Castille d'aprĂšs le recensement de 1591. Étude cartographique, Univ. de Caen, Éd. Economica, 1980. 2. Le clergĂ© dans le royaume de Castille Ă  la fin du XVF siĂšcle. Approche cartographique », 1973-1, pp. 6-53 ;
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Pour l’étĂ©, InternetActu vous propose de revenir sur les usages d’internet en compagnie de quelques-uns des chercheurs, sociologues, anthropologues, psychologues qui nous aident Ă  comprendre l’internet. Il y a 4 ans, nous rencontrions AndrĂ© Gunthert, directeur du Laboratoire d’histoire visuelle contemporaine Lhivic, pour Ă©voquer avec lui la rĂ©volution Flickr. Depuis, le web s’est largement installĂ©, mĂȘme s’il a aussi largement montrĂ© ses limites, notamment Ă  transformer tout un chacun en producteur de contenus, d’images, de vidĂ©os, de textes
 Il n’est pas Ă©trange qu’aujourd’hui, ce ne soit plus tant la maniĂšre dont on produit des images qu’il nous intĂ©ressait d’interroger, que la maniĂšre dont on les consulte. Le web crĂ©atif des amateurs est-il en train de cĂ©der le pas face au web des industries culturelles ? Chacun Ă  leur mesure, Hadopi comme l’iPad d’Apple, un outil tout entier dĂ©diĂ© Ă  la consultation », n’en sont-ils pas les premiers symboles ? Le contenu gĂ©nĂ©rĂ© par l’utilisateur User generated content, UGC est-il vraiment le trĂ©sor » du web ? Qu’est-ce qui est plus important finalement sur YouTube, les quelques vidĂ©os créées par les amateurs ou cette transformation radicale de la diffusion ? AndrĂ© Gunthert Sur YouTube, le modĂšle dominant n’est pas celui de la crĂ©ation de contenus. Sur Youtube, nos enfants ne produisent pas de vidĂ©os. Ils sĂ©lectionnent des contenus. Leur usage principal c’est le visionnage. Les chercheurs ont tendance Ă  considĂ©rer la production plutĂŽt que l’activitĂ© de consommation. Ils n’observent pas beaucoup non plus l’espace du partage, qui se situe entre les deux et dont le signalement, tel qu’il se pratique sur Facebook ou Twitter, est certainement l’activitĂ© majeure. On construit nos identitĂ©s numĂ©riques par du signalement d’articles, de vidĂ©os, d’images. C’est du flux qu’on transmet. Les deux activitĂ©s les plus importantes ne sont donc pas du ressort de la production. On est restĂ© avec l’idĂ©e que les nouveaux outils numĂ©riques facilitaient la rĂ©alisation d’images – et c’est vrai -, mais ce n’est rien par rapport Ă  la rĂ©volution de la diffusion. Cette dimension de la consultation est essentielle, d’autant qu’elle ne s’effectue plus comme autrefois. La diffĂ©rence avec les mĂ©dias traditionnels est qu’on y est actif ce que l’on trouve personne » ne l’a trouvĂ© pour nous. Longtemps, pour consulter les contenus nous avons eu besoin de les collectionner
 AndrĂ© Gunthert Mes enfants ne ressentent pas le besoin d’accumuler les contenus. Jeune Ă©tudiant, la BibliothĂšque nationale Ă©tait mon deuxiĂšme bureau, j’y allais presque tous les jours. J’achetais trĂšs peu de livres, seulement les ouvrages rĂ©cents. Un jour, je rends visite Ă  un ami Ă  Fribourg, qui avait une trĂšs belle bibliothĂšque. Il Ă©tait loin de tout, il avait besoin d’un outil de rĂ©fĂ©rence. La conservation des contenus, que nous percevons comme un rĂ©flexe naturel est en rĂ©alitĂ© dictĂ© par un contexte, qui peut Ă©voluer. Pour les images, la situation d’abondance est trĂšs nouvelle. La volontĂ© de rassembler tous les livres existe depuis Alexandrie. Il y a eu des pinacothĂšques, mais il n’y a jamais eu de BNF des images. YouTube ou Google Images offrent des ressources auxquelles nous n’avons jamais eu accĂšs. C’est bien une rĂ©volution de la consultation plus que de la production. Cette rĂ©flexion est liĂ©e aux transformations de la pĂ©riode rĂ©cente et notamment au dĂ©placement de l’investissement social du grand public de l’espace institutionnel vers l’espace personnel. Dans les annĂ©es 1960, les modĂšles sociaux ont le vent en poupe les partis et les syndicats sont les modĂšles d’organisation de la sociĂ©tĂ©, alors que la famille, jugĂ©e conservatrice, est dĂ©valorisĂ©e. Aujourd’hui, c’est l’inverse. La famille est au premier rang de l’investissement social. Le succĂšs de Facebook s’explique si l’on prend en compte ce grand dĂ©placement de la confiance ou de la dĂ©fiance selon le point de vue oĂč l’on se place. Tous les Ă©lĂ©ments en perte de vitesse sont marquĂ©s du sceau des institutions, alors que tout ce qui est marquĂ© du sceau du personnel est valorisé  Et toute l’économie du signalement de Facebook est circonscrite Ă  cette dynamique. Ce ne sont pas tant les capacitĂ©s particuliĂšres de Facebook qui font son succĂšs, que ce qu’il valorise le local, la dimension personnelle, le groupe d’amis comme nouveau noyau social. Dans cette dynamique, l’image est bien sĂ»r situĂ©e du cĂŽtĂ© de la culture privĂ©e. L’image est l’une des choses qu’on n’apprend pas Ă  l’école. Elle se situe du cĂŽtĂ© du modĂšle de l’investissement personnel l’explosion de l’image ne s’explique pas seulement parce que c’est une ressource abondante, facile Ă  produire, mais surtout, parce qu’elle est pour chacun de nous quelque chose d’intime et de proche. Elle appartient Ă  notre culture personnelle, celle, sauvage », que nous avons construit nous-mĂȘmes, comme nous construisons ce que nous cherchons sur Google. Le fonctionnement sĂ©mantique de l’image est plus fluide, moins fixĂ© que la transmission du langage ou d’autres formes d’information codĂ©e. Cela tient en partie Ă  la dimension sĂ©miotique particuliĂšre de l’image, mais surtout au facteur culturel. Tout ce qui appartient Ă  la culture sauvage bouge, circule. Les significations vĂ©hiculĂ©es par l’image ont un grand caractĂšre de fluiditĂ©, de plasticitĂ©. L’image est un outil pour jouer, pour produire du sens second, de la dĂ©rivation
 La contrepartie, c’est le risque de la mĂ©comprĂ©hension, la mĂ©sinterprĂ©tation
 La plasticitĂ© de l’image comporte en elle-mĂȘme une ambiguĂŻtĂ© native, qui favorise par exemple la publicitĂ© ou Ă  la propagande
 La question de notre environnement numĂ©rique interroge en profondeur le passage d’un espace personnel, devenu si dense, Ă  un espace public, devenu multiple. Paradoxalement, est-ce que l’abondance de contenus ne signe pas la fin de leur conservation ? AndrĂ© Gunthert On n’a jamais tout conservĂ©. La photo est d’ailleurs un trĂšs bon exemple on a perdu bien plus d’images qu’on n’en a gardĂ©es, et c’est probablement tant mieux. Pourquoi ? Parce qu’on ne peut pas appliquer les mĂȘmes critĂšres Ă  la production familiale ou privĂ©e qu’à l’oeuvre d’art. L’image a diffĂ©rentes fonctions et notamment certaines qui sont de consommation rapide et pĂ©rimable. Il faut remettre en contexte nos usages des images. On s’aperçoit alors qu’il y a de nombreux cas oĂč l’image ne sert que de façon trĂšs provisoire
 Il y a plusieurs usages de l’image comme il existe diffĂ©rents types de mĂ©moire moyen, court et long terme. L’usage rĂ©cent de photographier le numĂ©ro de sa place de parking est un exemple d’information qui n’a aucune pertinence Ă  long terme. L’erreur est d’appliquer des raisonnements liĂ©s aux modĂšles de l’archive Ă  des activitĂ©s qui n’ont pas vocation Ă  en gĂ©nĂ©rer. Sur Facebook on poste beaucoup d’images. Mais on en dĂ©truit aussi beaucoup. L’usage de la photo sur Facebook est un usage relationnel. Une fois qu’elle a rempli sa fonction crĂ©er du lien, une fonction qui dure entre 24 et 72h, elle n’a plus lieu d’ĂȘtre. Bien sĂ»r, pour les lettrĂ©s, comme les blogueurs, le reflexe de la conservation et de la collection est dans nos gĂšnes. On a commencĂ© Ă  rĂ©flĂ©chir avec des bibliothĂšques
 La collection, c’est les LumiĂšres, la naissance du British Museum, c’est-Ă -dire le moment oĂč on transforme les cabinets de curiositĂ© en rĂ©serves de savoir, en corpus organisĂ©s, en outil culturel. Ce sont des collectionneurs qui ont inventĂ© l’histoire, l’archĂ©ologie. Notre rapport au savoir et Ă  la politique se transforme Ă  partir de lĂ . Cette organisation du rĂ©el se perpĂ©tue, mais une autre logique se superpose celle d’une consommation immĂ©diate et trĂšs rapide des contenus. J’ai perdu successivement 5 ou 6 bases bibliographiques composĂ©es avec Zotero, perdant avec dĂ©pit plusieurs milliers de rĂ©fĂ©rences. Mais je me suis rendu compte que je ne les consultais pas. Nous subissons une pression du prĂ©sent, qui mange le passĂ©. Tout se passe comme si l’offre de nouveaux contenus Ă©tait de toute façon plus importante que le reste. Notre comportement par rapport Ă  l’archive se modifie. Parmi mes collections, les DVD que j’ai achetĂ©s depuis 10 ans sont probablement ceux que j’ai le moins reconsultĂ©s. Comme pour la technologie, oĂč le meilleur modĂšle est toujours celui d’aprĂšs-demain, notre attention est en permanence sollicitĂ©e par la promesse, ce qui s’articule mal avec la mobilisation de nos dĂ©sirs passĂ©s. Nos collections prennent la poussiĂšre, s’étiolent et meurent sans mĂȘme qu’on s’en aperçoive. Ajoutons que dans les discussions que nous avons aujourd’hui sur l’archive, la vision qu’on a de la conservation est souvent idĂ©alisĂ©e. Il faudrait aussi rappeler la dimension contraignante de l’archive. La rĂ©alitĂ© de l’archive, c’est le contrĂŽle de son accĂšs. Notre nouvelle situation, celle de l’accĂšs permanent, pose de nombreux problĂšmes, mais ce qu’elle nous ouvre en termes de ressources est sans commune mesure avec l’état antĂ©rieur. Pour l’instant, ce qu’on a gagnĂ© avec internet est plus prĂ©cieux que ce que l’on a perdu. Chez les plus jeunes, je constate que l’idĂ©e de collection est Ă©trange. L’idĂ©e d’acheter des choses pour les garder les surprend. Ils ont du mal Ă  comprendre l’utilitĂ© de l’archive ils vivent sur l’idĂ©e de l’abondance des contenus, de la disponibilitĂ© permanente et perpĂ©tuelle des images, orientĂ©e vers le futur et non pas vers le passĂ©. Il y a des serveurs qui, magiquement, maintiennent disponibles un contenu dĂ©sirable
 Le contenu de demain sera toujours plus dĂ©sirable que le contenu de la veille, et si tu ne trouves pas ce que tu cherches, tu as toujours Ă  ta disposition un contenu de remplacement. Sur Youtube, il y a toujours une rĂ©ponse. La sĂ©rendipitĂ© est comme une pertinence seconde, qui vient se substituer Ă  la rĂ©ponse exacte. Ce que vous dĂ©crivez Ă  une consĂ©quence
 Le monde est restreint Ă  ce qui est disponible. Ce qui ne l’est pas n’existe pas
 AndrĂ© Gunthert Oui, la question est bien celle de la disponibilitĂ©. Pour exister aujourd’hui dans l’espace culturel, il faut exister dans cet Ă©cosystĂšme lĂ . Vous dessinez la problĂ©matique d’une histoire de la consultation d’internet
 AndrĂ© Gunthert La consultation est difficile Ă  dĂ©crire. Alors que la production est souvent interprĂ©tĂ©e Ă  partir d’une observation au cas par cas, sur le modĂšle de l’oeuvre, la consommation est mesurĂ©e globalement, de façon statistique. Je pense que le paysage de la consultation ne pourra apparaĂźtre qu’à partir d’une observation beaucoup plus rapprochĂ©e et plus prĂ©cise. Sur mon blog, j’essaie d’enregistrer des exemples en contexte Comment nos enfants, en faisant des recherches sur Youtube, lui adressent leurs rĂȘves ? Pour eux, c’est dĂ©jĂ  un rĂ©flexe Ă©vident. Il y a lĂ  de nouvelles problĂ©matiques Ă  crĂ©er. On peut regarder le dĂ©veloppement de jeux sociaux. La visualisation en commun de vidĂ©os Ă  succĂšs, dans un contexte amical ou familial, par exemple. Typiquement, c’est la tante qui n’a pas vu ses neveux depuis longtemps, et qui leur propose de regarder ensemble des vidĂ©os sur son ordinateur. A la maniĂšre des jeux de cartes Panini qu’on Ă©changeait dans les cours de rĂ©crĂ©ation, il y a lĂ  un nouveau rituel social, un Ă©quivalent du conte de fĂ©es racontĂ© au coin du feu ou de la priĂšre avant de s’endormir. Les vidĂ©os vidĂ©o gags, hits, publicitĂ©s originales
 servent de monnaie d’échange pour fabriquer du lien social. On Ă©change de petits objets qui ne coĂ»tent pas cher mais, dont la consommation en commun est prĂ©cieuse, sur le modĂšle anthropologique du don contre-don. Bien sĂ»r, comme le soulignait le sociologue Sylvain Maresca, dans un rĂ©cent billet Ă©voquant la non-utilisation d’écran photo connectĂ© par certains membres d’une famille, l’installation d’une nouvelle culture ne se fait pas sans exclusion. La culture est un combat identitaire, qui ne va pas sans perte ni sans douleur. Et la mĂ©moire alors ? AndrĂ© Gunthert Le discours sur la perte des donnĂ©es numĂ©riques est un leurre. Nous avons aujourd’hui un problĂšme de trop-plein, de tri et de sĂ©lection. Ce dont on a besoin c’est d’une bonne gestion de l’oubli. La discussion sur le droit Ă  l’oubli initiĂ©e par la secrĂ©taire d’Etat Ă  l’économie numĂ©rique est mal posĂ©e, mais elle demeure une bonne question face Ă  l’univers numĂ©rique qui par dĂ©faut conserve tout
 Ce qui est vite ingĂ©rable. Gmail propose de conserver par dĂ©faut tous nos mails. Tout y est accumulĂ©, mais le tri s’effectue grĂące Ă  notre mĂ©moire rĂ©elle par ce dont on arrive Ă  ce souvenir. Ce qu’on a oubliĂ©, c’est ce qui n’était pas important. C’est parce qu’on ne l’a pas oubliĂ© qu’on sait comment retrouver un vieux mail d’il y a trois ans ! Nous avons trop de mĂ©moires numĂ©riques. La bonne rĂ©ponse n’est pas la mĂ©moire, mais l’histoire. L’histoire, c’est ce qui reste quand on a fait le tri, ce qu’on a jugĂ© important, ce qui fait sens. L’une des rĂ©ponses que j’ai dĂ©veloppĂ©es sans m’en rendre compte avec ARHV puis Culture Visuelle, c’est de faire l’histoire en cours de route, d’essayer aussi vite que possible d’interprĂ©ter, de fixer une signification, de focaliser sur les Ă©lĂ©ments symptomatiques
 Produire du sens est une rĂ©ponse efficace en termes de gestion de l’information. L’important, ce n’est peut-ĂȘtre pas les collections de photos qu’on amasse, mais l’acte de produire la photo. Comprendre pourquoi prendre une photo est important au moment oĂč on la prend, plutĂŽt que pour sa pseudo-valeur mĂ©morielle. Ce sont les nouvelles questions qui s’ouvrent Ă  partir de l’observation des outils d’aujourd’hui. Propos recueillis par Hubert Guillaud, le 27 janvier 2010. AndrĂ© Gunthert est maĂźtre de confĂ©rences Ă  l’Ecole des hautes Ă©tudes en sciences sociales EHESS, il dirige le Laboratoire d’histoire visuelle contemporaine Lhivic, premiĂšre Ă©quipe de recherche française consacrĂ©e aux visual studies, qu’il a créé en 2005. Il a fondĂ© en 1996 la premiĂšre revue scientifique francophone consacrĂ©e Ă  l’histoire de la photographie, Etudes photographiques, qu’il a dirigĂ©e jusqu’en 2008. Ses travaux actuels portent sur les nouveaux usages des images numĂ©riques et les formes visuelles de la culture populaire. Il a lancĂ© rĂ©cemment une plateforme de blogs consacrĂ©e Ă  la culture visuelle, sur laquelle il tient son propre carnet de recherche, qu’il faut complĂ©ter par son bloc-note personnel. Image AndrĂ© Gunthert lors d’une rĂ©cente intervention prĂ©sentant Culture Visuelle, par Didier Roubinet. Pour l’étĂ©, InternetActu vous propose de revenir sur les usages d’internet en compagnie de quelques-uns des chercheurs, sociologues, anthropologues, psychologues qui nous aident Ă  comprendre l’internet. L’intimitĂ© au travail Ă©galement disponible en format numĂ©rique est un livre Ă  mi-chemin entre le documentaire et le pamphlet. L’anthropologue Stefana Broadbent, qui travaille au Laboratoire d’anthropologie numĂ©rique du CollĂšge universitaire de Londres, y fait une dĂ©monstration aussi puissante qu’évidente sur l’aliĂ©nation du monde du travail, plus aboutie encore qu’elle ne l’avait fait Ă  TED Global ou Ă  Lift France. Elle montre d’abord l’importance qu’ont acquis en quelques annĂ©es nos communications personnelles. Plus que de nous relier au Village Global », tous les canaux de communication que nous utilisons servent avant tout Ă  communiquer avec une poignĂ©e de gens trĂšs proches se rĂ©sumant le plus souvent au cercle familial. Elle montre ensuite l’aliĂ©nation que reprĂ©sente la sĂ©paration artificielle entre la vie privĂ©e et la vie professionnelle et combien nos pratiques de communication personnelle durant l’activitĂ© professionnelle cherchent Ă  rĂ©tablir l’équilibre affectif duquel nous sommes exclus. Le livre dĂ©fend la thĂšse que plutĂŽt que de chercher Ă  restreindre la communication personnelle sur les lieux de travail, les organisations auraient intĂ©rĂȘt Ă  la faciliter, car elle est fondamentalement bĂ©nĂ©fique au travail et Ă  l’apprentissage. C’est fort de ce propos affirmĂ© avec conviction, que nous avons voulu rencontrer Stefana Broadbent pour continuer Ă  comprendre, avec elle, les mutations de nos Ă©changes. Interview. Dans votre livre vous Ă©voquez les Ă©volutions de nos lieux de travail, mais assez peu les Ă©volutions de la maison, du foyer familial
 Stefana Broadbent J’ai hĂ©sitĂ© Ă  faire un chapitre sur le sujet. Pourtant, oui, notre rapport Ă  l’espace domestique n’a cessĂ© de changer, notamment Ă  mesure que se modifiait notre rapport au travail. On a transformĂ© les espaces de travail en espaces clos, privĂ©s en mĂȘme temps qu’on vidait les maisons des fonctions de travail qu’elles occupaient jusqu’au XIXe siĂšcle. C’est ce mouvement qu’évoque trĂšs bien l’historien Philippe AriĂšs, montrant que quand les bourgeois ont commencĂ© Ă  travailler en dehors de leurs propriĂ©tĂ©s, la maison est devenue un refuge. Le lieu de travail a exclu les communications privĂ©es, et le lieu privĂ© a exclu l’extĂ©rieur. Dans mes recherches, j’ai Ă©tĂ© frappĂ© de constater combien il y avait peu de visites extĂ©rieures dans la maison. Rares sont les personnes, extĂ©rieures au foyer qui y soient invitĂ©. Le nombre de visites extĂ©rieures est globalement trĂšs faible. La privatisation de la maison a conduit Ă  sa fermeture au monde extĂ©rieur. Mais si rares sont les visiteurs physiques qui en franchissent le seuil, les visites virtuelles sont plus nombreuses. La maison est assez permĂ©able aux communications. Quand on observe les usages de Skype ou des messageries instantanĂ©es, on constate qu’il est frĂ©quent que les gens ouvrent une fenĂȘtre vidĂ©o sur un autre espace. Plus que d’avoir une conversation directe et limitĂ©e, les gens utilisent ces systĂšmes de maniĂšre immersive on accĂšde Ă  la piĂšce de l’autre, on peut bouger, voir ce que l’autre fait, parfois mĂȘme diner ensemble et Ă  distance
 Skype d’ailleurs travaille beaucoup Ă  rendre son systĂšme accessible via la tĂ©lĂ©vision, car ils se sont rendu compte que l’usage repose plus sur la communication entre espaces que sur le dialogue en face Ă  face. J’ai eu l’occasion de le dire aux fabricants de webcams, leur expliquant qu’il serait certainement judicieux de proposer des webcams avec des angles plus larges
 Mais ce n’est visiblement pas les produits qu’ils ont lancĂ©s. Ils prĂ©fĂšrent les machines qui suivent les personnes et qui ont un angle assez restreint
 RĂ©sultat, pour l’instant, les gens se baladent avec leurs camĂ©ras pour montrer Ă  leurs interlocuteurs ce qu’ils ont Ă  leur montrer. Image Stefana Broadbent sur la scĂšne de TED Global en 2009. A quoi nous servent les multiples canaux de communications et ils sont d’autant plus nombreux que leur nombre n’a cessĂ© d’augmenter que nous utilisons ? A ĂȘtre reliĂ© au village global ? A ĂȘtre disponible Ă  tous et tout le temps ? Ou Ă  n’ĂȘtre disponible qu’à nos proches ? Stefana Broadbent 80 % de nos Ă©changes rĂ©guliers se font toujours avec les mĂȘmes 4-5 personnes. Bien sĂ»r, dans les 20 % qui restent, il y a beaucoup de variabilité  Les Ă©tudes sur Facebook ont montrĂ© que malgrĂ© nos 120 amis en moyenne, ceux avec lesquels ont Ă©change rĂ©ellement sont peu nombreux. Alors que nous avons tous un grand nombre de personnes disponibles dans les rĂ©pertoires de nos tĂ©lĂ©phones mobiles, dans les listes de contacts de nos messageries instantanĂ©es, dans nos rĂ©pertoires d’e-mails, sur les rĂ©seaux sociaux que ce soit Facebook, Cyworld ou Mixii
, la rĂ©alitĂ© de l’échange rĂ©gulier est que nous communiquons avec peu de personnes et souvent les 4-5 mĂȘmes. DĂšs qu’on demande aux personnes de regarder eux-mĂȘmes la rĂ©alitĂ© de leurs Ă©changes, tout le monde l’admet. Ce que j’ai essayĂ© de montrer, c’est les raisons de cela. Il y a des canaux qui ne peuvent ĂȘtre dĂ©diĂ©s qu’à trĂšs peu de personnes ce sont les canaux synchrones, qui ont tendance Ă  ĂȘtre plutĂŽt vocaux comme le tĂ©lĂ©phone ou Skype. OĂč est lĂ  dans la gestion de la relation. Bien souvent, on Ă©change avec des personnes avec lesquelles l’appel a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© nĂ©gociĂ© par SMS, par tchat
. La synchronicitĂ© favorise le fait qu’on Ă©change avec peu de personnes. Un utilisateur de Skype appelle en moyenne toujours les 2 mĂȘmes personnes. Demander l’attention immĂ©diate de quelqu’un comme on le fait quand on appelle, est un acte socialement trĂšs chargĂ©. Car donner de l’attention Ă  quelqu’un veut dire lui donner un statut Ă©levĂ© et inversement, la personne qui donne l’attention se met dans une position de statut infĂ©rieur. On hĂ©site donc Ă  demander de l’attention Ă  des personnes que l’on estime de statut supĂ©rieur ou que l’on connait mal son chef, une femme dont on est amoureux, etc.. C’est pour cette raison que la voix est dĂ©diĂ© essentiellement aux intimes ou aux personnes avec qui les problĂšmes de statut ont Ă©tĂ© rĂ©solus. D’autres canaux peuvent ĂȘtre dĂ©diĂ©s Ă  plusieurs personnes. Ce sont souvent des canaux asynchrones qui ont tendance Ă  ĂȘtre Ă©crits plus que vocaux, comme l’e-mail. Avec l’e-mail, il faut distinguer l’e-mail professionnel de l’e-mail privĂ©. Ce dernier est de plus en plus dĂ©diĂ© Ă  des activitĂ©s semi-administratives Ă  la maison rĂ©servation, communication avec des institutions – Ă©coles, associations
. C’est le canal semi-professionnel de la maison. Mais on y trouve aussi des conversations privĂ©es, qui lĂ  aussi, bien souvent, concernent peu de personnes. L’e-mail demeure le canal d’envoi des piĂšces attachĂ©es et notamment des photos privĂ©es, mais aussi des blagues et des Ă©changes de PowerPoint thĂ©matiques qui se regroupent en 4 thĂ©matiques selon Elena Angel, Ă©tudiante au dĂ©partement d’Anthropologie de l’UCL les diaporamas religieux, ceux sur le sens de la vie, ceux sur la nature et enfin les diaporamas politiques souvent nationalistes. Ce renfermement sur soi, sur la cellule familiale, sur les quelques proches avec lesquels on communique frĂ©quemment paraĂźt plutĂŽt inquiĂ©tant
 Stefana Broadbent Avec la crise Ă©conomique et Ă©cologique, la question est de savoir si les noyaux familiaux restreints vont ĂȘtre soutenables. Allons-nous revenir Ă  l’accueil intergĂ©nĂ©rationnel dans les foyers ? J’ai tendance Ă  penser que la crise va nous y forcer, que nous allons ĂȘtre contraints Ă  nous regrouper dans des mĂȘmes espaces physiques. En mĂȘme temps, c’est plutĂŽt le contraire qu’on constate l’atomisation de la cellule familiale ! Stefana Broadbent Les personnes qui ont les communications les plus intenses sont souvent des personnes qui ont des problĂšmes financiers, des gens qui ne peuvent pas sortir de leur pays permis de sĂ©jour limitĂ©s, des familles Ă©clatĂ©es
 Dans les maisons Ă  revenus restreints, j’ai toujours Ă©tĂ© Ă©tonnĂ© de voir trĂŽner de grands Ă©crans de tĂ©lĂ©, alors que la taille de l’écran a une incidence directe sur son prix. On pourrait penser que dans les familles Ă  petits revenus, la tĂ©lĂ© devrait ĂȘtre petite. Or c’est bien le contraire qu’on constate. Pourquoi ? Mais parce que c’est l’ensemble des activitĂ©s de loisirs qui passent par cet Ă©cran. On voit les films Ă  l’écran plutĂŽt qu’au cinĂ©ma, on joue sur la console plutĂŽt que de s’offrir des vacances au ski
 Plus les revenus sont restreints, moins on a des expĂ©riences de loisirs diffĂ©rentes. C’est la mĂȘme logique qui prĂ©side Ă  ouvrir une fenĂȘtre Skype avec sa famille quand il est trop cher d’aller la voir. Pourquoi ses relations de proximitĂ©s sont-elles aussi intenses ? Pourquoi utilisons-nous tous ces canaux pour les raffermir ?Stefana Broadbent Contrairement Ă  ce qu’on a longtemps cru, l’innovation sociale dans les comportements de communication n’a jamais Ă©tĂ© dans l’extension des contacts, mais d’abord dans la continuitĂ©, l’approfondissement. La chercheuse Mimi Ito parle de conscience permanente permanent awareness. Nous sommes sensibles Ă  l’état de nos proches oĂč sont-ils le fameux OĂč es-tu ? » ? Que font-ils ? Comment se sentent-ils ? 
 Dans les journaux de communication que nous demandons aux utilisateurs de tenir qui recensent et dĂ©crivent toutes leurs communications, on trouvait tout le temps des messages catĂ©gorisĂ© comme des descriptions de l’état. Avec nos proches, nous voulons toujours avoir la sensation claire de leur Ă©tat. Maintenant, l’intensitĂ© des Ă©changes n’est pas aussi forte qu’il y paraĂźt. Hormis des phases particuliĂšres de stress ou de relations intenses relations amoureuses notamment, on parle de 2 SMS par jour et un appel tĂ©lĂ©phonique pendant la journĂ©e en moyenne. Cette intensitĂ© culmine en moyenne Ă  7 Ă©changes par jour via des outils de communication, mĂȘme s’il y a de fortes variations individuelles il n’est pas rare de trouver des gens envoyer jusqu’à 70 messages par jour. Ce qui donne cette impression d’intensitĂ© est que les comportements demeurent trĂšs stables jour aprĂšs jour. InternetActu Mais n’est-ce pas contradictoire de vouloir ĂȘtre tout le temps en communication avec les gens que nous voyons le plus ? Stefana Broadbent Sur ces questions, j’ai discutĂ© avec des psychologues, mais beaucoup ont tendance Ă  parler rapidement de dĂ©pendance
 Les gens ne savent pas vivre seuls, ont besoin de satisfactions immĂ©diates
 » Les thĂ©ories montrent que ce besoin est surtout liĂ© Ă  la sĂ©paration et Ă  l’attachement. Quand les gens doivent gĂ©rer de l’anxiĂ©tĂ©, souvent, ils tendent Ă  s’appuyer sur des proches, Ă  les interpeler pour gĂ©rer le moment de stress. Ce contact permet en fait de faire diminuer le stress, en en parlant. En observant la nature des communications des gens, on se rend compte que beaucoup des petits contacts que nous avons avec nos proches via les outils de communication moderne sont de cette nature. Bien sĂ»r, tous les Ă©changes qu’on a n’ont pas pour but de gĂ©rer uniquement l’anxiĂ©tĂ©, mais beaucoup de nos Ă©changes sont de cette nature, servant Ă  partager un moment pĂ©nible, une contrariĂ©tĂ©, Ă  l’anticiper Je suis bien arrivĂ© ! », Ă  reprendre le contrĂŽle. Cela se voit encore plus quand les gens ne peuvent avoir accĂšs Ă  des moyens de communication, comme quand ils sont empĂȘchĂ©s par les rĂšglements de leur entreprise ou quand ils ont perdu leur tĂ©lĂ©phone
 Bien souvent, l’absence du mobile gĂ©nĂšre une anxiĂ©tĂ© Ă©norme On ne va pas pouvoir ĂȘtre joint ». Dans notre sociĂ©tĂ© sĂ©curitaire, tous les gens justifient l’achat d’un mobile pour les situations d’urgence. Or, elles ne sont pas si frĂ©quentes. On voit bien qu’il y a une association trĂšs forte entre l’outil qui permet de gĂ©rer des situations d’urgence et le stress de son usage. Quand les gens sont dans des situations de restriction fortes, les oppositions Ă  ces restrictions Ă©voquent d’abord et avant tout des questions de sĂ©curitĂ©s ou d’urgence. Quand on restreint l’accĂšs des tĂ©lĂ©phones mobiles Ă  l’école, les parents sont bien souvent les premiers Ă  s’en plaindre. Maintenant, il est vrai qu’on constate dans notre sociĂ©tĂ© un surinvestissement sur la famille. Y-a-t-il pour autant une perte de la CitĂ©, de l’espace social ? On peut en dĂ©battre. La famille semble ĂȘtre devenue le seul point de repĂšre psychique, Ă©conomique, sĂ©curitaire
 La dissolution de la communautĂ© sociale rend l’extĂ©rieur plus dangereux. D’oĂč certainement le fait qu’on souhaite garder le lien, via la palette des outils qui nous sont disponibles, avec la seule chose qui semble sĂ»re la famille. Quel est le rĂŽle des catĂ©gories socioprofessionnelles sur nos communications ? L’étendue du rĂ©seau social est-elle proportionnelle au niveau de revenu ? Quels sont les effets de la variĂ©tĂ©, la diversitĂ© des relations ? Le tĂ©lĂ©phone mobile de mon collĂšgue ne lui sert qu’à communiquer avec sa femme, mais celui de mon patron aussi ! Stefana Broadbent Dans le cadre des communications privĂ©es, on ne constate pas de diffĂ©rences sociales entre le patron et le collĂšgue. En ce qui concerne l’importance et l’intensitĂ© de nos Ă©changes de proximitĂ©s, nous sommes tous dans le mĂȘme bain. J’ai commencĂ© un projet sur les sans-abris de Londres
 Et je constate que dans les centres sociaux oĂč ils dorment, ils cherchent la prise Ă©lectrique pour charger leurs mobiles ; dans les bibliothĂšques oĂč ils passent leurs journĂ©es, ils prennent d’assaut les ordinateurs pour se connecter Ă  Facebook
 Pour beaucoup, ils ressemblent Ă  n’importe quels Ă©tudiants. Mais ce n’est pas tant la catĂ©gorie sociale de l’individu qui compte, que l’activitĂ© qu’il fait. Plus on est dans des activitĂ©s de type cols bleus, plus il y a de contrĂŽles de vos communications privĂ©es. On peut d’ailleurs Ă©valuer une organisation aux rĂšgles de restriction qu’elle impose sur les canaux privĂ©s. Plus il y a de filtrages, d’interdiction et plus la structure est organisĂ©e avec une forte dĂ©composition des tĂąches, une organisation du travail fondĂ© sur le temps passĂ© plutĂŽt que sur la rĂ©ussite du projet. A l’inverse, les organisations qui laissent de la libertĂ© sont fondĂ©es sur l’autonomie du travail et la rĂ©ussite des objectifs. Les cols bleus sont plus contrĂŽlĂ©s que les cols blancs qui ont plus d’autonomie. DerriĂšre cette distinction, Ă  mon sens, il y a vraiment un modĂšle social de domination. La hiĂ©rarchie distingue des gens auxquels on peut se fier et ceux auxquels on ne peut pas se fier. Selon votre niveau hiĂ©rarchique, vous avez ou pas accĂšs Ă  votre mobile personnel, Ă  YouTube, Ă  Facebook
 Votre livre dĂ©montre l’importance des communications intimes au travail. Mais plutĂŽt que de chercher Ă  les rĂ©duire ou les faire disparaĂźtre, vous suggĂ©rez qu’il faut les faciliter pour Ă©viter les tensions et le stress, accroitre l’acceptabilitĂ© du travail
 Qu’il faut apprendre Ă  l’intĂ©grer plutĂŽt qu’à la combattre
 Stefana Broadbent J’ai beaucoup regardĂ© les questions de contrĂŽle, notamment le contrĂŽle aĂ©rien, nuclĂ©aire ou de transport [NDE voir l’étonnant dĂ©montage d’un accident de transport amĂ©ricain que Stefana rĂ©alisa pour Lift France et dont nous vous avions rendu compte par le dĂ©tail]. Bien souvent, dans les incidents qui ont lieu dans ce secteur on recherche le facteur humain en cause. Ce que m’ont montrĂ© 30 ans de recherches dans le domaine, c’est qu’on ne peut pas rĂ©duire le rĂŽle de l’opĂ©rateur Ă  un rĂŽle de monitoring pur. Cela ne marche pas ! On ne peut pas rester inactif et en Ă©tat de veille pendant des heures. D’autant plus quand les gens peuvent avoir entre les mains des outils qui suscitent leur intĂ©rĂȘt
 C’est Ă©vident qu’ils vont avoir tendance Ă  les utiliser, malgrĂ© les interdictions. A la fin, on punit l’employĂ©, mais on ne se pose pas la question de ce qui a rendu le travail inintĂ©ressant. VidĂ©o Stefana Broadbent sur la scĂšne de Lift France 2010 par Thierry Weber. Or, il faut comprendre comment est organisĂ© le travail aujourd’hui. Ces 20 derniĂšres annĂ©es, grĂące aux TIC, on a isolĂ© les travailleurs, on les a instrumentalisĂ©s, divisĂ©s
 Jusqu’à l’introduction des tĂ©lĂ©phones mobiles, on pouvait encore compter sur la prĂ©sence, sur l’attention de l’employĂ©, mais depuis
 Les mobiles font resurgir toutes les failles de l’organisation du travail telle qu’on l’a construite. Bien sĂ»r, la rĂ©action consiste trop souvent Ă  contrĂŽler, punir, restreindre
 Alors que c’est le travail lui-mĂȘme qu’il faut repenser. On ne peut pas avoir un niveau croissant d’éducation, d’autonomisation, d’habileté  et un contexte de travail aussi pauvre socialement et cognitivement ! Que pensez-vous de l’argument de Nicholas Carr selon lequel nous outils modifieraient nos capacitĂ©s cognitives en rĂ©duisant notre capacitĂ© d’attention et de concentration ? Stefana Broadbent PlutĂŽt que de regarder tous nos canaux de communication comme des distractions, je pense qu’il faudrait plutĂŽt regarder comment le contrĂŽle de l’attention est devenu un thĂšme crucial. Qui peut contrĂŽler son attention et qui n’en a pas le droit ? A qui donne-t-on le droit de la contrĂŽler ? Il y a une distinction sociale de l’attention qui me semble prĂ©pondĂ©rante. L’attention est sociale et non pas cognitive. Carr la regarde comme une capacitĂ© personnelle, Ă©conomique – ne parle-t-on pas de dĂ©pense » ? Or il y a un dĂ©saccord social profond de ce sur quoi nous devons ou pouvons porter attention. Le systĂšme scolaire est totalement construit autour du contrĂŽle de l’attention, un contrĂŽle que n’aurait pas reniĂ© Michel Foucault on isole les enfants, on ne les laisse pas parler entre eux, il y a une figure centrale et toute puissante et toutes les sanctions tournent autour de l’attention. Or nos outils permettent aux gens de devenir plus autonomes et notamment dans leur attention. C’est cet hiatus entre autonomie et contrĂŽle qui créé dĂ©bat. Or, le problĂšme n’est pas tant l’attention que l’objet de l’attention. On dit que les gens gaspillent leur attention, mais la question est plutĂŽt de savoir ce sur quoi ils la gaspillent. Si on regarde plutĂŽt ce sur quoi les gens portent de l’attention, on change d’enjeu. Je suis plus sceptique sur le changement de type neurologique ou mental qu’évoque Carr. Ce type de changement est lent. On assiste plutĂŽt, il me semble, Ă  une transformation des relations entre individus et institutions, plutĂŽt qu’à une modification de nos capacitĂ©s cognitives. C’est d’ailleurs ce dont je parle dans ce livre on assiste Ă  une rupture des croyances que l’on peut avoir sur l’attention, la productivitĂ©, le travail. Certes, il est dĂ©solant que quelqu’un prĂ©fĂšre regarder Lady Gaga plutĂŽt que d’écouter un cours. Mais la question est autre. Pourquoi Lady Gaga est-elle plus attirante qu’un cours ? L’appauvrissement, la simplification du discours, le fait de tout traduire en contenus Ă©motionnels, comme on le trouve dans une grande partie de la presse, sont-ils un effet des canaux de communication ou d’une transformation des contenus mĂ©dias ? On traite toujours l’attention comme un phĂ©nomĂšne de type ressource individuel ». Le plus souvent on utilise d’ailleurs une mĂ©taphore Ă©conomique pour la dĂ©signer comme une ressource rare. Je pense qu’il faut la regarder d’un point de vue social. L’attention est d’abord relationnelle. Quand je donne de l’attention Ă  quelqu’un, je lui donne d’abord un statut. Le statut social est liĂ© Ă  l’attention. Quand on donne de l’attention, on place la personne dans un statut de supĂ©rioritĂ©. Quand on reçoit de l’attention, c’est nous qui sommes placĂ©s dans un statut de supĂ©rioritĂ©. Certains canaux demandent plus d’attention que d’autres, comme ceux qui utilisent la voix, les communications synchrones. D’ailleurs, Ă  une Ă©poque oĂč il n’y avait pas d’autres canaux, il y avait une tolĂ©rance bien plus forte Ă  l’interruption. Aujourd’hui, l’appel non planifiĂ© devient une imposition forte. On interrompt donc sa mĂšre ou son Ă©pouse, mais c’est notre patron qui nous interrompt
 Les canaux asynchrones, comme Facebook, sont particuliĂšrement polis ils ne demandent l’attention de personne, car personne n’a l’obligation de rĂ©pondre. Quand ils le font, c’est vraiment un cadeau. Le risque demeure qu’il se banalise, qu’il créé ses contraintes ou qu’on n’y parle Ă  personne. Quand on regarde d’autres canaux, plus Ă©troits, les obligations sont souvent plus fortes, comme sur Cyworld. Mais ce n’est pas vrai de tous. On est moralement obligĂ© de rĂ©pondre aux mails, car les gens attendent une rĂ©ponse. Le stress et la fatigue de l’e-mail s’expliquent ainsi on ne peut se cacher des rĂ©ponses que l’on doit. Si je ne rĂ©ponds pas, je viole la rĂšgle, celle de l’engagement rĂ©ciproque tacite. C’est pourquoi les gens donnent plus facilement leur adresse Facebook que leurs mails. Les nouvelles technologies ont-elles changĂ© la nature de la confiance Ă  l’oeuvre entre les gens ?Stefana Broadbent Dans mon livre, j’évoque le cas de St Paul’s, une des Ă©coles secondaires les plus prestigieuses de Grande-Bretagne, dont les rĂ©sultats sont exceptionnels et qui a dĂ©cidĂ© d’ouvrir l’école aux mĂ©dias sociaux en permettant aux Ă©lĂšves d’y amener et d’y utiliser tous les appareils qu’ils veulent. MĂȘme dans cette Ă©cole, on sait qu’il y aura des abus et des problĂšmes, mais on les utilise pour discuter. On profite qu’on est dans un lieu d’apprentissage pour Ă©laborer une conscience des comportements sociaux Ă  avoir avec ces technologies. L’apprentissage est d’abord collectif et intĂ©riorisĂ©. L’abus le plus frĂ©quent, c’est l’abus de confiance. Quelqu’un prend une photo d’une personne en situation ridicule ou dangereuse et la transmet Ă  tout le monde. Avant d’ĂȘtre un problĂšme technologique, il y a lĂ  un abus de confiance manifeste. Nous cherchons tous Ă  Ă©laborer des comportements et des rĂšgles autour des nouvelles technologies. Dans certaines situations, des normes sociales vont apparaĂźtre, dans d’autres cas, la sociĂ©tĂ© va Ă©laborer des lois pour les imposer. Aujourd’hui, mes Ă©tudiants ne prennent plus de notes. Ils enregistrent tous nos propos quittent Ă  crĂ©er des montages pour les rĂ©exploiter ensuite hors de contexte. Que dois-je faire ? Dois-je changer ma façon d’enseigner ? Dois-je traiter toutes les conversations comme quelque chose d’officiel ? Je crois que la seule façon de voir est de discuter au cas par cas. Tout cela est tellement nouveau, il faut qu’on utilise les cas pour Ă©laborer la norme qui nous permettra de vivre harmonieusement avec ces technologies. Un article rĂ©cent sur le sujet dans le New York Times, montrait lĂ  encore qu’on ne peut pas traiter autrement les cas d’intimidation en ligne que par la pĂ©dagogie. Mais on trouve plutĂŽt des Ă©coles qui confisquent et brouillent les tĂ©lĂ©phones. L’attitude de fermeture est bien souvent le choix du moindre mal, plus qu’un choix militant, hĂ©las. La question reste de savoir si les abus sont si frĂ©quents que cela. Les mĂ©dias les mettent en avant, car ils portent des questions sur le processus d’élaboration des normes sociales. Ce sont des sujets dont on peut discuter. Il me semble surtout qu’ils ressortent parce qu’ils permettent de discuter de la norme, de dire ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas. Propos recueillis par Hubert Guillaud le 29 mars 2011. La lecture de la semaine, il ne s’agit pas comme d’habitude de la traduction d’un texte anglo-saxon, mais de ma lecture du dernier livre de Michel Houellebecq, La Carte et le territoire, paru Ă  la fin du mois d’aoĂ»t aux Ă©ditions Flammarion. Je ne vais pas faire une critique littĂ©raire de ce livre, rassurez-vous, d’autres, et ils sont nombreux, s’en sont largement chargĂ©. Mais il est possible – en tout cas c’est ce qui m’a frappĂ© -, d’en faire une lecture sous l’angle des technologies. On sait Michel Houellebecq intĂ©ressĂ© par les questions scientifiques. Il est ingĂ©nieur de formation d’abord ingĂ©nieur agronome, puis il a fait ensuite de l’informatique, Les particules Ă©lĂ©mentaires avaient l’aspect, en bien des passages, d’un manuel de physique, et La possibilitĂ© d’une Ăźle Ă©tait aussi une rĂ©flexion sur les utopies posthumaines dont on sait Ă  quel point elles sont importantes dans les problĂ©matiques numĂ©riques souvenons-nous les rapports entretenus par Google, pour ne citer que Google, avec le transhumanisme et autres thĂ©ories de la SingularitĂ©, qui, pour aller vite, postulent un avenir oĂč les technologies pourraient rĂ©soudre bon nombre des problĂšmes humains, la mort notamment. Avec La Carte et le territoire, le questionnement est moins immĂ©diat. Le livre raconte la vie d’un artiste, Jed Martin, qui va connaĂźtre gloire et fortune avec une oeuvre qui a consistĂ© d’abord Ă  photographier des cartes Michelin, puis Ă  peindre Ă  l’huile des personnes au travail, et enfin, dans le dernier temps de sa vie, Ă  faire des photos Ă©tranges, de la nature et d’objets, comme les cartes mĂšres d’ordinateur qui filmĂ©es, sans aucune indication d’échelle, Ă©voquent d’étranges citadelles futuristes ». Les lieux oĂč Houellebecq Ă©crit vraiment, c’est-Ă -dire oĂč il semble se soucier quelque peu de la langue, sont d’ailleurs les longs passages oĂč il dĂ©crit ces oeuvres, ravivant avec pas mal de talent il faut dire le vieux genre de l’exphrasis WikipĂ©dia. Mais l’essentiel pour nous est d’ailleurs. Il est dans trois moments qui sont moins spectaculaires que l’outing de Jean-Pierre Pernault, mais nettement plus intĂ©ressants et importants pour la progression globale du livre. Et d’abord deux longues conversations dans lesquelles, comme souvent chez Houellebecq, sont abordĂ©es des questions thĂ©oriques. Or dans ces deux conversations, est rĂ©animĂ©e une figure passionnante de l’histoire de l’art et de la pensĂ©e, William Morris. William Morris WikipĂ©dia est un personnage important du 19e siĂšcle britannique. Ecrivain, traducteur des sagas nordiques, Ă©diteur, architecte, entrepreneur, thĂ©oricien de ce que l’on a considĂ©rĂ© comme le design moderne, proche des prĂ©raphaĂ©lites, et trĂšs engagĂ© dans les mouvements socialistes. Je note que si William Morris n’est pas trĂšs connu en France, sa pensĂ©e continue d’irradier en Grande-Bretagne, ce n’est pas un hasard si dans la mobilisation rĂ©cente des artistes britanniques contre les rĂ©ductions du budget de la Culture, c’est une phrase de William Morris qui a Ă©tĂ© choisie pour l’affiche publicisant cette mobilisation Facebook. Revenons Ă  Houellebecq. Et Ă  la premiĂšre conversation, celle qui a lieu entre Jed Martin et son pĂšre, un architecte qui a oubliĂ© ses idĂ©aux de jeunesse pour gagner sa vie dans la construction de stations balnĂ©aires. Voici ce que Jean-Pierre Martin explique Ă  son fils Pour les prĂ©raphaĂ©lites, comme pour William Morris, la distinction entre l’art et l’artisanat, entre la conception et l’exĂ©cution, devait ĂȘtre abolie tout homme, Ă  son Ă©chelle, pouvait ĂȘtre producteur de beautĂ© – que ce soit dans la rĂ©alisation d’un tableau, d’un vĂȘtement, d’un meuble – ; et tout homme avait le droit, dans sa vie quotidienne, d’ĂȘtre entourĂ© de beaux objets. Il alliait cette conviction Ă  un activisme socialiste qui l’a conduit, de plus en plus, Ă  s’engager dans les mouvements d’émancipation du prolĂ©tariat ; il voulait simplement mettre fin au systĂšme de production industrielle. » Jed Martin, le hĂ©ros de Houellebecq ne connaissait pas William Morris avant cette conversation avec son pĂšre. Quelques pages plus tard, il a une autre longue conversation avec Michel Houellebecq, qui, comme vous le savez sans doute, est un des personnages principaux de La Carte et le Territoire. Et cette conversation tourne aussi autour des idĂ©es de William Morris. Voici ce que Michel Houellebecq, le personnage, dit Ă  Jed Martin Chesterton a rendu hommage Ă  William Morris dans Le retour de Don Quichotte. C’est un curieux roman dans lequel il imagine une rĂ©volution basĂ©e sur le retour Ă  l’artisanat et au christianisme mĂ©diĂ©val se rĂ©pandant peu Ă  peu sur les Ăźles Britanniques, supplantant les autres mouvements ouvriers, socialistes et marxistes, et conduisant Ă  l’abandon du systĂšme de production industrielle au profit de communautĂ©s artisanales et agraires. » Cette question de la fin du systĂšme de production industrielle, associĂ© Ă  la figure de William Morris, revient donc dans deux moments clĂ©s du livre. Et on la retrouve dans la toute fin de La Carte et le territoire. Si une bonne partie du livre se dĂ©roule dans les annĂ©es 2010, c’est-Ă -dire dans des annĂ©es Ă  venir, la fin est carrĂ©ment une vision de la France des annĂ©es 2040, 2050. Or, comment Michel Houellebecq, l’auteur, imagine-t-il cette France des annĂ©es 2040 ? Il l’imagine comme une rĂ©alisation des utopies de William Morris, mais dans une version technologique. Il imagine une Ă©trange coexistence du numĂ©rique et de l’artisanat. Si dans le moindre cafĂ© de la Creuse, chaque table [est] Ă©quipĂ©e d’une station d’accueil pour laptop avec Ă©cran 21 pouces, prises de courant aux normes europĂ©ennes et AmĂ©ricaine, dĂ©pliant indiquant les procĂ©dures de connexion au rĂ©seau CreuseSat », le paysage de la France est aussi un paysage presque totalement dĂ©sindustrialisĂ©. Houellebecq imagine une France oĂč l’on aurait vu rĂ©apparaĂźtre la ferronnerie d’art, la dinanderie » et les hortillonnages ». Comment ne pas voir lĂ  une victoire dĂ©calĂ©e dans le temps et dans les outils, des utopies de Morris ? Ca me semble ĂȘtre une ligne forte de La Carte et le territoire. Mais si je vous raconte tout ça, c’est parce que je n’ai cessĂ© de penser pendant toute la lecture de ce livre Ă  une tendance forte des technologies contemporaines. Cette tendance, c’est celle dont j’ai dĂ©jĂ  un peu parlĂ© ici, et dont on reparlera bientĂŽt, une tendance qu’on peut rassembler sous le nom de Fab Lab ». En effet, on assiste depuis quelques annĂ©es, sous l’impulsion notamment des Fab Lab du MIT, Ă  un mouvement qui n’est pas si loin des utopies de Morris. Ce mouvement rassemble des gens qui sont trĂšs forts en informatique, mais qui pensent qu’il y a plus intĂ©ressant que le bidouillage des logiciels, il y a le bidouillage du matĂ©riel. Des gens qui dĂ©veloppent par exemple ce qu’on appelle les imprimantes 3D, qui ne sont rien d’autre que des petites usines capables d’ĂȘtre programmĂ©es pour fabriquer des objets. Aujourd’hui, ces imprimantes 3D sont encore Ă©lĂ©mentaires et il y a beaucoup d’obstacles Ă  leur dĂ©veloppement. NĂ©anmoins, ce qui est derriĂšre est passionnant. C’est l’idĂ©e que nous pourrions Ă  terme nous rĂ©approprier la fabrication des objets qui nous entourent. Je tĂ©lĂ©charge dans mon imprimante 3D le programme de fabrication de pinces Ă  linge, et, Ă  condition que je l’alimente de plastique et de mĂ©tal, elle me fabrique des pinces Ă  linge. Je dis pince Ă  linge », mais ça pourrait ĂȘtre des vĂȘtements, des meubles et une multitude d’autres objets. L’idĂ©e Ă©tant aussi que je peux customiser ces objets, que je peux les adapter Ă  mes besoins, leur donner la forme que je veux, que je peux m’abstraire de la standardisation. Bref que je peux m’épanouir dans la fabrication de beaux objets, oĂč l’on retrouve les idĂ©aux exprimĂ©s par Morris. Et puis, on n’est pas loin non plus des prĂ©occupations politiques de Morris, car ces Fabs Labs se dĂ©veloppent en particulier dans les pays oĂč les produits industriels sont inaccessibles aux populations et oĂč le fait de pouvoir les fabriquer Ă  bas coĂ»ts, avec des matĂ©riaux de rĂ©cupĂ©ration, serait une avancĂ©e non nĂ©gligeable. Les plus prosĂ©lytes de ces nouvelles pratiques y voient la fin possible de l’ùre industrielle, l’émergence d’une forme d’artisanat qui ferait la synthĂšse entre autoproduction et technologie. Et l’on retrouve lĂ  la conclusion du livre de Michel Houellebecq, cette France de 2050 dont la vision occupe les derniĂšres pages de La carte et le territoire. Houellebecq ne parle pas explicitement des Fabs Labs dans son roman, ou de quelconques mouvements lui ressemblant. Peut-ĂȘtre n’en connaĂźt-il pas l’existence. Ce qui serait encore plus beau. Mais il s’intĂ©resse aux technologies. Et ce qui est beau, c’est le rĂȘve de l’écrivain qui rejoint une avant-garde technologique. Les deux cherchant chacun de leur cĂŽtĂ© avec leurs outils et leurs substrats thĂ©oriques. Et mĂȘme, sans le savoir peut-ĂȘtre, il rĂ©inscrit ce mouvement dans une histoire longue, une histoire intellectuelle et politique. Si, Ă  l’image de Proust Ă©crivant ce que le tĂ©lĂ©phone Ă©tait en train de changer Ă  son monde, beaucoup de grands Ă©crivains ont pensĂ© et mis en mot les mutations de leur temps, alors oui, Houellebecq est un Ă©crivain qui mĂ©rite d’ĂȘtre lu. Xavier de la Porte Xavier de la Porte, producteur de l’émission Place de la Toile sur France Culture, rĂ©alise chaque semaine une intĂ©ressante lecture d’un article de l’actualitĂ© dans le cadre de son Ă©mission. Une lecture accessible chaque lundi matin sur Cette lecture Ă©tait liĂ©e Ă  l’émission du 3 octobre 2010 qui Ă©tait consacrĂ©e au philosophe Bernard Stiegler, directeur de l’Institut de recherche et d’innovation IRI du Centre Georges-Pompidou et auteur de Ce qui fait que la vie vaut la peine d’ĂȘtre vĂ©cue. Avant-derniĂšre partie de notre plongĂ©e dans l’univers des Makers premiĂšre partie, seconde partie, avec un retour sur l’édition de la confĂ©rence Lift 2010 qui donna lieu Ă  un vivifiant exposĂ© de ce que sont les FabLabs aujourd’hui par ceux qui les font ! Que ce passerait-il si demain n’importe qui pouvait fabriquer presque n’importe quoi ? Ou, pour ĂȘtre un peu moins caricatural, si tout un chacun pouvait fabriquer presque tout ce qu’il voulait ? C’est ce que proposent dĂšs Ă  prĂ©sent les FabLabs abrĂ©viation de Fabrication laboratory, laboratoires de fabrication, ces ateliers permettant Ă  tout un chacun de concevoir et construire tout et n’importe quoi. Quels que soient leurs noms TechShops, HackerSpaces, FabLabs
 des centaines d’espaces de ce type ont rĂ©cemment vus le jour de part le monde. Que s’y passe-t-il ? Comment y travaille-t-on ? Quelles nouvelles perspectives ces endroits permettent-ils ? Telle Ă©tait la question que la confĂ©rence Lift Ă  Marseille voulait poser Ă  certains de ceux qui sont Ă  l’origine de ces nouveaux espaces censĂ© repenser l’avenir de la production. RepRap se rĂ©approprier les outils de production Adrian Bowyer, cet ingĂ©nieur et mathĂ©maticien britannique, inventeur de la RepRap, cette imprimante 3D libre capable d’imprimer des objets en volume, a commencĂ© par citer Karl Marx. Pour Marx, le prolĂ©taire dĂ©signe des travailleurs qui sont rĂ©duits Ă  vendre leur force de travail pour vivre parce qu’ils ne possĂšdent pas d’outils de production. La solution pour libĂ©rer le prolĂ©tariat consistait Ă  faire la rĂ©volution pour confisquer les moyens et les outils de production. On a su par la suite qu’il s’agissait d’une mauvaise idĂ©e, s’amuse Bowyer, mais Marx avait cependant raison sur le diagnostic estime-t-il la pauvretĂ© consiste Ă  ne pas avoir accĂšs aux moyens de production. Image Adrian Bowyer sur la scĂšne de Lift France, photographiĂ© par Florent Kervokian. Adrian Bowyer propose une autre solution au problĂšme qui passe par une autre rĂ©volution, celle d’avoir accĂšs plus facilement Ă  des outils de production. C’est l’idĂ©e qui prĂ©side Ă  la RepRap qu’il a conçu une imprimante 3D capable d’imprimer une partie de ses propres piĂšces, Ă  peu prĂšs la moitiĂ© – le reste des piĂšces pouvant facilement s’acheter dans la plupart des grandes villes. Le prix total d’une RepRap se monte Ă  environ 350 euros. La machine est capable de reproduire des objets en plastique, en dĂ©posant des couches de plastiques les unes sur les autres pour produire des objets pour l’instant d’un volume de presque 20 cm cube vidĂ©o. Elle est capable de s’autorĂ©parer en produisant ses propres piĂšces de rechange on parle de machine autorĂ©plicante. Bien sĂ»r, les spĂ©cifications de la machine sont libres et gratuites, permettant Ă  chacun de construire la sienne. Aujourd’hui, elle est utilisĂ©e dans de nombreux pays occidentaux, et commence Ă  pĂ©nĂ©trer des pays comme l’Afrique. Les utilisateurs peuvent partager et diffuser des plans d’objets conçus pour la RepRap via par exemple un site comme Thingiverse. AprĂšs avoir prĂ©sentĂ© sa machine, Bowyer a tentĂ© de montrer comment la RepRap s’insĂšre dans un fonctionnement global en prĂ©sentant les diffĂ©rentes contraintes que la machine doit relever. Pour lui, il y a diffĂ©rent types de contraintes celle des rĂšgles, de la loi et de la coutume. Au-dessus d’elles, il y a la contrainte Ă©conomique, puis celle de la biologie et celle de la physique, couche fondamentale de l’existence. En ce qui concerne le premier niveau, celui des rĂšgles, du droit, du copyright et des brevets, Bowyer rappelle qu’il est permis d’imprimer n’importe quel type d’objet. S’il existe des contraintes, tout n’est pas interdit, au contraire. Par exemple, si on dĂ©sire rĂ©parer un rĂ©troviseur cassĂ© et qu’on doit lui donner une forme “brevetĂ©e”, on n’enfreint pas la loi. On n’est pas non plus dans l’illĂ©galitĂ© si on reproduit un objet brevetĂ© qu’on ne souhaite pas vendre. Au niveau Ă©conomique, la RepRap, avec son prix moyen de 350 euros, est bien moins chĂšre que la moins onĂ©reuse des imprimantes 3D 12 000 euros pour les premiers modĂšles. Elle est Ă©galement Ă©cologique puisqu’elle ne consomme que 8 grammes de carbone pour produire un objet et en enferme 17 dans les objets imprimĂ©s. Sur le plan biologique, la machine repose sur la notion d’autoreproduction propre au vivant. Quant au plan de la physique, il n’est pas sĂ»r que la centralisation et le grossissement soit un principe d’évolution unique pour les ĂȘtres vivants comme pour les objets. Si c’est aujourd’hui le cas par exemple des voitures, qui sont créées dans des usines de plus en plus imposantes, d’autres mouvements vont dans le sens inverse, favorisant plutĂŽt la dĂ©centralisation et la rĂ©duction. La machine Ă  laver personnelle a ainsi remplacĂ© la blanchisserie centrale. C’est dans cette derniĂšre logique que se situe la RepRap
 avec l’espoir qu’un jour, les gens possĂšderont chez eux de plus en plus d’outils effectuant un travail longtemps rĂ©servĂ© aux industries. FabLabs des fabriques de communautĂ©s Quand il avait cinq ans, Ton Zijlstra blog Ă©tait persuadĂ© que ses grands-parents Ă©taient des gens trĂšs riches ils avaient leur propre jardin potager, ainsi qu’un atelier oĂč son grand-pĂšre pouvait rĂ©parer tout ce qu’il voulait. Et pour le petit Ton, ĂȘtre capable de pouvoir faire les choses par soi-mĂȘme reprĂ©sentait une richesse extraordinaire. Image Ton Zijlstra sur la scĂšne du théùtre de la CriĂ©e Ă  Marseille, photographiĂ© par Florent Kervokian. Adulte, il s’est retrouvĂ© Ă  travailler en solitaire, isolĂ©, alors mĂȘme qu’il occupait un poste de directeur dans une entreprise. Et c’est grĂące Ă  son blog qu’il a pu se rĂ©aliser “j’avais plein de connexions dans le monde entier, un feedback extraordinaire. Et c’est en combinant les deux, la rĂ©silience de mes grands-parents, et le rĂ©seau global” qu’il a commencĂ© Ă  s’interesser aux FabLabs, ces espaces imaginĂ©s il y a presque 10 ans par Neil Gershenfeld, directeur du Laboratoire Bits and atoms du MIT, comme il l’expliquait Ă  TED 2007. Les FabLabs, explique-t-il dans sa prĂ©sentation, sont ces endroits qui contiennent des machines qui permettent de faire n’importe quoi y compris des machines », mouvement dans lequel il est trĂšs impliquĂ© depuis, et qui, pour lui, repose sur ces deux fondements la possibilitĂ© de pouvoir fabriquer, par soi-mĂȘme, et celle de pouvoir en discuter, en insĂ©rant ces fabrications personelles dans une communautĂ©. “Il faut respecter les concepts d’accessibilitĂ© ouverte et d’utilisation pour tous, et donc que ce soit ouvert, qu’on puisse y entrer, y partager expĂ©riences et compĂ©tences. Il s’agit aussi d’y construire une communautĂ©. » Pour lui, un FabLab doit ĂȘtre “libre”, et ĂȘtre dotĂ© de machines imprimantes 3D, dĂ©coupeurs laser ou vynil, RepRaps, etc. et des logiciels, pour concevoir, construire et fabriquer. Mais surtout, il ne faut pas qu’il n’y ait qu’un seul FabLab, mais plusieurs, d’abord et avant tout pour Ă©changer. Le premier FabLab nĂ©erlandais a Ă©tĂ© créé en 2007 Ă  Amsterdam. Depuis, quatre autres ont Ă©tĂ© lancĂ©s au Pays-Bas Utrecht en 2008, La Haye en 2009, Groningen et Arnhem en 2010, et au BĂ©nĂ©lux Ă  Louvain et Gent notamment, dont un FabLab mobile, et 11 autres projets devraient voir le jour dans les 18 mois Ă  venir 7 autres projets seraient en cours d’élaboration en France dont le FabLabSquared, un prototype mobile. Ces projets sont indĂ©pendants, mais connectĂ©s des rĂ©unions rĂ©unissent rĂ©guliĂšrement, non seulement leurs dirigeants, mais Ă©galement leurs utilisateurs, des confĂ©rences annuelles leur permettent de rencontrer les autres FabLabs du monde entier comme la 6e confĂ©rence internationale des FabLabs qui aura lieu en aoĂ»t Ă  Amsterdam, mais ils partagent Ă©galement certaines compĂ©tences et ressources humaines, Ă  l’image de ce spĂ©cialiste pointu de l’impression en 3D, qui passe d’un FabLab Ă  un autre et permet de mutualiser son expertise, et son coĂ»t. A la question de savoir si ces FabLabs pourraient se retrouver en concurrence, Ton Zijlstra rĂ©pond que non, parce que chacun d’entre eux est unique en son genre, bien ancrĂ© dans sa communautĂ©, dans sa ville, avec son propre Ă©cosystĂšme, qu’ils rĂ©pondent aux besoins locaux, et sont suffisamment diffĂ©rents pour ne pas se marcher sur les pieds. On a une infrastructure, qui donne un effet rĂ©seau, et chaque nouveau FabLab augmente la valeur des autres, parce que ça apporte une expertise nouvelle, parce qu’on peut dire que pour telle chose il vaut mieux s’adresser Ă  tel ou tel FabLab. » ConcrĂštement, on y fait quoi ? Difficile de dresser de grandes lignes, et un FabYearBook revient chaque annĂ©e sur les projets les plus marquants. Ton Zijlstra n’en cite pas moins un rideau fait en bĂ©ton, des mobiliers de bureau, bijoux, lampes, jeux, stickers, T-shirts, robots
 créés tant par des particuliers que sous forme de prototypes par des professionnels notamment via un concours de conception permanent, mais Ă©galement un projet de prothĂšses coĂ»tant moins de 40$, Ă  destination des pays Ă©mergents, ou encore le projet Big Bird destinĂ© Ă  aider les villages indiens Ă  rĂ©cupĂ©rer l’eau de la pluie
 Dans sa prĂ©sentation des FabLabs, Ton Zijlstra montre une communautĂ© organisĂ©e, en rĂ©seau, qui utilise tous les moyens de communication d’aujourd’hui mĂȘme un canal vidĂ©o, s’appuyant notamment sur une universitĂ© permanente oĂč les projets se rencontrent les uns les autres, qui explore des modĂšles Ă©conomiques de longue traĂźne en partie locaux et en partie via le rĂ©seau. Et qui a encore pour dĂ©fi de continuer Ă  consolider sa communautĂ©, de rĂ©ussir la construction d’un Ă©cosystĂšme local. FabLabs La puissance du rĂ©seau Haakon Karlsen Jr, est le crĂ©ateur de la FabFoundation et du FabLab NorvĂ©gien installĂ© au-dessus du cercle Artique. Tout Ă  commencĂ© par l’installation d’antennes et de capteurs sur des moutons dont Haakon Ă©tait propriĂ©taire pour repĂ©rer leurs dĂ©placements dans la montagne. C’est pour trouver une solution technique Ă  ce besoin qu’il a dĂ©veloppĂ© le premier FabLab norvĂ©gien. Image Haakon Karlsen Jr, l’organisateur de la FabFoundation, photographiĂ© par Florent Kervokian. Le FabLab a Ă©tĂ© montĂ© en octobre 2002 et a ouvert en juin 2003. Au dĂ©but, il ne consistait qu’en une fraiseuse, une machine Ă  dĂ©couper et quelques ordinateurs installĂ©s dans une grande de ferme. En 2003, Neil Gershenfeld, directeur du Centre Bits et Atomes du MIT et crĂ©ateur du modĂšle des FabLabs a envoyĂ© une machine Ă  dĂ©coupe laser du MIT qui est devenu depuis la machine de base du FabLab. Il en a envoyĂ© de nombreuses autres alors que le projet se transformait en un “village de l’invention” en 2005. Le FabLab norvĂ©gien, malgrĂ© sa situation gĂ©ographique particuliĂšre accompagne quelques 120 projets par an et accueille chaque annĂ©e quelque 6000 personnes et plus de 5 millions de visites sur son site web. Le FabLab au dĂ©but Ă©tait un endroit de prototypage rapide permettant de reproduire tout et n’importe quoi. Mais dĂ©sormais, c’est avant tout un rĂ©seau de personnes souhaitant coopĂ©rer et partager leurs connaissances. Les outils permettent d’atteindre cet objectif, comme le rĂ©seau de vidĂ©oconfĂ©rence qui les relie, explique Haakon Karlsen Jr avant de montrer un reportage de CNN prĂ©sentant le FabLab du cercle arctique. Il est devenu difficile de dĂ©nombrer le nombre de FabLabs existants dans le monde. Et il a fallu du temps Ă  la fondation pour qu’elle organise et structure le rĂ©seau et les missions, entre les laboratoires .org, les services commerciaux .com et Ă©ducatifs .edu. Le FabLab est un endroit pour rĂ©pondre aux besoins des gens quels qu’ils soient explique Haakon Karlsen Jr. en se souvenant d’une femme venue leur commander un moule pour crĂ©er des chocolats, puis un autre
 puis une boĂźte pour les emballer. Puis 100. Puis 1000 puis 10 000. Le FabLab a fini par lui en fabriquer 40 000 ! Jusqu’à devenir trop petit pour cela
 De nombreuses petites entreprises se lancent ainsi, petit Ă  petit, en commençant une production unitaire. Le FabLab du Kenya produit des mĂ©dicaments antipaludĂ©ens, et disposent d’une vingtaine d’employĂ©s. Nous faisons Ă  la fois de la recherche, de l’éducation et de la commercialisation
 Mais c’est lĂ  encore une difficultĂ© on a des problĂšmes pour aider Ă  la crĂ©ation de commerces et d’entreprises notamment. » MalgrĂ© ces succĂšs, il nous reste du chemin Ă  faire pour mieux esquisser le rĂ©seau des FabLab », estime celui qui en est le maĂźtre d’oeuvre. Et de nous inviter au BootCamp annuel qu’il organise au fin fond de la NorvĂšge, pour partager et Ă©changer techniques, projets mais aussi savoir-faire autour de la gestion et de l’organisation des FabLab. On y va ? Hubert Guillaud, Jean-Marc Manach, RĂ©mi Sussan De quoi le mouvement Makers est-il le nom ? Le mouvement makers est en plein essor, comme le montre la multiplication des lieux qui leurs sont dĂ©diĂ©s voir la premiĂšre partie de ce dossier. L’éclosion des TechShops, des foires, des ateliers, qui sont pour beaucoup dans une logique de dĂ©veloppement et d’essaimage du modĂšle y participe pleinement. A certains endroits, Ă  San Francisco, le TechShop est au cƓur de la rĂ©habilitation d’un quartier comme c’est le cas Ă  South Market. Mais surtout, ces lieux s’implantent au coeur d’un Ă©cosystĂšme qui favorise leur dĂ©veloppement Ă©coles, musĂ©es, start-ups et grands acteurs de l’internet qui souhaitent redĂ©ployer leur activitĂ© en centre-ville
 Faire sociĂ©tĂ© des lieux et de leurs enjeux Pour Michael Shiloh, l’enjeu va bien au-delĂ  des lieux. Il consiste Ă  rĂ©introduire l’envie de faire des choses. Il consiste Ă  permettre aux enfants de faire et pas seulement d’apprendre ». Avec ses ateliers itinĂ©rants, Michael Shiloh souhaite montrer Ă  chacun son potentiel de crĂ©ativitĂ©. Il faut redonner confiance aux enfants, leur apprendre Ă  faire des choses
 » On devine derriĂšre ce mouvement makers, un vĂ©ritable enjeu pour un apprentissage diffĂ©rent. On pense bien sĂ»r Ă  nos Ă©coles, Ă  nos enfants, oĂč la culture du faire est trĂšs peu prĂ©sente si ce n’est inexistante. En France, il y a fort heureusement quelques initiatives comme celle des petits dĂ©brouillards qui proposent des ateliers aprĂšs l’école. Mais ce n’est que trop embryonnaire
 Plus encore, on devine derriĂšre ce mouvement une vraie remise en cause de notre systĂšme Ă©ducatif et de nos maniĂšres d’apprendre, comme l’expliquait Kevin Kelly dans un rĂ©cent article ce que nous apporte avant tout la technologie ne repose pas sur des solutions toutes faites, mais au contraire, sur le fait que la technologie nous pousse toujours Ă  apprendre. La leçon de la technologie ne repose pas dans ce qu’elle permet de faire, mais dans le processus. » En donnant tout entier corps au processus, Ă  l’action de faire », les makers rappellent quelque chose d’essentiel Ă  l’apprentissage. Reprendre confiance dans sa capacitĂ© Ă  crĂ©er Les animateurs de workshops rencontrĂ©s ont partagĂ© avec nous un constat fort la plupart des participants manquent de confiance en eux en ce qui concerne leur capacitĂ© Ă  crĂ©er. Pour Michael Shiloh comme pour Mike Petrich du Tinkering Studio, pour Dale Dougherty de Make Magazine comme pour Paulo Blikstein du FabLab de Stanford la rĂ©assurance est une des problĂ©matiques qui doit ĂȘtre anticipĂ©e dĂšs les phases de crĂ©ation et d’animation du lieu de fabrication numĂ©rique. Image visite du Maker Space avec Michael Shiloh. Tout le monde ne s’improvise pas designer ou ingĂ©nieur Ă©lectronique – et ce n’est d’ailleurs pas la vocation de ces lieux. La dĂ©marche pour la plupart des acteurs du rĂ©seau consiste donc Ă  associer plusieurs pratiques, visant toutes Ă  crĂ©er un environnement crĂ©atif rassurant tout en restant ambitieux. Parmi ces bonnes pratiques », trois nous semblent essentielles au sein mĂȘme du lieu de fabrication l’équipe d’animateurs, la dynamique de communautĂ© et l’organisation de l’espace. Dans tous les maker spaces » que nous avons visitĂ©s, l’accueil et l’accompagnement par les animateurs du lieu ont Ă©tĂ© formidables. TrĂšs grande disponibilitĂ©, attention particuliĂšre Ă  nos demandes et partage d’expĂ©riences l’équipe de jeunes chercheurs facilitateurs » du FabLab de Stanford aussi bien que les artistes du Shipyard, les Dream coachs » de Techshop comme les membres de Noisebridge. L’échange et la rencontre font rĂ©ellement partie intĂ©grante de la culture du faire » qui anime ces lieux, mĂȘme si les styles peuvent ĂȘtre trĂšs diffĂ©rents. Pour le nouvel arrivant comme pour celui qui rĂ©alise ses projets au long cours, la vie en communautĂ© est un des autres aspects forts qui permettent d’encourager la confiance en soi et la crĂ©ativitĂ© individuelle. Parce que chacun a ses champs de spĂ©cialitĂ© Ă©lectronique, dĂ©coupe du bois, couture, ou simplement le dĂ©sir d’apprendre et de participer, le travail en Ă©quipe est naturellement encouragĂ©. A The Crucible Ă©norme espace d’apprentissage manuel Ă  Oakland par exemple, les ateliers de rĂ©parations de vĂ©lo rassemblent les enfants du quartier dans l’atelier chaque samedi, Ă  The Shipyard atelier d’artistes situĂ© lui aussi Ă  Oakland la cour principale voit se monter chaque annĂ©e les projets fous prĂ©sentĂ©s Ă  Burning Man qui mĂȘlent mĂ©tal, feu, Ă©lectronique, sur lesquels travaillent ensemble des groupes de 10 personnes au minimum voire 60 ou 200 selon les projets. Tout le monde est invitĂ© Ă  participer et le credo principal, relayĂ© en permanence est toi aussi tu peux le faire ». Donner confiance passe par l’échange humain donc, mais aussi par la dĂ©monstration de ce qui peut ĂȘtre rĂ©alisĂ©. Un Ă©vĂ©nement comme Maker Faire par exemple, Ă©norme rassemblement de makers » qui se dĂ©roule fin mai dans la Bay Area et dans bien d’autres villes Ă  travers le monde dĂ©sormais, a pour vocation Ă  la fois d’ĂȘtre une formidable caverne d’Ali Baba de crĂ©ations faites maisons, originales et incroyables prĂ©sentĂ©es par plus de 600 exposants, mais aussi de montrer que derriĂšre chacun de ces projets se cache un amateur passionnĂ©, qui a souvent appris et essayĂ© par lui-mĂȘme pendant son temps libre. Transformer, partager vers une culture Open Source de la fabrication numĂ©rique Les lieux de fabrication numĂ©rique sont le théùtre d’inventions en tout genre, d’expĂ©rimentations et de mise en place de projets souvent extraordinaires ! Parce que le mouvement maker dĂ©fend l’idĂ©e de mettre de l’art dans la science et de la science dans l’art, les projets qui voient le jour sont trĂšs souvent inĂ©dits, particuliĂšrement inventifs et humains. A The Shipyard par exemple, oĂč une vingtaine d’artistes a installĂ© ses ateliers dans des containers Ă  bateau, a Ă©tĂ© crĂ©e une cĂ©lĂšbre art car voiture-Ɠuvre en forme de maison victorienne mouvante prĂ©sentĂ©e plusieurs fois Ă  Burning Man. Alors que lors de notre visite d’American Steel Ă  Oakland un quartier composĂ© de hangars et d’ateliers d’artistes certains Ă©taient occupĂ©s Ă  dĂ©couper un petit avion pour un projet d’envergure ; d’autres ont créé Ă  Noisebridge un robot fauteuil roulant Ă©quipĂ© d’un capteur de mouvement issu de la console Kinect de Microsoft. Ces exemples qui sont avant tout des expĂ©rimentations soulignent aussi ce goĂ»t gĂ©nĂ©ralisĂ© du hacking, du dĂ©tournement d’objets, et la volontĂ© permanente de comprendre comment les choses fonctionnent et peuvent ĂȘtre modifiĂ©es. Image la voiture-oeuvre en forme de maison victorienne
 Ce postulat d’ouverture et d’échange est plus qu’un simple goĂ»t pour le travail collectif, il s’agit d’un vĂ©ritable parti-pris, aussi fort que celui qui anime les dĂ©fenseurs de l’Open Source. Les lieux de fabrication numĂ©rique sont ainsi un terrain d’expĂ©rimentation pour l’Open Source Hardware, c’est-Ă -dire non pas seulement pour la conception de logiciels, mais pour la crĂ©ation d’objets dont la conception et fabrication est ouverte Ă  tous. Au sein de ces lieux, la plupart des objets sont en effet créés collectivement et souvent Ă  partir d’autres objets. La pratique la plus courante consiste Ă  partager sa crĂ©ation avec le reste des membres, en mettant en ligne plans, instructions, liste des matĂ©riaux, recommandations
en bref, tout ce qui permet de reproduire l’objet chez soi, de le rĂ©utiliser, le dĂ©tourner, l’amĂ©liorer. L’ensemble des makers rencontrĂ©s fait le mĂȘme constat le projet a plus de chance de rĂ©ussir s’il est partagĂ© avec les autres parce qu’il s’enrichit et s’amĂ©liore au contact de la communautĂ©. La paternitĂ© de l’objet est aussi d’autant plus reconnue et protĂ©gĂ©e que le ou les crĂ©ateurs prĂ©sentent leur projet et l’exposent aux autres. Publier son projet sur le site amĂ©ricain de rĂ©fĂ©rence en matiĂšre de tutoriaux de fabrication, son fichier 3D sur ou prĂ©senter son projet Ă  Maker Faire font souvent partis du trio lĂ©gitimant. Une tendance forte parmi les projets créés – et d’autant plus que ces lieux sont frĂ©quentĂ©s par nombre d’ingĂ©nieurs logiciels travaillant dans la Baie faire de ces objets ouverts des objets connectĂ©s. Utiliser une roue de vĂ©lo comme support Ă  un kit Ă©lectronique qui permet de crĂ©er des motifs visibles uniquement lorsqu’on roule SpokePOV, vidĂ©o, un porte-clĂ© gadget qui permet d’éteindre n’importe quelle tĂ©lĂ©vision le fameux TV B-Gone imaginĂ© par Mitch Altman, un stylo qui Ă©met des sons si on approche son doigt le Drawdio, vidĂ©o. Les projets qui parviennent Ă  un stade de maturitĂ© suffisant pour ĂȘtre montrĂ©s, prototypĂ©s voire prĂ©produits sont malgrĂ© tout bien sĂ»r assez rares, surtout dĂšs lors que l’on touche Ă  l’électronique. La naissance d’un Ă©cosystĂšme local de manufacturers semble ĂȘtre la prochaine Ă©tape de dĂ©veloppement de ce marchĂ© du DIY, elle est en tout cas de plus en plus demandĂ©e par les makers » de la Baie, pour leur permettre de passer du stade du prototype Ă  la vente de quelques modĂšles
 Du maker space Ă  la start-up Si la vision commune des diffĂ©rents lieux de fabrication numĂ©rique de la Baie est bien d’encourager la crĂ©ativitĂ© et le partage, certains vont encore plus loin, en se voulant plus que de simples lieux d’expĂ©rimentations, mais bien des lieux de prototypage et prĂ©production industrielle. La diffĂ©rence se joue principalement sur les types de machines prĂ©sentes et leur accessibilitĂ©. Dans la grande majoritĂ© des makers spaces, la machine Ă  dĂ©coupe laser, qui permet de dĂ©couper trĂšs prĂ©cisĂ©ment depuis des plans en 3D presque n’importe quelle surface, est la reine. La marque Epilog est clairement leader sur le marchĂ©. Parmi les machines que l’on trouve facilement dans ces lieux imprimantes 3D en gĂ©nĂ©ral des Makerbots, qui permettent de crĂ©er des petits objets en volume le plus souvent en plastique Ă  partir d’un fichier 3D, machine Ă  dĂ©couper le vinyle, machine pour mouler le plastique sous-vide, machine Ă  coudre notamment pour coudre des fils conducteurs d’électricitĂ© ou studio de photographie, sans compter nombre d’oscilloscopes ou de fers Ă  souder. L’ensemble permet de rĂ©aliser un grand nombre de projets. Techshop se dĂ©marque avec une offre extrĂȘmement riche et davantage orientĂ©e vers les amateurs dĂ©sireux de prototyper des projets sur des machines de type professionnel WaterJet, machines Ă  travailler le bois, fraiseuses, tours, 
. Lorsqu’il est bien Ă©quipĂ©, le maker space devient alors une sorte de mini-usine de quartier, entre club de bricolage et micro-usine adaptĂ©e Ă  la production de prototypes et sĂ©ries limitĂ©es. Pour la plupart des makers, ces lieux deviennent peu Ă  peu une rĂ©elle opportunitĂ© de faire de leur passion ou de leur bonne idĂ©e un business, pour un coĂ»t accessible. Au sein d’un lieu comme Techshop par exemple, n’importe qui peut venir esquisser son objet, voire mĂȘme le produire Ă  petite Ă©chelle, comme l’a fait DODOcase le premier mois de son succĂšs. La jeune compagnie San Franciscaine, spĂ©cialisĂ©e dans la confection de coques pour iPad au design inspirĂ© par Moleskine et les reliures traditionnelles, a passĂ© ses premiĂšres semaines au TechShop de Menlo Park pour designer, rĂ©aliser son prototype et produire les premiers exemplaires en petite sĂ©rie. AprĂšs deux mois, les commandes affluaient tant que DODOcase a dĂ» passer au stade de production industrielle afin de rĂ©pondre aux demandes. Un lieu comme le TechShop ne fournit pas d’aide spĂ©cifique pour manufacturer ou vendre son produit – c’est un simple espace avec machines Ă  disposition – mais il ne prend pas non plus de commission en cas de rĂ©ussite du business. Image Makerbots en sĂ©rie. Passer de la production de prototypes a de petites sĂ©ries, du soutien de l’initiative individuelle au soutien de micro-projets qui peuvent devenir grand
 On voit bien que se dessine ici une tout autre ambition pour ces espaces. Une ambition qui n’est plus tant dans la rĂ©invention de la sociĂ©tĂ© fondĂ©e sur le partage, l’ouverture et l’apprentissage, que finalement celle d’une sociĂ©tĂ© marchande toujours plus large, plus Ă©tendue, plus conquĂ©rante. Une sociĂ©tĂ© qui n’est pas sans commencer Ă  poser problĂšme d’ailleurs rĂ©cemment Ars Technica faisait part de l’arrivĂ©e des premiers conflits de propriĂ©tĂ© liĂ©s Ă  des crĂ©ations qui ont vu le jour dans ces espaces. Plus que le grand public, c’est peut-ĂȘtre bien les avocats qui seront les prochains clients des makerspaces. Mathilde Berchon et VĂ©ronique Routin VĂ©ronique Routin est directrice du dĂ©veloppement Ă  la Fing, l’association Ă©ditrice d’InternetActu qui anime notamment le programme FabLabÂČ sur ce sujet. Mathilde Berchon termine une exploration de trois mois autour de San Francisco Ă  la rencontre de la communautĂ© des makers » de la Bay Area. Elle continue de raconter cette aventure dans son blog On les appelle Makers. Et les traductions hĂ©sitent entre artisans et bricoleurs, peut-ĂȘtre parce qu’ils tiennent un peu des deux. Certains ne sont que douĂ©s de leurs mains, d’autres ont Ă©galement une autre vision de la sociĂ©té  Une sociĂ©tĂ© relocalisĂ©e, oĂč les gens se rĂ©approprieraient les outils de productions, oĂč le partage des outils, des plans, des logiciels, du matĂ©riel et des savoir-faire finirait par transformer le monde. “We are all makers” Nous sommes tous des artisans. Le credo de Dale Dougherty, fondateur de Make Magazine et de Maker Faire, le plus grand Ă©vĂ©nement dĂ©diĂ© au mouvement “makers”, est en passe de devenir le nom de rĂ©fĂ©rence d’une communautĂ© extrĂȘmement diverse et dynamique, en pleine expansion. DerriĂšre ce sigle rassembleur, inventĂ© par Make Magazine il y a plus de 10 ans au sein mĂȘme d’O’Reilly Media, gĂ©ant de l’édition orientĂ©e techno fondĂ©e par Tim O’Reilly l’un des gourous de l’internet Ă  l’origine du concept de Web on trouve une idĂ©e clĂ© il faut encourager la crĂ©ativitĂ© individuelle car elle est porteuse de plus de conscience et responsabilitĂ© sociale, comme l’exprimait Dale Dougherty sur la scĂšne de TED. Profitant de la vague du DIY Do it yourself, pour “Fais le toi-mĂȘme !” de l’autre cĂŽtĂ© de l’Atlantique se multiplie les “maker spaces” ou lieux de fabrication numĂ©rique Hackerspaces, TechShop, mini-espaces dĂ©diĂ©s Ă  la fabrication personnelle au sein d’écoles ou d’entreprises, Ă©vĂ©nements emblĂ©matiques Burning Man, Maker Faire, 
, start-ups et sites internet Ă  succĂšs pour Ă©changer des tutoriaux, pour vendre ses productions, pour Ă©changer des maquettes et des plans en 3D, ateliers en tout genre Arduino, Light painting, sculpture sur bois, 3D printing
, rassemblements informels Dorkbot, MakeSF, BioCurious
, publications Make Magazine qui tire Ă  125 000 exemplaires dont la moitiĂ© sont des abonnements
, travaux acadĂ©miques dĂ©partements dĂ©diĂ©s au Design, Interaction & Technologies Ă  l’universitĂ© d’Etat de San Francisco, Berkeley, le Maker’s club de Stanford ou l’Institute for the Arts l’enthousiasme est gĂ©nĂ©ralisĂ©. Le “faire”, assurent ses promoteurs, permet de se rĂ©approprier le monde grĂące Ă  une meilleure connaissance des processus de fabrication, permet de prendre confiance en soi et en sa capacitĂ© Ă  comprendre et crĂ©er, permet aussi de partager son savoir et bĂ©nĂ©ficier des dĂ©couvertes de la communautĂ©. Trois objectifs qui en font un peu plus qu’un mouvement, presque une philosophie
 Qui sont les makers ? Dale Dougherty compare cette communautĂ© des makers aux amateurs du monde de la musique peu de gens sont considĂ©rĂ©s comme des professionnels de la musique alors que beaucoup de gens en jouent, chez eux ou Ă  l’extĂ©rieur. En gĂ©nĂ©ral on s’intĂ©resse Ă  l’innovation provenant du haut de la pyramide, les makers, eux, sont Ă  la base de cette pyramide. Dale cherche Ă  rendre visible cette innovation par la base. En crĂ©ant Make, il s’est intĂ©ressĂ© Ă  cette communautĂ© de gens qui font des choses et partagent leur crĂ©ation. Le rĂ©seau social de ces artisans amateurs a permis de sortir les gens de leur garage et de les rendre visibles. Dale a Ă©galement dĂ©veloppĂ© les Maker Faires, ces foires aux makers, qui poussent un peu partout aux Etats-Unis DĂ©troit, New York, Kansas City
, mais aussi en Europe Angleterre et Allemagne, AmĂ©rique du Sud et Afrique. Ces foires ont grossi au fil du temps accueillant de 300 Ă  8000, voire 20 000 personnes. Elles rĂ©unissent un monde d’amateurs et de professionnels qui utilisent les mĂȘmes outils et partagent la mĂȘme passion. La place particuliĂšre de San Francisco dans ce monde des makers est peut ĂȘtre Ă  trouver dans le fait que les gens, ici, ont eu le talent d’initier le rĂ©seau. La diversitĂ© culturelle de la ville la majoritĂ© de ses habitants n’est pas originaire de San Francisco, a permis une utilisation encore plus importante qu’ailleurs du rĂ©seau et de son haut niveau de connectivitĂ©. Des chercheurs comme Paul Graham ont beaucoup Ă©tudiĂ© cette dimension culturelle des villes. Dale compare ces amateurs aux nouveaux outsiders, “ceux qui n’entrent dans aucune case”. “La plupart sont des inventeurs ! Ils ne font pas les choses comme les autres. Ils mettent la main Ă  la pĂąte, ils touchent Ă  tout ! Ils sont dans la culture du DIY. Ils ont accĂšs aux outils et en ont suffisamment la maĂźtrise pour “faire des choses”.” Est-ce Ă  dire que ce mouvement ne concernerait qu’une infime partie de gens ou est-il plus profond ? Lors d’une prĂ©sentation publique Ă  l’occasion du Fab6 la confĂ©rence internationale annuelle du rĂ©seau des Fab Labs, Dale Dougherty dĂ©clarait qu’il Ă©tait difficile de quantifier le nombre » de makers en activitĂ© aux Etats-Unis. NĂ©anmoins, lui qui est investi dans ce mouvement depuis des annĂ©es, faisait remarquer que l’internet avait contribuĂ© Ă  structurer ce mouvement, Ă  permettre aux gens de se rencontrer, de faire des projets ensemble. Si le phĂ©nomĂšne n’est peut-ĂȘtre pas appelĂ© Ă  concerner tout le monde, peut-ĂȘtre faut-il, Ă  la suite d’Eric von Hippel, ne pas croire qu’il se limite aux geeks mais qu’il concerne une plus large part de la population qui s’étend Ă  tous les innovateurs du quotidien. Dans l’une de ses enquĂȘtes de lectorat Make Magazine a rĂ©alisĂ© qu’en plus d’avoir des espaces de publications pour partager idĂ©es et plans, 90 % de ses lecteurs souhaitaient avoir accĂšs Ă  des outils et des ateliers des lieux dĂ©diĂ©s pour rĂ©aliser leurs projets. Si tous les bricoleurs possĂšdent un fer Ă  souder ou une perceuse, trĂšs peu disposent d’une imprimante 3D ou d’une fraiseuse Ă  commande numĂ©rique. Et tout cela pour faire quoi ? Si l’en en croit la mĂȘme enquĂȘte, 68 % des rĂ©pondants Ă  l’enquĂȘte de Make Magazine fabriquent des fusĂ©es, 47 % des robots, 11 % un kart et 7 % un Kegerator pour garder la biĂšre au frais. Pour mieux comprendre ce mouvement et sa diversitĂ©, l’équipe du FabLabÂČ est allĂ© visiter les diffĂ©rents makers spaces de San Franciso. Panorama des maker spaces de San Francisco The Tinkering Studio “atelier de bidouillage” Le Tinkering Studio est installĂ© dans l’Exploratorium de San Francisco, un musĂ©e similaire Ă  la CitĂ© des Sciences et de l’Industrie Ă  Paris. Une Ă©quipe de trois Ă©ducateurs accueillent les curieux dans un espace mi-ouvert, visible de tous les visiteurs du musĂ©e mais protĂ©gĂ©s de l’hyperactivitĂ© ambiante. L’espace en question ne fait que 50 mÂČ, mais c’est un espace en Ă©volution permanente, en fonction des activitĂ©s et dĂ©monstrations du moment. Fers Ă  souder, pinces, marteaux sont Ă  la disposition de tous sur de grandes tables. L’animateur Mike Petrich, nous explique que, si au sein du musĂ©e les visiteurs s’attardent en moyenne moins de 10 secondes par machine exposĂ©e, le temps passĂ© au Tinkering Studio oscille entre 30 et 40 minutes ! Le Studio est donc un espace oĂč le prend le temps de se poser et d’apprendre vidĂ©o. L’objectif du Studio est de dĂ©velopper la crĂ©ativitĂ© des gens par la crĂ©ation manuelle retour Ă  la matiĂšre, aux bases de l’électricitĂ©, soudure, sculpture, dĂ©coupe du bois ou du mĂ©tal. Images photo du Thinkering Studia de San Francisco. Le Tinkering Studio en action, vidĂ©o promotionnelle du Learning Studio sur Vimeo. The Tinkering Studio est une illustration assez rĂ©ussie de ce que peut donner un atelier de ce type dans un environnement institutionnel notamment via son fonctionnement Ă©quilibrĂ©, entre espace ouvert et club fermĂ©, entre espace rĂ©servĂ© aux enfants et participation collective, entre courte initiation Ă  la crĂ©ation manuelle et suivi complet de projet. Ajoutez Ă  cela l’intervention d’animateurs de renoms comme Michael Shiloh ou Jess Hobbs un des artistes Ă  l’origine de la Flux Foundation et vous obtenez un lieu assez atypique de la culture “maker”. FabLabSchool prototyper l’éducation de demain Le concept de Fab Lab est trĂšs prisĂ© en Europe. Autour de la Baie, il semble pour le moins Ă©clipsĂ© par la grande diversitĂ© des espaces de fabrication Ă  disposition des diffĂ©rents publics enfants, Ă©tudiants, designers, ingĂ©nieurs, bricoleurs amateurs. L’initiative de prototype de Fab Lab menĂ©e par Paulo Blikstein au sein du dĂ©partement de Sciences MĂ©caniques de Stanford se dĂ©marque donc. AppelĂ© FabLabSchool, l’espace est un lieu de fabrication numĂ©rique expĂ©rimental destinĂ© Ă  essaimer dans n’importe quelle Ă©cole Ă  travers le monde, pour un public d’enfants ĂągĂ©s de 10 Ă  17 ans. Le prototype permet d’explorer in vivo l’impact des Fab Labs dans le secteur de l’éducation et diffĂ©rents formats d’animation et d’interaction avec les enfants. A l’intĂ©rieur de ce Fab Lab, on rĂ©flĂ©chit aux outils et Ă  leur prise en main par les enfants. Les lundis et mardis sont rĂ©servĂ©s aux jeunes venant des Ă©coles alentour. Pendant les vacances scolaires, les enfants viennent par petits groupes pour rĂ©aliser des projets sur un mois. L’animation en direction des enfants se fait autour de problĂšmes de sociĂ©tĂ©, touchant par exemple aux questions Ă©nergĂ©tiques comment limiter la consommation d’eau ou d’électricitĂ© Ă  la maison. Image photos du FabLabSchool Ă  Stanford. L’équipe derriĂšre le projet rĂ©flĂ©chit et expĂ©rimente autour de ce qui fait un bon maker space Ă©ducatif organisation de l’espace et prise en main des machines de grandes tables de travail au centre qui permettent l’échange, couleurs trĂšs vives, machines toutes accessibles mais protĂ©gĂ©es, systĂšme de QR code et Ă©tiquetage qui permettent d’associer vidĂ©os et tutoriaux Ă  chaque machine
, outils mis Ă  disposition la classique machine Ă  dĂ©coupe laser, une imprimante 3D Ă  haute prĂ©cision, scanner 3D, scie Ă©lectronique. Les chercheurs-animateurs n’hĂ©sitent pas Ă  expĂ©rimenter et faire le lien entre les prototypes de support Ă©ducatif dĂ©ployĂ©s dans d’autres dĂ©partements comme le GoGoBoard une carte Arduino simplifiĂ©e pour rĂ©pondre Ă  des prĂ©rogatives Ă©ducatives ou Scratch le langage de programmation pour enfants dĂ©veloppĂ© par le MIT. Fablabschool de Stanford a Ă©tĂ© financĂ© par Schlumberger pour un coĂ»t global de 300 000$ Ă©quipement et formation pour un an avec un coordinateur Ă  temps plein, qui ne comprend donc ni les frais de fonctionnement ni les salaires. Le premier vĂ©ritable FabLabSchool ouvrira ses portes Ă  Moscou en juin normalement. Le FabLab de Stanford est une expĂ©rimentation acadĂ©mique qui soulĂšve un intĂ©rĂȘt local principalement venant des Ă©coles alentours et des Ă©tudiants de Stanford et international. Un lieu trĂšs actif qui est aussi Ă  l’origine du Stanford Makers Club, Ă©vĂ©nement rĂ©gulier et informel de 150 “makers” de tous horizons. Hackerspaces communautĂ© experte et libertĂ© d’action A ces lieux de fabrication numĂ©rique structurĂ©s, acadĂ©miques et institutionnels, viennent rĂ©pondre des espaces volontairement dĂ©sorganisĂ©s oĂč priment l’absence de hiĂ©rarchie et de rĂšgles imposĂ©es. Les Hackerspaces font partie des lieux les plus vivants de la communautĂ© ; pour ne citer que les plus connus de la rĂ©gion Noisebridge Ă  San Francisco, The Hacker Dojo Ă  Mountain View ou le tout nouveau Ace Monster Toys Ă  Oakland. Le Hackerspace mythique de San Francisco a Ă©tĂ© fondĂ© il y a trois ans par un groupe de hackers entendez passionnĂ©s d’informatique fĂ©rus de comprendre et transformer tout ce qui leur passe sous la main menĂ© entre autres par Mitch Altman. Noisebridge est un ancien atelier textile qui offre une large vue sur le quartier populaire de Mission. Avec de grandes baies vitrĂ©es de parts et d’autres, l’espace est lumineux, tout en longueur, mais surtout dĂ©borde d’un fatras inimaginable. Coin-cuisine, bibliothĂšque et espace de projection de films complĂštent les trois piĂšces plus petites consacrĂ©es aux ateliers, Ă  la programmation Turing Room et au bricolage Dirty Shop. L’open space est aussi organisĂ© autour d’un coin Ă©lectronique, d’un espace couture et d’un large bric-Ă -brac de projets en cours et matĂ©riaux donnĂ©s, prĂȘts Ă  ĂȘtre revisitĂ©s. A cet ensemble dĂ©jĂ  trĂšs dense s’ajoutent un petit studio de dĂ©veloppement photo et une micro-piĂšce occupĂ©e par la machine Ă  dĂ©coupe laser. Parmi les machines Ă  disposition quelques Makerbots ces imprimantes 3D, une machine Ă  dĂ©coupe laser et des machines Ă  coudre, des murs de composants Ă©lectroniques, une bibliothĂšque de livres rares
 mais surtout l’entre-aide des membres du lieu, qui peuvent ĂȘtre plus d’une centaine certains soirs. Image Noisebridge. Ici, tout respire la communautĂ© et l’échange. La profusion de crĂ©ativitĂ© et l’atmosphĂšre trĂšs particuliĂšre qui se dĂ©gage du lieu rĂ©vĂšlent des strates d’activitĂ©, de discussions, de projets collectifs. Les murs sont couverts d’affiches et de messages qui font rĂ©fĂ©rences Ă  la culture hacker partagĂ©e par tous “Shut up and hack !” Taisez-vous et bidouillez !. Ce rapide tour du propriĂ©taire souligne bien une double particularitĂ© des hackerspaces expertise et communautĂ©. MĂȘme s’il se prĂ©sente comme ouvert Ă  tous – et c’est le cas -, Noisebridge reste un lieu plutĂŽt rĂ©servĂ© Ă  un public de connaisseurs, qui demeure intimidant pour celui qui n’est pas du sĂ©rail. A cela s’ajoute une vĂ©ritable “dĂ©sorganisation organisĂ©e”, toutes les dĂ©cisions sont prises collectivement et personne ne dĂ©cide pour les autres. L’espace est ouvert nuit et jour, la cotisation pour devenir membre est laissĂ©e Ă  la discrĂ©tion de chacun, ainsi que la participation Ă  l’achat et l’entretien du matĂ©riel. Pour sous-tendre l’ensemble, une seule rĂšgle “Be excellent.” Techshop rendre la fabrication numĂ©rique accessible Ă  tous A l’inverse des Hackerspaces, qui sont une nĂ©buleuse de lieux dĂ©pendants avant tout de l’initiative de petits groupes de passionnĂ©s et sans volontĂ© commerciale, Techshop est en train de se positionner comme l’entreprise de rĂ©fĂ©rence en matiĂšre de lieu de fabrication personnelle. Le premier Techshop a Ă©tĂ© ouvert Ă  Menlo Park, au sud de San Francisco, Ă  l’instigation d’un inventeur enthousiaste, Jim Newton, qui se dĂ©sespĂ©rait de ne pas avoir d’espace de bricolage de grande envergure Ă  sa disposition. Le deuxiĂšme Techshop vient Ă  peine d’ouvrir ses portes, cette fois en plein coeur de San Francisco. Immense building occupĂ© sur deux Ă©tages par des machines professionnelles accessibles de façon illimitĂ©e par tous les membres contre un abonnement mensuel environ 120$ et le suivi de classes d’initiation au fonctionnement et Ă  la sĂ©curitĂ© environ 50$ par classe. Machines Ă  dĂ©coupe laser, fraiseuses, tours, machines Ă  dĂ©couper du bois, machines Ă  coudre professionnelles, imprimante et scanner 3D, dĂ©coupeuse vinyle, oscilloscope, une trentaine d’ordinateurs Ă©quipĂ©s des derniers logiciels de conceptualisation 3D, et mĂȘme un WaterJet Ă©norme machine qui utilise un jet d’eau surpuissant pour dĂ©couper n’importe quel matĂ©riau de plusieurs dizaines de centimĂštres d’épaisseur
 Ici, on trouve tous les outils. Ce qui explique peut-ĂȘtre qu’on trouve aussi tous les profils aussi bien des bricoleurs et inventeurs farfelus que des entrepreneurs venant prototyper leur projet, des artistes que des Ă©tudiants souvent en design et architecture. Image photo d’un TechShop de San Francisco. Premier en son genre, Techshop a eu beaucoup de mal Ă  convaincre des investisseurs du fait de l’originalitĂ© de son concept. Le projet a finalement trouvĂ© le soutien de plusieurs business angels et d’un gĂ©ant de la Valley, qui n’a pas encore rĂ©vĂ©lĂ© son nom. L’entreprise semble aujourd’hui avoir les moyens de ses ambitions, malgrĂ© un coĂ»t d’entrĂ©e extrĂȘmement Ă©levĂ© pour un concept qui doit encore trouver son grand public. Il faut compter plus de 2,5 millions de dollars pour ouvrir un espace comme celui de San Francisco, avec un seuil de rentabilitĂ© atteint en 3 ans avec 600 Ă  700 membres rĂ©guliers. Pour Mark Hatsch, leur directeur, les espaces de fabrication personnelle deviendront Ă  moyen terme un nouveau genre de fitness club, un espace oĂč l’on se rend chaque semaine pour bricoler, crĂ©er et dĂ©velopper ses projets. L’ambition forte affichĂ©e par l’équipe dirigeante qui a 8 projets d’ouvertures de Techshop d’ici Ă  la fin 2012 va dans le sens de l’enthousiasme gĂ©nĂ©ralisĂ© qui accompagne l’ouverture de ces lieux autour de la Baie. Mathilde Berchon et VĂ©ronique Routin VĂ©ronique Routin est directrice du dĂ©veloppement Ă  la Fing, l’association Ă©ditrice d’InternetActu qui anime notamment le programme FabLabÂČ sur ce sujet. Mathilde Berchon termine une exploration de trois mois autour de San Francisco Ă  la rencontre de la communautĂ© des “makers” de la Bay Area. Elle continue de raconter cette aventure dans son blog Pour prĂ©parer la 3e Ă©dition française de la confĂ©rence Lift qui aura lieu du 6 au 8 juillet Ă  Marseille, nous vous proposons de redĂ©couvrir quelques-unes des plus stimulantes prĂ©sentations qui s’y sont tenues ces derniĂšres annĂ©es et que nous avons couvertes. Retour sur l’édition 2010 avec les prĂ©sentations d’Anders Sandberg et François TaddĂ©i. Elaborer de nouveaux systĂšmes d’intelligence collective Anders Sandberg travaille Ă  l’Institut pour le futur de l’humanitĂ© d’Oxford, un lieu “à la limite de la philosophie” ou l’on s’efforce d’ĂȘtre bizarre, affirme-t-il voir notre rĂ©cente interview. La plupart des grands problĂšmes auxquels nous faisons face aujourd’hui n’auraient mĂȘme pas Ă©tĂ© compris il y a quelques annĂ©es, estime Sandberg. Pourquoi ? Parce que rĂ©soudre les problĂšmes contemporains exige de plus en plus d’intelligence comprendre les problĂšmes Ă©cologiques d’aujourd’hui implique de meilleures connaissances en physique par exemple. C’est pourquoi nous avons besoin de plus en plus d’intelligence. Pour cela il existe une grande gamme de mĂ©thodes. Les plus classiques consistent Ă  bien manger, bien dormir ou faire de l’exercice. Il existe aussi des mĂ©thodes Ă©ducatives qui ont pour objectif d’augmenter le quotient intellectuel
, bien qu’on arrive assez vite Ă  un seuil avec ce type d’entrainement. On peut Ă©galement prendre des substances chimiques, mais toutes impliquent une contrepartie, des effets secondaires si certaines permettent de se concentrer plus facilement sur un projet, par exemple, il devient plus difficile de conduire. Il existe Ă©galement des moyens pour amĂ©liorer sa mĂ©moire, mais elles agissent chacune sur diffĂ©rents types de mĂ©moire. On peut aussi envisager de connecter directement les cerveaux et les ordinateurs. Mais en rĂ©alitĂ©, c’est un processus trĂšs difficile Ă  mettre en place, il faut vraiment ĂȘtre trĂšs motivĂ© pour entreprendre ce genre de projet, souligne Anders Sandberg qui a pourtant Ă©tĂ© un ardent dĂ©fenseur du transhumanisme, c’est pourquoi il s’intĂ©resse surtout, aujourd’hui, aux personnes handicapĂ©es, peut-ĂȘtre parce qu’il semble plus acceptable aujourd’hui de connecter le cerveau de personnes handicapĂ©es Ă  des machines
 Enfin, il ya les “gadgets”, les tĂ©lĂ©phones portables par exemple, qui peuvent grandement aider notre façon de penser. L’intĂ©rĂȘt de ces produits est qu’ils sont peu onĂ©reux. Un objet comme le tĂ©lĂ©phone portable est apparu dans le milieu des affaires et son usage s’est aujourd’hui rĂ©pandu jusque dans les pays les plus pauvres de la planĂšte. Enfin, il y a la connexion des cerveaux entre eux, l’intelligence collective. Celle-ci existe depuis longtemps en science, sous la forme de la “critique par les pairs”. Lorsqu’un scientifique publie, il reçoit diverses observations des autres spĂ©cialistes du domaine ce qui permet d’amĂ©liorer sa thĂ©orie originelle. Mais le problĂšme avec l’intelligence collective c’est que la sagesse des foules semble aller de pair avec sa folie. Ainsi, une grande foule qui dĂ©libĂšre est un excellent moyen pour augmenter les “biais” cognitifs, autrement dit les prĂ©jugĂ©s et les prĂ©fĂ©rences de groupe ! Selon les chercheurs travaillant dans ce domaine, les problĂšmes pour lesquels on ne dispose pas de solutions sont par exemple mieux traitĂ©s par des personnes isolĂ©es que par des groupes. En revanche, les problĂšmes qui peuvent se subdiviser en petites tĂąches sont bien mieux rĂ©glĂ©s par les groupes. Toute la question consiste donc Ă  Ă©laborer de nouveaux systĂšmes d’intelligence collective. Pour cela, il existe de multiples mĂ©thodes. Par exemple, dans un jeu Ă  rĂ©alitĂ© alternĂ©e comme The Beast, les joueurs sont divisĂ©s en une multitude d’équipes pour rĂ©soudre les Ă©nigmes posĂ©es par le jeu. La WikipĂ©dia est bien sĂ»r l’exemple le plus cĂ©lĂšbre d’une telle connexion des cerveaux. Les recherches et les simulations d’Anders Sandberg ont permis d’établir quelques faits intĂ©ressants. Tout d’abord, une page peut commencer Ă  un trĂšs bas niveau et monter trĂšs vite en qualitĂ©. En fait, l’intervention de rĂ©dacteurs incompĂ©tents a peu d’incidence sur le systĂšme. Leurs erreurs sont assez vite corrigĂ©es. Une intĂ©ressante recherche Ă  mis face Ă  face deux groupes diffĂ©rents. L’un Ă©tait constituĂ© de “spĂ©cialistes” de gens qui Ă©taient considĂ©rĂ©s comme “trĂšs intelligents”. Le second groupe Ă©tait plus divers, et comprenait des gens de niveaux trĂšs diffĂ©rents. Il s’avĂšre que la qualitĂ© des pages travaillĂ©es par le second groupe s’est avĂ©rĂ©e meilleure que les pages Ă©ditĂ©es par le premier. Comment cela est-il possible ? Et bien dans le second groupe, il y avait peut-ĂȘtre des gens pas trĂšs douĂ©s, mais il en avait aussi de trĂšs hauts niveaux, supĂ©rieurs, en fait aux “intelligents” du premier groupe ! Les blogs constituent un autre moyen de filtrer “l’intelligence collective”, dont la qualitĂ© globale augmente via un processus de filtres entre pairs. Aujourd’hui pourtant, la WikipĂ©dia semble trouver ses limites, et certains se plaignent qu’il devient difficile de lui ajouter grand-chose. Il va falloir trouver des modĂšles capables d’aller plus loin, mais jusqu’ici toutes les tentatives ont Ă©chouĂ©. La plupart des recherches en intelligence collective sont connues et apprĂ©ciĂ©es des spĂ©cialistes de l’internet. Mais ne faut-il pas aller plus loin ? Ne faudrait-il pas essayer de faire sortir les techniques propres Ă  la WikipĂ©dia du monde en ligne pour les appliquer aux mondes rĂ©els, notamment aux institutions ? C’est en tout le projet qu’esquisse Anders Sandberg, reste Ă  en trouver les modalitĂ©s concrĂštes. Adapter le systĂšme Ă©ducatif Ă  demain Pour devenir plus intelligent, il y a une mĂ©thode trĂšs ancienne qui a peut-ĂȘtre besoin d’ĂȘtre rajeunie, l’éducation. Comment adapter le systĂšme Ă©ducatif au XXIe siĂšcle ? Telle est la question que nous adresse François TaddĂ©i chercheur au Centre de recherche interdisciplinaire de l’Inserm. “Je me suis intĂ©ressĂ© Ă  l’éducation quand j’ai eu un enfant et qu’il est allĂ© Ă  l’école. C’est un enfant adorable, mais il pose trop de questions, me disait son professeur avec un ton de reproche”. Cette petite anecdote illustre bien le problĂšme de l’école d’aujourd’hui, estime François TaddĂ©i. Nous vivons dans un flux d’information oĂč il est difficile de savoir laquelle est pertinente. La mĂ©thode socratique a Ă©tĂ© inventĂ©e il y a des milliers d’annĂ©es pour passer de l’information au savoir. Peut-on questionner collectivement les choses pour trouver de nouvelles narrations et scĂ©narios ? Peut-on rendre la mĂ©thode socratique collective ? Chacun de nos enfants est un petit Socrate, mĂȘme si le systĂšme Ă©ducatif leur apprend Ă  poser de moins en moins de questions. Comment les aider Ă  aller de plus en plus vite ? A apprendre Ă  en poser plus de plus en plus ? Image François TaddĂ©i sur la scĂšne de Lift, photographiĂ© par User Studio. Le jeu d’échec est un paradigme du futur. Quand Garry Kasparov a perdu contre Deep Blue, The Economist a publiĂ© un article qui disait que si votre emploi ressemblait aux Ă©checs, il Ă©tait temps d’en changer. Or, moi mĂȘme, j’ai bĂąti ma carriĂšre sur la base de ma capacitĂ© Ă  mĂ©moriser et Ă  calculer », reconnaĂźt François TaddĂ©i. Tous les emplois qui ne concernent que le calcul et la mĂ©morisation sont en danger et ce ne sont pas que des emplois peu qualifiĂ©s. Pourtant, une fois que l’ordinateur l’a battu aux Ă©checs, Kasparov a lancĂ© les Ă©checs perfectionnĂ©s, un concours oĂč les joueurs Ă©taient assistĂ©s de leurs ordinateurs pour jouer. Il est intĂ©ressant d’observer que ceux qui ont gagnĂ© sont ceux qui avaient les meilleures compĂ©tences d’interaction entre l’homme et la machine et non pas ceux qui avaient le meilleur programme ou le meilleur joueur d’échec. Et François TaddĂ©i d’en tirer une leçon Il faut apprendre aux enfants Ă  utiliser la techno de maniĂšre optimale, pour faire le meilleur usage du cerveau et de l’ordinateur ». La technologie est moralement neutre, mais elle peut-ĂȘtre Ă  la fois utilisĂ©e pour dĂ©truire ou construire le monde. Le PoĂšte TS Elliot disait dans Le Roc, l’un de ses cĂ©lĂšbres poĂšmes OĂč est la vie que nous avons perdue en vivant ? OĂč est la sagesse que nous avons perdue dans la connaissance ? OĂč est la connaissance que nous avons perdue dans l’information ? » Il faut rĂ©inventer l’école estime François TaddĂ©i. Nous Ă©duquons nos enfants pour les formater via une boite logique, alors que nous avons besoin d’un enseignement plus crĂ©atif pour les aider Ă  imaginer l’avenir, Ă  se responsabiliser, Ă  faire ce que l’ordinateur ne sait pas faire. Tous les adultes ont Ă©tĂ© Ă©duquĂ©s par le systĂšme Ă©ducatif passĂ© et nous avons du mal Ă  aller au-delĂ  de cette boite logique qui nous a formatĂ© et trouver de nouvelles possibilitĂ©s. » Le monde dans lequel nous vivons s’accĂ©lĂšre sans cesse plus avant. Lewis Carroll en 1871 avait compris qu’il fallait courir deux fois plus pour rester au mĂȘme endroit et aller encore deux fois plus vite pour aller ailleurs. Pour s’adapter dans un monde qui va plus vite, il faut effectivement courir plus vite et savoir oĂč l’on court. » Biologiste de formation, j’ai Ă©tĂ© formĂ© Ă  comprendre comment courent les bactĂ©ries », rappelle François TaddĂ©i. Nous savons allonger la durĂ©e de vie, lutter contre de nombreux agents pathogĂšnes
 Nous avons triplĂ© l’espĂ©rance de vie en deux siĂšcles. Mais les bactĂ©ries ont appris Ă  apprendre, elles ont accru leur capacitĂ© d’apprentissage, elles savent collaborer, elles savent dĂ©sapprendre, elles savent construire leur propre environnement adaptĂ© Ă  leurs gĂ©nomes et Ă©changent des informations sur la maniĂšre de coopĂ©rer. Le paradigme des bactĂ©ries se met Ă  l’oeuvre dans un monde de plus en plus vaste. Et il nous faut l’appliquer Ă  l’avenir de la science. La science ouverte, tel qu’elle commence Ă  ĂȘtre pratiquĂ©e, montre que les gens apprennent plus vite ainsi et qu’elle peut s’adresser Ă  tous. » En Afrique, l’oiseau miel ne sait pas trouver seul le miel, explique le chercheur. Il chante une jolie chanson qui va plaire aux humains, les attirer pour leur indiquer lĂ  oĂč se situent les abeilles et l’oiseau va profiter du savoir-faire de l’humain pour rĂ©cupĂ©rer un peu de miel. La lĂ©gende africaine dit que si vous ne donnez pas de miel Ă  l’oiseau, la fois suivante, il vous conduira au lion. Si l’oiseau et l’homme surexploitent la ressource, ni l’un ni l’autre n’auront de quoi vivre. En cela, la fable est une belle mĂ©taphore de la coopĂ©ration. Tous les systĂšmes apprennent, rappelle le scientifique. Certains primates ont appris Ă  laver des lĂ©gumes avant de les manger pour qu’il n’y ait pas de sable dedans. Et cette technique s’est d’abord propagĂ©e via les jeunes femelles avant de finir par convaincre les vieux mĂąles dominants, s’amuse François TaddĂ©i en comparant cette appropriation Ă  la façon dont nos sociĂ©tĂ©s s’approprient les technologies. Semmelweis a le premier insistĂ© auprĂšs des mĂ©decins pour qu’ils se lavent les mains en passant d’un malade Ă  l’autre, de la salle d’autopsie Ă  la salle d’accouchement. Pourtant, malgrĂ© ses dĂ©monstrations et son insistance, les docteurs de l’époque ne l’entendaient pas. Souvent, les innovations ne prennent pas, car les gens n’acceptent pas que l’idĂ©e d’un autre ce soit mieux que leur pratique quotidienne. » Kiran Bir Sethi Ă  la confĂ©rence TED a Ă©voquĂ© le virus “i can”, c’est-Ă -dire le fait de pouvoir se dire je peux le faire », un virus qu’elle tente de transmettre Ă  des milliers d’enfants indiens pour leur donner l’envie d’apprendre et d’innover. Il faut Ă©tablir des liens entre les crĂ©ateurs et rĂ©inventer la maniĂšre dont nous crĂ©ons, estime encore François TaddĂ©i. D’oĂč l’idĂ©e d’imaginer des Campus un campus en Ă©volution oĂč il faut rĂ©inventer en continu la façon dont on procĂšde Ă  l’éducation et dont on utilise la techno tout en Ă©tant accessible Ă  tous sur la planĂšte, Ă  l’image des cours du MIT en ligne. Mais au vrai MIT, on a plus que les cours, il y a aussi les interactions avec les enseignants et les Ă©tudiants, souligne le chercheur. Plus que de donner accĂšs Ă  la science, nous avons besoin de zones de crĂ©ativitĂ© », insiste le chercheur, car souvent, on est entourĂ© de gens qui ne le sont pas. Il faut crĂ©er des espaces de crĂ©ation de maniĂšre constructive ». On sait qu’en France on a tendance Ă  critiquer sans faire de propositions constructives pour aller plus loin, ce n’est pourtant pas la dĂ©marche de François TaddĂ©i, au contraire. Il a mis en place le programme explications additionnelles, vidĂ©o par lequel tente de crĂ©er un espace numĂ©rique pour Ă©changer et crĂ©er des idĂ©es entre Ă©tudiants. C’est un espace oĂč ils peuvent trouver des idĂ©es, rĂ©aliser des projets, de maniĂšre ouverte, utilisant l’intelligence collective
 Que peut-on faire de plus beau et de plus utile qu’une tour Eiffel, conclut François TaddĂ©i en nous montrant le symbole d’une Ă©poque, en utilisant des technologiques d’une maniĂšre constructive et collective ? François TaddĂ©i esquisse une piste. Il faut crĂ©er l’avenir, car nous allons y passer le reste de leur vie », rappelle-t-il enthousiaste, avant de s’éclipser rapidement prendre un avion pour l’autre bout du monde, certainement pour en convaincre d’autres personnes de l’urgence Ă  dĂ©velopper une Ă©cole innovante, comme il le disait dĂ©jĂ  l’annĂ©e derniĂšre dans une tribune au Monde. RĂ©mi Sussan et Hubert Guillaud Lift11 6-8 juillet, Marseille OĂč peut-on Ă  la fois Ă©changer avec le M. Innovation » du Royaume-Uni Geoff Mulgan, l’entrepreneuse en sĂ©rie du covoiturage Robin Chase, le directeur R&D du plus grand rĂ©seau de patients du monde, PatientsLikeMe Paul Wicks, la chercheuse de rĂ©fĂ©rence sur les villes globales Saskia Sassen, la designeuse des Slow cities » Anna Meroni et celle d’un rĂ©seau de gestion de crises qui, issu d’Afrique, intĂ©resse jusqu’aux Japonais Juliana Rotich ? A Lift France, cet Ă©tĂ© Ă  Marseille. OĂč peut-on dĂ©couvrir 22 installations incroyables qui mettent en scĂšne des projets d’artistes, de designers, de chercheurs et d’entrepreneurs audacieux ? Participer Ă  14 ateliers crĂ©atifs pour redessiner la ville, inventer la consommation collaborative de demain ou rĂ©flĂ©chir au futur de la monnaie ? Toujours Ă  Lift. A l’occasion de l’ouverture du blog invitĂ© d’InternetActu et de Place de la Toile sur la plateforme du profitez de 25 % de remise pour aller Ă  Lift France 2011. Pour prĂ©parer la 3e Ă©dition française de la confĂ©rence Lift qui aura lieu du 6 au 8 juillet Ă  Marseille, nous vous proposons de redĂ©couvrir quelques-unes des plus stimulantes prĂ©sentations qui s’y sont tenues ces derniĂšres annĂ©es et que nous avons couvertes. Retour sur l’édition 2010 avec les prĂ©sentations de Manuel Lima, Stefana Broadbent et Ivo Gormley
 La complexitĂ© n’est-elle pas devenue une caractĂ©ristique de nos sociĂ©tĂ©s, plutĂŽt qu’un bug ? Comment pourrions-nous regagner le contrĂŽle de nos flots d’information, de notre temps ? Pouvons-nous aborder la complexitĂ© d’une façon plus productive ? Pouvons-nous mieux la comprendre, mieux la maĂźtriser ? Tel Ă©taient les questions adressĂ©es par les organisateurs de la seconde Ă©dition de la confĂ©rence Lift France, Ă  la fois Ă  un designer, Ă  un vidĂ©aste et Ă  une ethnologue. ForcĂ©ment, cela a apportĂ© des rĂ©ponses multiples. Visualiser la complexitĂ© Sommes-nous en train de dĂ©couvrir une nouvelle vision du monde, aussi diffĂ©rente de la vision mĂ©canique newtonienne du rĂ©el, que celle-ci le fut de la vision aristotĂ©licienne qui domina tout au long du Moyen-Age ? Le mot clĂ© de cette supposĂ©e rĂ©volution cognitive, ce serait la complexitĂ© ». Sous cette banniĂšre se regroupe l’ensemble des phĂ©nomĂšnes capables de s’organiser spontanĂ©ment de maniĂšre trĂšs Ă©laborĂ©e, sans intervention d’une intelligence extĂ©rieure. Image Manuel Lima sur la scĂšne du théùtre de la CriĂ©e Ă  Marseille, photographiĂ© par Fabien Girardin. C’est dans le but de mieux comprendre cette rĂ©volution de la complexitĂ© que le designer Manuel Lima a créé le site Visual Complexity. Dans sa prĂ©sentation Ă  Lift le 7 juillet, Manuel Lima a rĂ©sumĂ© l’actuelle transformation de nos connaissances en citant un article de Warren Weaver un scientifique qui dĂ©veloppa dĂšs 1944 la thĂ©orie de l’information en compagnie du cĂ©lĂšbre Claude Shannon sur la complexitĂ© organisĂ©e, oĂč il tente d’analyser l’histoire de la perception de la rĂ©alitĂ© en trois Ă©tapes Les 17e, 18e et 19e siĂšcles, Ă©poque du triomphe de la mĂ©canique newtonienne furent essentiellement consacrĂ©s Ă  l’analyse de la simplicitĂ©. Les sciences et les mathĂ©matiques de l’époque se chargeaient de comprendre les choses prĂ©visibles, constantes, comme les mouvements des objets sous l’influence des forces physiques. Le 20e siĂšcle s’est intĂ©ressĂ© Ă  la complexitĂ© dĂ©sorganisĂ©e le hasard, les statistiques
 Le 21e siĂšcle, lui, se heurte Ă  la complexitĂ© organisĂ©e. Celle justement qui se caractĂ©rise par la constitution des rĂ©seaux. Les thĂ©ories de la complexitĂ© sont nombreuses par exemple, il y a la thĂ©orie du chaos, celle des automates cellulaires » chĂšre Ă  Stephen Wolfram, voire la cybernĂ©tique des annĂ©es 50
 mais aujourd’hui celle qui est peut-ĂȘtre la plus populaire au moins dans les milieux du web, ce qui n’étonnera personne ! est la thĂ©orie des rĂ©seaux, notamment l’idĂ©e des petits mondes » qui montre comment un certain type de connectivitĂ© peut trĂšs facilement permettre une mise en relation globale de tous ces Ă©lĂ©ments la fameuse notion des six degrĂ©s de sĂ©paration ». Selon ses promoteurs, tels que Duncan Watts, Steven Strogatz, ou Albert-Laszlo Barabasi, cette thĂ©orie permettrait de mieux comprendre toute une Ă©chelle de phĂ©nomĂšnes, de la physique fondamentale Ă  Facebook, en passant par le clignotement synchronisĂ© des lucioles ou les rythmes du cerveau
 Et pour cause tous ces ensembles sont en fait constituĂ©s de la mĂȘme maniĂšre, Ă  des Ă©chelles diffĂ©rentes, avec des composants diffĂ©rents. Comme l’a rappelĂ© Lima Le cerveau est un rĂ©seau constituĂ© de neurones reliĂ©s par des axones ; la cellule est un rĂ©seau de molĂ©cules reliĂ©es par des produits chimiques ; les sociĂ©tĂ©s humaines sont constituĂ©es d’individus reliĂ©s par des relations amicales, familiales, professionnelles ; les Ă©cosystĂšmes entiers sont des rĂ©seaux d’espĂšces connectĂ©es par diverses interactions comme la chaine alimentaire. » Il y a quelques annĂ©es, en rĂ©digeant sa thĂšse, Manuel Lima a créé un outil permettant de visualiser comment l’information se rĂ©pand Ă  travers les blogs Blogviz, qui a suscitĂ© l’intĂ©rĂȘt de nombreux chercheurs. C’est cette recherche sur la nature de la blogosphĂšre qui a conduit Lima Ă  s’intĂ©resser plus avant aux structures fondamentales des rĂ©seaux, et Ă  crĂ©er Visual Complexity. Ce site est un vĂ©ritable catalogue illustrĂ© des systĂšmes complexes existant Ă  l’ùre de l’interconnectabilitĂ© infinie », un bestiaire de tous les types de rĂ©seaux existant dans notre univers. On y trouve des centaines de modĂšles. Lima en a mentionnĂ© quelques-uns lors de son intervention. Des analyses de la blogosphĂšre politique amĂ©ricaine, par exemple qui permettent de voir si les intersections entre blogs dĂ©mocrates et rĂ©publicains permettent de se faire une idĂ©e des rĂ©sultats des Ă©lections. Une recherche du mĂȘme type a Ă©tĂ© effectuĂ©e sur les soutiens Ă  SĂ©golĂšne Royal, qui incluaient de surcroit les coordonnĂ©es gĂ©ographiques des diffĂ©rents participants. Un autre type de visualisation, la “blogosphĂšre hyperbolique” de Matthieu Hurst cofondateur du site Blogpulse , concerne l’ensemble des blogs et a permis de visualiser des donnĂ©es surprenantes. On y dĂ©couvre en effet l’existence, au milieu de tous ces sites interconnectĂ©s, de petits ilots isolĂ©s du reste de la sphĂšre. Des blogs de gens trĂšs jeunes, interconnectĂ©s entre eux, mais qui ne font guĂšre de liens vers le reste du monde. Il existe une multitude d’autres exemples, comme les cartographies rĂ©alisĂ©es depuis Flickr par Fabien Girardin ou cette expĂ©rience de Biomapping, qui mesure via GPS le niveau de stress des gens se dĂ©plaçant dans la pĂ©ninsule de Greenwich, Ă  Londres. Il existe mĂȘme des recherches sur le terrorisme, comme Rewiring the spy, qui cartographie la “carriĂšre” de diffĂ©rents terroristes, pas forcĂ©ment des leaders, mais ceux qui restent plusieurs annĂ©es dans le milieu, afin d’analyser la dynamique de ces groupes pour ActuVisu, Caroline Goulard a fait sa lecture de Manuel Lima en pointant Ă©galement les diffĂ©rents exemples Ă©voquĂ©s. L’ensemble de ces diffĂ©rentes configurations de rĂ©seaux, qu’il est dĂ©sormais possible d’observer et de mesurer, implique la crĂ©ation d’un nouveau langage, d’une nouvelle syntaxe visuelle, estime Manuel Lima. C’est tout l’enjeu de Visual Complexity. Tous ces rĂ©seaux qui possĂšdent autant de points communs, sont-ils tous des exemples particuliers d’une mĂȘme structure universelle ? C’est une question que Manuel Lima a posĂ©e en conclusion, en nous montrant face Ă  face deux photos aux sujets fort diffĂ©rents. L’une reprĂ©sentant la structure cĂ©rĂ©brale d’une souris, l’autre Ă©tant une illustration de la forme de l’univers entier. Deux images qui se ressemblent de maniĂšre impressionnante, mais une simple analogie est-elle suffisante pour convaincre qu’une rĂ©volution scientifique est en marche ? On voit se profiler aujourd’hui derriĂšre une telle science du rĂ©seau l’idĂ©e d’un nouveau platonisme, la conviction qu’il existe un Monde des IdĂ©es » donnant forme Ă  l’ensemble des phĂ©nomĂšnes. Une idĂ©e qui ne va pas sans susciter un certain scepticisme lorsqu’à la fin de Lift, le gĂ©ographe Jacques Levy a mis en garde les actuels chercheurs du web contre une formule magique » susceptible d’expliquer Ă  la fois phĂ©nomĂšnes sociaux et physiques, sans doute avait-il en tĂȘte la prĂ©sentation de Manuel Lima. D’un autre cĂŽtĂ©, on ne peut s’empĂȘcher de penser que ces nouveaux modĂšles formels nous rĂ©vĂšlent quelque chose de profond sur la nature de la rĂ©alitĂ©, mais quoi ? Pour le savoir, sans doute faudra-t-il aller encore plus loin, construire plus avant ce nouveau langage, et au-delĂ  d’un vocabulaire visuel, fĂ»t-il fascinant, s’attacher Ă  l’élaboration de sa sĂ©mantique et de sa syntaxe. Comprendre la complexitĂ© des usages Stefana Broadbent est chercheuse au dĂ©partement d’Anthropologie de CollĂšge universitaire de Londres et s’occupe du laboratoire UsageWatch qui consiste, comme son nom l’indique, Ă  observer les usages, notamment technologiques. Cet homme envoie un SMS depuis son lieu de travail », certainement Ă  quelqu’un qui n’est pas loin de lui, car souvent on s’adresse Ă  des amis, Ă  de la famille, explique la chercheuse en nous montrant la photo d’un ouvrier du bĂątiment en train de faire une petite pause avec son mobile, comme on la faisait avant avec une cigarette. C’est une action trĂšs subversive, car cela remet en question la morale et l’éthique au travail, souligne la chercheuse. Nous avons appris que pour ĂȘtre productif, il faut ĂȘtre isolĂ© de notre famille et des gens qu’on aime. On ne doit pas ĂȘtre distrait par des activitĂ©s personnelles au travail. Or, tous les gens qui ont accĂšs Ă  des moyens de communication l’utilisent pour des communications privĂ©es sur leurs lieux de travail. » Cette croyance selon laquelle la productivitĂ© et l’isolement sont importants dans le travail ne remonte pourtant qu’à la rĂ©volution industrielle avec l’invention des lieux de production spĂ©cialisĂ©e, quand nous sommes passĂ©s du moment oĂč les gens Ă©taient payĂ©s pour le produit qu’il fabriquait au temps passĂ© Ă  le fabriquer ». Cette transformation a introduit le problĂšme de l’attention au travail », explique Stefana Broadbent. C’est Ă  partir de lĂ  qu’on a inventĂ© des systĂšmes de contrĂŽle de l’attention des gens, en transformant les environnements de travail, en introduisant des superviseurs, des agents de maĂźtrise chargĂ©s de contrĂŽler le travail des autres. » On a la mĂȘme chose dans le systĂšme Ă©ducatif on apprend aux enfants Ă  se concentrer , ce sur quoi se concentrer, ce qui vaut la peine de se concentrer. Il y a beaucoup de discussions et de confusions sur la question de l’attention, estime la chercheuse. La façon de gĂ©rer la complexitĂ© et l’attention s’appuie sur l’idĂ©e que les gens peuvent la gĂ©rer de façon individuelle, que c’est un processus individuel qui s’appuie sur la volontĂ© de chacun. Or, j’aimerais vous montrer que l’attention est un processus social plus qu’individuel. » Charles Derber en 1979 dans The Poursuit of Attention disait que les relations entre les statuts des uns et des autres Ă©taient liĂ©es Ă  l’attention. Ceux qui ont un statut plus Ă©levĂ© s’attendent Ă  recevoir l’attention des autres et ceux qui ont un statut plus bas doivent porter de l’attention. Mon expĂ©rience d’observation des gens sur leurs lieux de travail montre qu’on contrĂŽle la gestion de l’attention des employĂ©s de bas niveau, alors qu’on fait confiance aux cadres et dirigeants » on ne surveille pas comment ils gĂšrent leur temps. Il y a une rupture sociale considĂ©rable dans la gestion de l’attention, liĂ©e Ă  la confiance. A l’heure actuelle, dans beaucoup de lieux de travail, on contrĂŽle l’accĂšs des employĂ©s aux modes de communication accĂšs internet restreint voir interdit, mobiles Ă©teints, e-mails dĂ©branchĂ©s
 Il y a une grande disparitĂ© dans la supervision et le contrĂŽle. Le contrĂŽle de l’attention des gens est pourtant vouĂ© Ă  l’échec, mĂȘme si beaucoup d’entreprises continuent Ă  le faire. Il est devenu de plus en plus impossible Ă  mesure que les moyens de communication se dĂ©multiplient. » Et Stefana Broadbent de prendre un exemple trĂšs prĂ©cis pour nous convaincre de sa dĂ©monstration, en observant par le dĂ©tail un accident de train, le Chatsworth Metrolink Accident de 2008, qui a eu lieu dans une petite ville du nord de Los Angeles un accident tragique oĂč deux trains sont entrĂ©s en collision Ă  4 heures de l’aprĂšs-midi faisant 25 morts et plus de 100 blessĂ©s. Les deux trains un de voyageur, l’autre de marchandise Ă©taient sur la mĂȘme section d’une voie unique et allaient dans deux sens diffĂ©rents. Le National Transportation Savety Board – NTSB – amĂ©ricain a enquĂȘtĂ© sur les causes de l’accident et a montrĂ© que le conducteur du train de passagers n’avait pas vu un feu de circulation rouge
 Et la raison pour laquelle il ne l’avait pas vu Ă©tait qu’il utilisait son mobile pour envoyer un texto, car l’enquĂȘte a montrĂ© que quelqu’un a reçu un texto de lui, 22 secondes avant la collision. On s’est rendu compte que ce jour-lĂ , pendant son travail, il avait envoyĂ© 62 textos. Metrolink avait pourtant Ă©dictĂ© des rĂšgles de non-utilisation des mobiles en conduisant. Mais si l’on regarde les messages du conducteur, on se rend compte qu’il envoyait des messages pendant qu’il Ă©tait au travail quasiment tous les jours. En regardant son activitĂ© via son tĂ©lĂ©phone mobile, on se rend compte que lorsqu’il travaillait 11 heures dans la journĂ©e, aux heures de pointe du matin et de l’aprĂšs-midi, il envoyait plus de textos pendant qu’il Ă©tait au travail que pendant qu’il Ă©tait au repos. C’est assez habituel dans nos pratiques, quand on les regarde en dĂ©tail, en fait », rappelle la chercheuse. Image Stefena Broadbent sur la scĂšne de Lift, montrant le schĂ©ma des Ă©changes de texto du conducteur de train, photographiĂ©e par User Studio. La sociĂ©tĂ© Metrolink s’est dĂ©fendu en disant qu’elle ne pouvait savoir si le conducteur du train Ă©tait en train de tĂ©lĂ©phoner ou de lire son journal. Personne ne voit ce qu’il fait dans sa cabine. Suite Ă  cet accident, le NTSB a conclu
 qu’il fallait installer des camĂ©ras vidĂ©os dans les cabines des conducteurs ! Dans les jours qui ont suivi l’accident, il y a une loi interdisant Ă  tout employĂ© des chemins de fer d’utiliser des dispositifs mobiles. Une autre loi a interdit l’utilisation du tĂ©lĂ©phone dans les voitures, et dans toute situation de mobilitĂ©. Or, si on regarde les facteurs de risque, on se rend compte qu’il y avait bien d’autres Ă©lĂ©ments qui ne fonctionnaient pas », rappelle Stefana Broadbent jouant au dĂ©tective
 D’abord, cette ligne Ă©tait une voie unique, comme il y en a beaucoup en Californie, ce qui n’est pas nĂ©cessairement sans risque. Ensuite, quand le train est passĂ© au feu rouge, personne n’a pu avertir le conducteur de son erreur. Le systĂšme ne permettait pas non plus d’arrĂȘter le train Ă  distance
 Enfin, la durĂ©e du travail journalier Ă©tait longue et fractionnĂ©e. Les conducteurs sont isolĂ©s dans leurs cabines. L’automatisation du systĂšme fait que leurs tĂąches sont trĂšs rĂ©pĂ©titives et ennuyeuses et l’on sait que la rĂ©pĂ©tition des tĂąches et l’ennui ne favorisent pas l’attention. On s’est Ă©galement rendu compte que l’autre conducteur de train de marchandise a envoyĂ© Ă©galement 42 messages avec son mobile durant cette journĂ©e
 On pourrait trouver bien des exemples analogues, comme lors du crash d’un avion sur l’Hudson oĂč un contrĂŽleur aĂ©rien a Ă©tĂ© accusĂ©, faussement, d’avoir utilisĂ© un tĂ©lĂ©phone mobile pendant son travail. On en connait tous, des exemples de ce type, mĂȘme si, heureusement, souvent, ils sont beaucoup moins dramatiques, reconnaĂźt la chercheuse. L’environnement de travail rĂ©duit le niveau d’implication des gens. L’automatisation implique des travaux de plus en plus dĂ©nuĂ©s de sens avec des fonctions limitĂ©es. On demande Ă  bien des employĂ©s de concentrer leur attention sur des tĂąches sans sens et rĂ©pĂ©titives et on sait qu’on a du mal Ă  concentrer son attention quand on s’ennuie
 Finalement, le tĂ©lĂ©phone mobile sert Ă  rester vigilant et en alerte. Comme nos vĂ©rifications d’e-mails correspondent souvent Ă  une chute d’attention dans notre travail et font partie d’un cycle d’attention qui a pour fonction de la dĂ©tourner pour nous permettre de nous reconcentrer », rappelle Stefana Broadbent. Enfin, on peut se demander si la division arbitraire entre le monde privĂ© et professionnel est une si bonne chose. Chacun sait qu’il est important d’avoir des moments de contacts avec les siens dans la journĂ©e. Ce n’est pas un choix indivuel, mais bien souvent un choix social imposĂ© par nos reprĂ©sentations
 » On peut se demander si la solution de contrĂŽler l’attention des gens est une bonne solution », conclu l’anthropologiste. La multiplication des camĂ©ras de surveillance et des politiques de surveillance augmente plutĂŽt qu’elle ne diminue le problĂšme. Or, les gens trouveront toujours une colonne pour se cacher et faire ce qui est interdit. Le problĂšme n’est pas tant d’utiliser un dispositif Ă©lectronique pour se distraire, mais de concevoir des environnements qui Ă©vitent un ennui massif et qui limitent les distractions. Les mobiles, comme l’internet, ou la nicotine peuvent ĂȘtre un bouc-Ă©missaire facile. mais au final, le vĂ©ritable dĂ©fi est de savoir comment concevoir des environnements de travail plus chargĂ© de sens. » La connexion solution Ă  la complexitĂ© ? Dans son film Us now voir l’article que nous lui consacrions l’annĂ©e derniĂšre, le cinĂ©aste et anthropologue britannique Ivo Gormley cherchait Ă  dĂ©montrer que la collaboration de masse va bouleverser l’organisation des gouvernements ». Aujourd’hui, il continue Ă  tracer cette voie mĂȘlant entraide mutuelle, socialisation et participation Ă  la vie de la communautĂ©. Le philosophe Thomas Hobbes pensait que l’état naturel des ĂȘtres humains Ă©tait de s’entretuer, pour que les uns puissent profiter de ce que les autres ont. A contrario, Kropotkine, connu pour ĂȘtre l’un des thĂ©oriciens de l’anarchie, a beaucoup Ă©tudiĂ© les animaux, des abeilles aux chimpanzĂ©s, et estimait de son cĂŽtĂ© que, s’ils devaient se battre voire tuer pour survivre, ils n’en passaient pas moins beaucoup de temps et d’énergie Ă  s’entre-aider, et que cette forme naturelle » de l’entraide mutuelle Ă©tait trĂšs importante pour leur survie. Image Ivo Gormley sur la scĂšne de Lift, photographiĂ© par Ton Zijlstra. Aujourd’hui, dĂ©plore Ivo Gormley, c’est plutĂŽt Hobbes qui a gagnĂ©. Lorsque les familles Ă©taient nombreuses et que les habitations Ă©taient surpeuplĂ©es, nombreux Ă©taient ceux qui allaient au pub ou au marchĂ©, n’hĂ©sitant pas Ă  parler avec des Ă©trangers. Les supermarchĂ©s ne sont pas aussi sociaux que les marchĂ©s, et les Ă©crans de tĂ©lĂ©vision, les lotissements, les immeubles, ont souvent tendance Ă  isoler les gens, Ă  les anonymiser, Ă  casser les mĂ©canismes d’entraide, d’apprentissage et d’échanges d’antan. A l’opposĂ©, l’encyclopĂ©die WikipĂ©dia, ou encore le Couchsurfing ce site par lequel des gens prĂȘtent leurs canapĂ©s Ă  des voyageurs du monde entier, montre Ă  quel point les gens ont envie de partager, et besoin de s’entraider. L’internet est un formidable vecteur de socialisation, estime Ivo Gormley, pour qui nous avons besoin de nouveaux formats d’entraide mutuelle, et de faire revivre les anciens, nous devons remettre ça dans le courant mainstream » Lorsqu’un systĂšme donne aux gens la possibilitĂ© d’agir de maniĂšre positive, ils le font avec plaisir, s’y connectent sur la base de similitudes importantes, pas seulement pour faire le bien, mais aussi de maniĂšre trĂšs individualiste, parce qu’ils ont besoin d’aide, de trouver des gens dans la mĂȘme situation. Ce n’est que le dĂ©but de ce phĂ©nomĂšne fabuleux la possibilitĂ© de se connecter – et il faut crĂ©er encore plus de possibilitĂ©s de se connecter. Ce qui s’est passĂ© au 20e siĂšcle est une anomalie
 On en revient Ă  ce mouvement oĂč l’on s’intĂ©resse aux autres, oĂč l’on retravaille en collaboration.” Le nouveau film d’Ivo Gormley, Playmakers montre comment certains se rĂ©approprient le jeu pour crĂ©er du lien social. Ainsi de ces jeunes blancs de la classe moyenne partis jouer Ă  chat dans la rue, la nuit, et qui, confrontĂ©s Ă  des jeunes Pakistanais qui ne comprenaient pas ce qu’ils faisaient et qui hĂ©sitaient Ă  aller se plaindre Ă  la police, les ont finalement invitĂ©s Ă  venir jouer avec eux, pour finir bras dessus bras dessous aprĂšs une partie nocturne endiablĂ©e. Playmakers from thinkpublic on Vimeo. Ivo Gormley explique Ă©galement avoir travaillĂ© dans le service qui s’occupe des patients atteints d’un cancer pour casser les hiĂ©rarchies constituĂ©es, permettre aux malades de prendre des responsabilitĂ©s, et amĂ©liorer les relations du personnel soignant et des patients. Evoquant l’individualisme et la compĂ©tition qui rĂšgne gĂ©nĂ©ralement dans les salles de gym, ce qu’il qualifie de mauvaise gym », et l’isolement croissant des personnes ĂągĂ©es, il a aussi participĂ© Ă  la mise en place du projet Good Gym, via l’agence d’innovation sociale britannique Think Public pour laquelle il est anthropologue, qui incite ceux qui ne pouvaient ou ne voulaient pas perdre de temps Ă  aller en salle de gym Ă  aller courir pour apporter par exemple un journal Ă  des personnes ĂągĂ©es, trop contentes de pouvoir ainsi voir du monde. Dans les deux cas, le bĂ©nĂ©fice est non seulement social, mais Ă©galement physiologique avoir des contacts rĂ©guliers avec des jeunes a un impact direct sur l’espĂ©rance de vie des plus ĂągĂ©s, leurs capacitĂ©s cognitives et leur santĂ© vasculaire. Pour Ivo Gormley, si le 20e siĂšcle semble avoir donnĂ© raison Ă  Thomas Hobbes, les nouvelles formes de sociabilitĂ© et d’entraide mutuelle que l’on voit poindre, notamment via le Net, nous renvoient plutĂŽt Ă  Kropotkine. Et nous aurions probablement beaucoup Ă  gagner Ă  tenter de reconcevoir nos relations, et nos actions, afin de remettre l’entraide mutuelle au coeur des processus. RĂ©mi Sussan, Hubert Guillaud, Jean-Marc Manach Embracing Complexity at Lift France 10envoyĂ© par videosfing. – VidĂ©os des derniĂšres dĂ©couvertes scientifiques. Lift11 6-8 juillet, Marseille OĂč peut-on Ă  la fois Ă©changer avec le M. Innovation » du Royaume-Uni Geoff Mulgan, l’entrepreneuse en sĂ©rie du covoiturage Robin Chase, le directeur R&D du plus grand rĂ©seau de patients du monde, PatientsLikeMe Paul Wicks, la chercheuse de rĂ©fĂ©rence sur les villes globales Saskia Sassen, la designeuse des Slow cities » Anna Meroni et celle d’un rĂ©seau de gestion de crises qui, issu d’Afrique, intĂ©resse jusqu’aux Japonais Juliana Rotich ? A Lift France, cet Ă©tĂ© Ă  Marseille. OĂč peut-on dĂ©couvrir 22 installations incroyables qui mettent en scĂšne des projets d’artistes, de designers, de chercheurs et d’entrepreneurs audacieux ? Participer Ă  14 ateliers crĂ©atifs pour redessiner la ville, inventer la consommation collaborative de demain ou rĂ©flĂ©chir au futur de la monnaie ? Toujours Ă  Lift. A l’occasion de l’ouverture du blog invitĂ© d’InternetActu et de Place de la Toile sur la plateforme du profitez de 25 % de remise pour aller Ă  Lift France 2011. Pour prĂ©parer la 3e Ă©dition française de la confĂ©rence Lift qui aura lieu du 6 au 8 juillet Ă  Marseille, nous vous proposons de redĂ©couvrir quelques-unes des plus stimulantes prĂ©sentations qui s’y sont tenues ces derniĂšres annĂ©es et que nous avons couvertes. Retour sur l’édition 2009 avec Gunter Pauli
 “Aujourd’hui, on donne des prix environnementaux aux hommes d’affaires qui annoncent qu’ils vont polluer un peu moins. Mais il ne faut pas polluer un peu moins il faut arrĂȘter de polluer.” C’est sur cette base, qui pourrait paraĂźtre totalement provocatrice, que Gunter Pauli a plantĂ© le dĂ©cor de son impressionnante intervention voir la vidĂ©o. Gunter Pauli est un industriel belge qui, dans les annĂ©es 90, a lancĂ© une sociĂ©tĂ© fabricant des produits biologiques pour la lessive et la vaisselle, Ecover. Il a conçu son usine pour qu’elle soit complĂštement biodĂ©gradable tous les matĂ©riaux pouvant ĂȘtre dĂ©montĂ©s et rĂ©utilisĂ©s. Il innova mĂȘme par exemple en payant ses employĂ©s jusqu’à 50 centimes d’euros par kilomĂštres parcourus pour qu’ils viennent en vĂ©lo Ă  l’usine, jusqu’à ce que la justice belge le condamne pour cette initiative qui sortait des cadres du droit du travail
 Il a dirigĂ© Ecover jusqu’à ce qu’il dĂ©couvre que les produits qu’il utilisait l’huile de palme notamment Ă©taient responsables de la dĂ©forestation et de la disparition des Orang-Outan en IndonĂ©sie. Il vendit alors son entreprise pour se consacrer Ă  la recherche de solutions alternatives Ă  nos modes de dĂ©veloppement. Pour ĂȘtre un vrai pionnier de l’écologie, il lui fallait trouver des matiĂšres premiĂšres qui rĂ©gĂ©nĂšrent la forĂȘt tropicale, pas l’inverse. Pour l’exposition universelle de Hanovre en 2000, il contribua Ă  rĂ©aliser un pavillon le Guadua Pavilion de Manizales construit uniquement en bambou, afin de montrer que le bambou – le matĂ©riel de la pauvretĂ©, celui avec lequel plus d’un milliard de personnes dans le monde construisent leur maison -, pouvait ĂȘtre un matĂ©riel durable et de qualitĂ©. Un vĂ©ritable acier vĂ©gĂ©tal. Cette rĂ©alisation a changĂ© le regard que les pauvres portaient sur ce matĂ©riau. “Il faut changer fondamentalement nos façons de penser. Nous devons crĂ©er des chemins pour que nos enfants imaginent un futur diffĂ©rent afin qu’ils ne rĂ©pĂštent pas nos erreurs”, explique Gunter Pauli. Image Gunter Pauli par Ivo NĂ€pflin pour la LiftConference. C’est par des rĂ©alisations comme celle-ci que Gunter Pauli a mis au point sa thĂ©orie et mĂ©thodologie de la “pollution zĂ©ro” qui a donnĂ© le nom de son Institut de recherche Zero emission research institute. Pour Pauli, faisant rĂ©fĂ©rence Ă  la dynamique de la croissance mise au point par Adam Smith, on a trop exploitĂ© les facteurs de la division du travail et de l’accumulation du capital au dĂ©triment des matiĂšres premiĂšres, gaspillĂ©es sous forme de dĂ©chets. Le dĂ©veloppement durable c’est la capacitĂ© de rĂ©pondre aux besoins de tous avec ce dont nous disposons. Chaque systĂšme naturel, dont il s’inspire totalement, fonctionne avec ce qui est disponible. Or depuis des annĂ©es, notre Ă©conomie, comme notre systĂšme financier, a fonctionnĂ© avec ce qui n’existe pas. » Un systĂšme qui n’a cessĂ© de produire du chĂŽmage, de la pollution, des dĂ©chets et de la pauvreté  dĂ©nonce l’entrepreneur Ă©cologiste. Aujourd’hui, l’économie amĂ©ricaine gaspille chaque annĂ©e 1 000 000 000 000 de dollars pour gĂ©rer ses dĂ©chets ! “C’est une folie !”, clame Gunter Pauli. “On ne met pas l’argent au bon endroit !” S’inspirer des systĂšmes naturels Il faut en revenir Ă  la satisfaction des besoins fondamentaux l’eau, la nourriture, le logement, la santĂ©, l’énergie, l’emploi, l’éthique et stimuler l’entrepreneuriat dans ce sens. La science hĂ©las n’est pas liĂ©e Ă  la satisfaction de ces besoins fondamentaux. “Les systĂšmes naturels sont mon inspiration”. Nous nous devons de ne gĂ©nĂ©rer aucune pollution, aucun dĂ©chet, aucun chĂŽmage
 explique-t-il le plus calmement du monde. De quoi avons-nous besoin pour arriver Ă  une sociĂ©tĂ© durable ? D’abord, y croire. Avoir une pensĂ©e positive. Se dire que c’est possible. Il faut s’engager dans un apprentissage crĂ©atif pour comprendre comment fonctionnent les systĂšmes naturels et nous en servir pour que les transformations s’accomplissent. On a besoin d’une innovation massive et de nouveaux modĂšles commerciaux pour y parvenir. Mais dans les Ă©coles de commerce, le modĂšle Ă©conomique qu’on apprend consiste Ă  investir plus et Ă©conomiser un peu. Ce n’est pas le modĂšle des systĂšmes naturels ! » L’évolution nous apprend le contraire il faut investir moins pour gĂ©nĂ©rer plus de crĂ©ation et de capital social pour que chacun contribue Ă  l’écosystĂšme. Nous ne pouvons pas accepter les dommages collatĂ©raux que nous faisons peser sur la nature et sur l’humanitĂ©. Pour dĂ©passer les gĂ©nĂ©ralitĂ©s, Gunter Pauli se dĂ©cide Ă  vouloir ĂȘtre concret et Ă  montrer, par quelques exemples forts, comment, sur son exemple, on peut transformer les choses. Le systĂšme naturel cherche toujours Ă  faire plus avec le moins d’énergie possible. Comment les systĂšmes naturels gĂ©nĂšrent-ils de l’électricitĂ© tous les jours ? Ce n’est pas grĂące au soleil comme on le croit souvent. Mais par la gravitĂ© et la biochimie. Les systĂšmes naturels n’utilisent ni piles, ni mĂ©taux comment peut-on rĂ©soudre le problĂšme de la connectivitĂ©, si ce n’est en regardant comment la vie elle-mĂȘme gĂ©nĂšre de l’électricitĂ© ? Et de montrer un prototype de film Ă©lectrocardiogramme thin film electrocardiogram, un Ă©lectrocardiogramme qui marche sans batterie, comme un patch, qui permet, en utilisant la connectivitĂ© naturelle du corps, de fonctionner pendant 24 heures, sans piles, sans fil. Oubliez les technologies qui ont besoin de trop d’énergie pour fonctionner comme le Bluetooth ! » Faisons tout sans piles. Les prothĂšses auditives, les tĂ©lĂ©phones mobiles peuvent fonctionner par la conductivitĂ© naturelle que nos corps produisent. Comment le dispositif nanomĂ©trique inventĂ© par le professeur Jorge Reynolds qui permet de rĂ©cupĂ©rer l’électricitĂ© produite par notre corps et qui nous permet d’envisager bientĂŽt des Pacemakers ne nĂ©cessitant ni chirurgie, ni anesthĂ©sie, ni piles pour fonctionner
 Le Fraunhofer Institut est en train de produire le premier tĂ©lĂ©phone mobile qui fonctionne en convertissant la pression gĂ©nĂ©rĂ©e par la voix en Ă©lectricitĂ© ! On peut crĂ©er de l’électricitĂ© avec le corps 60 volts/heure ou par la pression de la voix et cela permet d’envisager de faire fonctionner un tĂ©lĂ©phone mobile pendant plus de 200 heures ! Plus vous parlez, plus votre tĂ©lĂ©phone est chargĂ© ! Mais on peut aller plus loin encore !, rapporte Gunter Pauli. Peut-on faire du mĂ©tal sans fonderie ni exploitations miniĂšres, c’est-Ă -dire sans la chaine industrielle que nous avons conçu jusqu’à prĂ©sent et qui n’est absolument pas durable. Pourrait-on exploiter du mĂ©tal juste en rĂ©cupĂ©rant le mĂ©tal existant ? A quoi servirait une place de marchĂ© de compensation des Ă©missions de carbone comme l’imagine le protocole de Kyoto, si on peut rĂ©duire de 99 % nos Ă©missions de carbone ? Autre exemple. Comment les systĂšmes naturels produisent-ils des polymĂšres ?, nous demande l’entrepreneur
 Ils sont fabriquĂ©s Ă  partir des acides animĂ©s d’insectes par exemple depuis des millions d’annĂ©es, nous explique-t-il. Si nous Ă©tions capables de fabriquer des polymĂšres comme le font les insectes plutĂŽt que d’utiliser la pĂ©trochimie, nous arriverions Ă  rĂ©volutionner profondĂ©ment la production. Gunter Pauli dĂ©fend ardemment le biomimĂ©tisme, c’est-Ă -dire des technologies inspirĂ©es par le vivant. Aujourd’hui, on est capable d’utiliser la soie pour faire des rĂ©parations nerveuses ou osseuses. L’araignĂ©e est capable de produire 9 types de soies diffĂ©rentes, avec des qualitĂ©s de rĂ©sistance diffĂ©rentes selon l’eau qu’elle y incorpore. Le zoologue Fritz Vollrath et ses Ă©quipes d’Oxford Biomaterial ont produit la premiĂšre usine produisant du fil comme l’araignĂ©e en utilisant des acides aminĂ©s et la pression. On utilise 100 000 tonnes d’acier pour fabriquer des rasoirs jetables », s’enflamme Gunter Pauli, alors que la capacitĂ© de la soie pourrait nous permettre de nous raser sans jamais pĂ©nĂ©trer la peau. On pourrait remplacer l’acier et le titane de nos lames de rasoir par de la soie, ne nĂ©cessitant ni pĂ©trole, ni Ă©nergie, ni dĂ©chets. Un hectare de murier permet de produire 2 tonnes de soie. La Chine ancienne a travaillĂ© Ă  rĂ©gĂ©nĂ©rer des sols arides en y plantant des mĂ»riers dont la soie a Ă©tĂ© le sous-produit. Pour fabriquer des rasoirs avec de la soie, il faudrait planter des mĂ»riers sur 250 000 hectares de sols arides qu’on pourrait reconquĂ©rir par ce moyen et qui permettraient de gĂ©nĂ©rer plus de 12 500 emplois », explique-t-il chiffres Ă  l’appui. Au final, l’observation et l’imitation des systĂšmes naturels pourraient nous permettre de gĂ©nĂ©rer des polymĂšres naturels, conquĂ©rir des terres arides et crĂ©er des emplois ! » Autre exemple encore. Remplacer la chimie par la physique
 Les systĂšmes naturels ne jouent pas avec les molĂ©cules non biodĂ©gradables. Or, si on se dĂ©barrasse de toutes les bactĂ©ries avec de la chimie, nous risquons surtout de finir par nous dĂ©barrasser de toute l’humanitĂ© ! Comment les systĂšmes naturels contrĂŽlent-ils les bactĂ©ries, sans utiliser le chlore et les produits chimiques ?
 On pourrait imaginer utiliser le vortex, ce tourbillon vertical qu’on observe lorsqu’on vide une baignoire par exemple. Realice, dĂ©veloppĂ© par H2O Vortex, un systĂšme qui créé de la glace en enlevant l’air l’eau glace plus facilement sans air, utilise ainsi la pression que gĂ©nĂšre un vortex. Sans air, pas de bactĂ©rie, pas de corrosion
 TrĂšs rapidement trop, Gunter Pauli a Ă©voquĂ© la climatisation naturelle du zĂšbre ou des termitiĂšres en citant une Ă©cole en SuĂšde oĂč l’air circule sur le modĂšle des termitiĂšres pour faire de la rĂ©gulation thermique naturelle, qui savent refroidir ou rĂ©chauffer en dĂ©pensant le moins d’énergie possible, en nous incitant Ă  nous en inspirer. Autre exemple encore nous avons pris l’habitude d’incinĂ©rer les dĂ©chets organiques, alors que dans les systĂšmes naturels, ils deviennent des aliments. Dans le cafĂ© par exemple, on trouve seulement 0,2 % des graines de cafĂ© dans un petit noir qu’on prend sur un zinc de bistro. 25 millions de fermes produisent du cafĂ© dans 70 pays dans le monde. L’initiative Chido’s Blend au Zimbabwe consiste justement Ă  utiliser les dĂ©chets du cafĂ© pour crĂ©er de la nourriture pour animaux ou de l’électricitĂ©, plutĂŽt que de les dĂ©truire. Autre exemple encore Ă©voquĂ© trop rapidement, celui de “Las gaviotas en el Vichada”. Ici, le projet Ă©tait de reconquĂ©rir des territoires qui ont subi la dĂ©forestation en rĂ©gĂ©nĂ©rant une forĂȘt primaire. Ce programme lancĂ© depuis 25 ans est le plus important programme de reboisement dans le monde. Il a permis de montrer qu’on pouvait rĂ©gĂ©nĂ©rer la biodiversitĂ©. Sur cet espace, nous sommes passĂ©s de 11 Ă  250 espĂšces. La forĂȘt gĂ©nĂšre une production naturelle d’eau offerte gratuitement Ă  la population locale et pour partie embouteillĂ©e pour ĂȘtre revendue ailleurs et gĂ©nĂ©rer des revenus pour cette communauté  Ce territoire a Ă©tĂ© achetĂ© pour quelques dollars et gĂ©nĂšre aujourd’hui des revenus pour toute une population, souligne Gunter Pauli pour montrer combien le modĂšle Ă©conomique est sensĂ©. Impressionnante intervention en tout cas, qui nous fera nous prĂ©cipiter, pour ceux qui ne l’ont pas dĂ©jĂ  lu, sur les livres de Gunter Pauli comme Croissance sans limites pour aller plus en dĂ©tail et plus en profondeur dans sa stimulante vision. Lift France 09 Gunter Pauli Changing the Planet from Lift Conference on Vimeo. Lift11 6-8 juillet, Marseille OĂč peut-on Ă  la fois Ă©changer avec le M. Innovation » du Royaume-Uni Geoff Mulgan, l’entrepreneuse en sĂ©rie du covoiturage Robin Chase, le directeur R&D du plus grand rĂ©seau de patients du monde, PatientsLikeMe Paul Wicks, la chercheuse de rĂ©fĂ©rence sur les villes globales Saskia Sassen, la designeuse des Slow cities » Anna Meroni et celle d’un rĂ©seau de gestion de crises qui, issu d’Afrique, intĂ©resse jusqu’aux Japonais Juliana Rotich ? A Lift France, cet Ă©tĂ© Ă  Marseille. OĂč peut-on dĂ©couvrir 22 installations incroyables qui mettent en scĂšne des projets d’artistes, de designers, de chercheurs et d’entrepreneurs audacieux ? Participer Ă  14 ateliers crĂ©atifs pour redessiner la ville, inventer la consommation collaborative de demain ou rĂ©flĂ©chir au futur de la monnaie ? Toujours Ă  Lift. A l’occasion de l’ouverture du blog invitĂ© d’InternetActu et de Place de la Toile sur la plateforme du profitez de 25 % de remise pour aller Ă  Lift France 2011. Pour prĂ©parer la 3e Ă©dition française de la confĂ©rence Lift qui aura lieu du 6 au 8 juillet Ă  Marseille, nous vous proposons de redĂ©couvrir quelques-unes des plus stimulantes prĂ©sentations qui s’y sont tenues ces derniĂšres annĂ©es et que nous avons couvertes. Pour commencer, retour sur l’édition 2011 qui se tenait Ă  GenĂšve en fĂ©vrier avec Kevin Slavin
 Kevin Slavin est le cofondateur d’Area/Code devenu il y a peu Zynga, un studio de conception de jeux. Et c’est pour ce travail qu’il est surtout connu voir ses interventions en 2009 Ă  Picnic dont nous vous avions rendu compte ici et lĂ , mais c’est Ă  une tout autre exploration – oh combien passionnante, bien que particuliĂšrement alambiquĂ©e – Ă  laquelle il nous a conviĂ©e Ă  la confĂ©rence Lift qui se tenait rĂ©cemment Ă  GenĂšve. Image Kevin Slavin sur la scĂšne de Lift11, photographiĂ© par Ivo NĂ€pflin. Sa prĂ©sentation s’appuyait sur une prĂ©cĂ©dente prĂ©sentation faite il y a 4 ans qui portait sur le bas Manhattan, le quartier financier de New York, et qui s’interrogeait pour comprendre comment les villes pouvaient apprendre Ă  Ă©couter le pouls de la ville. Il y expliquait que les villes devaient construire des radars, comme on construisait des amplificateurs acoustiques pour dĂ©tecter l’approche des avions. Mais ce qui conduit Ă  construire des radars, conduit aussi Ă  construire des avions furtifs pour y Ă©chapper, pour voler sans laisser de traces. L’histoire de l’avion furtif pourtant s’est mal terminĂ©e puisqu’en 1999, l’un de ses avions a rĂ©ussi Ă  ĂȘtre touchĂ© par un missile WikipĂ©dia. Or, c’était lĂ  quelque chose qui n’aurait jamais dĂ» se passer. Ce qui est intĂ©ressant, explique Kevin Slavin, c’est de regarder comment les avions furtifs disparaissent des radars. Le principe pour tromper les radars consiste Ă  faire passer les avions pour des oiseaux. Faire disparaĂźtre les gros objets et les rendre plus petits qu’ils ne sont. C’est la façon de faire disparaĂźtre les choses Ă  notre Ă©poque ». C’est notre façon de construire des boites noires. C’est un peu la mĂȘme chose sur les marchĂ©s financiers, estime Kevin Slavin, qui arrive enfin Ă  son propos. Si l’on veut dĂ©placer une grosse quantitĂ© d’argent, il faut faire de maniĂšre Ă  ce que cela ne se voie pas. Les banques disposent ainsi d’algorithmes pour rendre invisibles certaines transactions, faire passer de gros Ă©changes massifs pour de petits Ă©changes insignifiants, en les dĂ©coupant en petits paquets pour que le marchĂ© remarque moins les transactions en cours. Mais comme dans le monde militaire, les parades se dĂ©veloppent. Il existe d’autres algorithmes qui surveillent les petites transactions pour les analyser, prĂ©voir les Ă©volutions du marchĂ© et comprendre ce qu’ils masquent. 70 % des Ă©changes Ă  Wall Street passent par des algorithmes qui tentent soit de les rendre invisibles soit de les repĂ©rer
 Nanex est ainsi une de ces sociĂ©tĂ©s qui extraient des algorithmes des comportements d’investissements. Dans le monde financier, la vitesse est une arme. Si vous faites des Ă©changes financiers Ă  haute frĂ©quence ou que vous essayez de voir comment ceux-ci se comportent, il vous faut de bons algorithmes, de bons processeurs et surtout un trĂšs bon rĂ©seau. Et pour gagner quelques millisecondes, il faut ĂȘtre proche de l’internet. Or, tout le monde pense que l’internet est un rĂ©seau Ă©galement et Ă©quitablement distribuĂ©. Mais ce n’est pas si vrai. A New York, Ă  proximitĂ© du Carrier Hotel, il y a un endroit oĂč arrivent les principaux tuyaux de l’internet mondial et qui permet d’obtenir des temps de latence quasiment nuls, explique encore Kevin Slavin. Et cet endroit est justement trĂšs proche de Wall Street. Ces quelques millisecondes valent des millions de dollars et les immeubles des environs se remplissent de serveurs plutĂŽt que de gens. Les bĂątiments et les villes sont structurellement façonnĂ©s par les algorithmes. Dans ce quartier de New York, on vide les bureaux et les appartements pour y mettre des tonnes de serveurs, parce que cette localisation peut donner un avantage stratĂ©gique en Ă©tant au plus prĂšs d’un des coeurs de l’internet. La ville de New York est en train d’ĂȘtre optimisĂ©e pour fonctionner comme une puce Ă©lectronique. » Et tout ce que nous pourrions faire en tant qu’ĂȘtre humain dans ces mĂȘmes locaux, vaut bien moins que ce que ces machines font et gagnent. Si on commence Ă  tirer sur le fil rouge des algorithmes, on se rend compte qu’ils dĂ©terminent de plus en plus de choses dans nos vies. Pas seulement les Ă©changes commerciaux ou le niveau de remboursement de nos pensions de retraite
 Ils dĂ©terminent Ă©galement la valeur de l’immobilier, ce qu’on regarde Ă  la tĂ©lĂ©, le prix des produits, ce que nous mangeons, comment nous circulons, ce qui va nous arriver, la maniĂšre dont sont conçues les chansons, ce que nous allons voir au cinĂ©ma, ce que nous lisons, le titre des livres que nous lisons, ce que nous pensons de ce que nous lisons
 » Tant et si bien que dresser l’Atlas des algorithmes contemporains, de tous les domaines oĂč ils ont une influence, est dĂ©jĂ  devenu quasiment impossible. Les inconvĂ©nients des effets de ces algorithmes sont bien sĂ»r nombreux. D’abord, il y a l’opacitĂ©. C’est-Ă -dire que nous ne savons pas ce qu’ils font. Observez ces nouveaux types d’ascenseurs sensĂ©s ĂȘtre mieux capables de distribuer les personnes dans les Ă©tages. On indique son Ă©tage, et l’algorithme vous propose de prendre tel ou tel ascenseur en fonction des multiples demandes qu’il reçoit au mĂȘme moment et de la situation des ascenseurs. Mais dans l’ascenseur vous n’avez plus de boutons pour demander un autre Ă©tage. Il n’y a que le bouton stop. L’effet des algorithmes est bien plus concret quand on est enfermĂ© dans une boĂźte », s’amuse Kevin Slavin. Regardez les trajets des robots aspirateurs. On constate qu’ils ne fonctionnent pas tous de la mĂȘme maniĂšre en observant comment ils se dĂ©placent. Certains, comme le Roomba, ont un algorithme alĂ©atoire, qui les fait se comporter d’une maniĂšre trĂšs angoissante, car leurs mouvements n’ont rien Ă  voir avec le fonctionnement d’un humain, d’autres fonctionnent avec des algorithmes qui ont l’air plus rationnels, qui balaient la piĂšce dans un sens puis un autre. » Autre inconvĂ©nient l’impĂ©nĂ©trabilitĂ©, c’est-Ă -dire le fait que les algorithmes ne soient pas lisibles et ne correspondent pas Ă  la maniĂšre dont les humains rĂ©flĂ©chissent. Et Kevin Slavin de prendre l’exemple d’un programme d’algorithme gĂ©nĂ©tique qui va trouver seul comment dĂ©placer des formes triangulaires et rondes dotĂ©es de caractĂ©ristiques physiques et motrices, comme sait le faire un ordinateur par essai-erreur vidĂ©o. Dans un premier temps, l’ordinateur ne sait mĂȘme pas que les roues doivent aller sur le sol. Il apprend de chaque essai et gĂ©nĂšre une nouvelle rĂ©ponse en utilisant ce qui a rĂ©ussi. En une heure, il a appris Ă  gĂ©nĂ©rer une voiture efficace, mais il ne sait toujours pas ce que sont des roues. Pour Slavin, c’est un bon exemple pour montrer comment l’ordinateur rĂ©flĂ©chit et combien ce mode est diffĂ©rent de la façon dont les humains eux rĂ©flĂ©chissent. CoreWar WikipĂ©dia est un jeu imaginĂ© par des programmateurs d’algorithmes, qui consiste Ă  les faire se battre. C’est un jeu absurdement abstrait, mais qui ne l’est pas plus que votre retraite oĂč vos investissements vus par les algorithmes financiers ». Enfin, il y a un dernier inconvĂ©nient que Slavin reconnait ne pas encore savoir nommer. Pour tenter de l’expliquer, il remonte Ă  Frances Galton, le cousin de Darwin WikipĂ©dia, qui voulait savoir comment trouver des structures dans l’agencement des Ă©lĂ©ments. C’est sa rĂ©flexion qui est Ă  l’origine du dĂ©veloppement de l’algorithmie – mais aussi de l’eugĂ©nisme. Aujourd’hui, le volume de donnĂ©es produites est si immense qu’on peut produire des algorithmes sur tout et n’importe quoi. Orley Ashenfelter, professeur d’économie Ă  Princeton, sait par exemple dĂ©terminer si le vin que va produire un vignoble sera bon, juste en analysant les raisins et en y appliquant un algorithme en fonction de la mĂ©tĂ©o et du sol. Une approche qui n’a rien Ă  voir avec celle de Robert Parker WikipĂ©dia, le grand gourou mondial du vin, puisque lui, c’est avec son palais qu’il dĂ©termine les qualitĂ©s d’un vin. Les donnĂ©es produites par les algorithmes gĂ©nĂšrent des donnĂ©es que l’on ne peut apprĂ©hender. DĂ©sormais, les mathĂ©matiques disent qu’ils peuvent influencer le goĂ»t et la prĂ©fĂ©rence des gens. 60 % des films louĂ©s sur Netflix sont des films qui ont Ă©tĂ© mis en avant pour vous par l’algorithme de Netflix en se basant sur ce que d’autres et vous-mĂȘmes avez dĂ©jĂ  apprĂ©ciĂ© ». Pire, une sociĂ©tĂ© comme Epagogix permet d’évaluer un film avant mĂȘme qu’il soit fait on introduit un scĂ©nario dans l’ordinateur et celui-ci peut vous dire le profit qu’il devrait gĂ©nĂ©rer
 DĂ©sormais, des algorithmes dĂ©terminent quels films vont ĂȘtre tournĂ©s. D’autres disent s’ils ont Ă©tĂ© bons
 Que se passe-t-il quand le crash qu’a connu la bourse va se dĂ©rouler dans l’industrie du cinĂ©ma ou sur le marchĂ© du vin ? Que signifient, Ă  long terme, cette production et cette consommation façonnĂ©es par les algorithmes ? OĂč tous les films se ressemblent. OĂč tous les vins ont le mĂȘme goĂ»t ? Jusqu’oĂč cela va fonctionner et jusqu’oĂč cela va nous conduire ? Que produit cette monoculture, cette culture moyenne, oĂč tout est lissĂ© par les algorithmes ?
 » On savait pourtant que les emprunts immobiliers des gens ne pourraient pas ĂȘtre remboursĂ©s. Mais on a largement ignorĂ© les faits et les donnĂ©es – pourtant produits par les marchĂ©s. On a autorisĂ© des gens Ă  emprunter au-dessus de ce qu’ils pouvaient rembourser, conclut Kevin Slavin. La leçon que l’on peut tirer de ce qu’il s’est passĂ© Ă  Wall Street vient peut-ĂȘtre de ceux qui ont dĂ©cidĂ© de quitter le marchĂ© des Ă©changes, Ă©coeurĂ©s. Peut-on faire la bourse ailleurs, autrement ? Peut-on crĂ©er des systĂšmes alternatifs des Dark Pools, c’est-Ă -dire des marchĂ©s oĂč d’immenses liquiditĂ©s se dĂ©placeraient en-dehors du royaume des algorithmes ? Quel serait le dark pool de l’art, de la musique, de l’immobilier ? Peut-on sortir du champ – du chant – des algorithmes ? Ou est-il dĂ©jĂ  trop tard ? Lift11 6-8 juillet, Marseille OĂč peut-on Ă  la fois Ă©changer avec le M. Innovation » du Royaume-Uni Geoff Mulgan, l’entrepreneuse en sĂ©rie du covoiturage Robin Chase, le directeur R&D du plus grand rĂ©seau de patients du monde, PatientsLikeMe Paul Wicks, la chercheuse de rĂ©fĂ©rence sur les villes globales Saskia Sassen, la designeuse des Slow cities » Anna Meroni et celle d’un rĂ©seau de gestion de crises qui, issu d’Afrique, intĂ©resse jusqu’aux Japonais Juliana Rotich ? A Lift France, cet Ă©tĂ© Ă  Marseille. OĂč peut-on dĂ©couvrir 22 installations incroyables qui mettent en scĂšne des projets d’artistes, de designers, de chercheurs et d’entrepreneurs audacieux ? Participer Ă  14 ateliers crĂ©atifs pour redessiner la ville, inventer la consommation collaborative de demain ou rĂ©flĂ©chir au futur de la monnaie ? Toujours Ă  Lift. A l’occasion de l’ouverture du blog invitĂ© d’InternetActu et de Place de la Toile sur la plateforme du profitez de 25 % de remise pour aller Ă  Lift France 2011. Pour les 500 millions d’utilisateurs de Facebook il semble n’y avoir qu’une maniĂšre d’accĂ©der Ă  Facebook celle de se connecter sur le rĂ©seau social pour consulter son mur d’activitĂ© le NewsFeed ». Pourtant, via Facebook Connect, on a dĂ©jĂ  vu qu’il y en avait une autre, distante, permettant d’interagir avec les services de Facebook depuis d’autres sites. Il y en a encore une autre, rĂ©servĂ©e aux services informatiques des sites qui utilisent Facebook. Cet autre accĂšs passe par les API, les interfaces de programmation, c’est-Ă -dire des jeux de donnĂ©es ouverts qui permettent aux dĂ©veloppeurs d’utiliser les services proposĂ©s par Facebook et qui sont l’une des clefs du fonctionnement du web Car derriĂšre tous les systĂšmes fermĂ©s que d’aucun dĂ©noncent Ă  grands cris, il y a avant tout des systĂšmes informatiques qui discutent entre eux, il y a des systĂšmes ouverts » souvent gratuits plus que payants, sauf si on dĂ©passe un certain niveau ou volume d’utilisation des donnĂ©es accessibles. Ouverts » Ă  tout le moins aux systĂšmes techniques, plutĂŽt qu’aux seuls utilisateurs. Si le web semble se refermer, par la mise en place d’écosystĂšmes propres comme le constatait Chris Anderson dans Le web est mort, vive l’internet, il faut nĂ©anmoins reconnaĂźtre que ces Ă©cosystĂšmes savent discuter entre eux. Mieux, pour atteindre la masse critique d’utilisateurs, il est bien souvent impossible que cette discussion n’ait pas lieu. C’est bien en tout cas dans les interfaces de programmation que se concoctent le web d’aujourd’hui et le web de demain dans les nĂ©gociations permettant d’accĂ©der aux services des uns et des autres, dans les mashups de services oĂč la bonne alchimie crĂ©era le bon service. De nombreuses start-ups naissent de ces croisements et des matrices permettent d’ailleurs d’imaginer leurs croisements. Les interfaces de programmations ne sont pas des technologies cachĂ©es la plupart des sites qui en proposent documentent ouvertement les conditions d’accĂšs, prĂ©cisent clairement les conditions d’utilisation. Mais ce sont des technologies relationnelles discrĂštes, des rĂ©pertoires de donnĂ©es qui Ă©changent des droits d’accĂšs, des utilisations, que le public ne voit pas. Ce sont elles qui permettent le plus souvent le dĂ©veloppement d’applications web ou logicielles, c’est-Ă -dire de micrologiciels que les Ă©changes de donnĂ©es rendent fonctionnels. Qu’est-ce qu’une interface de programmation ? Il existe deux façons de donner accĂšs Ă  des donnĂ©es sur le web, explique Charles Nepote responsable du programme DonnĂ©es publiques de la Fing. Tout d’abord un accĂšs direct Ă  un fichier contenant les donnĂ©es. C’est souvent la mĂ©thode la plus simple, car les outils de gestion proposent gĂ©nĂ©ralement une fonction d’export des donnĂ©es sous forme de fichier. Elle est cependant moins bien adaptĂ©e lorsque les donnĂ©es changent souvent et qu’il y en a beaucoup cela oblige les rĂ©utilisateurs Ă  recharger frĂ©quemment l’ensemble du fichier et peut ĂȘtre consommateur en ressources systĂšme et rĂ©seau. C’est pourquoi se dĂ©veloppent frĂ©quemment un mode d’accĂšs direct aux donnĂ©es uniquement nĂ©cessaires Ă  travers une interface de programmation API. Pour Karl Dubost, chargĂ© des relations avec les dĂ©veloppeurs chez Opera, l’API n’est rien d’autre qu’ un protocole de communication pour accĂ©der Ă  un service ». De la mĂȘme façon qu’avec un logiciel de base de donnĂ©es, on a un vocabulaire pour accĂ©der aux donnĂ©es et faire une requĂȘte, l’API permet de construire des interrogations via une interface normalisĂ©e ». Les fonctionnalitĂ©s proposĂ©es par les API Ă©voluent selon les services et au cours du temps. Par exemple, Facebook propose plusieurs API celle pour s’authentifier, celle pour explorer et exploiter le graphe social des utilisateurs, etc. Une API va permettre Ă  un programme de demander Ă  l’application qui fournit les donnĂ©es, uniquement celles dont elle a besoin ou auxquelles il souhaite ou peu accĂ©der. Les grands acteurs du numĂ©rique en gĂ©nĂ©ral et du web particulier, comme Google, Amazon, Facebook, Twitter, 
 ont Ă©tabli leur succĂšs grĂące Ă  leurs APIs. Une API est donc un protocole d’accĂšs Ă  un systĂšme d’information pour un autre systĂšme d’information, afin qu’ils Ă©changent des donnĂ©es entre eux. Ce Ă  quoi ils ont accĂšs et les conditions de cet accĂšs sont clairement dĂ©crits et documentĂ©s par l’interface, selon les jeux de donnĂ©es qui peuvent s’échanger. Via des API, on peut construire un systĂšme de rĂ©servation de billets de trains ou d’avion en utilisant les API proposĂ©es par les transporteurs, utiliser des banques d’images comme celles des agences de presse ou utiliser des services spĂ©cifiques faire correspondre cette banque d’image Ă  un service de reconnaissance d’image lui-mĂȘme accessible via une API. Image La croissance du nombre d’API disponibles et de leur utilisation par Programmable Web. Les API sont des interfaces d’accĂšs aux donnĂ©es numĂ©riques, comme l’explique Christian FaurĂ©. C’est une porte d’entrĂ©e qui permet de contrĂŽler l’exposition et l’utilisation des donnĂ©es numĂ©riques produites par un service. C’est un service logistique qui s’adresse aux autres services et aux dĂ©veloppeurs pour faciliter l’échange d’informations. Chaque API Ă  ses particularitĂ©s ses clefs d’accĂšs, le nombre de requĂȘtes maximales par clefs d’accĂšs, les donnĂ©es accessibles et celles qui ne le sont pas, les fonctions de manipulation des donnĂ©es celles qui sont proposĂ©es en lecture seule comme celles qui pourront ĂȘtre Ă©crites par un service tiers permettant par exemple Ă  un service d’écrire Ă  votre place sur votre mur Facebook quand vous l’utilisez et si vous l’avez autorisĂ©. Elles permettent donc Ă  des services de communiquer entre eux, de croiser leurs donnĂ©es, d’utiliser les donnĂ©es des uns et des autres, de maniĂšre plus ou moins transparente pour l’utilisateur. API de quoi l’utilisateur est-il maĂźtre ? Plus ou moins transparente. Dans Facebook par exemple, quand vous installez une application, celle-ci vous demande en langage plus ou moins clair si vous souhaitez que les donnĂ©es que cette application va mĂ©moriser Ă©changent avec Facebook. Elle se rĂ©sume souvent par une page d’autorisation qui n’est pas sans poser problĂšme, comme s’en plaint Danny Sullivan, puisque la plupart du temps, nous n’avons pas d’autres choix que d’accepter ou refuser la communication, quand bien mĂȘme bien des donnĂ©es rĂ©cupĂ©rĂ©es sembleraient inutiles Ă  son fonctionnement. Nous n’avons aucune capacitĂ© d’ajustement des donnĂ©es rĂ©cupĂ©rĂ©es. Les applications demandent souvent bien plus d’information qu’elles n’en ont besoin et l’utilisateur n’a rarement d’autre choix que d’approuver ce vol ou de ne pas utiliser l’application en question. Image exemple d’une demande d’autorisation d’une application dans Facebook listant tout ce Ă  quoi elle demande accĂšs sans que nous puissions moduler quoi que ce soit. Bien souvent, les rĂšgles qui rĂ©gissent les interfaces de programmation ne sont pas les mĂȘmes que celles que connaissent les utilisateurs passant par le service principal. Sur par exemple, il est difficile de trouver un tweet particulier ou de remonter loin dans le temps
 Le moteur de Twitter ne semble pas avoir une longue mĂ©moire de nos Tweets. Mais ce n’est pas le cas des API utilisĂ©es par des services tiers, comme le moteur de recherche SnapBird. Sur Facebook, les choses qu’on apprĂ©cie like disparaissent peu Ă  peu de nos murs et de nos mĂ©moires, mais ce n’est pas le cas des interfaces de programmation de Facebook qui elles savent trĂšs bien que vous avez apprĂ©cier tel groupe ou telle marque il y a plusieurs mois de cela, et l’utiliser pour vous proposer des recommandations ou des publicitĂ©s adaptĂ©es Ă  votre profil. Il y a une dissymĂ©trie pour l’usager entre ce Ă  quoi accĂšdent les services qui se branchent sur les API et ce Ă  quoi accĂšde l’usager, limitĂ© Ă  la seule pratique du site web dudit service. Tant et si bien que les API sont bien plus utilisĂ©es que les sites web les API de Twitter reçoivent bien plus de visites que le site web de Twitter, explique Dion Hinchcliffe. L’écosystĂšme de Twitter c’est dĂ©sormais plus de 10 000 applications tierces qui utilisent les API de Twitter, et si Twitter fait 20 millions de visiteurs uniques, 40 millions de personnes y accĂšdent via des applications estime TechCrunch. Autre difficultĂ©, pour les programmeurs et les sites web qui utilisent ces interfaces ils dĂ©pendent complĂštement de leurs Ă©volutions. RĂ©cemment, Google annonçait faire le mĂ©nage dans ses API, expliquant que certaines allaient tout simplement ĂȘtre abandonnĂ©es, comme l’API permettant d’utiliser le service Google Translate. DerriĂšre cette dĂ©cision, ce sont des dizaines de services qui doivent repenser leur offre pour trouver une solution alternative ou fermer Ă  leur tour. L’internet des API, le web des applications Les interfaces de programmations et les applications, qui sont leur corollaire, nous font entrer dans un nouveau web ou plutĂŽt une nouvelle Ă©tape de l’informatique. Avec d’un cĂŽtĂ© l’internet des API et de l’autre le web des applications. D’un cĂŽtĂ©, les Ă©changes d’information entre services qui structurent le rĂ©seau, mais demeurent inaccessibles au commun des mortels, de l’autre le web des applications, c’est-Ă -dire de nanoprogrammes qui utilisent les donnĂ©es de ces API pour rendre l’information plus accessible aux gens. C’est en ce sens qu’il faut regarder l’arriver d’applications dans le navigateur comme le propose dĂ©jĂ  Google Chrome ou Mozilla. Si les applications s’expliquaient dans l’univers du mobile et du tactile pour rĂ©pondre aux spĂ©cificitĂ©s d’utilisabilitĂ© de ces interfaces, l’arrivĂ©e d’applications dans le navigateur promet d’autres apports et notamment de rĂ©soudre les problĂšmes d’incompatibilitĂ© des plateformes, supports et langages. Il permet surtout de simplifier les installations plutĂŽt que de devoir lancer un programme, prĂ©ciser oĂč il doit s’installer, configurer son accĂšs, il suffit dĂ©sormais d’activer une application pour qu’elle soit disponible, que ce soit sur votre ordinateur pour les applications de bureau, sur votre mobile ou dans votre navigateur. Pour Oren Michels, PDG de Mashery, une solution de gestion d’interfaces de programmation, les API semblent ĂȘtre des choses trĂšs techniques, trĂšs geeks, alors que ce n’est rien d’autre qu’un canal de distribution. Realtibits, une start-up qui propose une solution pour crĂ©er des Forums, a ainsi lancĂ© son API avant de lancer son site web, rapporte le ReadWriteWeb. Pour Sam Rami d’Apigee, les API sont la chaĂźne d’approvisionnement du XXIe siĂšcle tant et si bien que des services mesurent leurs performances en permanence. Les API ne sont pas spectaculaires. Elles consistent en de simples entrepĂŽts de donnĂ©es communicants, dont la disponibilitĂ© doit ĂȘtre sans faille, au risque sinon de briser toute une chaĂźne d’accessibilitĂ©, car elles ne sont pas seulement utilisĂ©es sur le site qui les propose mais sur une infinitĂ© de sites qui les utilisent. Facebook a lancĂ© sa premiĂšre API en 2006, avant de crĂ©er en 2007, une plateforme dĂ©diĂ©e aux dĂ©veloppeurs. Dans les premiers temps, celle-ci s’est surtout concentrĂ©e Ă  fournir le matĂ©riel pour construire des applications Ă  l’intĂ©rieur de Facebook. DĂ©sormais, la vitrine pour les dĂ©veloppeurs de Facebook, explique Daniel Luxembourg de Programmable Web, fait uniquement la promotion de mesures techniques permettant d’utiliser Facebook au-delĂ  de Facebook et ce, notamment depuis le lancement en avril 2010 du nouveau graphe Facebook et de l’Open Graph Protocol. Autant d’évolution qui ont permis Ă  Facebook de devenir le troisiĂšme service le plus populaire en terme d’utilisation sous forme de mashup voir le classement, rapporte Programmable Web. Image les API les plus utilisĂ©es par type sur ces 14 derniers jours, via Programmable web. Comme l’explique Dion Hinchcliffe dans un rĂ©cent billet l’intĂ©gration est devenue la vertu Ă  cultiver. Il est de moins en moins frĂ©quent de voir de nouvelles applications Web apparaitre sans une bonne API qui lui corresponde, car les start-ups ont appris depuis longtemps que si elles ont quelque chose de bien Ă  offrir, l’essentiel de son utilisation viendra des API et non pas de l’expĂ©rience utilisateur. » DĂ©sormais, les sites ne sont qu’une modalitĂ© d’accĂšs. L’essentiel de celui-ci se fait d’une maniĂšre distante. Quand vous commencer Ă  utiliser des API, vous rĂ©alisez que ce que vous considĂ©riez jusqu’à prĂ©sent comme le web les sites web n’est qu’une maniĂšre de voir l’information contenue dans le web », explique Christian Heilmann dans une trĂšs claire prĂ©sentation des enjeux du web de donnĂ©es. Le succĂšs de Facebook ne tient pas tant au succĂšs d’audience du site de plus en plus il est liĂ© au succĂšs de ses API, Ă  la façon dont d’autres sites exploitent Facebook Connect ou intĂšgrent le Graphe de Facebook dans d’autres services. C’est en cela que Facebook, et la plupart des services majeurs du web deviennent chaque jour un peu plus incontournables leur Ă©cosystĂšme ne cessant de s’étendre. Au cours de ces derniĂšres annĂ©es, nous avons vu les API des entreprises devenir plus simples, plus web, plus faciles d’intĂ©gration tout en rĂ©duisant les coĂ»ts d’accĂšs », explique encore Dion Hinchcliffe. Tant et si bien que leur succĂšs ouvre de nouvelles perspectives d’intĂ©grations des solutions complexes utilisĂ©es en entreprise, estime le consultant. Le succĂšs des API des services web devrait inspirer les services professionnels, invitĂ©s Ă  dĂ©livrer dĂ©sormais leurs donnĂ©es et faciliter leurs intĂ©grations par d’autres sociĂ©tĂ©s via des interfaces de programmation. Il n’y a pas de web sans API Les API sont la clef du web social et du web des donnĂ©es. C’est par elles que transitent les donnĂ©es. C’est par leur croisement que se construisent de nouveaux services et de nouvelles connaissances. Si les donnĂ©es sont les entrepĂŽts d’information, nul n’y accĂšde sans clef, et cette clef, ce sont les API. Mais c’est lĂ  un web dans lequel l’utilisateur n’a qu’une place congrue. Les enjeux sont ailleurs, comme le montrait la rĂ©cente bataille entre Facebook et Google permettant de croiser les contacts des utilisateurs DorĂ©navant, les services Web ne pourront utiliser l’interface de programmation API qui gĂšre les contacts de Gmail que s’ils autorisent en contrepartie l’exportation des mĂȘmes informations de contacts de maniĂšre simple ». De nombreux services utilisent l’API de Gmail pour faciliter l’inscription de nouveaux utilisateurs lorsque l’utilisateur rentre son adresse, le service peut trĂšs facilement accĂ©der Ă  son carnet de contact, et donc lui signaler quels sont ses correspondants qui sont dĂ©jĂ  inscrits sur le service, ou lui proposer de leur envoyer une invitation. Facebook, notamment, utilise cette API pour proposer aux nouveaux inscrits de retrouver et d’ajouter comme amis » les correspondants Gmail. Or Facebook se refuse Ă  proposer la mĂȘme option aux services tiers. Un nouvel inscrit sur Gmail ne peut pas rentrer son identifiant Facebook pour ajouter automatiquement Ă  son carnet d’adresses ses amis » du rĂ©seau social. » La guerre des stratĂ©gies autour des API Ă  savoir la façon dont elles sont proposĂ©es, ouvertes, payantes Ă  partir d’un certain seuil d’utilisation, gratuites, rĂ©ciproques
 est en train de façonner l’internet et tout ce qui en dĂ©pend. Pour la plupart des sociĂ©tĂ©s de l’internet, ĂȘtre accessible via une ou plusieurs API est essentiel pour le dĂ©veloppement de son service. Mais pour certains acteurs, la surutilisation de leurs ressources pose question. Les stratĂ©gies s’affinent Ă  mesure et peuvent ĂȘtre trĂšs diffĂ©rente d’un service l’autre. Certains acteurs ne vont proposer que des API payantes. D’autres vont proposer des API trĂšs ouvertes pour ĂȘtre exploitĂ©es par le plus grand nombre. D’autres au contraire, semblent vouloir de plus en plus distinguer qui peut accĂ©der ou non Ă  ses API
 DĂ©sormais, la plupart des grands services web proposent leurs API. InitiĂ©s dĂšs 2000 par l’API d’eBay puis par celle d’Amazon, elles se sont depuis multipliĂ©es d’abord par celles des grands acteurs du web permettant l’explosion des Mashups, puis par le dĂ©veloppement des API des sites sociaux depuis 2006, comme l’explique trĂšs bien ClĂ©ment Vouillon. DĂ©sormais, non seulement tous les sites sociaux proposent une API – comme Linked-in -, mais le phĂ©nomĂšne touche dĂ©sormais des services plus petits, des start-ups moins connues, qui misent sur le dĂ©veloppement d’interfaces de programmation pour assurer leur dĂ©veloppement. L’asymĂ©trie des Ă©changes de donnĂ©es Si via ces API, la circulation des donnĂ©es semble s’ouvrir, les dĂ©veloppeurs sont les otages consentants du moindre changement dans les conditions d’utilisations, comme l’explique ClĂ©ment Vouillon. Mais surtout, dans cet univers, l’utilisateur et ses donnĂ©es semblent ĂȘtre le plus petit dĂ©nominateur commun. On a l’impression que s’oppose un monde d’API plutĂŽt ouvertes, oĂč les systĂšmes discutent entre eux, Ă  un monde d’applications relativement fermĂ©es qui jouent des donnĂ©es des utilisateurs sans que ceux-ci en comprennent la portĂ©e. Certes, ils en bĂ©nĂ©ficient aussi. Mais peut-on vraiment bĂ©nĂ©ficier de choses qu’on ne maĂźtrise pas, qu’on ne comprend pas ? En fait, ce n’est pas tant le fait qu’on ne maĂźtrise pas ou qu’on ne comprend pas les API qui posent problĂšme. C’est plutĂŽt le fait qu’elles utilisent nos donnĂ©es sans que nous nous en rendions vraiment compte. Et surtout qu’elles utilisent nos donnĂ©es de maniĂšre asymĂ©trique c’est-Ă -dire qu’elles n’utilisent pas nĂ©cessairement les mĂȘmes que celles auxquelles nous pensons leur donner accĂšs. Autoriser un service Ă  utiliser nos donnĂ©es sur Facebook, peut l’autoriser Ă  aller chercher dans tout notre historique, faisant apparaĂźtre des choses de nous que nous-mĂȘmes avions oubliĂ©es. Le problĂšme des API ne repose pas tant dans la circulation des donnĂ©es que dans leur asymĂ©trie. Comme le disait Kevin Kelly rĂ©cemment “Nous ne voulons pas moins de donnĂ©es, nous voulons une plus grande symĂ©trie, tirer plus davantage que ce que l’autre partie sait de nous”. Et force est de constater que ce n’est pas ce que proposent les API. Hubert Guillaud Le dossier “Comprendre Facebook” 1Ăšre partie Le rĂŽle social du bavardage 2e partie Facebook technologie relationnelle 3e partie L’internet des API, le web des applications La lecture de la semaine n’est pas une lecture, mais plutĂŽt une thĂ©orie, dont je ne sais pas si elle est lĂ©gĂšrement dĂ©lirante ou trĂšs banale. Mais je vous la livre mercredi aux alentours de 18h, j’ai compris Facebook, je veux dire que j’ai vraiment compris ce que c’était que Facebook. Pourquoi mercredi aux alentours de 18h ? Parce qu’à ce moment-lĂ , Mark Zuckerberg, le fondateur et prĂ©sident de Facebook Ă©tait Ă  la tribune de l’e-G8, et, comme plusieurs centaines de personnes, j’étais dans la salle. Zuckerberg Ă©tait lĂ  fidĂšle Ă  l’image qu’on se fait de lui l’air d’un jeune amĂ©ricain de 27 ans, en jean, t-shirt et basket, transpirant sous les spots et sirotant un soda. Il parlait comme on s’attendait Ă  ce qu’il parle Ă  la fois humble et sĂ»r de lui, consensuel et Ă©nervant. Mais, un passage de son intervention a commencĂ© Ă  me mettre la puce Ă  l’oreille. Zuckerberg s’est lancĂ© dans un dĂ©veloppement sur ce qui faisait selon lui les deux composantes de l’ADN de Facebook. Ces deux composantes Ă©tant pour lui la technologie et le social. D’ailleurs a-t-il expliquĂ©, j’ai créé Facebook Ă  Harvard oĂč j’étudiais alors non seulement les sciences computationnelles, l’informatique, mais aussi la psychologie. Facebook c’est cela, c’est de la technologie et une apprĂ©hension du social ». Image Mark Zuckerberg, PDG de Facebook, lors de l’eG8 Forum, photographiĂ© par Arash Derambarsh. IntĂ©ressant me dis-je alors, je ne savais pas que Zuckerberg avait Ă©tudiĂ© la psychologie. Quelques minutes plus tard, les questions sont ouvertes Ă  la salle, et lĂ , il se produit un phĂ©nomĂšne surprenant. Sur la demi-douzaine de questions qui lui sont posĂ©es, deux abordent la question des affects ; pas ses affects Ă  lui, mais ceux qui sont mobilisĂ©s dans la sociabilitĂ© Ă  l’Ɠuvre dans Facebook. A ces deux questions Zuckerberg ne sait pas quoi rĂ©pondre et mĂȘme, il ne les comprend pas, il dit ne pas les comprendre. Les Ă©crans donnent Ă  voir en gros plan son visage incrĂ©dule, mal Ă  l’aise, lui qui jusque-lĂ  semblait dĂ©rouler sans encombre un discours parfaitement rodĂ©. Mon voisin me montre alors un texto qu’il reçoit Ă  l’instant mĂȘme, texto dans lequel un correspondant Ă©voque le syndrome d’Asperger pour expliquer la rĂ©action de Zuckerberg. Que Zuckerberg soit atteint de cette maladie associĂ©e Ă  l’autisme est Ă  l’évidence impossible, d’ailleurs, je ne crois pas qu’il s’agissait d’une hypothĂšse sĂ©rieuse. En revanche, il y a dans l’appel Ă  la psychopathologie quelque chose d’assez juste. Et c’est lĂ  d’oĂč ma thĂ©orie tire sa source. Je suis convaincu que quand nous sommes dans Facebook, nous sommes dans l’esprit de Mark Zuckerberg. Je suis convaincu que Mark Zuckerberg a créé Facebook parce qu’il avait besoin de Facebook, et que Facebook est une manifestation technologique de la PsychĂ©e de Zuckerberg. Au moment de la sortie de The Social Network, le film de David Fincher retraçant la naissance de Facebook, l’écrivaine britannique Zadie Smith a Ă©crit dans la New York Review of Books un excellent article sur le film, et, au-delĂ , sur Facebook. Elle concluait son article en expliquant que Facebook, c’était la vision du monde d’un Ă©tudiant de Harvard, mais c’était aussi celle de Zuckerberg. Elle rappelait que Facebook Ă©tait bleu parce que Zuckerberg Ă©tait daltonien et que pendant longtemps, le site avait portĂ© la mention a production by Mark Zuckerberg ». Mais on peut aller au-delĂ  ? Cette maniĂšre qu’a Facebook de rationaliser les relations sociales Ă©nonciation du statut amoureux, possibilitĂ© de sĂ©lectionner les relations, division des amitiĂ©s en groupe semble ressortir Ă  la crĂ©ation d’un espace oĂč les angoisses sont Ă  la fois exprimĂ©es et subsumĂ©es. C’est pourquoi je pense que l’on a tort quand on envisage Facebook comme un outil et quand on tente de l’analyser avec le seul prisme de la sociologie. Bien sĂ»r, c’est devenu un outil, car d’autres dĂ©veloppeurs sont venus ajouter leur savoir-faire au travail de Zuckerberg, et puis les usagers s’en sont emparĂ©s d’une maniĂšre qui n’avait sans doute pas Ă©tĂ© imaginĂ©e par Zuckerberg cf. son rĂŽle politique dans les rĂ©voltes arabes. Bien sĂ»r Facebook est nĂ© dans un contexte sociologique particulier, celui de Harvard, et a empruntĂ© des formes identifiĂ©es sociologiquement celles de la sociabilitĂ© des universitĂ©s amĂ©ricaines d’élite. Certes Facebook est une entreprise dont les dĂ©veloppements sont Ă  comprendre en termes Ă©conomiques. Mais le vrai mystĂšre de Facebook n’est pas lĂ . Le vrai mystĂšre de Facebook est le mĂȘme que celui qui touche tout chef d’Ɠuvre artistique. La question c’est pourquoi 600 millions de personnes se sentent Ă  l’aise dans l’esprit de Mark Zuckerberg ? Pourquoi 600 millions jouissent manifestement d’ĂȘtre dans l’esprit de Mark Zuckerberg ? Cette question, qui peut paraĂźtre Ă©trange, est la mĂȘme que celle qui pose toute grande Ɠuvre d’art. Pourquoi des millions de gens de par le monde ont-ils lu et continue de lire La Recherche du Temps Perdu, alors que s’y dĂ©ploie dans ses moindres mĂ©andres l’esprit de Proust ? Pourquoi des millions de gens ont-ils Ă©coutĂ© et continuent d’écouter Mozart alors que s’y Ă©panouit la folie de Mozart ? Cette triangulation miraculeuse entre un gĂ©nie nĂ©vrotique, une forme d’expression parfaitement maĂźtrisĂ©e et un public, l’art nous y a habituĂ©s. La technologie un peu moins, et c’est pourquoi Facebook nous trouble autant, c’est pourquoi on ne sait pas trĂšs bien comment le prendre. Mais c’est peut-ĂȘtre cela Facebook. Un gĂ©nie nĂ©vrotique qu’est Mark Zuckerberg, la maĂźtrise d’une forme d’expression qu’est l’informatique et la rencontre avec ce qu’est un public dans le monde sans frontiĂšres qu’est l’Internet. Facebook est bien autre chose qu’un outil ou un phĂ©nomĂšne de sociĂ©tĂ© Facebook, c’est le premier chef d’Ɠuvre de l’art numĂ©rique. Xavier de la Porte Xavier de la Porte, producteur de l’émission Place de la Toile sur France Culture, rĂ©alise chaque semaine une intĂ©ressante lecture d’un article de l’actualitĂ© dans le cadre de son Ă©mission. Cette lecture Ă©tait liĂ©e Ă  l’émission du 29 mai 2011 consacrĂ©e justement Ă  l’eG8. La caractĂ©ristique principale du web social, dont Facebook est l’emblĂšme, est de lier les activitĂ©s des gens sur internet. Facebook n’est pas un trombinoscope ou un annuaire comme on l’entend souvent, car s’il n’était que cela, il ne permettrait pas d’action, autre que la prĂ©sentation de profils. Les profils ne sont qu’une porte d’entrĂ©e c’est l’activitĂ© communicationnelle qui fait mĂ©dia. En ce sens, il est bien un mĂ©dia social », mĂȘme si nous avons tous du mal Ă  dĂ©finir ce que c’est, comme le rapportait trĂšs justement Nicolas Vanbremeersch. Qu’est-ce qu’un mĂ©dia social ? Pour comprendre ce qu’est un mĂ©dia social, il faut en revenir Ă  ce qu’est un mĂ©dia, un support de diffusion massive de l’information ». Le mĂ©dia social, par essence, est donc toujour un support de diffusion massive de l’information qui emprunte exactement toutes les formes et supports existants texte, image, vidĂ©o, audio
, mais la diffĂ©rence vient peut-ĂȘtre de la nature de l’intermĂ©diaire, comme l’exprime trĂšs bien FrĂ©dĂ©ric Cavazza alors que dans les mĂ©dias traditionnels il y a un Ă©metteur qui diffuse un message unique Ă  destination de cibles, dans les mĂ©dias sociaux chacun est Ă  la fois diffuseur et cible. Les mĂ©dias sociaux sont des mĂ©dias pour l’interaction sociale », explique la version anglaise de la dĂ©finition de WikipĂ©dia C’est l’usage de technologies web ou mobile pour transformer les communications en dialogue interactif ». Les propriĂ©tĂ©s qui distinguent un mĂ©dia d’un mĂ©dia social reposent sur la portĂ©e si les deux peuvent atteindre des publics massifs, les mĂ©dias industriels utilisent un cadre centralisĂ©, alors que les mĂ©dias sociaux sont par nature mĂȘme plus dĂ©centralisĂ©s, moins hiĂ©rarchisĂ©s
, l’accessibilitĂ© les mĂ©dias sociaux sont accessibles Ă  un coĂ»t faible ou nul ils rĂ©duisent les coĂ»ts de transaction, comme l’explique Clay Shirky dans Here Comes Everybody, la facilitĂ© d’utilisation ils ne nĂ©cessitent pas nĂ©cessairement de compĂ©tences pour ĂȘtre utilisĂ©s, l’immĂ©diatetĂ© et la permanence les mĂ©dias sociaux peuvent ĂȘtre modifiĂ©s en permanence. Image issue du bĂȘtisier des captures d’écrans de Facebook, ZĂ©ros Sociaux. Encore plus qu’avec les mĂ©dias traditionnels, avec les mĂ©dias sociaux, Le mĂ©dium est le message », comme disait Marshall McLuhan dans Pour comprendre les mĂ©dias. Le mĂ©dia ne reprĂ©sente plus seulement tous les prolongements technologiques » de l’homme, comme le prophĂ©tisait le chercheur, mais Ă©galement tous les prolongements sociaux » de l’homme. danah boyd et Nicole Ellison ont essayĂ© de dĂ©finir en 2007 les sites de rĂ©seaux sociaux Nous dĂ©finissons les sites de rĂ©seaux sociaux comme des services basĂ©s sur le web qui permettent aux individus de 1 construire un profil public ou semi-public sans systĂšme dĂ©limitĂ©, 2 articuler une liste d’autres utilisateurs avec lesquels ils partagent une connexion et 3 voir et traverser leurs listes de connexions et celles faites par les autres par le biais du systĂšme. La nature et la nomenclature de ces connexions pouvant varier d’un site Ă  l’autre. Nous utilisons le terme de site de rĂ©seaux sociaux » social network site pour dĂ©crire ce phĂ©nomĂšne, le terme site de rĂ©seautage social social networking sites apparait Ă©galement dans le discours public et les deux termes sont souvent utilisĂ©s de maniĂšre interchangeable. Nous avons dĂ©cidĂ© de ne pas utiliser le terme rĂ©seautage pour deux raisons l’emphase et la portĂ©e. RĂ©seautage » met l’accent sur l’initiation des relations, souvent entre Ă©trangers. Alors que le rĂ©seautage est disponible sur un grand nombre de sites, elle n’est pas la pratique principale de nombre d’entre eux, alors que c’est ce qui les diffĂ©rencie des communications mĂ©diatisĂ©es par l’ordinateur computer-mediated communication. » La prĂ©cision est d’importance. Une fonction sociale ne fait pas mĂ©dia social. Dans sa messagerie instantanĂ©e, le fait d’avoir accĂšs Ă  toute une liste d’ami ne transforme pas pour autant un tchat en mĂ©dia social. La construction d’un environnement communautaire dans les commentaires de blogs via Gravatar ou mĂȘme BuddyPress par exemple, qui permet d’ajouter une couche sociale aux blogs sous WordPress et notamment aux commentaires, mais qui fait plus fonction de forum que de mĂ©dia social ne fait pas nĂ©cessairement mĂ©dia social. La nature des connexions rendues possibles ou impossibles par le mĂ©dia social est d’importance pour le dĂ©finir. Nous sommes entrĂ©s dans l’ùre des plateformes sociales Quand on observe Facebook, emblĂšme des mĂ©dias sociaux, on constate que la diffĂ©rence essentielle entre un mĂ©dia et un mĂ©dia social est que le second nous propose une autre forme de lecture que le mĂ©dia alors que sur le mĂ©dia notre lecture personnelle est guidĂ©e par l’éditorialisation proposĂ©e par le mĂ©dia, avec le mĂ©dia social, notre lecture est orientĂ©e par nos relations, nos parcours, notre historique. Facebook est un site oĂč chacun est invitĂ© Ă  partager de l’information et Ă  faire-part de ses prĂ©fĂ©rences avec son rĂ©seau d’ami. Et ce sont les relations au sein de ce rĂ©seau qui vous permettent d’accĂ©der aux informations que les autres diffusent. Plus que les profils en eux-mĂȘmes, c’est l’activitĂ© qu’accomplissent vos correspondants via Facebook qui est intĂ©ressante. Les images et textes qu’ils y Ă©changent, les recommandations qu’ils adressent via le bouton like », les services qu’ils utilisent et auxquels, en les partageant, ils permettent d’accĂ©der
 Les mĂ©dias sociaux sont des supports de diffusion massifs de l’information des mĂ©dias orientĂ©e par les relations sociales. C’est bien le fait que la connexion entre amis transforme ce Ă  quoi on accĂšde qui fait mĂ©dia social. D’une certaine maniĂšre, les mĂ©dias sociaux n’existent pas en tant que tel. Sans utilisateurs, Facebook serait une page vide. Il n’y a Ă©change d’information que s’il y a Ă©changes entre les utilisateurs. Et surtout, nul n’en a la mĂȘme vision. Contrairement au web traditionnel, par lequel nous accĂ©dons tous plus ou moins Ă  la mĂȘme page, avec les rĂ©seaux sociaux, nul n’accĂšde Ă  la mĂȘme chose, car le contenu de ce Ă  quoi on accĂšde dĂ©pend entiĂšrement des relations que l’on a Ă©tablies avec d’autres membres dudit rĂ©seau et avec le reste du monde nos prĂ©fĂ©rences » qui signalent ce que l’on apprĂ©cie, qui nous relient Ă  ce qui ne tient pas des personnes objets, marques, produits, organisations
. C’est ce que danah boyd appelle l’homophilie qui renforce le sentiment de sa propre communautĂ©, l’attachement Ă  ses propres relations. Image issue du bĂȘtisier des captures d’écrans de Facebook, ZĂ©ros Sociaux. Comme le dit FrĂ©dĂ©ric Cavazza, il y a bien des mĂ©caniques communautaires et sociales diffĂ©rentes selon les types de mĂ©dias sociaux et les relations qu’ils proposent, pour autant elles s’avĂšrent souvent dĂ©cevantes. Elles dressent le plus souvent des typologies d’outils plutĂŽt que de distinguer des caractĂ©ristiques spĂ©cifiques. Il faut faire la diffĂ©rence entre des mĂ©dias qui utilisent des fonctions sociales des communications mĂ©diatisĂ©es par l’ordinateur » comme diraient danah boyd et Nicole Ellison et des mĂ©dias sociaux en passe de devenir de vĂ©ritables plateformes sociales, c’est-Ă -dire un Ă©cosystĂšme oĂč l’identifiant proposĂ© par la plateforme, les prĂ©fĂ©rences et le rĂ©seau de relation qui lui est associĂ© sont transportables » dans une multitude d’environnements diffĂ©rents. Ce que Facebook appelle le Graphe Social. Facebook Login regarder son activitĂ© par ses contacts Et la vraie puissance de Facebook est incontestablement ici. Dans son potentiel Ă  pouvoir retrouver vos amis sur les autres sites que vous utilisez. Ce n’est pas seulement voire Facebook Login ou Facebook Connect comme il s’appelait encore il y a peu, prĂ©cise Christian Gallardo, responsable du dĂ©veloppement business de Facebook – ou d’autres types d’identifiants [1] – comme un identifiant universel, mais comme une clef d’entrĂ©e sur le web via ses relations et ses prĂ©fĂ©rences. En se connectant via Facebook, l’identification est la fonction que vous voyez, celle que vous pensez activer, alors qu’en fait, vous activez bien plus. Pire, l’identification est la fonction la moins importante qu’on utilise en passant par Facebook Login. Le plus important est l’importation de votre rĂ©seau relationnel et vos prĂ©fĂ©rences partout oĂč vous allez. AccĂ©der Ă  Rue89 et accĂ©der Ă  ce que vos amis ont apprĂ©ciĂ© sur Rue89 c’est lĂ  deux propositions de navigation dans les contenus radicalement diffĂ©rentes. Facebook est un connecteur, qui plus qu’embarquer votre identitĂ©, vous permet d’embarquer avec vous vos relations sociales et vos prĂ©fĂ©rences, et ce, sur de plus en plus de sites, comme le montre la vitrine des intĂ©grations de Facebook dans d’autres sites web ou l’explique Julien Codorniou, responsable des partenariats de Facebook pour la France et le Benelux. Par exemple, vous pouvez utiliser Spotify pour Ă©couter de la musique. Et vous pouvez utiliser Spotify via Facebook pour Ă©couter de la musique. Ce sont alors deux services totalement diffĂ©rents. Dans l’un, vous utilisez le service en tant que tel pour chercher, organiser et Ă©couter votre musique. Dans l’autre, vos connaissances deviennent une nouvelle porte d’entrĂ©e sur le service vous n’accĂ©dez plus seulement Ă  votre musique, mais Ă  celle de vos amis, Ă  la maniĂšre dont ils l’organisent et la partagent. Vous n’avez pas accĂšs seulement Ă  la musique que vos amis dĂ©clarent partager de temps en temps, vous pouvez vous brancher sur ce qu’ils apprĂ©cient, sur ce qu’ils Ă©coutent, et cela sans mĂȘme qu’ils en soient forcĂ©ment conscients mĂȘme s’il faut activer la fonction de partage de sa musique en partie ou en intĂ©gralitĂ©. Je ne suis pas sĂ»r que Christophe Abric, l’illustre fondateur de la blogothĂšque, ou Philippe Astor qui tient l’excellent Digital Jukebox soient pleinement conscients que j’ai accĂšs aux listes de lectures publiques qu’ils partagent et c’est pourtant un vrai plaisir que d’accĂ©der Ă  leur expertise et Ă  leur Ă©clectisme. De la mĂȘme façon, on peut accĂ©der Ă  une foule d’autres services comme DisMoiOĂč ou Ă  Trip Advisor et naviguer entre les recommandations des utilisateurs. Mais les cartes changent de dimensions quand on a accĂšs aux recommandations de nos amis. Les notations des restaurants et des commerces qui peuplent le territoire qui nous entoure prennent une autre couleur en se peuplant des recommandations de nos relations. Ce restaurant recommandĂ© par 40 ou un milliers d’internautes n’a pas la mĂȘme image quand c’est une connaissance qui vous le recommande. Autre exemple emblĂ©matique de l’utilisation que l’on peut faire de Facebook, le site Etsy, une communautĂ© d’achat et de vente de produits faits mains, propose de trouver dans son catalogue les cadeaux qui iraient le mieux Ă  vos amis. Comment ? Le site propose une application qui se branche sur Facebook et qui regarde dans les profils de vos amis, ce qu’ils ont apprĂ©ciĂ© un mĂ©dia, un objet, une sĂ©rie tĂ©lĂ©, des personnages ou des groupes
 via le bouton Like. Le site utilise alors ces informations pour chercher des produits correspondants dans son catalogue ainsi, si vous avez apprĂ©ciĂ© Radiohead ou Barack Obama, Etsy va regarder dans son catalogue pour vous proposer des tee-shirts, des badges, des dessins ou des boucles d’oreilles correspondantes – Etsy n’est plus le seul magasin en ligne Ă  proposer cette connexion, tous s’y sont mis et non des moindres. Depuis juillet 2010, Amazon a lancĂ© en bĂȘta une premiĂšre version de son magasin connectĂ© Ă  Facebook, permettant de voir les produits culturels populaires de vos relations pour acquĂ©rir les mĂȘmes et vous suggĂ©rant de leur offrir des cadeaux mieux adaptĂ©s Ă  leurs goĂ»ts. De nos goĂ»ts au profil marketing de nos goĂ»ts Bien sĂ»r, pour l’instant, le rĂ©sultat est loin d’ĂȘtre idĂ©al, car, Facebook Ă  tendance Ă  nous servir Ă  tout et Ă  rien. On est dĂ©sormais capable d’apprĂ©cier tout et n’importe quoi, sur l’instant, sans que cela signifie clairement que vous l’apprĂ©ciez vraiment. Qu’importe ! Facebook extrait tout de son contexte. C’est sa fonction principale. Si vous apprĂ©ciez les mĂ©lodies des Beatles et que vous les recommandez ne serait-ce qu’une fois, cela pourra vous ĂȘtre reprochĂ© Ă  vie, par des services tiers qui vont utiliser cette information pour en dĂ©duire, automatiquement, que vous ĂȘtes fan des Beatles. C’est certainement encore la limite du like de Facebook. Si je regarde la musique qu’apprĂ©cie Philippe Astor sur Facebook, elle est limitĂ©e pour l’instant Ă  37 artistes, autant dire une broutille par rapport aux milliers de morceaux qu’il a classĂ©s et sĂ©lectionnĂ©s dans Spotify. Facebook propose donc deux types de graphes le graphe des recommandations les likes et le graphe social celui des relations. L’un et l’autre sont intrinsĂšquement liĂ©s, mais ils sont bien diffĂ©rents par nature. Plus que les relations, c’est dĂ©sormais plutĂŽt sur le graphe des recommandations que Facebook travaille. Les Like » peuvent devenir de la publicitĂ© c’est-Ă -dire que Facebook est capable de faire appel aux recommandations de vos amis pour distribuer de la publicitĂ© ciblĂ©e, comme l’explique Business Insider on parle de publicitĂ© endossĂ©e socialement » dont les rapports sont bien sĂ»r meilleurs que la publicitĂ© traditionnelle. Nos amis deviennent le panneau d’affichage de cette publicitĂ©, c’est-Ă -dire que leurs recommandations peuvent ĂȘtre utilisĂ©es par les marques pour le signaler Ă  notre attention. C’est l’un des biais du systĂšme du graphe de recommandation penser que toutes les actions que nous y faisons nous reprĂ©sentent, dressent notre graphe non pas social, mais comportemental, la carte de nos goĂ»ts et de nos dĂ©sirs, notre profil marketing complet. Cela gĂ©nĂšre beaucoup d’erreurs bien sĂ»r le systĂšme est forcĂ©ment imparfait, car pas plus qu’il n’est pas capable de faire de distinguo entre nos relations il n’y a toujours qu’un seul niveau de relation dans Facebook l’amitiĂ©, alors que le systĂšme pourrait proposer plusieurs niveaux relationnels pas nĂ©cessairement symĂ©triques, il n’est pas non plus capable de faire le distinguo entre ce qu’on apprĂ©cie il n’y a qu’une fonction d’apprĂ©ciation, le Like », elle aussi sans nuances. Cela Ă©voluera certainement. Le problĂšme c’est que pour un systĂšme sociotechnique de ce type, ce qu’on dĂ©clare apprĂ©cier ne se pĂ©rime pas dans le temps, ne s’apprĂ©cie pas en contexte
 Facebook a du mal Ă  passer du graphe de recommandation au graphe de l’intĂ©rĂȘt. AprĂšs le graphe social, le graphe d’intĂ©rĂȘt ? En juillet 2010, Chris Dixon – cofondateur de Hunch, un moteur de recommandation social personnalisĂ© – expliquait que nous allions passer de l’époque du graphe pour les gouverner tous » Ă  des graphes sociaux plus spĂ©cifiques, construits autour de concepts comme le goĂ»t comme s’y essaye Hunch, la localisation Foursquare, la confiance
 Des concepts qui pourraient devenir le fondement de ce qu’on n’appelle non plus le graphe social le rĂ©seau des gens avec lesquels vous ĂȘtes en relation, mais le graphe d’intĂ©rĂȘt le rĂ©seau des gens qui partagent des centres d’intĂ©rĂȘt avec vous, mais que vous ne connaissez pas nĂ©cessairement, explique Om Malik. Car le graphe social et le graphe de recommandation de Facebook ont des limites, on l’a vu. S’ils sont une base pour construire des mĂ©dias sociaux, ils ont Ă©galement ses dĂ©fauts la rĂ©ciprocitĂ© de l’amitiĂ©, la limite du like pour mesurer les objets que l’on partage et la limite des relations que le systĂšme sociotechnique instaure
 Vos meilleurs amis peuvent avoir des goĂ»ts musicaux diamĂ©tralement opposĂ©s aux vĂŽtres. La musique, les films, les livres, les prĂ©fĂ©rences quelles qu’elles soient
 sont autant de domaines oĂč les gens ont des goĂ»ts qui ne sont pas nĂ©cessairement influencĂ©s par leurs amis ou pas par une large part de ces amis. Il n’est pas surprenant si les services de musique les plus rĂ©ussis sont plutĂŽt organisĂ©s autour du graphe de vos goĂ»ts musicaux qu’autour du graphe social musical de vos amis », explique Nathaniel Whittemore sur le blog d’Assetmap. L’enjeu pour de nombreuses start-ups dĂ©sormais n’est plus de s’intĂ©resser au graphe social qu’il est possible de rĂ©cupĂ©rer de nombreux services via les interfaces de programmation qu’ils proposent – on en parlera dans la 3e partie de ce dossier, qu’au graphe d’intĂ©rĂȘt pour construire des systĂšmes de recommandations toujours plus efficaces. Nonobstant, les plateformes sociales sont devenues des systĂšmes techniques par lesquels nous parcourons le web. Le graphe social a conquis le jeu Farmville en est un trĂšs bon exemple, l’e-commerce, l’information
 Nous observons dĂ©jĂ  le web non plus de la maniĂšre dont il est Ă©ditorialisĂ© via les flux RSS des sites d’origines, mais par le prisme du filtre de nos relations sociales via Twitter ou Facebook
. Nos relations sont transformĂ©es par les plateformes sociales il devient important de suivre certains propulseurs plutĂŽt que d’autres. Nos relations en ligne sont technologisĂ©es par le rĂŽle que jouent ces plateformes dans notre approche des services existants qui les intĂšgrent. L’emprise des technologies relationnelles Comme le rĂ©pĂ©taient les reprĂ©sentants de Facebook eux-mĂȘmes au rĂ©cent Facebook Developer Garage leur vrai » produit n’est pas le site, mais l’Open Graph nouveau nom du Graph Social, c’est-Ă -dire l’infrastructure mise en place. L’association Ars Industrialis a raison de parler de technologies relationnelles pour dĂ©signer l’ensemble des technologies qui non seulement mettent en relation, mais Ă©galement qui engramment les relations ». Par engrammer, il faut entendre Ă  la fois incorporĂ© et ce qui laisse une trace, Ă  l’image de l’engramme, la trace biologique de la mĂ©moire dans le cerveau. A ce titre, ces technologies sont un moment, contemporain, du processus de grammatisation qui consiste Ă  discrĂ©tiser les flux temporels, c’est-Ă -dire Ă  spatialiser le temps. AprĂšs la grammatisation de la parole dans l’écriture, puis du geste dans la machine-outil, les technologies relationnelles grammatisent Ă  prĂ©sent les relations psychosociales. » Image issue du bĂȘtisier des captures d’écrans de Facebook ZĂ©ros Sociaux. L’enjeu de la grammatisation des relations, pour faire plus simple, c’est nos gestes et nos comportements qui sont distinguĂ©s par les outils technologiques que nous utilisons. Et c’est tout Ă  fait ce qu’accomplit Facebook en dressant la liste de nos relations que ce soit avec des personnes nos amis ou avec d’autres types d’entitĂ©s des informations, des images, des vidĂ©os, des jeux, des produits, des marchandises, des institutions, des organisations
. La grammaire de Facebook dĂ©crit les rĂšgles qui rĂ©gissent le fonctionnement non plus d’une langue, mais de notre relation Ă  la technologie. Les identifiants sociaux, comme Facebook Login, encapsulent la grammaire de l’internet de demain. Ils recĂšlent les rĂšgles et les Ă©lĂ©ments constitutifs des pratiques relationnelles en ligne, des outils de recommandation et de mises en relation. C’est en cela qu’il faut entendre que Facebook nous façonne, qu’il conditionne les rapports humains et les reprĂ©sentations. En cela, il est pleinement une technologie relationnelle, qui a un impact sur la nature de la relation, un impact d’autant plus important que l’usage du graphe social s’étend. La capitalisation de certaines connexions devient primordiale pour accĂ©der pleinement Ă  certains services. Il faut non seulement identifier les experts adĂ©quats, mais Ă©galement ĂȘtre leur ami. Sur Dis moi oĂč il faut que je sois ami avec quelqu’un qui va souvent au restaurant, sur Spotify avec quelqu’un qui a des gouts musicaux qui me sont proches et qui exploitent pleinement le service, etc. Dit autrement, l’important sur Facebook, n’est pas ce que chacun y fait, mais les actions que nous partageons avec d’autres. Par le biais de Facebook, les services que nous utilisons sur internet deviennent tous sociaux et communautaires. Cette transformation n’agit pas sur Facebook seulement, mais sur l’internet tout entier. L’idĂ©e ici n’est pas de regretter les relations prĂ©numĂ©riques. Mais de comprendre que la grammaire qu’introduisent les plateformes relationnelles va avoir un impact direct et total sur notre relation Ă  la technologie et sur notre maniĂšre de construire des relations sur le numĂ©rique. Nous sommes passĂ©s du logiciel social le blog, aux plateformes relationnelles et on observe bien que c’est la mĂȘme transformation qui se prolonge observer le monde par le regard des gens qui ont les mĂȘmes sources d’intĂ©rĂȘts, certainement parce que c’est un plus puissant stimulant pour son propre intĂ©rĂȘt. Etre sur Facebook n’a donc pas grand-chose Ă  voir avec une pulsion voyeuriste-exhibitionniste nous plongeant dans l’émotionnalisme le plus simple. C’est aujourd’hui devenu le moyen d’activer son rĂ©seau relationnel pour l’exploiter sur l’internet tout entier. Hubert Guillaud Sur le sujet, signalons la sortie du denier numĂ©ro de la revue HermĂšs consacrĂ©e Ă  Ces rĂ©seaux numĂ©riques dits sociaux ». _______________ [1] Facebook Login est bien ici un exemple parmi d’autres. Je ne dis pas qu’il est notre seul avenir, d’autres identifiants globaux sont en concurrence. Gmail en a le potentiel, puisque votre identifiant personnel permet Ă©galement d’accĂ©der Ă  toutes les adresses mails avec lesquelles vous avez communiquĂ©. Twitter Ă©galement. Le service de messagerie instantanĂ©e pourrait Ă©galement jouer ce rĂŽle. Linked-in s’y essaie. Et Diaspora essaie d’imaginer une plateforme relationnelle libre. On le sait depuis longtemps. AccĂ©der Ă  un service, ne signifie par pour autant savoir l’utiliser, le comprendre, ni mĂȘme le maĂźtriser suffisamment pour ĂȘtre capable d’innover, de crĂ©er avec. Les outils numĂ©riques sont familiers de ces cloisonnements. On peut-ĂȘtre nĂ© avec le numĂ©rique et ne pas en maĂźtriser les usages, on peut utiliser Facebook au quotidien sans comprendre l’étendue de son action. D’ailleurs, la plupart du temps, on n’en a pas besoin. Pas seulement, les dangers de son utilisation comme aiment Ă  nous le rĂ©pĂ©ter les grands mĂ©dias de maniĂšre souvent simpliste ou certains experts avec plus de finesse je vous renvoie au livre de notre collĂšgue Jean-Marc Manach La vie privĂ©e un problĂšme de vieux cons pour mieux comprendre la problĂ©matique de la vie privĂ©e Ă  l’heure des rĂ©seaux sociaux, qui ne sera pas le sujet de cette sĂ©rie, mais plus encore le potentiel crĂ©atif que l’outil libĂšre, son fonctionnement intrinsĂšque. Comprendre les mĂ©dias sociaux et leur fonctionnement social et psychologique comme technique, tel est l’enjeu de ce dossier. Apparemment, Facebook est un babillage chronophage et dĂ©cĂ©rĂ©brant Il y a quelques mois, dans le Monde magazine sur abonnement, FrĂ©dĂ©ric Filloux, pourtant grand observateur d’internet, dressait le portrait de Facebook, avec le dĂ©dain habituel avec lequel on considĂšre toutes les innovations en provenance du web. Ce qu’on Ă©change sur Facebook mais Ă©galement sur Twitter ou la plupart des mĂ©dias sociaux se rĂ©sume Ă  un babillage » chronophage et dĂ©cĂ©rĂ©brant, estime le journaliste et consultant. Une des pires expressions de l’infobĂ©sitĂ© contemporaine. Image 5 des 10 raisons pour lesquelles le dessinateur Obion n’aime pas Facebook. Soit. On peut le voir ainsi. C’est pourtant ne pas voir grand-chose du fonctionnement de Facebook. C’est n’en voir que le mur, que ce fil d’actualitĂ© qui disparait Ă  mesure qu’il s’affiche. C’est n’en voir que ces Ă©changes subjectifs et incomplets, ce bavardage, cette conversation permanente pour ne rien dire, et oublier qu’ils sont depuis toujours le ciment des relations sociales. Certes, l’usage des sites sociaux peut-ĂȘtre chronophage mais pas pour tout le monde et pas pour tous de la mĂȘme maniĂšre. Quant Ă  l’action dĂ©cĂ©rĂ©brante d’internet qu’agitent comme une menace quelques Cassandres, tel Nicholas Carr, on sait que ce n’est pas si simple notre capacitĂ© Ă  ĂȘtre attentif, n’est pas nĂ©cessairement un idĂ©al. Si nous n’étions qu’attentifs, en fait, nous ne pourrions pas l’ĂȘtre c’est notre inattention qui nous permet de construire notre attention. Mais surtout ce bavardage et ces Ă©changes ne sont pas aussi vains qu’ils y paraissent, pour autant qu’on veuille bien observer le rĂŽle social et psychologique du bavardage. La fonction phatique de l’internet Que l’internet permette de publier un message qui ne dit rien d’intĂ©ressant, c’est ça qui est intĂ©ressant », nous explique le psychologue Yann Leroux. De plus en plus, la technologie prend en charge ce que Roman Jakobson appelait la fonction phatique du langage ». Et dans ce cadre, nos Ă©changes sur l’internet sont bien l’exact reflet de nos Ă©changes rĂ©els. L’essentiel de nos Ă©changes ne vise pas Ă  l’efficacitĂ©, loin de lĂ . Et ce d’autant plus que les espaces d’écritures du web sont limitĂ©s comme c’est le cas sur Facebook ou Twitter Ă  la diffĂ©rence des blogs oĂč l’on trouve plus souvent une narration de qualitĂ© ». Le dispositif joue une part importante en fonction de ce qu’il impose ainsi, on ne dit plus qu’on est Ă  tel endroit, mais on se gĂ©olocalise sur Foursquare », estime le psychologue. Une part de la fonction phatique de nos Ă©changes est prise en charge par nos machines et via les machines. Nos outils socio-techniques dĂ©multiplient Ă  l’envie les messages pour s’assurer de leur fonctionnement ou de leur bonne rĂ©ception
 Internet est un espace intermĂ©diaire entre moi et les autres, un espace de porositĂ© entre nos mondes internes et nos phases sociales. Quand je dis quelque chose de trĂšs banal pour les autres, ça peut-ĂȘtre important pour moi. » Bien sĂ»r cela peut-ĂȘtre utilisĂ© de façon transformative ça peut-ĂȘtre utilisĂ© pour se transformer, pour agir sur soi ou pour favoriser des enfermements on dĂ©pose des choses intimes dans un espace pour ne pas y repenser, prĂ©cise le psychologue. Mais tous nos Ă©changes ne sont pas informatifs. Jouer, plaisanter, rire de soi ou des autres, parler pour ne rien dire
 sont aussi des formes d’échange social importantes. Et ce sont bien celles-ci que beaucoup dĂ©noncent sur Facebook. Pourtant, les formes courtes, lapidaires, favorisent les jeux de styles, l’humour. MĂȘme si dans le champ des personnes qu’il rencontre, il peut ne pas toucher tout le monde. Bien souvent, et depuis longtemps, le style et la maniĂšre d’intervenir sur les rĂ©seaux comptent plus que l’objet mĂȘme de l’échange, estime la psychanalyste GeneviĂšve Lombard. Une des possibilitĂ©s de Twitter est ainsi de faire signe ». Lorsque » le signe » n’a pas de consistance , ou quand sa consistance n’est pas reconnue, il fonctionne quand mĂȘme comme signal, car il se rattache la plupart du temps Ă  des arborescences des liens, des blogs, des sites
 grĂące auxquelles il se trouve contextualisĂ©, explicitĂ©, dĂ©veloppĂ© de mille maniĂšres. Ce signe » est juste la pointe la plus actuelle d’une activitĂ© web plus gĂ©nĂ©rale, qui a souvent une histoire et une surface plus large. Il en assure l’apparaitre au prĂ©sent. » C’est ainsi qu’il faut entendre l’essentiel de nos Ă©changes sur les sites sociaux comme un ensemble de signes qui nous permettent de faire sociĂ©tĂ© dans une sociĂ©tĂ© mĂ©diatĂ©e. Pour Yann Leroux, le rĂ©seau social est notre nouveau doudou, celui qu’on consulte le soir, avant de s’endormir. Selon un sondage britannique, plus de 70% de personnes interrogĂ©es consultent leurs rĂ©seaux sociaux avant d’aller au lit et 18% twittent en pleine nuit. Il faut se souvenir que s’endormir n’est pas une opĂ©ration simple », rappelle le psychologue. Nous avons tous des techniques personnelles pour y parvenir. Ces techniques et ces objets sont des maniĂšres de pallier l’angoisse de la sĂ©paration, d’aller vers un Ă©tat que l’on ne connaĂźt pas le sommeil. Pour cela, il faut dĂ©sinvestir les pensĂ©es qui nous ont accompagnĂ©es toute la journĂ©e, et une des choses qui peut aider passe parfois par des rituels de vĂ©rification ». Ainsi, vĂ©rifier le calme qui se rĂ©pand sur les rĂ©seaux sociaux au fur et Ă  mesure que la nuit s’avance nous rassure et nous calme Ă  notre tour. Le rĂ©seau social peut aussi ĂȘtre utilisĂ© comme un consolateur ou un briseur de soucis. Les lolcats et autres motivational posters ou demotivational jouent Ă©galement ce rĂŽle. Des chaines de mails qui Ă©changent Ă  l’infini ces mĂšmes qui composent le rĂ©seau, aux assertions idiotes ou inutiles que l’on publie en commentaire sur le Facebook de nos relations
 tout cela participe de modalitĂ©s d’échanges qui ne sont pas aussi futiles qu’elles paraissent. Image extrait d’un des sketchs Facebook imaginĂ© par CĂ©cile Dehesdin et GrĂ©goire Fleurot journalistes Ă  lors de l’affaire Woerth-Bettancourt, montrant combien le fil d’actualitĂ© et sa complexitĂ© sont devenus un mode de narration Ă  part entiĂšre, que tentent d’ailleurs de rĂ©cupĂ©rer des startups comme Storify. De l’importance sociale du bavardage Le bavardage confirme le rĂŽle prĂ©dominant de la communication sociale non, nos Ă©changes ne visent pas uniquement Ă  l’efficacitĂ©, loin de lĂ . Le bavardage est certes un bruit de fond, disait dĂ©jĂ  Paolo Virno insignifiant en soi, il offre nĂ©anmoins la trame d’oĂč extraire des variantes significatives, des modulations insolites, des articulations imprĂ©vues. Le bavardage ne reprĂ©sente pas quelque chose, mais c’est prĂ©cisĂ©ment en cela qu’il peut tout produire. » Pour autant, il est par beaucoup dĂ©noncĂ© comme une injonction Ă  parler, Ă  dĂ©battre, le fruit vĂ©nĂ©neux d’une hypnose sociale » au profit de l’autonomie de la pensĂ©e, mĂȘme si cette injonction du dialogue pour le dialogue conduit Ă  tout confondre et Ă  ne plus rien classer. Tout devient prĂ©texte Ă  bavardage et tout est bavardage. Et Facebook, permettant de bavarder sur tout en est certainement le symbole le plus Ă©vident. Mais Facebook n’est pas condamnĂ© parce qu’il nous permet de bavarder sur tout, mais parce que nos bavardages sont dĂ©sormais Ă©crits, affichĂ©s, indexĂ©s, cherchables, monĂ©tisables
 La futilitĂ© des propos inscrits n’a pas la mĂȘme valeur que ceux que la parole prononce et oublie aussitĂŽt. D’un coup, ils s’affichent, s’archivent et deviennent reproductibles mĂȘme avec leurs tics de langage puisque Facebook est le roman que nous Ă©crivons tous ». L’incident peut devenir un accident comme le disait Frank Beau lorsqu’il analysait la viralitĂ© des mĂšmes qui circulent sur l’internet et en structurent l’imaginaire. François Perea, maĂźtre de confĂ©rences Ă  l’universitĂ© Paul ValĂ©ry, dans un article sur les reprĂ©sentations de soi dans l’espace numĂ©rique parle de comportement tribal » du web L’anthropologue Robin Dunbar parle de toilettage verbal » pour caractĂ©riser la fonction du bavardage, qu’il rapproche du toilettage social que pratiquent les primates. C’est ce que nous explique Ă©galement Judith Donath, la directrice du Sociable Media Group Ce que l’on fait sur ces sites consiste plutĂŽt Ă  passer un peu de temps, Ă  montrer qu’on fait attention Ă  l’autre, que l’on pense Ă  lui ». Pour cela, bien sĂ»r, il faut passer par un activisme nĂ©cessaire », contraint par l’objet sociotechnique qu’on utilise. C’est pourquoi nous modifions nos statuts, commentons, jouons aux jeux et aux quizz que d’autres nous transmettent
 Nous sommes contraints de rĂ©pondre aux signaux que nous adressent les autres. Le mur de Facebook joue prĂ©cisĂ©ment ce rĂŽle accepter une mise en relation le plus souvent avec un inconnu avec quelqu’un qui vous a identifiĂ©, mais que vous ne connaissez pas nĂ©cessairement pour Ă©changer des signaux qui feront sens ou qu’on ne dĂ©codera pas forcĂ©ment l’un l’autre. Facebook et les outils du web dĂ©multiplient les signaux et rituels qu’on s’envoie commentaires, images, liens, photos, vidĂ©os, jeux, like
 pour permettre de s’apprĂ©hender les uns les autres. Mais surtout, insiste Donath Cela montre que les choses que vous dites n’existent que dans le contexte d’autres communications et qu’on ne peut pas les regarder de maniĂšres isolĂ©es, comme si elles Ă©taient des publications uniques, singuliĂšres. Nos discussions ne se comprennent que dans le rĂ©seau de relations et de signes dans lesquelles elles s’inscrivent. » C’est-Ă -dire qu’il est difficile d’interprĂ©ter nos Ă©changes sur Facebook Ă  l’aune de ces seuls Ă©changes. Publier sur le mur de Facebook une petite vidĂ©o prise avec son mobile montrant un ami en train d’hurler on ne sait pas quoi lors d’une soirĂ©e chahutĂ©e peut n’avoir aucun sens pour bien des relations qui en prendront connaissance. Cette vidĂ©o qui semble isolĂ©e s’inscrit en fait dans un maillage relationnel et communicationnel qui nous est en grande partie inconnu, qui passe par un bien plus vaste maillage de relations et d’outils de communications. Sur Facebook on ne voit poindre qu’une partie du bavardage constant qui nous façonne. Mais nĂ©anmoins, mĂȘme imparfaitement, il apparaĂźt, il devient visible, lisible
 Il dĂ©multiplie les relations particuliĂšres que nous avons avec chacun pour les mettre Ă  la vue de tous, permettant Ă  d’autres de s’en saisir, d’y trouver sens ou amusement – ou pas. L’optimisation des Ă©changes et la rĂ©duction relationnelle Ces Ă©changes inconstants que l’on a sur les rĂ©seaux s’avĂšrent une formidable matiĂšre pour comprendre les Ă©volutions de notre sociĂ©tĂ©. L’analyse des donnĂ©es issues de Facebook ou d’autres rĂ©seaux sociaux comme le site relationnel OK Cupid par exemple, qui sur son blog observe trĂšs rĂ©guliĂšrement ce que publie ses membres pour en comprendre les normes sociales permet de porter un regard neuf sur le rĂŽle de ces Ă©changes, sur leur importance et surtout sur leurs significations. Facebook essayait ainsi rĂ©cemment de comprendre les relations de cause Ă  effet entre la composition des messages des statuts et l’entregent d’une personne c’est-Ă -dire sa capacitĂ© Ă  entretenir un rĂ©seau de relations influentes, montrant que les messages qui ont le plus d’audience sont ceux qui se conforment le plus aux canons de la prise de parole classique dans l’espace public des messages plus structurĂ©s, dĂ©sinvestis et moins personnels, se projetant vers l’avenir fĂ»t-il proche », rappelle Vincent Truffy. Rien que de normal. La technologie relationnelle Ă  l’oeuvre porte ses propres effets d’optimisation. Le plus souvent ses techniques favorisent certaines formes d’activitĂ©s par rapport Ă  d’autres les rĂ©seaux sociaux favorisent globalement ceux qui partagent des liens entre eux plus que ceux qui discutent, ceux qui dĂ©multiplient les relations que ceux qui ont des relations intensives avec un groupe rĂ©duit. Ces mesures ne discriminent pas pour autant la portĂ©e des autres messages, mĂȘme si elles ne savent pas les valoriser les messages moins structurĂ©s, plus personnels, qui servent Ă  donner de la vacuitĂ© ou de l’épaisseur Ă  nos relations demeurent nĂ©anmoins les plus nombreux. Echanger des banalitĂ©s a certes moins d’impact sur notre entregent, mais n’est pour autant dĂ©nuĂ© de sens ou de plaisir, pour autant que nous nous sentions proches de cette personne. Facebook favorise ce sentiment de proximitĂ©, en nous montrant le flux de ceux avec qui nos Ă©changes sont les plus nourris. Sur Facebook, chacun derriĂšre nos Ă©crans, nous Ă©changeons nos quotidiens. Nos messages personnels se perdent dans le flux des relations que l’outil, dans sa logique d’optimisation, nous pousse Ă  dĂ©multiplier. Nos amis, nos relations, nos collĂšgues, les inconnus qui croient nous connaĂźtre sont tous indiffĂ©remment mĂȘlĂ©s. Dans ce flux constant, notre bavardage prend sens, ou pas. Il est le ciment des relations. Mais en traitant toutes les relations sur le mĂȘme pied d’égalitĂ©, Facebook en dĂ©tourne le jeu. En ne permettant d’avoir qu’un niveau de relation l’amitiĂ© Facebook rĂ©duit la complexitĂ© relationnelle de sa base Ă  son expression la plus simple. Il faudrait pouvoir avoir plusieurs niveaux relationnels pour caractĂ©riser nos relations inconnus, relations, collĂšgues, amis
. Or Facebook a tendance Ă  tout lisser, mettant sur le mĂȘme plan le signe social et l’information structurĂ©e, le privĂ© et le public, le personnel et le professionnel. Quand le bavardage permet de comprendre notre sociĂ©tĂ© RĂ©cemment, un professeur d’universitĂ© britannique faisait Ă©tat d’une recherche qui n’aurait pas Ă©tĂ© possible de mesurer sans Facebook son Ă©tude portait sur le phĂ©nomĂšne consistant Ă  se rouler une pelle entre amis par jeu, pour afficher son amitiĂ© et de publier la vidĂ©o ou les photos de ce baiser sur les sites sociaux. Le professeur Eric Anderson, maĂźtre de confĂ©rences au dĂ©partement de l’Education de l’universitĂ© de Bath veut y voir un signe du dĂ©clin de l’homophobie chez les nouvelles gĂ©nĂ©rations
 Les avocats voient mĂȘme dĂ©sormais dans les Ă©changes sur Facebook l’une des principales raisons des divorces et surtout de preuves apportĂ©es aux divorces, sans voir qu’en fait Facebook ne fait que mettre en Ă©vidence des choses qui se sont dĂ©jĂ  dĂ©litĂ©es par ailleurs. Facebook n’est que le lieu documentĂ© de notre sociĂ©tĂ© moderne. Pratique bouc-Ă©missaire ou document ultime – parce qu’écrit et visible – de la vie des gens. Il faut raison garder, nous rappelle le sociologue Dominique Cardon. Sur Facebook, on peut toujours trouver quelque chose pour confirmer qu’on a raison. » Le risque est de passer de la sociologie Ă  la tendançologie », de faire des sites sociaux les boucs-Ă©missaires de nos relations tourmentĂ©es et difficiles, parce que les incidents y prennent une inscription qui leur donne une importance qu’ils n’avaient pas nĂ©cessairement. Reste que les rĂ©seaux sociaux constituent un corpus d’archives en temps rĂ©el assez passionnant pour comprendre les mentalitĂ©s et les pratiques, explique le chercheur. Les sites sociaux permettent d’observer beaucoup de choses, pour autant qu’on se donne les outils et mĂ©thodes nĂ©cessaires. Est-ce qu’internet Ă  travers les blogs de cuisine peut nous donner une idĂ©e des transformations des pratiques culinaires de français ? » Pour autant, relativise le chercheur, si on trouve plein d’exemples de ce qu’internet apporte aux sciences sociales, rien de ce qu’y s’y trouve n’est inconnu des sciences sociales. Il n’y a pas de rĂ©volution par les donnĂ©es. L’utilisation des bases de donnĂ©es confirme des intuitions, des analyses, permet d’affiner les chiffres, mais ne rĂ©volutionne pas la connaissance. C’est le coeur des sciences sociales elles sont tout le temps dĂ©cevantes ! ». Certes, avant on connaissait la vie privĂ©e par les documents archivĂ©s par la police et les tribunaux, aujourd’hui, le corps de l’information n’est plus dans les archives administratives, mais dans les tĂ©moignages directs des gens. On peut chercher Ă  anoblir les bavardages sur Facebook pour qu’ils deviennent objets de sciences. Ils sont certes une matiĂšre riche pour la comprĂ©hension des fonctionnements et des transformations sociales. Mais il ne faut pas pour autant que cela leur enlĂšve leur sens premier celui d’ĂȘtre essentiel aux Ă©changes sociaux ». Qu’importe alors si nos Ă©changes sur Facebook ne sont pas l’expression la plus haute de la pensĂ©e humaine, ce n’est certainement pas leur but
 Un si petit monde Dans son analyse sur les relations de cause Ă  effet entre la composition des messages des statuts et l’entregent d’une personne, la Data Team de Facebook a aussi soulignĂ© l’importance de l’homogĂ©nĂ©itĂ© des groupes c’est-Ă -dire la tendance Ă  avoir le mĂȘme type de comportement que ses relations si le groupe auquel on appartient Ă©crit des messages longs ou commente beaucoup, on a tendance Ă  avoir le mĂȘme comportement pour se conformer aux usages du groupe. Les sociologues ont depuis longtemps mis cela en Ă©vidence, notamment dans les pratiques adolescentes, comme l’a montrĂ© Dominique Pasquier. Mais ce n’est pas le cas seulement des plus jeunes nous faisons groupe Ă©galement parce que nous avons des pratiques similaires. C’est l' »homophilie » qu’évoque danah boyd, c’est-Ă -dire cette capacitĂ© dans un monde en rĂ©seau Ă  ce que les gens se connectent Ă  des gens qui leur ressemblent a un corolaire il est dĂ©sormais facile de ne pas accĂ©der au point de vue de gens qui ne pensent pas comme vous. Nous vivons tous dans nos propres mondes, avec des gens qui partagent nos valeurs, et avec les mĂ©dias en rĂ©seau, il est souvent difficile de voir au-delĂ . 
 La technologie ne bouleverse pas les clivages sociaux. Au contraire, elle les renforce.” En 2009, des chercheurs en sciences sociales employĂ©s par Facebook pour en Ă©tudier les effets sur la sociabilitĂ© ont publiĂ© un rapport analysant de quelle maniĂšre s’organise la communication entre les membres du rĂ©seau », explique l’anthropologue Stefana Broadbent dans son rĂ©cent livre, L’intimitĂ© au travail. Il en est ressorti qu’en moyenne les utilisateurs comptaient cent vingt amis, mais qu’ils communiquaient activement avec moins de 10 % d’entre eux. Les chercheurs ont dĂ©fini ainsi 4 types de rĂ©seaux diffĂ©rents les amis, c’est-Ă -dire l’ensemble des relations d’une personne ; ceux avec lesquels il y avait une communication rĂ©ciproque ; ceux avec lesquels il y avait une communication Ă  sens unique et ceux avec lesquels il y avait des relations maintenues quand les gens cliquent sur le fil d’actualitĂ© d’une relation ou visite plusieurs fois le profil. Ils ont montrĂ© que les personnes ayant 120 amis un chiffre qui correspond Ă  la majoritĂ© des utilisateurs, sont activement engagĂ©es avec moins de 10 personnes. L’utilisateur moyen laisse des commentaires sur les photos, le mur ou les statuts de 7 relations, et envoie des messages ou chatte avec 6 amis. » Les utilisateurs sont engagĂ©s de façon passive avec une vingtaine d’amis seulement. Or, c’est cet engagement passif qui donne aux utilisateurs du site que grĂące Ă  Facebook ils communiquent plus et restent en contact avec davantage de gens. » Olivier Ertzscheid, maĂźtre de confĂ©rences en Sciences de l’information et de la communication au dĂ©partement Infocom de l’IUT de La Roche-sur-Yon, explique dans un billet sur la taille du web que nous frĂ©quentons que l’une des consĂ©quences de cette homogĂ©nĂ©itĂ© et de cette homophilie signifie qu’une fois sur quatre, je vais naviguer lĂ  oĂč mes amis » ou les amis de mes amis » m’envoient naviguer ». Sur Facebook, plus encore que sur le web, le diamĂštre de ce que nous visitons ne semble cesser de se restreindre. Notre univers est bornĂ© par nos amis », comme il l’était il y a 100 par notre voisinage et notre niveau social – et nos amis sont bien Ă©videmment le plus souvent aussi le reflet de cela. Difficile de mesurer si l’enfermement consenti » ou la logique documentaire concentrationnaire » ou uniformisante » Ă  l’oeuvre sur les sites sociaux est moindre qu’elle a pu l’ĂȘtre, dans le rĂ©el, oĂč Ă  l’époque oĂč nous ne consultions que les trois premiers rĂ©sultats de Google. Comme le dit encore Olivier Ertzscheid, c’est peut-ĂȘtre dans nos reprĂ©sentations que le web, vu via Facebook, est porteur d’une rupture radicale. Avec Facebook, le web n’est plus synonyme d’altĂ©ritĂ©, de dĂ©calage. Il n’est plus un lieu d’exploration inĂ©puisable, comme nous avons bien souvent tendance Ă  le croire. Au contraire. Il borne le web que nous frĂ©quentons, qui est toujours plus Ă©troit que nous ne le pensons – nous revenons pourtant le plus souvent toujours sur les mĂȘmes sites. Cela participe certainement de son mĂ»rissement et de son installation comme mĂ©dia » Ă  part entiĂšre. L’internet – et l’internet vu depuis Facebook – Ă©chappe de moins en moins Ă  la logique de mĂ©dia social qui le caractĂ©rise. Hubert Guillaud Le dossier Comprendre Facebook » 1e partie Le rĂŽle social du bavardage 2e partie Facebook, technologie relationnelle 3e partie L’internet des API, le web des applications AprĂšs avoir Ă©tĂ© deux ans durant partenaires de la section Technologie du InternetActu et Place de la Toile ouvrent un blog invitĂ© sur la plateforme du Monde Un espace pour aller plus avant dans la comprĂ©hension des nouvelles technologies. Chaque semaine, nous essayerons de traiter une thĂ©matique en y apportant diffĂ©rents Ă©clairages provenant du fonds d’articles d’ et d’émissions de Place de la Toile. Hubert Guillaud, Xavier de la Porte, RĂ©mi Sussan
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N° 3363 ______ ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958 DOUZIÈME LÉGISLATURE EnregistrĂ© Ă  la PrĂ©sidence de l’AssemblĂ©e nationale le 12 octobre 2006 AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2007 n° 3341,PAR M. GILLES CARREZ, Rapporteur GĂ©nĂ©ral, DĂ©putĂ©. —— ANNEXE N° 19 MÉDIAS AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC Rapporteur spĂ©cial M. Patrice MARTIN-LALANDE DĂ©putĂ© ____ CHAPITRE PREMIER L’ÉVOLUTION DU CADRE FINANCIER ET DES OUTILS DE RÉGULATION DES MÉDIAS 15 I.– FINANCER LA RÉFORME BUDGÉTAIRE ET FISCALE FACE AUX ALÉAS DES RECETTES 15 A.– LE BUDGET GÉNÉRAL DE L’ÉTAT UN CADRE INTERMINISTÉRIEL ENCORE IMPARFAIT 151.– La mission MĂ©dias en 2007 face aux exigences de la LOLF 15a Une maquette plus aboutie que l’an dernier 15 b Un dispositif de mesure de la performance encore perfectible 15 c Un pĂ©rimĂštre trop restreint 16 2.– Le complĂ©ment indispensable des mesures fiscales 17B.– LE COMPTE D’AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC L’AFFECTATION DE LA REDEVANCE ET LE BILAN DE SA RÉFORME 181.– Une structure de mission plus conforme Ă  la LOLF 18 2.– Le bilan de la rĂ©forme de la redevance audiovisuelle 19 a Rappel du nouveau dispositif mis en place 19 b Le renforcement efficace des contrĂŽles 20 c Le bon bilan social de la rĂ©forme 21 3.– L’exĂ©cution 2005 des prĂ©visions erratiques 23 4.– Les prĂ©visions 2006 une certaine prudence 26 5.– Les hypothĂšses 2007 des crĂ©dits en hausse pour l’audiovisuel 26 6.– Les voies d’amĂ©lioration 100 % de compensation des dĂ©grĂšvements 29 II.– RÉGULER DES OUTILS FORTEMENT CONTRAINTS 30A.– LA VOIE RÉGALIENNE LA PLACE DES POUVOIRS PUBLICS DANS UN ENVIRONNEMENT COMPLEXE 301.– Le Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel CSA le prix de l’indĂ©pendance ? 30a Des missions de plus en plus lourdes 30 b Des crĂ©dits de fonctionnement insuffisants 31 2.– La direction du dĂ©veloppement des mĂ©dias DDM face aux enjeux nationaux et europĂ©ens 32a Des missions lourdes 32 b Des moyens limitĂ©s 33 B.– LA VOIE CONTRACTUELLE UN MOMENT CLEF POUR LES CONTRATS D’OBJECTIFS ET DE MOYENS 331.– Un outil essentiel mais fragilisĂ© 33a Un instrument moderne et responsabilisant 33 b Les dĂ©ceptions des contrats de premiĂšre gĂ©nĂ©ration 34 c Les enjeux des nouveaux COM 35 d Un Parlement dĂ©sormais mieux associĂ© en amont 36 2.– Un bilan trĂšs contrastĂ© mais un renouvellement indispensable 37a L’Institut national de l’audiovisuel les vertus de la contractualisation 37 b L’Agence France–Presse la nĂ©gociation d’un avenant 39 c ARTE France vers un nouveau contrat 39 d Radio France le premier COM 40 e France TĂ©lĂ©visions un certain nombre d’incertitudes 42 f Radio France Internationale un COM lointain mais plus que jamais nĂ©cessaire 44 g TV5 Monde pour un COM supranational ? 45 CHAPITRE DEUXIÈME LES ACTEURS DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC FACE AUX MUTATIONS DU SECTEUR 47 I.– UNE NÉCESSAIRE REFONDATION DE L’AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR 47 A.– UN PANORAMA FOISONNANT 471.– Le constat unanime d’une certaine dispersion 47a La multiplicitĂ© des intervenants face Ă  l’absence de pilotage 47 b La complexitĂ© des circuits financiers 48 c Une dimension multimĂ©dia » encore mal apprĂ©hendĂ©e 49 2.– Des missions enchevĂȘtrĂ©es 50a Une ambition trĂšs vaste 50 b Les enjeux spĂ©cifiques de la coopĂ©ration audiovisuelle CFI 51 c La place du partenariat franco-marocain MĂ©di 1 52 3.– Une rationalisation est possible 53a À l’ùre du multimĂ©dia, il faut mettre en synergie les acteurs de l’audiovisuel extĂ©rieur 53 b Il faut doter l’audiovisuel extĂ©rieur d’un pilotage politique 54 B.– RADIO FRANCE INTERNATIONALE UNE MUTATION INÉLUCTABLE 551.– Le recul du financement public n’est pas la traduction d’une stratĂ©gie 55 2.– Une situation sociale toujours tendue 56 3.– Des orientations stratĂ©giques dĂ©terminantes pour l’avenir de RFI 57 C.– TV5 MONDE L’OUTIL FRANCOPHONE 591.– Les moyens 59 2.– Les orientations stratĂ©giques 61 D.– FRANCE 24 LE NOUVEL ACTEUR 621.– La naissance d’une idĂ©e originale 62 2.– Des moyens Ă  mobiliser dans le cadre d’une forte synergie 63 3.– Une diffusion Ă  l’étranger et sur le territoire français 64 E.– ARTE UNE PLACE SINGULIÈRE 661.– Un positionnement original et bien ancrĂ© dans le paysage audiovisuel 66 2.– Le financement des orientations pour 2007 67 3.– Une menace sur le dĂ©veloppement Ă  moyen terme 68 II.– FAIRE DE LA NOUVELLE OFFRE DE TÉLÉVISION UNE CHANCE POUR LE SERVICE PUBLIC 70A.– LES ENJEUX DU SECTEUR 701.– Les rĂ©ussites et les dĂ©fis de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre 70a Un lancement rĂ©ussi 70 b L’offre gratuite pour tous est triplĂ©e 70 c L’offre payante complĂ©mentaire 71 d Le dĂ©ploiement de la TNT lever les incertitudes sur la couverture de 85 % de la population en 2007 73 e Comment couvrir 100 % du territoire mĂ©tropolitain ? 74 f Les enjeux du projet de loi tĂ©lĂ©vision du futur » 77 2.– Les tĂ©lĂ©visions locales en plein essor 79a Relancer et amĂ©liorer le financement des tĂ©lĂ©visions locales 79 b Achever le dĂ©ploiement en analogique hertzien 80 c Poursuivre la diffusion des tĂ©lĂ©visions locales sur le cĂąble 81 d Encourager le dĂ©veloppement des chaĂźnes locales en TNT 82 3.– Renouveler le soutien Ă  la production audiovisuelle indĂ©pendante 83a Un dispositif rĂ©glementaire protecteur 83 b Un bilan global est nĂ©cessaire 84 B.– FRANCE TÉLÉVISIONS UN PARI POUR LA MODERNITÉ 851.– Le groupe France TĂ©lĂ©visions un nouvel Ă©lan 86a Le bon bilan de la prĂ©sidence Tessier 86 b Les orientations stratĂ©giques de la prĂ©sidence Carolis 89 2.– Les enjeux spĂ©cifiques des chaĂźnes du groupe 94a France 2 grande chaĂźne gĂ©nĂ©raliste 94 b France 3 chaĂźne de la proximitĂ© et de la mĂ©diation 95 c France 4 un an d’existence 98 d France 5 chaĂźne de diffusion et de partage des connaissances 99 e RFO chaĂźne de l’outre-mer et de la diversitĂ© 100 III.– À L’ÈRE DE L’IMAGE, LA RADIO A BESOIN D’UN SERVICE PUBLIC RENFORCÉ 102A.– LES ENJEUX DU SECTEUR 1021.– La poursuite du plan FM 2006 » 102 2.– La radio en route vers le numĂ©rique 103 3.– Le soutien aux radios locales 105 B.– LA SOCIÉTÉ RADIO FRANCE 1071.– Une situation d’ensemble mĂȘlant atouts et fragilitĂ©s 107a Une situation sociale Ă  solidifier 107 b La fragilitĂ© de l’audience et du marchĂ© publicitaire 108 c Une gestion budgĂ©taire contrainte 110 2.– La poursuite de la rĂ©habilitation de la Maison de la Radio 112a Un processus par Ă©tapes 112 b Le contenu du projet 112 c Une dĂ©pense importante mais nĂ©cessaire 114 IV.– LE PATRIMOINE AUDIOVISUEL DE LA CONSERVATION À LA DÉMOCRATISATION DES ARCHIVES 117A.– L’INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL UN OUTIL BIEN GÉRÉ ET OUVERT SUR SON ENVIRONNEMENT IMMÉDIAT 1171.– Une gestion efficace 117 2.– Une ouverture croissante vers le monde Ă©ducatif et culturel 118 B.– LES ENJEUX DE LA VALORISATION DU PATRIMOINE AUDIOVISUEL 1191.– L’indispensable plan de sauvegarde et de numĂ©risation du patrimoine 119 2.– Le trĂšs beau succĂšs de la mise en ligne des archives 120 CHAPITRE TROISIÈME REDÉFINIR LES AIDES POUR PRÉPARER LA PRESSE DE DEMAIN 123 I.– LA PRESSE FRANÇAISE UN PANORAMA INQUIÉTANT 123 A.– LA SITUATION ÉCONOMIQUE DE LA PRESSE UNE STAGNATION GÉNÉRALE CACHANT CERTAINES ÉVOLUTIONS INQUIÉTANTES 123 B.– LA NÉCESSAIRE ÉVOLUTION DU SYSTÈME DE PRESSE FRANÇAIS 127 II.– LES AIDES À LA PRESSE UN CALIBRAGE DÉLICAT, UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE 131A.– CONFORTER LES ENGAGEMENTS EN FAVEUR DU PLURALISME ET LE DÉVELOPPEMENT DES CIRCUITS DE DISTRIBUTION ET DE DIFFUSION 1321.– L’aide au transport postal de la presse d’information politique et gĂ©nĂ©rale 133 2.– Les aides Ă  la diffusion 134 3.– L’aide Ă  l’impression dĂ©centralisĂ©e des quotidiens 134 4.– L’aide au transport de la presse par la SNCF 135 5.– Les aides au pluralisme 135 B.– ACCOMPAGNER LES MUTATIONS ET LA MODERNISATION DU SECTEUR 1351.– L’aide Ă  la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne d’information politique et gĂ©nĂ©rale 136 2.– L’aide Ă  la modernisation de la distribution de la presse quotidienne nationale 136 3.– L’aide Ă  la modernisation du rĂ©seau des diffuseurs de presse 137 4.– L’aide Ă  la modernisation de la presse quotidienne et assimilĂ©e d'information politique et gĂ©nĂ©rale 138 5.– Le soutien au dĂ©veloppement du lectorat des jeunes 138 6.– L’aide au dĂ©veloppement des services en ligne des entreprises de presse 139 C.– DÉVELOPPER DES DÉPENSES FISCALES PLUS EFFICACES 1391.– Pour mieux remĂ©dier Ă  la sous-capitalisation de la presse amĂ©lioration du dispositif de l’article 39 bis A du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts et rĂ©duction d’impĂŽt pour la souscription au capital 139 2.– Le taux rĂ©duit de TVA applicable Ă  la presse pour une extension Ă  la presse en ligne 141 3.– Hors presse, la TVA des publications des collectivitĂ©s et organismes Ă  but non lucratif 143 III.– L’AGENCE FRANCE–PRESSE ENTRE REDRESSEMENT ET RÉORIENTATION 144A.– UNE RÉORIENTATION STRATÉGIQUE 144 B.– DES ÉQUILIBRES FINANCIERS ENCORE FRAGILES 145 AUDITION DU MINISTRE EN COMMISSION ÉLARGIE 149 EXAMEN EN COMMISSION 169 Article 63 RĂ©partition, au profit des organismes de l’audiovisuel public, des ressources de la redevance audiovisuelle 171AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION 175 LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES 177 L’article 49 de la loi organique du 1er aoĂ»t 2001 relative aux lois de finances LOLF fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des rĂ©ponses aux questionnaires budgĂ©taires. À cette date, 85 % des rĂ©ponses Ă©taient parvenues Ă  votre Rapporteur spĂ©cial. PRINCIPAUX POINTS DU RAPPORT DE PATRICE MARTIN-LALANDE, RAPPORTEUR SPÉCIAL DU BUDGET DES MÉDIAS, SUR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2007 1. La LOLF et la mesure de la performance La mission MĂ©dias est devenue une mission interministĂ©rielle, les crĂ©dits de l’audiovisuel extĂ©rieur n’étant plus imputĂ©s sur ceux de la mission Action extĂ©rieure de l’État. Quant Ă  la mission Avances Ă  l’audiovisuel public, elle est dĂ©sormais structurĂ©e en trois programmes. Si cela contribue Ă  une plus grande lisibilitĂ© des politiques publiques menĂ©es par l’État en faveur des mĂ©dias, des amĂ©liorations peuvent encore ĂȘtre apportĂ©es – amĂ©liorer la mesure de la performance du programme Audiovisuel extĂ©rieur et harmoniser les objectifs et les indicateurs des trois programmes de la mission MĂ©dias ; – intĂ©grer au sein du programme Presse la part des crĂ©dits de l’aide au transport postal figurant dans la mission DĂ©veloppement et rĂ©gulation Ă©conomiques ; – scinder la mission Avances Ă  l’audiovisuel public en autant de programmes que de bĂ©nĂ©ficiaires de la redevance ; – isoler le Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel au sein d’un programme rattachĂ© Ă  la mission MĂ©dias. On signalera qu’un dĂ©calage trĂšs fort existe entre les attentes – grandissantes – Ă  l’égard du CSA et la rĂ©alitĂ© – contrainte – de ses moyens budgĂ©taires les crĂ©dits affectĂ©s au CSA restent significativement insuffisants pour que celui-ci puisse faire face aux lourdes tĂąches qui l’attendent en 2007 dĂ©ploiement de la TNT, rĂ©allocation des frĂ©quences radios, dĂ©veloppement des tĂ©lĂ©visions locales, campagnes Ă©lectorales
. Ses crĂ©dits de fonctionnement sont en baisse de 0,5 % en 2007 par rapport Ă  2006 et mĂȘme de 15 % en euros courants sur la pĂ©riode 1992–2007. 2. Le bilan de la rĂ©forme de la redevance La rĂ©forme de la collecte de la redevance est un vĂ©ritable succĂšs Ă  la fois pour l’audiovisuel, pour le contribuable et pour l’État, mĂȘme si, Ă  la marge, certaines difficultĂ©s n’ont pas encore disparu. D’abord, la compensation des dĂ©grĂšvements accordĂ©e par l’État reste plafonnĂ©e, et ce en contradiction avec la loi relative Ă  l’audiovisuel public il n’est pas normal de financer sur le budget de l’audiovisuel public des politiques sociales. Ensuite, des amĂ©liorations doivent Ă©galement ĂȘtre apportĂ©es pour mieux informer les contribuables et diminuer les contestations. Quant aux erreurs de prĂ©vision de l’exercice 2005, elles portent sur 30 millions d’euros par rapport Ă  la loi de finances rectificative et sur 10 millions d’euros par rapport Ă  la loi de finances initiale. Si ces mauvaises estimations sont un peu perturbatrices, elles sont probablement liĂ©es pour une grande part Ă  la montĂ©e en puissance d’une rĂ©forme encore trĂšs rĂ©cente. Elles doivent aussi ĂȘtre relativisĂ©es au regard du produit total des encaissements de redevance puisqu’elles ne portent que sur une dizaine de millions d’euros pour un produit total de 2,2 milliards d’euros. Surtout, elles ne doivent pas occulter les acquis de la rĂ©forme de la redevance, en termes d’économies sur les coĂ»ts de recouvrement une centaine de millions d’euros par an ou en termes de taux de recouvrement 91,5 % en 2005 contre 83,7 % en 2004. Mieux, le taux global de recouvrement sur les particuliers au titre de la redevance 2005 c’est-Ă -dire y compris les recouvrements intervenus en 2006 au titre de 2005 peut ĂȘtre estimĂ© Ă  96,1 % au 31 aoĂ»t 2006 et Ă  97,8 % au 31 dĂ©cembre 2006. Au total, les ressources publiques redevance et remboursement partiel des dĂ©grĂšvements allouĂ©es aux organismes de l’audiovisuel public progresseront de 2,57 % en 2007 Ă  millions d’euros TTC. 3. Les contrats d’objectifs et de moyens Les contrats d’objectifs et de moyens sont l’outil de pilotage pluriannuel indispensable tant pour l’État–actionnaire que pour les opĂ©rateurs de l’audiovisuel public. Leur renouvellement est nĂ©cessaire afin de convenir avec les entreprises – d’engagements prĂ©cis et chiffrĂ©s des opĂ©rateurs sur les objectifs relevant de leurs missions de service public ; – d’engagements en termes de gestion du personnel, de maĂźtrise des coĂ»ts et de gains de productivitĂ© ; – d’engagements en termes de ressources publiques allouĂ©es. Le Parlement est dĂ©sormais mieux associĂ© Ă  la dĂ©marche en amont comme en aval il vote chaque annĂ©e le montant de la redevance, il est consultĂ© avant la signature dĂ©finitive des contrats, il en contrĂŽle l’exĂ©cution annuelle. Il faut dĂ©sormais que le Parlement soit Ă©galement associĂ© Ă  la signature d’avenants aux COM Ă  chaque fois qu’une modification substantielle de l’équilibre d’un contrat intervient et mĂ©rite d’ĂȘtre formalisĂ©e par une renĂ©gociation entre l’État et l’entreprise, Ă  l’image de la dĂ©marche de l’AFP qui a nĂ©gociĂ© un avenant Ă  son contrat pour rĂ©orienter sa stratĂ©gie vers la vidĂ©o et le multimĂ©dia et rester compĂ©titive face Ă  ses concurrents Reuters et Associated Press. Pour autant, de nombreuses incertitudes demeurent. L’État–actionnaire peine Ă  dĂ©velopper une vĂ©ritable vision entrepreneuriale pour ses entreprises et pĂątit de l’éclatement des tutelles avec ses risques d’incohĂ©rence. S’agissant de France TĂ©lĂ©visions, la proposition actuelle de COM connue depuis le mois d’avril n’est pas satisfaisante en l’état, faute pour l’entreprise d’avoir reçu de la part de son actionnaire unique des directives claires sur un certain nombre de points dĂ©licats. L’évolution prĂ©visible du plan d’affaires comporte des interrogations, et des besoins spĂ©cifiques haute dĂ©finition, sous-titrage pour les sourds et malentendants ne sont pas financĂ©s. De mĂȘme, les engagements financiers et le calendrier de signature du COM d’ARTE doivent ĂȘtre prĂ©cisĂ©s. Quant Ă  Radio France, il est grand temps de parvenir Ă  signer un premier COM
 six ans aprĂšs le vote de la loi. Un projet a Ă©tĂ© nĂ©gociĂ© et transmis au Parlement. Si certains aspects auraient pu ĂȘtre plus ambitieux modernisation sociale, publicitĂ© autorisĂ©e ou mieux chiffrĂ©s indicateurs de performance, ce projet est tout Ă  fait acceptable en l’état et comporte des engagements solides des deux parties modernisation Ă  effectifs constants, financement des travaux de rĂ©habilitation de la Maison de la Radio. Le COM doit ĂȘtre signĂ© rapidement, Ă  charge pour les deux parties de nĂ©gocier un avenant ultĂ©rieurement si les ressources publicitaires se rĂ©vĂ©laient insuffisantes ou si l’évolution de la radio numĂ©rique le justifiait. La situation de Radio France Internationale est beaucoup plus problĂ©matique l’État–actionnaire lui demande de moderniser sa gestion, d’allĂ©ger ses coĂ»ts, de rĂ©orienter sa stratĂ©gie vers le multimĂ©dia
. tout en lui rĂ©duisant ses moyens, en accentuant les reproches, sans lui donner des marges de nĂ©gociation sur le plan social. Autant dire que la perspective de signature d’un COM est bien incertaine. 4. L’audiovisuel extĂ©rieur L’audiovisuel extĂ©rieur fait l’objet de nombreuses critiques liĂ©es Ă  l’empilement des structures, aux coĂ»ts de fonctionnement, Ă  l’adĂ©quation insuffisante des modes de communication aux usages de chaque rĂ©gion du monde ou encore Ă  l’absence de synergies entre des intervenants souvent complĂ©mentaires. Si des synergies sont possibles, elles ne peuvent se mettre en Ɠuvre sans un projet cohĂ©rent dĂ©fini par l’État–actionnaire, dont la stratĂ©gie et les orientations apparaissent souvent opaques et contradictoires. La vraie question n’est pas tant celle du nombre ou de la stratification des outils que de la cohĂ©rence entre ces diffĂ©rents acteurs. Or, cette mise en cohĂ©rence n’est pas assurĂ©e par les tutelles. L’audiovisuel extĂ©rieur souffre, Ă  l’évidence, d’un dĂ©ficit de pilotage politique et administratif et il est temps de rĂ©activer un outil de pilotage interministĂ©riel du type Conseil de l’audiovisuel extĂ©rieur de la France. Radio France Internationale est l’une des victimes les plus flagrantes de cet empilement des tutelles qui vient amplifier l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© des financements publics qui l’affecte dĂ©jĂ  subvention budgĂ©taire, sujette Ă  rĂ©gulation, et affectation de redevance, dont l’évolution suit une logique diffĂ©rente. En 2007, la dotation du ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres est, pour la toute premiĂšre fois, en diminution de 3,2 % par rapport Ă  2006 alors que la redevance ne progresse que de 1,2 %, soit un financement public total de 127,35 millions d’euros au total – 1,2 %. L’annĂ©e 2007 sera cruciale pour TV5. AprĂšs deux annĂ©es 2004 et 2005 de trĂšs faible augmentation et, pour la premiĂšre fois en 2006, une baisse de la dotation française, une nouvelle diminution de la dotation, concomitante par exemple au lancement de France 24, constituerait tout Ă  la fois une atteinte aux engagements pris par la France au niveau international, un renoncement dĂ©finitif au plan de dĂ©veloppement stratĂ©gique adoptĂ© en 2005 et fondĂ© sur un effort important de sous-titrage des programmes et un dĂ©sengagement de la chaĂźne francophone de certains marchĂ©s. Le projet de loi de finances propose, Ă  ce stade, de relever la subvention française Ă  TV5 Monde Ă  65,27 millions d’euros + 4,5 % par rapport Ă  2006. France 24 sera lancĂ©e en dĂ©cembre prochain. Il faut veiller Ă  ce que les moyens donnĂ©s Ă  cette chaĂźne ne soient ni redondants avec ceux des opĂ©rateurs existants les partenariats et les synergies sont donc essentiels, ni insuffisants face Ă  l’ampleur de la mission mondiale assignĂ©e Ă  la chaĂźne. La traduction concrĂšte de cette mission devra ĂȘtre apprĂ©ciĂ©e avec attention, dans la mesure oĂč l’équilibre n’est pas simple Ă  trouver entre la nĂ©cessaire indĂ©pendance des rĂ©dactions France 24 ne pouvant apparaĂźtre comme une chaĂźne d’État et la recherche d’un approche spĂ©cifiquement française sur l’actualitĂ©, d’une vision de la France sur le monde. Quant Ă  ARTE–France, elle bĂ©nĂ©ficiera d’une augmentation de redevance de 2,8 % par rapport Ă  2006 avec 214,33 millions d’euros en 2007. Mais une progression de 3,5 % aurait Ă©tĂ© nĂ©cessaire pour garantir l’accomplissement de l’essentiel des missions fixĂ©es par l’État dĂ©veloppement de la TNT, sous-titrage pour les sourds et malentendants, haute dĂ©finition, soutien Ă  la production française. 5. La tĂ©lĂ©vision La tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre TNT est un rĂ©el succĂšs. LancĂ©e le 31 mars 2005 pour 35 % de la population, la TNT se dĂ©ploie par phases successives et couvre plus de 58 % de la population depuis le 15 juin dernier et 64 % de la population depuis le 18 octobre phase 4. Ce taux devrait ĂȘtre portĂ© Ă  70 % au printemps 2007 phase 5 et atteindre 85 % avant la fin de l’annĂ©e 2007 phase 6. Cependant, Ă  la fin 2006, le plus facile » aura Ă©tĂ© fait et les Ă©metteurs, censĂ©s permettre de couvrir 85 % de la population, concernent des zones posant des problĂšmes beaucoup plus complexes, en particulier les zones frontaliĂšres. Pour la plupart des observateurs, la couverture Ă  l’issue de la phase 6 sera en rĂ©alitĂ© de l’ordre de 80 %, soit significativement moins que l’objectif de couverture de 85 % de la population. Des retards sont d’ores et dĂ©jĂ  certains, notamment lorsque le dĂ©ploiement est conditionnĂ© Ă  des accords de coordination aux frontiĂšres. Par ailleurs, au sein mĂȘme des zones Ă  couvrir, des disparitĂ©s locales trĂšs fortes devraient ĂȘtre constatĂ©es entre les dĂ©partements des dĂ©partements seront couverts Ă  95 % Ă  l’issue de la phase 6
 et d’autres Ă  seulement 5 %. À l’heure actuelle, certains dĂ©partements ont mĂȘme un taux de couverture proche de 0 %. Face au caractĂšre choquant de ces disparitĂ©s territoriales, il est essentiel d’accĂ©lĂ©rer le dĂ©ploiement de la TNT
 ce qui pose deux questions celle du nombre de réémetteurs nĂ©cessaires il faudrait réémetteurs complĂ©mentaires pour passer de 80 Ă  90 % de la population couverte, et encore supplĂ©mentaires pour atteindre 95 ou 96 % et celle du taux d’équipement des Français seulement 30 % aujourd’hui. C’est pourquoi une utilisation complĂ©mentaire des autres vecteurs de tĂ©lĂ©vision, Ă  commencer par le satellite, est nĂ©cessaire pour parvenir Ă  une couverture Ă  100 % du territoire français Par ailleurs, des dĂ©cisions doivent ĂȘtre prises s’agissant de la TNT outre-mer, et l’État doit respecter son engagement de favoriser une diffusion rapide des chaĂźnes locales sur la TNT, afin d’encourager ces mĂ©dias Ă©mergents donc fragiles. AprĂšs la TNT, les prochaines Ă©tapes de progrĂšs technologique pour le secteur sont la haute dĂ©finition production, Ă©quipement, diffusion et la tĂ©lĂ©vision mobile. Pour ne pas faire prendre un an de retard Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur, l’examen du projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle doit impĂ©rativement ĂȘtre achevĂ© d’ici la fin fĂ©vrier 2007. Tous les paris comportent leur part de risque et en baptisant Gagner le pari pour la modernitĂ© » leur proposition de nouveau contrat d’objectifs et de moyens, les responsables de France TĂ©lĂ©visions savent qu’ils prennent un risque. La volontĂ© du nouveau prĂ©sident de France TĂ©lĂ©visions de rĂ©concilier exigences de service public, crĂ©ativitĂ© et accĂšs Ă  un large public est ambitieuse. Mais cette prise de risque est lĂ©gitime et raisonnĂ©e. Elle correspond Ă  une certaine idĂ©e du service public. Pour permettre Ă  cette ambition de se concrĂ©tiser, il reste Ă  l’État et Ă  l’entreprise Ă  formaliser, le plus rapidement possible, les missions et les engagements Ă  horizon 2010, afin que France TĂ©lĂ©visions dispose d’une feuille de route claire et prĂ©cise pour gagner ce pari »... Pour l’y aider, la redevance revenant Ă  France TĂ©lĂ©visions progresse de 2,5 % par rapport Ă  2006, s’élevant Ă  millions d’euros en 2007. 6. La radio Le paysage radiophonique français est riche, quantitativement comme du point de vue de la diversitĂ© des programmes et des contenus. Davantage pluraliste que dans bien d’autres pays, il a su Ă  la fois valoriser les outils de diffusion du service public de la radio un tiers des frĂ©quences et laisser les antennes associatives 25 % des frĂ©quences privĂ©es exister et se dĂ©velopper. Comme les autres mĂ©dias, la radio n’échappe toutefois pas aux prĂ©occupations liĂ©es aux sources de financement dans un contexte de concurrence accrue sur le marchĂ© publicitaire comme Ă  celles liĂ©es aux mutations technologiques qui remettent en cause tous les plans de dĂ©veloppement. La rĂ©allocation des frĂ©quences radio, dans le cadre du projet FM 2006, se poursuit le lancement des appels Ă  candidatures a dĂ©butĂ© le 31 janvier 2006, par l’appel sur le Languedoc–Roussillon et la Corse, et se poursuivra jusqu’au mois de juillet 2007. Plus fondamental, le projet de radio numĂ©rique doit permettre d’assurer une meilleure couverture du territoire, en particulier pour cette partie de la population qui ne reçoit que 10 radios contre prĂšs de 50 en Ile-de-France. AprĂšs avoir longtemps fait Ă©tat de positions divergentes, notamment Ă  l’occasion de la consultation organisĂ©e par le CSA en 2005, les radios semblent aujourd’hui s’accorder sur la nĂ©cessitĂ© de lancer, Ă  un horizon proche, des services numĂ©riques sur des rĂ©seaux dĂ©diĂ©s. De son cĂŽtĂ©, l’État a lancĂ© le 2 octobre dernier une consultation publique sur les normes techniques de diffusion Ă  retenir pour la radio numĂ©rique. ParallĂšlement, le CSA a lancĂ© le 3 octobre une consultation publique sur un projet de dĂ©ploiement de services de radio numĂ©rique sur la bande III pour des larges couvertures, dont les zones rurales et sur la bande L pour des couvertures plus restreintes, en zones denses, en vue du lancement d’appels aux candidatures pour la diffusion de services de radio locaux et nationaux. Radio France est un bel outil. L’image vĂ©hiculĂ©e, depuis de nombreuses annĂ©es, d’une maison souvent touchĂ©e par les revendications sociales cache une rĂ©alitĂ© plus prĂ©sente encore celle d’une somme de talents dont la rĂ©union a trĂšs peu de points de comparaison dans le monde. On doit saluer l’orientation prise par la sociĂ©tĂ© de mettre en place, Ă  l’horizon 2009, une politique sociale moderne et efficace Ă  effectifs constants. Ne serait-ce que parce que les conflits sociaux rĂ©currents et leurs consĂ©quences sur les antennes font objectivement perdre des auditeurs et de la lĂ©gitimitĂ© Ă  la radio de service public. En 2005–2006, 13 millions de personnes ont Ă©coutĂ© au moins un programme de Radio France au cours de la saison. Le groupe reprĂ©sente 20,6 % de la consommation de la radio en part d’audience, en lĂ©ger retrait de 0,5 point par rapport Ă  2004–2005, Radio France n’ayant pas Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©e par une Ă©volution plutĂŽt dĂ©favorable du mĂ©dia radio. Il serait Ă©quitable de donner Ă  Radio France les moyens par une actualisation de la rĂ©glementation de dynamiser ses recettes publicitaires qui ne reprĂ©sentent aujourd’hui que 8 % du budget. La redevance affectĂ©e devrait progresser de 2,65 % par rapport Ă  2006, Ă  508,2 millions d’euros en 2007. 7. Le patrimoine audiovisuel L’Institut national de l’audiovisuel INA est passĂ© en quelques annĂ©es d’une situation de crise Ă  un assainissement de sa gestion lui permettant dĂ©sormais de jouer un rĂŽle majeur au sein du paysage audiovisuel français. La redevance devrait progresser de 4 % par rapport Ă  2006 Ă  80,46 millions d’euros en 2007. Cela permettra la poursuite du plan de sauvegarde et de numĂ©risation des fonds Ă  horizon 2015, ainsi que leur conservation pĂ©renne. Outre le formidable succĂšs de la mise en ligne des archives de l’INA qui donne tout son sens Ă  la notion de service public », on doit saluer la crĂ©ation d’une Ă©cole de l’INA » dĂ©livrant un diplĂŽme validĂ© par l’État, initiative cohĂ©rente avec sa situation de premier centre europĂ©en de formation aux mĂ©tiers de l’image et du son. 8. La presse La presse française, surtout la presse quotidienne, connaĂźt depuis maintenant quelques annĂ©es une crise profonde que le dispositif d’aides peine Ă  enrayer. Les remĂšdes appliquĂ©s jusqu’à prĂ©sent ont eu un effet plutĂŽt positif et les aides de l’État constituent un outil indispensable pour aider la presse quotidienne nationale et rĂ©gionale Ă  conserver sa diversitĂ© et sa qualitĂ©. Mais cet effort ne permettra pas Ă  lui seul d’inverser la tendance. La rĂ©orientation des aides se poursuivra en 2007 pour se concentrer sur le soutien Ă  la presse d’information politique et gĂ©nĂ©rale, tout en réévaluant les besoins en fonction de la consommation rĂ©elle des crĂ©dits et de la montĂ©e en puissance des accords. Les conditions d’une meilleure diffusion de la presse constituent une prĂ©occupation prioritaire face Ă  la perte de lectorat. Le total des aides directes Ă  la presse s’élĂšvera Ă  435,7 millions d’euros pour 2007. Les deux dĂ©penses principales restent l’aide au transport postal 237,7 millions d’euros et les abonnements de l’État Ă  l’Agence France Presse 109,4 millions d’euros, l’État respectant ses engagements Ă  l’égard de l’AFP tout en encourageant une rĂ©orientation de sa stratĂ©gie. Quant aux dĂ©penses fiscales, elles se situent autour de 210 millions d’euros, principalement par l’effet du taux de TVA de 2,1 % appliquĂ© aux publications de presse. Il faut souhaiter que les nĂ©gociations communautaires aboutissent rapidement Ă  un accord entre les États–membres permettant d’étendre ce taux rĂ©duit de TVA aux publications de presse en ligne, qui se voient aujourd’hui appliquer le taux normal de 19,6 %. Votre Rapporteur spĂ©cial dĂ©posera un nouvel amendement en ce sens lors de l’examen du projet de loi de finances rectificative pour 2006. Toute la difficultĂ© pour l’élaboration de la politique publique de soutien Ă  la presse rĂ©side dans l’absence de vision par la profession elle-mĂȘme sur ce que sera la presse de demain. Il faut Ă©viter que de nouveaux acteurs Ă©conomiques viennent remplacer les acteurs existants, et avec eux une histoire intiment liĂ©e Ă  l’essor de la dĂ©mocratie, un prestige symbolique du respect des libertĂ©s dans notre pays et une exigence qui font de la presse française une des plus indĂ©pendantes, rigoureuses et pluralistes au monde. Les diffĂ©rents acteurs commencent nĂ©anmoins Ă  prendre conscience de l’urgence et mettent de cĂŽtĂ© leurs divergences d’intĂ©rĂȘts pour rĂ©flĂ©chir ensemble aux mutations Ă  rĂ©ussir pour crĂ©er le quotidien du futur. L’État de son cĂŽtĂ© doit s’interroger sur son rĂŽle et s’engager sans tabou dans une rĂ©flexion portant Ă  la fois sur ses aides Ă  la presse, importantes et diverses, et sur le cadre juridique global dans lequel Ă©volue la presse, aujourd’hui. 2007 et 2008 seront des annĂ©es dĂ©cisives pour le renouveau de la presse. * * * CHAPITRE PREMIER L’ÉVOLUTION DU CADRE FINANCIER ET DES OUTILS DE RÉGULATION DES MÉDIAS I.– FINANCER LA RÉFORME BUDGÉTAIRE ET FISCALE FACE AUX ALÉAS DES RECETTES A.– LE BUDGET GÉNÉRAL DE L’ÉTAT UN CADRE INTERMINISTÉRIEL ENCORE IMPARFAIT 1.– La mission MĂ©dias en 2007 face aux exigences de la LOLFa Une maquette plus aboutie que l’an dernierVotre Rapporteur spĂ©cial se rĂ©jouit que la mission MĂ©dias soit devenue une mission interministĂ©rielle, les crĂ©dits de l’audiovisuel extĂ©rieur n’étant plus imputĂ©s sur ceux de la mission Action extĂ©rieure de l’État. La mission Medias regroupe dĂ©sormais trois programmes – le programme Presse, placĂ© sous la responsabilitĂ© du directeur du dĂ©veloppement des mĂ©dias ; – le programme ChaĂźne française d’information internationale, relevant Ă©galement du directeur du dĂ©veloppement des mĂ©dias ; – le programme Audiovisuel extĂ©rieur, dont le responsable est le directeur gĂ©nĂ©ral de la coopĂ©ration internationale et du dĂ©veloppement. b Un dispositif de mesure de la performance encore perfectibleDans l’esprit des travaux de votre Commission 1, le projet annuel de performances PAP a Ă©tĂ© amĂ©liorĂ© dans le sens d’une meilleure hiĂ©rarchisation des objectifs autour de prioritĂ©s claires, d’une rĂ©duction du nombre d’objectifs et d’une clarification de l’intitulĂ© des objectifs. Ces derniers ont Ă©tĂ© retravaillĂ©s et recentrĂ©s sur quelques prioritĂ©s. Ainsi le programme Presse a-t-il Ă©tĂ© enrichi d’un cinquiĂšme objectif visant Ă  amĂ©liorer le ciblage et l’efficacitĂ© des dispositifs d’aide. Deux indicateurs Ă©valuent dĂ©sormais l’efficacitĂ© des aides publiques en la matiĂšre. Le premier mesure l’effet de levier des aides directes Ă  la presse et le second la part de l’aide publique directe globale accordĂ©e Ă  la presse quotidienne d’information politique et gĂ©nĂ©rale. De mĂȘme, un nouvel indicateur a Ă©tĂ© créé au sein du premier objectif afin de mesurer le chiffre d’affaires de l’AFP hors abonnement de l’État, et ce faisant le dynamisme de l’entreprise et le dĂ©veloppement de ses activitĂ©s. Pour autant, le dispositif de mesure de la performance rĂ©vĂšle un certain dĂ©sĂ©quilibre entre les objectifs et indicateurs pilotĂ©s par le Premier ministre en liaison avec le ministĂšre de la Culture et de la communication, et ceux pilotĂ©s par le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres. Il est plus que curieux que le programme Audiovisuel extĂ©rieur ne dispose que de 2 objectifs et 4 indicateurs alors qu’il regroupe un tiers des crĂ©dits de la mission et s’appuie sur de nombreux acteurs aux problĂ©matiques fournies TV5 Monde, Radio France Internationale, RMC Moyen-Orient, Canal France International, la CIRT et MĂ©di 1... lĂ  oĂč le programme ChaĂźne française d’information internationale est dotĂ© de 3 objectifs et 5 indicateurs pour seulement 13,9 % des crĂ©dits de la mission et un destinataire unique France 24. Le PAP nous apprend que le programme Audiovisuel extĂ©rieur est dotĂ© d’une seule action qui intĂšgre les activitĂ©s de l’ensemble du programme ». L’indicateur relatif au coĂ»t journalier des actions de coopĂ©ration menĂ©es par Canal France International nous apprend que le rĂ©alisĂ© 2005 est exactement le mĂȘme que l’objectif 2006 qui est le mĂȘme que l’objectif 2007 qui est le mĂȘme que l’objectif cible 2008
 Bref, le dispositif de mesure de la performance du programme Audiovisuel extĂ©rieur apparaĂźt trĂšs insuffisant et votre Rapporteur spĂ©cial demande Ă  ce qu’il soit substantiellement enrichi et dĂ©taillĂ© l’an prochain. c Un pĂ©rimĂštre trop restreint Comme l’an dernier, votre Rapporteur spĂ©cial regrette que la logique de lisibilitĂ© des moyens de l’État affectĂ©s Ă  une politique publique ne s’impose pas jusqu’au bout dans la nomenclature budgĂ©taire retenue. Ainsi, cette mission ne regroupe toujours pas l’ensemble des aides publiques destinĂ©es Ă  la presse Ă©crite, puisque l’aide au transport postal de la presse est partagĂ©e entre le programme Presse de la mission MĂ©dias et le programme DĂ©veloppement des entreprises de la mission DĂ©veloppement et rĂ©gulation Ă©conomiques, gĂ©rĂ©e par la direction gĂ©nĂ©rale des entreprises du ministĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie. PrĂšs 161,7 millions d’euros sont prĂ©vus Ă  cet effet en 2007, minorant d’autant le programme Presse, rĂ©ceptacle pourtant Ă©vident de cette dĂ©pense. Rappelons que l’aide au transport postal constitue, budgĂ©tairement, la principale aide de l’État Ă  la presse. Votre Rapporteur spĂ©cial dĂ©posera donc un amendement sur la mission DĂ©veloppement et rĂ©gulation Ă©conomiques pour proposer de mettre fin Ă  cette incohĂ©rence de nomenclature. Comme l’avait fait remarquer la mission d’information sur la mise en Ɠuvre de la LOLF 2, l’ensemble des crĂ©dits participant Ă  telle ou telle politique publique doit ĂȘtre rassemblĂ© au sein d’un mĂȘme programme. Une dispersion des crĂ©dits entre des programmes alors qu’ils participent d’une mĂȘme politique est inacceptable, et ce pour deux raisons du point de vue du Parlement, cela rĂ©duit grandement la lisibilitĂ© de la politique et l’on risquerait de revenir aux errements constatĂ©s sous le rĂ©gime de l’ordonnance de 1959 ; du point de vue du responsable de programme, comme l’expliquaient nos collĂšgues dans leur rapport, le principe de responsabilisation suppose que chaque gestionnaire, pour pouvoir atteindre ses rĂ©sultats, maĂźtrise tous les moyens prĂ©vus pour mener Ă  bien la politique dont il a la charge. Par consĂ©quent, l’intĂ©gralitĂ© des crĂ©dits participant Ă  une politique donnĂ©e, quelle que soit la nature de ces crĂ©dits, doit ĂȘtre regroupĂ©e au sein d’un mĂȘme programme ». Dans le mĂȘme esprit, on peut regretter que les crĂ©dits de la direction du dĂ©veloppement des mĂ©dias et du Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel CSA relĂšvent du programme Coordination du travail gouvernemental de la mission Direction de l’action du Gouvernement. Votre Rapporteur spĂ©cial continue de souhaiter que soit constituĂ© un programme RĂ©gulation des MĂ©dias rattachĂ© Ă  la mission MĂ©dias. Cette solution n’a malheureusement pas Ă©tĂ© retenue. En particulier, la place du CSA au sein de la maquette n’est pas satisfaisante, sa dĂ©pendance budgĂ©taire contrastant avec son indĂ©pendance statutaire. Cette question sera abordĂ©e plus loin dans ce rapport. 2.– Le complĂ©ment indispensable des mesures fiscalesLes dĂ©penses fiscales de la mission MĂ©dias sont concentrĂ©es sur le programme Presse. Ces dispositifs concernent l’impĂŽt sur les bĂ©nĂ©fices avec le dispositif prĂ©vu Ă  l’article 39 bis A du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts, le taux de TVA rĂ©duit applicable Ă  la presse et l’exonĂ©ration de TVA des publications des collectivitĂ©s publiques et des organismes Ă  but non lucratif. On rappellera Ă©galement que, le 19 octobre dernier, l’AssemblĂ©e nationale a adoptĂ© – en le modifiant et l’élargissant – l’article 7 du projet de loi de finances 3, qui reconduit et amĂ©nage le rĂ©gime des provisions pour investissements applicables aux entreprises de presse article 39 bis A du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts. Votre Rapporteur spĂ©cial reviendra sur l’ensemble de ces mesures fiscales plus loin dans ce rapport, Ă  l’occasion des dĂ©veloppements thĂ©matiques consacrĂ©s Ă  la presse. B.– LE COMPTE D’AVANCES À L’AUDIOVISUEL PUBLIC L’AFFECTATION DE LA REDEVANCE ET LE BILAN DE SA RÉFORME1.– Une structure de mission plus conforme Ă  la LOLFVotre Rapporteur spĂ©cial se rĂ©jouit de ce que le Gouvernement ait en partie tirĂ© les consĂ©quences des critiques formulĂ©es l’an dernier et confirmĂ©es d’ailleurs par le Conseil constitutionnel 4 la mission n’est donc plus une mission monoprogramme, mais est dĂ©sormais dĂ©coupĂ©e en trois programmes regroupant les cinq opĂ©rateurs financĂ©s par le compte de concours financier – le programme TĂ©lĂ©vision rĂ©unissant France TĂ©lĂ©visions et ARTE France ; – le programme Radio rĂ©unissant Radio France et Radio France internationale ; – le programme Patrimoine audiovisuel pour l’Institut national de l’audiovisuel. Votre Rapporteur spĂ©cial estime Ă©galement qu’il est trĂšs positif que les indicateurs de performances associĂ©s aux programmes correspondent mieux Ă  ceux des contrats d’objectifs et de moyens. Encore faudrait-il que ces contrats soient tous signĂ©s et que leurs indicateurs soient effectivement opĂ©rationnels, question qui sera abordĂ©e plus loin dans ce rapport. Comme votre Rapporteur spĂ©cial le souhaitait l’an dernier, un effort d’harmonisation des objectifs a ainsi Ă©tĂ© entrepris, puisque les programmes TĂ©lĂ©vision et Radio disposent d’objectifs communs. On pourrait probablement dĂ©finir un ou deux indicateurs vĂ©ritablement communs Ă  tous les opĂ©rateurs afin de rendre possible une comparaison intĂ©grale des performances respectives des bĂ©nĂ©ficiaires de la redevance. Cependant, il est dĂ©licat d’admettre que l’action de l’établissement public INA se mesure comme celle des sociĂ©tĂ©s du groupe France TĂ©lĂ©visions. C’est pourquoi votre Rapporteur spĂ©cial continue d’exiger une structuration de la mission en autant de programmes que d’opĂ©rateurs c’est-Ă -dire cinq, et ce pour deux raisons principales de simplification et de clarification d’une part, un tel dĂ©coupage permettrait, en loi de finances, de se passer du vote, redondant avec celui sur le compte, de l’article de seconde partie procĂ©dant Ă  la rĂ©partition du produit de la redevance entre les cinq opĂ©rateurs 5 ; d’autre part, ce dĂ©coupage permettrait de calquer exactement les indicateurs de performances des programmes sur ceux figurant dans les contrats d’objectifs et de moyens des cinq opĂ©rateurs financĂ©s par la redevance audiovisuelle. 2.– Le bilan de la rĂ©forme de la redevance audiovisuelleComme il s’y Ă©tait engagĂ©, votre Rapporteur spĂ©cial a procĂ©dĂ© au bilan de cette rĂ©forme, rĂ©forme qui correspond aux propositions qu’il avait formulĂ©es en 2003 dans son rapport d’information consacrĂ© Ă  la redevance 6. 2006 est la deuxiĂšme annĂ©e d’application de cette rĂ©forme qui est, aux yeux de votre Rapporteur spĂ©cial, une rĂ©forme rĂ©ussie elle a permis le maintien d’une ressource durablement affectĂ©e Ă  l’audiovisuel public », capable de rĂ©pondre Ă  l’évolution des besoins, tout en en rĂ©duisant fortement les coĂ»ts de recouvrement et la fraude. Elle suscite temporairement des interrogations de la part de certains contribuables et agents chargĂ©s de la mettre en Ɠuvre mais ces difficultĂ©s, inĂ©vitables vu l’ampleur de la rĂ©forme, devraient ĂȘtre rapidement surmontĂ©es grĂące Ă  un complĂ©ment d’information en cours. Le caractĂšre rĂ©solument moderne de cette rĂ©forme s’impose Ă  tout observateur objectif. a Rappel du nouveau dispositif mis en placeS’agissant du fait gĂ©nĂ©rateur de la redevance, le choix a Ă©tĂ© fait de faire payer une seule redevance par foyer dĂ©tenant un ou plusieurs appareils de rĂ©ception de la tĂ©lĂ©vision. Pour rĂ©aliser des Ă©conomies, le recouvrement est dĂ©sormais adossĂ© Ă  celui de la taxe d’habitation, ce qui permet de rĂ©aliser des Ă©conomies de gestion substantielles en Ă©mettant et en traitant un seul titre interbancaire de paiement. Comme existait dĂ©jĂ  pour la taxe d’habitation, ce paiement peut ĂȘtre plus largement fractionnĂ© et mensualisĂ©. Rappelons que le taux de mensualisation pour la taxe d’habitation est aujourd’hui de l’ordre de 30 %. Le redevable y gagne donc en simplification des formalitĂ©s et en facilitĂ©s de paiement. Le dĂ©cret n° 2005-1232 a, par voie de consĂ©quence, procĂ©dĂ© Ă  la suppression du service de la redevance audiovisuelle, symbole fort des Ă©conomies rĂ©alisĂ©es grĂące Ă  cette modernisation. Rappelons que l’inspection gĂ©nĂ©rale des finances avait estimĂ© Ă  prĂšs de 130 millions d’euros le coĂ»t total du service de la redevance y compris le coĂ»t immobilier et le coĂ»t des huissiers du TrĂ©sor. L’État compensait en partie ce coĂ»t en prĂ©levant sur le compte d’affectation spĂ©ciale de la redevance 73 millions d’euros, ce qui diminuait d’autant la ressource de l’audiovisuel public. Sur le plan social, l’adossement du recouvrement Ă  la taxe d’habitation a permis d’élargir trĂšs significativement le champ des personnes exonĂ©rĂ©es, ou plutĂŽt dĂ©grevĂ©es 7, de redevance 8. b Le renforcement efficace des contrĂŽlesLa redevance Ă©tait l’impĂŽt le plus fraudĂ© le France. Pour combattre la fraude, la dĂ©claration sur l’honneur est incluse dans la dĂ©claration de l’impĂŽt sur le revenu. DĂ©sormais, pour toute personne physique imposĂ©e Ă  la taxe d’habitation au titre d’un local meublĂ© affectĂ© Ă  l’habitation que la rĂ©sidence soit secondaire ou principale, une redevance est due si le contribuable dĂ©tient un ou plusieurs appareils de tĂ©lĂ©vision ou assimilĂ©s au 1er janvier de l’annĂ©e. Cette condition de dĂ©tention d’une tĂ©lĂ©vision est regardĂ©e comme remplie dĂšs lors que le contribuable n’aura pas indiquĂ© dans sa dĂ©claration de revenus ne pas dĂ©tenir de tĂ©lĂ©viseur dans sa rĂ©sidence principale ou secondaire. ConcrĂštement, le contribuable ne dĂ©tenant pas de tĂ©lĂ©vision coche une case nouvelle dans la dĂ©claration de revenus, dĂ©clarant ainsi sur l’honneur ne pas dĂ©tenir de tĂ©lĂ©vision au 1er janvier de l’annĂ©e, que ce soit dans sa rĂ©sidence principale ou dans sa rĂ©sidence secondaire. Le systĂšme mis en place renforce les contrĂŽles puisque non seulement il maintient l’obligation de dĂ©claration de vente d’un tĂ©lĂ©viseur incombant aux vendeurs, mais il ouvre Ă©galement la possibilitĂ© Ă  l’administration fiscale de demander aux Ă©tablissements diffuseurs ou distributeurs de services payants de programmes de tĂ©lĂ©vision les Ă©lĂ©ments des contrats de certains de leurs clients strictement nĂ©cessaires Ă  l’établissement de l’assiette de la redevance audiovisuelle identitĂ© du client, adresse, date du contrat. Le renforcement des contrĂŽles anti-fraude 1. Le contrĂŽle des particuliers – Des contrĂŽles sur piĂšces À partir du mois d’octobre 2005, des contrĂŽles sur piĂšces ont Ă©tĂ© engagĂ©s Ă  partir du fichier des contribuables ayant cochĂ© la case de non dĂ©tention sur leur dĂ©claration de revenus transmis par les services de la direction gĂ©nĂ©rale des impĂŽts au pĂŽle national de contrĂŽle situĂ© Ă  Toulouse. Ce fichier comportait 1,2 million de rĂ©fĂ©rences. Les croisements avec le fichier des vendeurs de tĂ©lĂ©vision et le fichier des redevables de la redevance en 2004 ont permis de recouper rĂ©fĂ©rences. Un questionnaire a Ă©tĂ© adressĂ© Ă  chaque redevable recoupĂ© afin de lui permettre de rĂ©gulariser sa situation sous 30 jours. PrĂšs d’un tiers des redevables ont reconnu dĂ©tenir un appareil rĂ©cepteur de tĂ©lĂ©vision, 30 % ont maintenu leur dĂ©claration initiale de non dĂ©tention, 23 % n’ont pas rĂ©pondu et 7 % des questionnaires envoyĂ©s sont revenus en NPAI » n’habite pas Ă  l’adresse indiquĂ©e. La procĂ©dure de rectification contradictoire a Ă©tĂ© engagĂ©e entre janvier et mars 2006 Ă  l’égard des redevables qui n’ont pas rĂ©pondu au questionnaire. Sans rĂ©ponse de leur part dans le dĂ©lai de 30 jours, un rĂŽle supplĂ©mentaire comportant une amende de 150 euros est Ă©mis. Au total, prĂšs de demandes d’émission d’un rĂŽle supplĂ©mentaire ont Ă©tĂ© adressĂ©es aux services fiscaux pour mise en recouvrement en dĂ©cembre 2005 et avril 2006, pour un montant total de 5,7 millions d’euros. – Des contrĂŽles sur place enquĂȘtes de terrain Au 15 septembre 2006, plus de enquĂȘtes ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©es plus de 13 % des contribuables contrĂŽlĂ©s ont reconnu dĂ©tenir un appareil de tĂ©lĂ©vision dans leur rĂ©sidence, dont prĂšs de 6 % au 1er janvier 2005 et 7 % aprĂšs le 1er janvier 2005. Au total, prĂšs de demandes d’émission d’un rĂŽle supplĂ©mentaire pour un montant total de 1,8 million d’euros seront transmises aux services fiscaux pour mise en recouvrement en novembre prochain. Les trois-quarts environ des rĂŽles supplĂ©mentaires Ă©mis en dĂ©cembre 2005 et en avril 2006 ont Ă©tĂ© recouvrĂ©s. 2. Le contrĂŽle des professionnels La direction gĂ©nĂ©rale des impĂŽts a adressĂ© en 2005 une lettre de relance amiable Ă  plus de professionnels qui n’avaient pas dĂ©clarĂ© de redevance audiovisuelle. Les contrĂŽles sur place ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s par les services de contrĂŽle de la redevance Ă  la suite de cette relance et ont concernĂ© les professionnels qui n’ont pas rĂ©pondu Ă  la relance amiable et, plus particuliĂšrement, ceux qui Ă©taient redevables de la redevance en 2004. Au 15 septembre 2006, plus de contrĂŽles des professionnels ont Ă©tĂ© engagĂ©s plus de 16 % des contrĂŽles ont permis la constatation immĂ©diate d’infractions qui ont donnĂ© lieu Ă  la demande d’émission d’un avis de mise en recouvrement AMR, pour un montant de plus de 2,6 millions d’euros. 3. Le contrĂŽle des vendeurs de tĂ©lĂ©viseurs Les contrĂŽles de vendeurs de tĂ©lĂ©viseurs sont essentiellement rĂ©alisĂ©s au second semestre 2006. Le nombre de dĂ©clarations de ventes d’appareils de tĂ©lĂ©vision enregistrĂ©es par le pĂŽle de Toulouse s’élĂšve au 31 juillet 2006 Ă  3,1 millions, ce qui devrait permettre d’atteindre – et mĂȘme de dĂ©passer – fin 2006 le niveau constatĂ© en 2004 5 millions ; le nombre de dĂ©clarations totales enregistrĂ© en 2005 avait chutĂ© Ă  3,4 millions. 4. Le contrĂŽle des diffuseurs de services payants de tĂ©lĂ©vision AprĂšs la rĂ©organisation de la chaĂźne des contrĂŽles sur piĂšces et sur place au second semestre 2005, le premier semestre 2006 a Ă©tĂ© consacrĂ© Ă  la mise en place opĂ©rationnelle du dispositif de droit de communication auprĂšs des Ă©tablissements diffuseurs ou distributeurs de services payants de tĂ©lĂ©vision cĂąble ou/et ADSL. Des rĂ©unions avec les principaux Ă©tablissements concernĂ©s ont Ă©tĂ© organisĂ©es afin de dĂ©finir en commun les modalitĂ©s d’exercice du droit de communication. Des tests en rĂ©el permettant de vĂ©rifier la pertinence des circuits ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s. Les premiĂšres demandes ont ainsi Ă©tĂ© transmises dĂ©but juillet 2006 ; elles ont Ă©tĂ© adressĂ©es Ă  8 Ă©tablissements cĂąble et/ou ADSL. c Le bon bilan social de la rĂ©formeVotre Rapporteur spĂ©cial avait dĂ©crit en dĂ©tail, l’an dernier, le plan d’accompagnement social de grande ampleur mis en Ɠuvre par la direction gĂ©nĂ©rale de la comptabilitĂ© publique DGCP dans le cadre de la rĂ©forme. Rappelons simplement que la rĂ©forme de la collecte de la redevance audiovisuelle a conduit Ă  maintenir les services de contrĂŽle de la redevance audiovisuelle et Ă  redĂ©ployer les agents anciennement chargĂ©s de la gestion vers de nouvelles fonctions au sein du rĂ©seau du TrĂ©sor public. L’objectif de reclassement avant le 31 dĂ©cembre 2005 des 964 agents concernĂ©s a Ă©tĂ© tenu. Les opĂ©rations de reclassement ont Ă©tĂ© facilitĂ©es par des engagements clairs en matiĂšre de garanties juridiques et gĂ©ographiques, des plans de qualification et de formation ambitieux, la mise en place d’un dispositif original d’écoute et d’orientation des agents et, enfin, un accompagnement spĂ©cifique en matiĂšre de rĂ©munĂ©ration. Le plan d’accompagnement social, arrĂȘtĂ© le 25 novembre 2004, a Ă©tĂ© signĂ© par les organisations syndicales CGT, FO, CFDT et FSU. L’ensemble du dispositif d’accompagnement continuera de faire l’objet jusqu’en 2007 d’un suivi rĂ©gulier avec les organisations syndicales dans le cadre d’une commission nationale paritaire de suivi des agents de la redevance. De nombreuses garanties ont Ă©tĂ© apportĂ©es aux agents en matiĂšre d’affectation le maintien dans l’ancien dĂ©partement d’affectation, le maintien dans la ville d’affectation pour une majoritĂ© des agents, le maintien dans leur ville d’affectation pour tous les agents des services de contrĂŽle. Un emploi dans le dĂ©partement informatique de la ville de localisation de leur ancien centre a Ă©galement Ă©tĂ© proposĂ© aux personnels ayant une qualification informatique et conservant une fonction informatique. Les nouvelles activitĂ©s concernent les centres de prĂ©lĂšvement service » Lille, Lyon et Strasbourg, le centre national de gestion des concours Lille, la trĂ©sorerie automatisĂ©e des amendes Rennes, le centre amendes service Toulouse, les pĂŽles d’apurement administratif des comptes des collectivitĂ©s locales Rennes et Toulouse et le pĂŽle national contrĂŽle de la redevance Rennes. S’agissant des qualifications, 151 promotions supplĂ©mentaires ont Ă©tĂ© rĂ©servĂ©es aux agents concernĂ©s, s’ajoutant aux promotions autorisĂ©es pour ces services dans le cadre de la tranche 2005 du plan ministĂ©riel de qualification, soit 92 postes. Les conditions de promotion des agents de la redevance ont Ă©tĂ© prĂ©servĂ©es. Dans le mĂȘme temps, en vue d’accompagner leur Ă©volution professionnelle, les agents de la redevance ont bĂ©nĂ©ficiĂ© d’une formation professionnelle complĂšte et adaptĂ©e aux besoins. Une douzaine de cursus de formation ont Ă©tĂ© Ă©laborĂ©s, comprenant chacun un volet thĂ©orique et un volet pratique immersion en trĂ©sorerie gĂ©nĂ©rale ou dans les postes comptables. Un certain nombre d’agents affectĂ©s dans les nouvelles structures ont par ailleurs suivi des formations mĂ©tiers complĂ©mentaires. Ces sessions spĂ©cifiques, mises en place au niveau local, ont pu permettre de rĂ©pondre aux besoins particuliers qui avaient Ă©tĂ© exprimĂ©s. Les agents ont bĂ©nĂ©ficiĂ© en moyenne de 20 jours de formation. À ce jour, 807 agents ont Ă©tĂ© formĂ©s soit un total de jours de formation dispensĂ©s hors tutorat. Un dispositif original d’écoute et d’orientation des agents a Ă©tĂ© mis en place dĂšs novembre 2004, a Ă©tĂ© organisĂ© en trois temps – une phase d’information collective des agents autour de la prĂ©sentation du nouvel environnement de travail rĂ©seau, trĂ©sorerie gĂ©nĂ©rale, des mĂ©tiers et des nouvelles structures de la DGCP ; – une phase d’écoute individuelle grĂące Ă  une gĂ©nĂ©ralisation des entretiens individuels avec une cellule d’écoute composĂ©e d’un consultant spĂ©cialisĂ© dans la conduite du changement et d’un cadre du service de la redevance, durant lesquels les agents ont exprimĂ© leurs souhaits d’affectation ; – une phase d’orientation durant laquelle les agents ont Ă©tĂ© conviĂ©s Ă  effectuer leurs choix de mutation aprĂšs rĂ©ception d’un livret de prĂ©sentation prĂ©cisant l’organisation et les mĂ©tiers de chacune des nouvelles structures. Enfin, le reclassement des agents n’a pas donnĂ© lieu Ă  une perte de rĂ©munĂ©ration et aucun dispositif de maintien de rĂ©munĂ©ration n’a Ă©tĂ© mis en place, Ă  l’exception des personnels affectĂ©s au traitement automatisĂ© de l’information fonctions de dactylocodage qui, mutĂ©s dans les services administratifs, ont bĂ©nĂ©ficiĂ© d’une indemnitĂ© en Ă©change de la fin du versement de la prime de fonctions informatiques. Ce dispositif indemnitaire repose sur un choix individuel entre le versement d’une indemnitĂ© exceptionnelle de reconversion Ă©galement Ă  la valeur de quatre annĂ©es de primes de fonctions informatiques ou une indemnitĂ© diffĂ©rentielle destinĂ©e Ă  garantir au bĂ©nĂ©fice de l’agent concernĂ© un maintien de rĂ©munĂ©ration. 3.– L’exĂ©cution 2005 des prĂ©visions erratiquesÀ cĂŽtĂ© des rĂ©sultats durables trĂšs positifs de la rĂ©forme, certains problĂšmes ont Ă©tĂ© posĂ©s dans cette phase de dĂ©marrage. Focalisant l’attention gĂ©nĂ©rale depuis quelques mois, les nombreuses erreurs de prĂ©vision sur les rĂ©sultats de l’exĂ©cution 2005 ne peuvent pas ĂȘtre niĂ©es. En effet, les donnĂ©es, transmises par le ministĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie l’an dernier Ă  la mĂȘme Ă©poque, estimaient Ă  plus de 19 millions le nombre de comptes payants particuliers pour 2005. Deux hypothĂšses Ă©taient alors formulĂ©es – une hypothĂšse basse Ă  19 millions de comptes payants, permettant d’anticiper des encaissements globaux d’au moins millions d’euros, soit un peu moins de 16 millions d’euros de plus que ce qui Ă©tait prĂ©vu dans le projet de loi de finances pour 2005 ; – une hypothĂšse haute Ă  19,3 millions de comptes payants, avec des encaissements globaux prĂ©visibles de millions d’euros, soit un peu moins de 49 millions d’euros de plus que ce qui Ă©tait prĂ©vu en loi de finances initiale pour 2005. ENCAISSEMENTS PRÉVISIONNELS DE REDEVANCE EN 2005 en millions d’euros Recettes du compte d’avances en 2005 HypothĂšse basse de novembre 2005 1 RĂ©alisĂ© 2005 Comptes particuliers crĂ©ances 2005 Comptes particuliers crĂ©ances antĂ©rieures 188,77 207,94 Comptes professionnels 70,02 77,83 Total 1 DonnĂ©es prĂ©sentĂ©es au moment de la publication du rapport spĂ©cial de l’an dernier, en novembre 2005, retenant une hypothĂšse de 19 millions de comptes payants en 2005 et un taux de recouvrement de 92,5 %, soit celui de la taxe d’habitation, et un montant de redevance pondĂ©rĂ© mĂ©tropole et outre-mer de 115,18 euros. Quant Ă  l’hypothĂšse haute 19,3 millions de comptes payants en 2005, elle aboutissait Ă  une prĂ©vision 2005 de millions d’euros. Source ministĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie Les estimations fournies l’an dernier en rĂ©ponse aux questionnaires budgĂ©taires parlementaires se sont donc rĂ©vĂ©lĂ©es erronĂ©es de 24 Ă  56 millions d’euros selon les hypothĂšses retenues par rapport au rĂ©alisĂ© 2005. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial Ă  la mi- octobre 2006, l’erreur de prĂ©vision porte en rĂ©alitĂ© sur 30 millions d’euros par rapport Ă  la loi de finances rectificative pour 2005 qui avait budgĂ©tairement tirĂ© Ă  tort les consĂ©quences – 
prĂ©maturĂ©es – d’une prĂ©tendue erreur de prĂ©vision qui aurait jouĂ© en faveur des organismes de l’audiovisuel public 9 et sur seulement 10 millions d’euros par rapport Ă  la loi de finances initiale pour 2005 ! Le bilan de l’exercice 2005 peut donc, Ă  prĂ©sent, ĂȘtre Ă©tabli avec plus de certitude 10. Un total de dĂ©grĂšvements de redevance audiovisuelle ont Ă©tĂ© accordĂ©s, dont pour un motif de non dĂ©tention de poste de tĂ©lĂ©vision. Les encaissements de redevance ont atteint 2,259 milliards d’euros en 2005. Mais ce montant ne doit pas ĂȘtre confondu avec les encaissements dus au titre de la redevance 2005, dans la mesure oĂč, d’une part, des recouvrements sont opĂ©rĂ©s en 2006 et mĂȘme aprĂšs 2006 au titre de la redevance 2005 et oĂč, d’autre part, des encaissements de redevance dus au titre de 2004 sont intervenus en 2005 et doivent donc ĂȘtre soustraits du total 2005 pour reflĂ©ter, en droits constatĂ©s », les rĂ©sultats de la seule campagne 2005. Aussi, le total des recettes brutes de redevance audiovisuelle en droits constatĂ©s au titre de l’annĂ©e 2005 devraient s’élever au 31 dĂ©cembre 2006 Ă  2,191 milliards d’euros hors frais de gestion fixĂ©s par l’État Ă  65 millions d’euros, qui se dĂ©composent de la maniĂšre suivante – 2,259 milliards d’euros pour les encaissements bruts en 2005 pour les particuliers et les professionnels ; – auxquels il convient de soustraire 208 millions d’euros correspondant Ă  des encaissements bruts en 2005 au titre d’annĂ©es antĂ©rieures Ă  2005 ; – et d’ajouter environ 140 millions d’euros correspondant aux toutes derniĂšres estimations des encaissements bruts en 2006 au titre de la seule annĂ©e 2005. À ce montant estimĂ© fin 2006, il conviendra d’ajouter les encaissements ultĂ©rieurs annĂ©e 2007 et suivantes au titre de 2005. Votre Rapporteur spĂ©cial souligne nĂ©anmoins que, si ces mauvaises estimations sont effectivement perturbatrices, elles sont probablement liĂ©es pour une grande part Ă  la montĂ©e en puissance d’une rĂ©forme encore trĂšs rĂ©cente, qui a bousculĂ© des comportements anciens. Ces estimations doivent aussi ĂȘtre relativisĂ©es au regard du produit total des encaissements de redevance elles ne portent que sur une dizaine de millions d’euros pour un produit total de 2,2 milliards d’euros ! Surtout, elles ne doivent pas occulter les acquis de la rĂ©forme de la redevance, en termes d’économies sur les coĂ»ts de recouvrement ou en termes de taux de recouvrement. Ainsi, le taux de recouvrement de la redevance, au terme de la premiĂšre annĂ©e, s’est Ă©tabli Ă  91,5 % contre 83,7 % en 2004. En rĂ©alitĂ©, d’aprĂšs les derniĂšres informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, le taux dĂ©finitif de recouvrement sur les particuliers au titre de la redevance 2005 c’est-Ă -dire y compris les recouvrements intervenus en 2006 au titre de 2005 peut ĂȘtre estimĂ© Ă  96,1 % au 31 aoĂ»t 2006 et Ă  97,8 % au 31 dĂ©cembre 2006. L’amĂ©lioration du taux de recouvrement de la redevance L’amĂ©lioration du taux de recouvrement constatĂ©e Ă  la suite de la rĂ©forme de la redevance ne tient pas au calendrier d’émissions puisqu’au contraire, ces derniĂšres sont concentrĂ©es sur la fin de l’annĂ©e, alors que dans l’ancien systĂšme les lissait sur toute l’annĂ©e. En revanche, deux Ă©lĂ©ments sont susceptibles d’expliquer un taux de recouvrement accru l’adossement Ă  la taxe d’habitation et l’accĂ©lĂ©ration comme le renforcement des poursuites en cas d’impayĂ©. L’adossement Ă  la taxe d’habitation et l’obligation de cocher une case dans l’hypothĂšse de non dĂ©tention d’un appareil rĂ©cepteur ont certainement contribuĂ© Ă  rĂ©duire la fraude. Par ailleurs, cet adossement a permis aux quelque 37 % de contribuables qui payent leur taxe d’habitation par mensualisation ou prĂ©lĂšvement Ă  l’échĂ©ance, de rĂ©gler sans y penser » leur redevance avec ces modes de paiement. L’accĂ©lĂ©ration et le renforcement des poursuites ont Ă©galement des effets positifs sur le recouvrement. En premier lieu, le rythme des poursuites est plus rapide depuis 2005. Auparavant en effet, les commandements de payer Ă©taient envoyĂ©s quatre mois au moins aprĂšs la date limite de paiement. En 2005, ce dĂ©lai a Ă©tĂ© ramenĂ© Ă  trois mois. En second lieu, le recours Ă  la procĂ©dure de l’avis Ă  tiers dĂ©tenteur » Ă  l’encontre des contribuables qui refusent de s’acquitter aprĂšs l’envoi d’une lettre de rappel, suivie souvent d’une lettre comminatoire avant poursuite, est beaucoup plus efficace que la saisie–vente », procĂ©dure mise en Ɠuvre majoritairement sous l’empire des anciennes dispositions. 4.– Les prĂ©visions 2006 une certaine prudenceAu vu des difficultĂ©s Ă  prĂ©voir des rĂ©sultats d’il y a deux ans, les prĂ©visions 2006 doivent ĂȘtre apprĂ©hendĂ©es avec prudence. La loi de finances pour 2006 estime les encaissements de redevance Ă  hauteur de millions d’euros. L’exĂ©cution au 30 juin 2006 se dĂ©compose de la maniĂšre suivante ENCAISSEMENTS PRÉVISIONNELS DE REDEVANCE EN 2006 en millions d’euros Recettes du compte d’avances LFI 2006 RĂ©alisĂ© au 30 juin 2006 Comptes particuliers crĂ©ances 2006 490,0 1 Comptes particuliers crĂ©ances antĂ©rieures 123,3 101,0 Comptes professionnels 82,8 69,0 Total 660,0 1 La faiblesse des encaissements rĂ©alisĂ©s au 30 juin 2006 s’explique par le fait que plus de deux-tiers des particuliers acquittent leur taxe d’habitation Ă  l’automne. Source ministĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie Cependant, d’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, certaines estimations font Ă©tat de rĂ©sultats probablement infĂ©rieurs de 30 Ă  50 millions d’euros aux prĂ©visions de la loi de finances pour 2006. Deux Ă©lĂ©ments pourraient expliquer une nouvelle prĂ©vision divergente les incertitudes sur la base d’imposition Ă  l’origine des imprĂ©cisions de l’exercice 2005 et l’impact des dĂ©grĂšvements supplĂ©mentaires accordĂ©s depuis le dĂ©but de l’annĂ©e 2006, qui ont conduit Ă  rĂ©duire encore la base d’imposition. 5.– Les hypothĂšses 2007 des crĂ©dits en hausse pour l’audiovisuelEn 2007, et pour la troisiĂšme annĂ©e consĂ©cutive, la charge fiscale pesant sur les foyers français restera stable. Le montant de la redevance audiovisuelle due par les particuliers reste en effet inchangĂ© Ă  116 euros en France mĂ©tropolitaine et Ă  74 euros outre-mer. Les recettes constatĂ©es in fine en 2005 et les prĂ©visions de recettes pour 2006 justifient ainsi que le montant retenu pour 2007 soit sensiblement identique Ă  celui inscrit en loi de finances pour 2006, soit millions d’euros. ENCAISSEMENTS PRÉVISIONNELS DE REDEVANCE EN 2007 en millions d’euros Recettes du compte d’avances LFI 2006 PLF 2007 Comptes particuliers crĂ©ances 2007 Comptes particuliers crĂ©ances antĂ©rieures 123,3 167,00 Comptes professionnels 82,8 84,0 Total Source ministĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie Les dĂ©grĂšvements de redevance pour motifs sociaux pris en charge par le budget gĂ©nĂ©ral s’élĂšvent Ă  509 millions d’euros 11. Ces dĂ©grĂšvements sont imputĂ©s sur le programme Remboursements et dĂ©grĂšvements d’impĂŽts d’État de la mission Remboursements et dĂ©grĂšvements. Nous reviendrons plus loin sur le constat que, cette annĂ©e encore, le remboursement n’est pas intĂ©gral. Il faut se fĂ©liciter que le Gouvernement ait, pour la premiĂšre fois, introduit lui-mĂȘme, dĂšs le projet de loi de finances dĂ©posĂ© Ă  l’AssemblĂ©e nationale 12, le mĂ©canisme de garantie de ressources » pour les opĂ©rateurs de l’audiovisuel public qui avait, les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, Ă©tĂ© introduit par voie d’amendement de votre Rapporteur spĂ©cial ! Par ailleurs, les coĂ»ts de collecte resteront bas. Ainsi, le montant des frais prĂ©levĂ©s par l’État au titre de la gestion de la redevance audiovisuelle s’élĂšve Ă  24 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2007, reconduisant ainsi les valeurs dĂ©jĂ  inscrites en loi de finances pour 2006 et corroborĂ©es par les recoupements avec les premiers rĂ©sultats de l’exercice en cours. Ce montant correspond Ă  l’ensemble des frais d’assiette, de recouvrement et de trĂ©sorerie, qui sont prĂ©levĂ©s sur les encaissements bruts de redevance audiovisuelle imputĂ©s en recettes du compte de concours financiers Avances Ă  l’audiovisuel public. Les Ă©conomies de coĂ»t de collecte obtenues grĂące Ă  la rĂ©forme de la redevance s’élĂšvent Ă  environ 100 millions d’euros, dont environ 50 millions d’euros au titre des frais prĂ©levĂ©s par l’État 73 millions d’euros avant la rĂ©forme, 24 millions d’euros en 2007 et environ 50 millions d’euros au titre des autres frais coĂ»ts immobiliers pour agents, coĂ»ts d’huissiers
. Les coĂ»ts de collecte facturĂ©s par l’État sont en sensible diminution par rapport Ă  la loi de finances initiale pour 2005 65 millions d’euros, et ce, grĂące Ă  la mise en place effective de la rĂ©forme de la redevance, qui a conduit – comme on l’a dĂ©jĂ  expliquĂ© – Ă  une organisation du recouvrement permettant une collecte plus performante avec un nombre d’agents plus rĂ©duit. Compte tenu du maintien Ă  24 millions d’euros des frais d’assiette, de recouvrement et de trĂ©sorerie, les recettes nettes de redevance s’établissent Ă  millions d’euros en 2007. Le budget 2007 est plutĂŽt encourageant puisqu’il permet l’augmentation des crĂ©dits effectivement affectĂ©s aux organismes de l’audiovisuel public, dont les effets seront analysĂ©s Ă  l’occasion des dĂ©veloppements thĂ©matiques, plus loin dans ce rapport. En effet, au total, les ressources allouĂ©es par la mission Avances Ă  l’audiovisuel public aux organismes de l’audiovisuel public en projet de loi de finances pour 2007 progressent de 2,57 % par rapport Ă  la loi de finances pour 2006, Ă  millions d’euros TTC, soit millions d’euros hors TVA. En consĂ©quence, l’article 63 du projet de loi de finances, rattachĂ© Ă  ce rapport spĂ©cial, procĂšde Ă  la rĂ©partition suivante de la ressource publique entre les cinq opĂ©rateurs bĂ©nĂ©ficiaires de la redevance audiovisuelle – millions d’euros pour France TĂ©lĂ©visions ; – 508,20 millions d’euros pour Radio France ; – 209,92 millions d’euros pour ARTE–France ; – 78,80 millions d’euros pour l’Institut national de l’audiovisuel ; – 56,53 millions d’euros pour Radio France Internationale. En tenant compte de la subvention allouĂ©e par le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres Ă  Radio France Internationale, le montant total des ressources publiques allouĂ©es aux organismes s’établit Ă  millions d’euros TTC en 2007, contre millions d’euros TTC en loi de finances pour 2006. En outre, les ressources propres des organismes devraient progresser de 5,4 % par rapport Ă  2006, grĂące Ă  un marchĂ© publicitaire orientĂ© Ă  la hausse et notamment caractĂ©risĂ© en 2007 par son ouverture au secteur de la grande distribution sur les chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision hertziennes. DĂšs lors, l’ensemble des ressources du service public de l’audiovisuel pour 2007 devrait s’élever Ă  millions d’euros hors taxe, en progression de 3,1 % par rapport Ă  2006. 6.– Les voies d’amĂ©lioration 100 % de compensation des dĂ©grĂšvementsSi la rĂ©forme constitue un progrĂšs trĂšs substantiel, elle n’en est pas moins perfectible. D’abord, il faut que l’administration fiscale s’attache Ă  mieux identifier les personnes dĂ©grevĂ©es de redevance au titre des droits acquis et des droits actuels. L’État doit ĂȘtre capable d’identifier les bĂ©nĂ©ficiaires de cette politique sociale et d’informer le Parlement sur le manque Ă  gagner que reprĂ©sente, pour l’audiovisuel public, l’actuel plafonnement de la prise en charge des dĂ©grĂšvements. Pour cela, une information prĂ©cise sur le nombre de personnes dĂ©grevĂ©es de redevance est essentielle. Surtout, et comme les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, votre Rapporteur spĂ©cial dĂ©plore que les compensations de dĂ©grĂšvements accordĂ©es par l’État restent plafonnĂ©es Ă  509 millions d’euros en 2007. Le principe d’un plafonnement des remboursements de dĂ©grĂšvements de redevance est en effet reconduit en 2007 par l’article 20 du projet de loi de finances, article adoptĂ© par l’AssemblĂ©e nationale le 20 octobre dernier. Votre Rapporteur spĂ©cial regrette ce plafonnement mĂȘme s’il a bien conscience qu’étant donnĂ© la situation budgĂ©taire de notre pays, il est difficile aujourd’hui d’assurer une compensation intĂ©grale des dĂ©grĂšvements. Mais, si l’une des consĂ©quences positives de la rĂ©forme de la redevance a Ă©tĂ© une extension des personnes bĂ©nĂ©ficiant d’une exonĂ©ration pour des motifs sociaux, rien ne saurait justifier que les exonĂ©rations en question aient vocation Ă  ĂȘtre financĂ©es par le budget de l’audiovisuel public. C’est d’ailleurs ce principe qu’affirme avec force la loi du 1er aoĂ»t 2000 relative Ă  l’audiovisuel en disposant que les exonĂ©rations de redevance audiovisuelle dĂ©cidĂ©es pour des motifs sociaux donnent lieu Ă  remboursement intĂ©gral du budget gĂ©nĂ©ral de l’État ». Ce plafond, qui n’est pas conforme Ă  l’esprit de la LOLF, dĂ©roge manifestement au principe de remboursement intĂ©gral imposĂ© par la loi organisatrice de l’audiovisuel. Ce qui a pu ĂȘtre acceptable en 2005, en raison des alĂ©as inhĂ©rents Ă  l’importante rĂ©forme de la collecte alors engagĂ©e, ne l’est plus dĂ©sormais. Il n’est pas normal de financer sur le budget de l’audiovisuel public des politiques sociales. Votre Rapporteur spĂ©cial regrette donc que, cette annĂ©e encore, son amendement supprimant ce plafond n’ait pas Ă©tĂ© adoptĂ©. * * * II.– RÉGULER DES OUTILS FORTEMENT CONTRAINTS A.– LA VOIE RÉGALIENNE LA PLACE DES POUVOIRS PUBLICS DANS UN ENVIRONNEMENT COMPLEXEDu point de vue de la nomenclature budgĂ©taire, votre Rapporteur spĂ©cial n’est pas compĂ©tent pour traiter des crĂ©dits de la direction du dĂ©veloppement des mĂ©dias ou du Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel puisque ceux-ci sont inscrits au sein du programme Coordination du travail gouvernemental de la mission Direction de l’action du Gouvernement 13. Pour autant, l’article 57 de la LOLF confĂšre aux Rapporteurs spĂ©ciaux un domaine de compĂ©tences plus large, qui, au cas prĂ©sent, s’étend Ă  l’ensemble des administrations et organes publics intervenant dans le secteur des mĂ©dias. 1.– Le Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel CSA le prix de l’indĂ©pendance ?Comme les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, votre Rapporteur spĂ©cial fait le constat du dĂ©calage trĂšs fort entre les attentes – grandissantes – Ă  l’égard du Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel CSA et la rĂ©alitĂ© – contrainte – de ses moyens budgĂ©taires. Cette annĂ©e encore, des doutes pĂšsent sur la capacitĂ© du CSA Ă  accomplir l’ensemble de ses missions avec les crĂ©dits de fonctionnement dont il dispose. Ce dĂ©calage risque de s’aggraver Ă  l’occasion de l’examen du projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur, qui propose d’étendre encore les compĂ©tences du CSA afin de favoriser l’extension de la couverture de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre, l’extinction de la tĂ©lĂ©vision hertzienne analogique et le dĂ©veloppement de la tĂ©lĂ©vision haute dĂ©finition ou numĂ©rique personnelle. a Des missions de plus en plus lourdesDes missions de plus en plus lourdes, des exigences de plus en plus fortes, des intĂ©rĂȘts de plus en plus contradictoires
 le CSA, qui regroupe 270 ETPT, est une autoritĂ© administrative indĂ©pendante dont la lĂ©gitimitĂ© et l’importance sont facilement illustrĂ©es par l’accroissement du champ de ses missions, ces derniĂšres annĂ©es. L’annĂ©e 2007 se prĂ©sente, du reste, comme une annĂ©e oĂč le CSA sera fortement sollicitĂ©. Outre les activitĂ©s normales » du Conseil qui pĂšsent dĂ©jĂ  lourdement sur son activitĂ©, plusieurs Ă©lĂ©ments joueront l’an prochain, sur lesquels votre Rapporteur spĂ©cial reviendra Ă  l’occasion des dĂ©veloppements thĂ©matiques, plus loin dans ce rapport – les Ă©chĂ©ances Ă©lectorales importantes, qui appellent Ă©videmment un renforcement temporaire des ressources consacrĂ©es par le CSA au respect du pluralisme ; – la prĂ©paration des appels gĂ©nĂ©raux Ă  candidature en matiĂšre de radio FM, qui mettra les services du CSA sous forte tension ; – le dĂ©ploiement de la TNT et l’avĂšnement des chaĂźnes de la TNT, qui ont considĂ©rablement accru les missions du CSA. Le lancement le 31 mars 2005 des nouvelles chaĂźnes de la TNT a notamment Ă©tendu ses missions de contrĂŽle de façon significative 14. La gĂ©nĂ©ralisation de la TNT, par la logistique qu’elle implique, par les contestations qu’elle ne manque pas de crĂ©er, viendra compliquer la tĂąche du Conseil davantage encore ; – et Ă©ventuellement, les nouvelles compĂ©tences confiĂ©es au CSA par l’adoption du projet de loi relatif Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur et Ă  la modernisation de la diffusion tĂ©lĂ©visuelle, qui sera prochainement examinĂ© par le SĂ©nat. b Des crĂ©dits de fonctionnement insuffisantsPour faire face Ă  tout cela, la dotation budgĂ©taire affectĂ©e au CSA diminue de 0,5 %. Le projet de loi de finances propose, en effet, de porter cette dotation Ă  33,94 millions d’euros en 2007, montant affectĂ© au sein de l’action n° 9 du programme Coordination du travail gouvernemental de la mission Direction de l’action du gouvernement. Les dotations seront ainsi passĂ©es de 30,38 millions d’euros en 1992 Ă  33,94 millions d’euros en 2007, soit une progression de 11,7 % en euros courants
 qui correspond en fait Ă  une baisse de prĂšs de 15 % en euros constants. La diminution des crĂ©dits est mĂȘme plus prononcĂ©e encore sur la pĂ©riode 2002–2007, si l’on prend en compte non seulement les crĂ©dits ouverts en loi de finances initiale, mais Ă©galement les reports et les fonds de concours. En effet, les reports ont baissĂ© de 7 millions d’euros en 2004 et 6,1 millions d’euros en 2005 Ă  0,95 million d’euros en 2006 15. Cette baisse pourrait se poursuivre compte tenu des effets conjuguĂ©s de la baisse des crĂ©dits demandĂ©s en 2007 et du plafonnement des reports de crĂ©dits 16. Si les difficultĂ©s seront surmontĂ©es en 2006 grĂące Ă  des Ă©conomies structurelles 17, les perspectives budgĂ©taires pour 2007 sont une source de prĂ©occupation rĂ©elle. Le projet de loi de finances pour 2007 prĂ©voit de rĂ©duire les crĂ©dits de fonctionnement et d’investissement du CSA de 18,65 millions d’euros en 2006 Ă  16 millions d’euros en 2007, soit une baisse de 14,2 %. Mais cette baisse est relativisĂ©e par un transfert de charges Ă  compter du 1er octobre 2006 et Ă  hauteur d’environ 2 millions d’euros entre le CSA et l’Agence nationale des frĂ©quences, cette derniĂšre se voyant confier le traitement des rĂ©clamations des tĂ©lĂ©spectateurs dont la rĂ©ception est brouillĂ©e. Le budget de fonctionnement et d’investissement du CSA ne devrait donc baisser Ă  pĂ©rimĂštre constant que de 0,65 million d’euros. Ne serait-ce que par cohĂ©rence avec l’objectif gouvernemental de gĂ©nĂ©ralisation de la TNT, qui repose trĂšs largement sur l’action du CSA, votre Rapporteur spĂ©cial dĂ©plore la faiblesse des moyens du Conseil et souhaite que l’adoption du projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur se traduise par une réévaluation des moyens affectĂ©s au CSA. 2.– La direction du dĂ©veloppement des mĂ©dias DDM face aux enjeux nationaux et europĂ©ensa Des missions lourdesDirection d’administration centrale rattachĂ©e au Premier ministre et placĂ©e sous son autoritĂ©, la direction du dĂ©veloppement des mĂ©dias DDM est un service mis Ă  la disposition du ministre de la Culture et de la communication, du ministre de l’Éducation nationale, de l’enseignement supĂ©rieur et de la recherche, ainsi que du ministre dĂ©lĂ©guĂ© Ă  la Promotion de l’égalitĂ© des chances. L’organisation interne de la direction est dĂ©finie par les arrĂȘtĂ©s du 24 fĂ©vrier 2003 18. Deux commissions lui sont rattachĂ©es la commission paritaire des publications et agences de presse 19 et la commission d’attribution des aides au soutien Ă  l’expression radiophonique 20. La DDM est chargĂ©e de dĂ©finir et coordonner la politique publique en matiĂšre de mĂ©dias et de la sociĂ©tĂ© de l’information et de prĂ©parer les Ă©volutions nĂ©cessaires de la rĂ©glementation en matiĂšre de libertĂ© de la presse, de communication et de services en ligne. La direction assure Ă©galement des fonctions de coordination interministĂ©rielle en matiĂšre de sociĂ©tĂ© de l’information, notamment dans le cadre de la prĂ©paration et de la mise en Ɠuvre des comitĂ©s interministĂ©riels de la sociĂ©tĂ© de l’information. La DDM assure enfin la prĂ©paration et la dĂ©fense des positions de la France sur ces sujets dans les instances internationales concernĂ©es. b Des moyens limitĂ©sLa DDM voit ses crĂ©dits imputĂ©s parmi ceux du programme Coordination du travail gouvernemental de la mission Direction de l’action du Gouvernement. Les crĂ©dits d’intervention qu’elle gĂšre sont, par contre, inscrits dans les programmes Presse et ChaĂźne française d’information internationale de la mission MĂ©dias et dans le programme Soutien Ă  l’expression radiophonique locale de la mission CinĂ©ma, audiovisuel et expression radiophonique locale. Cette rĂ©partition ne favorise pas la lisibilitĂ© budgĂ©taire sur le coĂ»t complet des moyens consacrĂ©s par l’État aux mĂ©dias. Dans le projet de loi de finances pour 2007, ces crĂ©dits sont de 5,55 millions d’euros, intĂ©gralement imputĂ©s sur des dĂ©penses de personnel. En 2006, les effectifs budgĂ©taires de la DDM reprĂ©sentent 92 emplois d’agents titulaires et 9 emplois d’agents contractuels, auxquels s’ajoutent des crĂ©dits correspondant Ă  la rĂ©munĂ©ration de 5 agents contractuels et de vacataires. Par ailleurs, la DDM comporte Ă©galement un certain nombre d’agents mis Ă  disposition, de sorte que son effectif global atteint 114 agents en 2006. B.– LA VOIE CONTRACTUELLE UN MOMENT CLEF POUR LES CONTRATS D’OBJECTIFS ET DE MOYENS1.– Un outil essentiel mais fragilisĂ©a Un instrument moderne et responsabilisantInstituĂ©s en 2000 par modification de l’article 53 de la loi de 1986 relative Ă  la libertĂ© de communication 21, les contrats d’objectifs et de moyens COM sont dĂ©sormais bien ancrĂ©s dans le paysage institutionnel des opĂ©rateurs audiovisuels. Les contrats d’objectifs et de moyens Symptomatiques de la modernisation de l’État, ces contrats ont pour ambition de formaliser dans une dĂ©marche contractuelle les relations entre un opĂ©rateur de l’audiovisuel public et son actionnaire unique, Ă  savoir l’État. Un COM dĂ©termine pour chaque sociĂ©tĂ© ou Ă©tablissement public – les axes prioritaires de son dĂ©veloppement, dont les engagements pris au titre de la diversitĂ© et l’innovation dans la crĂ©ation ainsi que les engagements permettant d’assurer, dans un dĂ©lai de cinq ans suivant la publication de la loi n° 2005-102 du 11 fĂ©vrier 2005 pour l’égalitĂ© des droits et des chances, la participation et la citoyennetĂ© des personnes handicapĂ©es, l’adaptation Ă  destination des personnes sourdes ou malentendantes de la totalitĂ© des programmes de tĂ©lĂ©vision diffusĂ©s, Ă  l’exception des messages publicitaires, sous rĂ©serve des dĂ©rogations justifiĂ©es par les caractĂ©ristiques de certains programmes ; – le coĂ»t prĂ©visionnel de ses activitĂ©s pour chacune des annĂ©es concernĂ©es, et les indicateurs quantitatifs et qualitatifs d’exĂ©cution et de rĂ©sultats qui sont retenus ; – le montant des ressources publiques devant lui ĂȘtre affectĂ© en identifiant celles prioritairement consacrĂ©es au dĂ©veloppement des budgets de programmes ; – le montant du produit attendu des recettes propres, notamment celles issues de la publicitĂ© de marques et du parrainage ; – les perspectives Ă©conomiques pour les services qui donnent lieu au paiement d’un prix. » Il s’agit d’un outil puissant grĂące auquel l’État doit fixer Ă  chaque opĂ©rateur des objectifs en termes de crĂ©ation, de programmation, de diversitĂ© culturelle
 mais aussi d’efforts de productivitĂ© et de meilleure gestion. En contrepartie de quoi, l’État s’engage Ă  fournir, annĂ©e aprĂšs annĂ©e, Ă  l’opĂ©rateur un montant de ressources publiques lui permettant d’atteindre les objectifs prĂ©alablement dĂ©finis. Cet engagement sur la recette est indispensable car, si l’on met Ă  part le cas de l’Institut national de l’audiovisuel, les sociĂ©tĂ©s de l’audiovisuel public bĂ©nĂ©ficiant de la redevance sont toutes des sociĂ©tĂ©s de droit privĂ© Ă©voluant dans un contexte Ă©conomique fortement concurrentiel et particuliĂšrement dynamique. Ces sociĂ©tĂ©s ont donc besoin – comme leurs concurrents – d’une certaine visibilitĂ© Ă  moyen terme quant aux ressources que leur actionnaire, c’est-Ă -dire l’État, est prĂȘt Ă  leur accorder. Or, aujourd’hui, jusqu’au vote dĂ©finitif de la loi de finances et sa promulgation Ă  la fin du mois de dĂ©cembre, elles ne disposent pas d’une information sĂ»re quant Ă  la part de la ressource publique qui leur sera affectĂ©e. Cette incertitude est bien sĂ»r encore plus grande, en raison du principe d’annualitĂ© budgĂ©taire, pour les annĂ©es ultĂ©rieures. Le contrat d’objectifs et de moyens est, aux yeux de votre Rapporteur spĂ©cial, l’outil moderne indispensable pour gĂ©rer la relation entre les organismes de l’audiovisuel public et leur actionnaire. Pour autant, sa dimension pluriannuelle doit ĂȘtre conciliĂ©e avec le caractĂšre annuel du vote par le Parlement de sa principale ressource, c’est-Ă -dire la redevance audiovisuelle et la compensation des dĂ©grĂšvements. b Les dĂ©ceptions des contrats de premiĂšre gĂ©nĂ©rationOn rappellera que, suite Ă  l’adoption de la loi de 2000, deux COM seulement avaient Ă©tĂ© signĂ©s, l’un avec France TĂ©lĂ©visions pour la pĂ©riode 2001–2005, l’autre avec ARTE 2002–2005, celui de l’INA 2000–2003 ayant Ă©tĂ© en quelque sorte prĂ©curseur » puisqu’il prĂ©existait Ă  la loi. Ces trois contrats Ă©tant dĂ©sormais obsolĂštes et, au moment oĂč une nouvelle gĂ©nĂ©ration est en nĂ©gociation, il semble utile d’en dresser un bilan. Votre Rapporteur spĂ©cial a dĂ©jĂ  eu l’occasion de regretter que ni Radio France, ni RFI n’aient signĂ© de contrat d’objectifs et de moyens avec l’État. Il s’agit d’une lacune importante qui ne doit, en aucun cas, ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©e
 ce qui ne semble malheureusement pas une Ă©vidence pour tout le monde. Par ailleurs, votre Rapporteur spĂ©cial rappelle que les COM signĂ©s n’ont pas Ă©tĂ© systĂ©matiquement respectĂ©s, en particulier par l’État. On signalera aussi que le dĂ©calage du lancement de la TNT et la volontĂ© de la nouvelle majoritĂ© issue des urnes en 2002 de recentrer les objectifs du groupe France TĂ©lĂ©visions sur l’amĂ©lioration des programmes des chaĂźnes existantes ont rendu une partie des dispositions des contrats d’ARTE et de France TĂ©lĂ©visions caduques. Il est lĂ©gitime, et mĂȘme sain, qu’une majoritĂ© politique nouvelle ait des objectifs diffĂ©rents pour l’audiovisuel public et le gouvernement de 2002 n’était pas obligĂ© de se sentir liĂ© par tous les engagements pris par le gouvernement prĂ©cĂ©dent. NĂ©anmoins, dans ce type de situations, votre Rapporteur spĂ©cial plaide pour la nĂ©gociation systĂ©matique d’un avenant au COM, Ă  chaque fois qu’intervient un changement stratĂ©gique majeur de l’actionnaire ou une remise en cause de l’équilibre financier initial. Un amendement sera dĂ©posĂ© en ce sens. Cette obligation de prendre en compte l’architecture des COM dĂ©jĂ  signĂ©s incombe d’ailleurs non seulement au Gouvernement mais Ă©galement au lĂ©gislateur. Ce dernier peut, en effet, ĂȘtre parfois amenĂ© Ă  adopter des dispositions lĂ©gislatives modifiant, sans qu’il en ait nĂ©cessairement conscience, en profondeur l’équilibre du contrat. L’adoption de la loi de 2005 pour l’égalitĂ© des chances 22 en constitue un exemple bien connu. c Les enjeux des nouveaux COMUn certain nombre d’enjeux communs peuvent ĂȘtre dĂ©gagĂ©s. En termes de calendrier d’abord, il faut s’efforcer de faire en sorte que tous les contrats d’objectifs et de moyens soient conclus au cours de l’annĂ©e 2006 qui doit, dans la mesure du possible, ĂȘtre l’annĂ©e de rĂ©fĂ©rence du contrat. Quoique lourd pour les tutelles, ce travail est indispensable et doit conduire Ă  une signature rapide des contrats, quand cela est envisageable. Pour autant, votre Rapporteur spĂ©cial considĂšre qui, si une signature en 2006 n’est pas possible, il serait absurde de retenir des dates artificielles pour la durĂ©e des contrats, dans le but de faire croire qu’il n’y aurait pas eu d’annĂ©e sans COM. C’est notamment le cas du projet de contrat avec France TĂ©lĂ©visions, qui – vu le retard dĂ©jĂ  pris – a trĂšs peu de chances d’ĂȘtre signĂ© avant la fin de l’annĂ©e. Mieux vaut, dans ce cas, travailler sereinement Ă  un COM solide, portant sur la pĂ©riode 2007–2011. Sur le fond, deux types de disposition doivent impĂ©rativement figurer dans la nouvelle gĂ©nĂ©ration de contrats d’objectifs et de moyens – d’abord, des engagements prĂ©cis et chiffrĂ©s des opĂ©rateurs sur les objectifs relevant de leurs missions de service public. On doit pouvoir trouver des objectifs sur les programmes, sur le respect d’une certaine diversitĂ©, sur la dĂ©fense du pluralisme ou encore des engagements en faveur de la crĂ©ation culturelle ; – ensuite, des engagements en termes de maĂźtrise des coĂ»ts, de gestion du personnel et de gains de productivitĂ©. PrĂ©cisĂ©ment parce que les opĂ©rateurs de l’audiovisuel public sont financĂ©s pour les trois quarts par une ressource publique, la redevance, ils doivent ĂȘtre exemplaires dans leur gestion et dans la recherche permanente de gains de productivitĂ©, d’économies et de synergies. Ce n’est qu’une fois ces deux Ă©tapes franchies qu’il est possible de dĂ©terminer le montant des ressources publiques nĂ©cessaires au financement des objectifs, compte tenu des marges de manƓuvre dĂ©gagĂ©es en interne. L’évolution de ces ressources publiques doit ĂȘtre raisonnable et ne pas se traduire par un alourdissement par trop important pour le contribuable payant la redevance. Si le budget de l’audiovisuel public ne peut, selon votre Rapporteur spĂ©cial, Ă©voluer au mĂȘme rythme que l’inflation compte tenu du secteur hautement concurrentiel dans lequel il Ă©volue, il ne saurait non plus dĂ©roger, en ces temps de difficultĂ©s budgĂ©taires, Ă  l’impĂ©ratif d’efficacitĂ© de la dĂ©pense publique. d Un Parlement dĂ©sormais mieux associĂ© en amontLe Parlement est aujourd’hui impliquĂ© en amont et aval de la procĂ©dure des contrats d’objectifs et de moyens. L’article 53 de la loi de 1986 relative Ă  la libertĂ© de communication dispose que le PrĂ©sident de la sociĂ©tĂ© France TĂ©lĂ©visions prĂ©sente chaque annĂ©e devant les commissions chargĂ©es des affaires culturelles et des finances de l’AssemblĂ©e nationale et du SĂ©nat un rapport sur l’exĂ©cution du contrat d’objectifs et de moyens ». Il s’agit lĂ  d’une procĂ©dure utile, le document prĂ©sentĂ© maintenant depuis quatre ans Ă©tant riche, prĂ©cis et rigoureux. Pour la deuxiĂšme fois, en application d’un amendement adoptĂ© il y a deux ans par le Parlement Ă  l’initiative de votre Rapporteur spĂ©cial, cette prĂ©sentation s’est faite devant les commissions chargĂ©es des Affaires culturelles et des Finances rĂ©unies 23. Un Ă©largissement systĂ©matique de cette procĂ©dure Ă  l’ensemble des opĂ©rateurs serait probablement excessif et alourdirait inutilement le calendrier de travail des commissions. Pour autant, votre Rapporteur spĂ©cial continue de croire utile que les prĂ©sidents de ces opĂ©rateurs soient rĂ©guliĂšrement entendus, par exemple tous les deux ans, par les commissions parlementaires afin de multiplier les liens et les rencontres entre le Parlement et l’audiovisuel public. Par ailleurs, l’adoption d’un amendement prĂ©sentĂ© l’an dernier par votre Rapporteur spĂ©cial 24 permet une plus grande implication du Parlement en amont du processus. Les projets de COM doivent dĂ©sormais ĂȘtre transmis, avant leur signature, aux commissions chargĂ©es des affaires culturelles et des finances de l’AssemblĂ©e nationale et du SĂ©nat, ce qui a Ă©tĂ© le cas du projet de COM de Radio–France par exemple. Cela constitue la meilleure garantie pour que le Parlement, qui vote le montant et l’assiette de la redevance, se sente partie prenante de la signature de l’État. Ces projets peuvent faire l’objet d’un dĂ©bat au Parlement et les commissions des Affaires culturelles et des Finances peuvent formuler un avis sur ces projets de contrat dans un dĂ©lai de six semaines. Par ailleurs, les sociĂ©tĂ©s Radio France, Radio France Internationale et ARTE–France ainsi que l’Institut national de l’audiovisuel ont l’obligation lĂ©gale de transmettre chaque annĂ©e, avant la discussion du projet de loi de rĂšglement, aux commissions chargĂ©es des affaires culturelles et des finances de l’AssemblĂ©e nationale et du SĂ©nat un rapport sur l’exĂ©cution de leur contrat d’objectifs et de moyens. Ces opĂ©rateurs se sont tous acquittĂ©s de cette obligation cette annĂ©e. 2.– Un bilan trĂšs contrastĂ© mais un renouvellement indispensableL’apprĂ©ciation portĂ©e sur chaque contrat d’objectifs et de moyens dĂ©pend Ă©videmment de la spĂ©cificitĂ© de l’opĂ©rateur et de ses missions. Votre Rapporteur spĂ©cial reviendra donc sur les points les plus importants en les dĂ©veloppant plus loin dans ce rapport. On se contentera ici d’une prĂ©sentation gĂ©nĂ©rale de chaque contrat ou projet de contrat, en insistant sur les situations – illĂ©gales – oĂč un COM n’est toujours pas signĂ©. a L’Institut national de l’audiovisuel les vertus de la contractualisationLes vertus de la stratĂ©gie de contractualisation apparaissent trĂšs clairement dans l’exemple de l’Institut national de l’audiovisuel INA. C’est au travers de l’outil du COM que l’INA a orchestrĂ© son redressement. Rappelons, en effet, que le premier COM avait Ă©tĂ© Ă©laborĂ© dans un contexte de crise. SignĂ© avec l’État le 27 avril 2000, pour la pĂ©riode 2000–2003, il s’articulait autour de l’organisation de la convergence des autres activitĂ©s vers la mission patrimoniale et le numĂ©rique, et de la rationalisation de la gestion en stabilisant la masse salariale et les effectifs, conditions indispensables au retour Ă  l’équilibre Ă©conomique. Force est de reconnaĂźtre que l’INA a assez bien tenu les engagements du premier COM et atteint les objectifs poursuivis, tant en matiĂšre de gestion que d’exĂ©cution du plan de sauvegarde et de numĂ©risation. Le rapport d’audit rĂ©alisĂ© par un organisme extĂ©rieur permet de constater que prĂšs de 80 % des indicateurs ont Ă©tĂ© respectĂ©s. L’INA a donc globalement rempli les objectifs qui lui Ă©taient assignĂ©s. Mais au-delĂ  de l’aspect visible des chiffres 25, l’INA a profondĂ©ment changĂ© et confortĂ© les missions que l’État lui a confiĂ©es. Votre Rapporteur spĂ©cial se rĂ©jouit que le COM 2005–2009 ait Ă©tĂ© signĂ©, le 17 novembre 2005. Dans le prolongement du premier contrat, et fort des rĂ©sultats acquis, le deuxiĂšme contrat dĂ©veloppe trois axes la sauvegarde du patrimoine audiovisuel et l’enrichissement des collections ; l’exploitation des fonds ; enfin, l’accroissement de l’efficacitĂ© et de la qualitĂ© de la gestion. Le contrat est signĂ© pour une pĂ©riode de 5 ans, soit un an de plus que le prĂ©cĂ©dent. La mesure de la performance et de l’efficacitĂ© des programmes d’actions s’est notamment traduite par la mise en place d’indicateurs stratĂ©giques de rĂ©sultats, plus pertinents que ceux du premier COM 26. Pour amĂ©liorer la lisibilitĂ© et Ă©viter la dispersion, leur nombre est significativement rĂ©duit par rapport au premier COM 19 indicateurs au lieu de 40. Pour mieux identifier les lignes de force, ces indicateurs sont centrĂ©s sur les objectifs stratĂ©giques et donc essentiels. Pour le pilotage interne de l’entreprise, ces indicateurs seront complĂ©tĂ©s, hors contrat, par un ensemble d’indicateurs opĂ©rationnels permettant d’apprĂ©hender de maniĂšre fine les composantes d’activitĂ© de l’INA. Par rapport au premier COM, le nouveau contrat se caractĂ©rise par une approche globale de la stratĂ©gie, qui cherche Ă  faire en sorte que toutes les compĂ©tences travaillent dans le mĂȘme sens. Les objectifs ne se dĂ©clinent plus par secteur pour la plupart d’entre eux, ils fĂ©dĂšrent autour d’une ligne de force sauvegarde, enrichissement et ouverture des fonds les diverses composantes de l’INA patrimoine, recherche, production, formation, gestion. En inscrivant chaque secteur dans l’action collective de l’entreprise, cette dĂ©marche renforce la lĂ©gitimitĂ© et la visibilitĂ© des orientations nouvelles assignĂ©es aux diffĂ©rentes activitĂ©s. En engageant chaque activitĂ© dans une dynamique de marque, elle crĂ©e une obligation collective de qualitĂ©. Votre Rapporteur spĂ©cial ne peut que souhaiter que cette ambition trouve une traduction concrĂšte. b L’Agence France–Presse la nĂ©gociation d’un avenant L’Agence France–Presse AFP a signĂ© avec l’État un COM couvrant la pĂ©riode 2003–2007, qui a pour objectif d’accompagner l’AFP Ă  sortir de la crise financiĂšre dans laquelle elle se trouvait. Ce COM avait pour ambition de faire grandir l’agence sur son cƓur de mĂ©tier, en accroissant son rayonnement international et d’abord europĂ©en. Il rĂ©affirme ainsi que l’AFP s’adresse d’abord aux mĂ©dias classiques », au premier rang desquels la presse Ă©crite papier et les mĂ©dias audiovisuels installĂ©s et connus. L’agence devait donc, aux termes du COM dans sa version 2003, dĂ©velopper de nouveaux mĂ©dias pour y afficher sa prĂ©sence et son savoir-faire
 mais avec prudence, c’est-Ă -dire dans le respect de ses clients traditionnels et en veillant Ă  la solvabilitĂ© des nouveaux besoins servis. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, un avenant au COM a Ă©tĂ© signĂ© pour la pĂ©riode 2006–2007 afin de prendre en compte une stratĂ©gie nouvelle la rĂ©orientation de l’AFP vers les nouveaux mĂ©dias en dĂ©veloppement vidĂ©o et multimĂ©dia, Ă©lĂ©ment qui n’était pas pris en compte au moment du COM signĂ© en 2003. Les nouveaux objectifs fixĂ©s Ă  l’AFP concernent notamment le dĂ©veloppement de l’activitĂ© vidĂ©o, sur le fondement d’un plan d’affaires comportant de nouveaux postes, créés en prioritĂ© par redĂ©ploiement. Par ailleurs, les investissements consacrĂ©s Ă  la modernisation de l’agence seront privilĂ©giĂ©s durant la pĂ©riode de l’avenant, de maniĂšre Ă  dĂ©velopper la capacitĂ© de l’AFP Ă  livrer des contenus multimĂ©dia assemblĂ©s, notamment avec des contenus vidĂ©o, Ă  des clients de type portail internet ou opĂ©rateurs mobiles, et d’augmenter ainsi ses revenus. Une poursuite des cessions de filiales et une rĂ©forme de la direction des systĂšmes d’informations sont prĂ©vues, de mĂȘme qu’un nouveau business plan modifiant les objectifs chiffrĂ©s de l’AFP. Enfin, la version de l’avenant transmise Ă  votre Rapporteur spĂ©cial fait Ă©tat d’engagement de maĂźtrise des charges, portant plus particuliĂšrement sur les charges de personnel. L’AFP contrĂŽlera Ă  cette fin le volume des ETP pour la catĂ©gorie du personnel permanent de statut siĂšge social ainsi que pour celle du personnel temporaire. Votre Rapporteur spĂ©cial considĂšre que cette dĂ©marche de modification du contrat par voie d’avenant est un Ă©lĂ©ment positif, dont la pratique devrait ĂȘtre Ă©tendue aux autres COM signĂ©s par l’État. c ARTE France vers un nouveau contratARTE France avait signĂ© son premier COM en mars 2002, pour la pĂ©riode 2002–2005. Ce COM avait pour principaux axes le soutien Ă  la production et Ă  la crĂ©ation, l’enrichissement de la grille de programmes en journĂ©e comme en soirĂ©e, ainsi que des objectifs relatifs Ă  la gestion de la sociĂ©tĂ©. Votre Rapporteur spĂ©cial estime que le bilan de ce premier COM est globalement positif, ARTE ayant rempli – et parfois dĂ©passĂ© – la plupart des objectifs qui lui Ă©taient fixĂ©s. Ainsi, l’indicateur relatif aux dĂ©penses en faveur de la production 27 est restĂ© supĂ©rieur aux objectifs et en constante Ă©volution sur l’ensemble de la pĂ©riode du COM 28. Quant au volume de production, qui devait ĂȘtre supĂ©rieur ou Ă©gal Ă  500 heures, il a atteint 556 heures en 2004 et 619 heures en 2005. L’objectif d’enrichissement progressif de la grille de programmes a Ă©tĂ© poursuivi, mais dans une moindre mesure par rapport aux objectifs, en raison du dĂ©calage du dĂ©marrage de la TNT. Les indicateurs de gestion ont Ă©tĂ© respectĂ©s, Ă  l’exception de l’objectif de ressources propres pour les annĂ©es 2003 et 2004. Surtout, votre Rapporteur spĂ©cial dĂ©plore le manque de 10 millions d’euros que l’État aurait dĂ» apporter, et qui font dĂ©faut
 pour financer l’avenir, comme on l’expliquera plus loin dans ce rapport. Votre Rapporteur spĂ©cial estime Ă©galement que les discussions en cours sur le prochain COM doivent pouvoir aboutir avant la fin de l’annĂ©e pour couvrir la pĂ©riode de 2006-2010. Parmi les grands axes stratĂ©giques pourraient figurer, d’une part, le renforcement de la politique de la chaĂźne en faveur de la crĂ©ation d’Ɠuvres audiovisuelles et cinĂ©matographiques et, d’autre part, son rĂŽle moteur dans la gĂ©nĂ©ralisation de la diffusion numĂ©rique sur le territoire et l’introduction de la haute dĂ©finition. d Radio France le premier COMVotre Rapporteur spĂ©cial a eu souvent l’occasion de regretter l’absence de COM avec la sociĂ©tĂ© Radio France. Cette absence est d’autant plus prĂ©judiciable que les montants financiers en jeu impliquent un pilotage responsabilisĂ© de la dĂ©pense publique. Alors qu’à l’issue du vote de la loi de 2000, la prĂ©cĂ©dente direction de la sociĂ©tĂ© n’avait pas souhaitĂ© disposer de cet outil, la direction en place depuis l’étĂ© 2004 souhaite au contraire bĂ©nĂ©ficier de ce cadre de travail et a, trĂšs rapidement, entamĂ© une discussion avec son actionnaire. Votre Rapporteur spĂ©cial salue cet effort, qui semble sur le point d’aboutir enfin. Un projet de contrat pour la pĂ©riode 2006–2009 a Ă©tĂ© approuvĂ© par le conseil d’administration de Radio France le 12 juillet dernier. Ce document est le fruit de plusieurs mois de nĂ©gociation qui ont Ă©tĂ© l’occasion, au cours de nombreuses rĂ©unions thĂ©matiques, d’aborder dans le dĂ©tail les activitĂ©s de la sociĂ©tĂ© et de mettre Ă  plat les grands enjeux stratĂ©giques et les dĂ©fis qu’elle se doit de relever. Il a bien Ă©tĂ© transmis, conformĂ©ment Ă  l’article 53 de la loi relative Ă  la libertĂ© de communication, Ă  votre commission des Finances. À travers ce projet, Radio France et l’État affirment leur souhait, dans un contexte de concurrence accrue et d’évolution rapide du paysage mĂ©diatique, de prĂ©ciser et conforter les sept chaĂźnes et les formations musicales de Radio France dans leurs missions de service public, tout en permettant Ă  la sociĂ©tĂ© de rĂ©aliser de nouveaux dĂ©veloppements. Projet de COM 2006–2009 de Radio France Le premier grand axe stratĂ©gique fixĂ© Ă  Radio France pour les annĂ©es Ă  venir est de renforcer son cƓur de mĂ©tier. Cela passe tout d’abord par la nĂ©cessitĂ© de prĂ©ciser et conforter le positionnement de chacune des sept chaĂźnes, dans un souci de renforcement des missions de service public, de complĂ©mentaritĂ© des chaĂźnes entre elles et de maintien de leur audience face au dĂ©veloppement de la concurrence. Ainsi, des objectifs propres Ă  chaque chaĂźne ont Ă©tĂ© dĂ©finis – pour France Inter, rĂ©nover la grille de programme dans le respect de ses valeurs pour retrouver la confiance des auditeurs ; – pour France Info, conforter son statut de chaĂźne d’information de rĂ©fĂ©rence avec une antenne moins rĂ©pĂ©titive, plus conviviale et une diffusion Ă©largie ; – pour France Bleu, renforcer l’ancrage local tout en s’adossant Ă  une stratĂ©gie de rĂ©seau et en complĂ©tant sa prĂ©sence territoriale ; – pour France Culture, renforcer son positionnement de chaĂźne des savoirs en phase avec les dĂ©bats de son temps et au service d’une ambition artistique et patrimoniale unique ; – pour France Musique, Ă©largir son rĂ©pertoire et son offre de concerts pour mettre en valeur la vie musicale en France et dans le monde ; – pour Le Mouv’, faire partager aux jeunes les valeurs de service public avec un programme ambitieux fondĂ© sur l’information et les dĂ©couvertes musicales ; – pour FIP, offrir un auditoire plus large au seul espace radiophonique dĂ©diĂ© aux dĂ©couvertes musicales les plus Ă©clectiques. – enfin, conforter l’action culturelle et musicale de Radio France grĂące Ă  une complĂ©mentaritĂ© des formations musicales entre elles mais aussi avec les chaĂźnes. Afin que cette offre soit pleinement mise en valeur, la stratĂ©gie de diffusion dĂ©finie pour la sociĂ©tĂ© dans les annĂ©es Ă  venir est double Radio France doit en effet s’inscrire dans le mouvement de numĂ©risation de la diffusion, tout en favorisant l’extension de la diffusion en FM. L’internet sera Ă©galement privilĂ©giĂ© pour renforcer l’offre par des contenus plus riches et plus accessibles, avec notamment la mise en place de chaĂźnes thĂ©matiques dĂ©rivĂ©es. Par ailleurs, Radio France devra saisir les opportunitĂ©s qui s’offrent Ă  elle, avec le dĂ©veloppement de nouveaux usages et notamment l’apparition de supports dĂ©diĂ©s Ă  la mobilitĂ©, pour proposer de nouveaux services et donnĂ©es associĂ©s. Un autre axe important du projet de COM est celui de la rĂ©habilitation de la Maison de la Radio. L’État confirme ainsi qu’il donnera Ă  Radio France les moyens de financer, sans affecter l’activitĂ© de la sociĂ©tĂ©, le chantier de rĂ©habilitation, rendu nĂ©cessaire pour des raisons de sĂ©curitĂ©. La rĂ©habilitation sera aussi l’occasion d’offrir aux occupants et spectateurs le cadre et l’outil de travail d’une radio du 21Ăšme siĂšcle et de crĂ©er un auditorium de places Ă  la hauteur des formations musicales de Radio France. Dans le projet de COM, l’État s’engage Ă  allouer Ă  la sociĂ©tĂ© une redevance de fonctionnement qui devrait augmenter de 2,6 % en 2007, 2,4 % en 2008 et 2,3 % en 2009, ainsi qu’une redevance d’investissement pour le financement des travaux de rĂ©habilitation 6,2 millions d’euros en 2007, 14,3 millions d’euros en 2008 et 22,3 millions d’euros en 2009. ParallĂšlement, la sociĂ©tĂ© s’est engagĂ©e Ă  mettre en place une politique sociale et salariale modernisĂ©e qui conditionne une bonne maĂźtrise de ses charges et Ă  optimiser sa gestion avec notamment la mise en place de nouveaux outils de suivi et d’analyse. Cette modernisation se fera Ă  effectifs constants. Votre commission des Finances se prononcera sur ce projet de COM lors de sa rĂ©union du 2 novembre 2006, mais votre Rapporteur spĂ©cial ne peut que souhaiter, six ans aprĂšs la rĂ©forme de la loi relative Ă  la libertĂ© de communication, la signature rapide d’un contrat d’objectifs et de moyens pour Radio France TĂ©lĂ©visions un certain nombre d’incertitudesMobilisant les enjeux stratĂ©giques, financiers et sociaux les plus lourds, le cas de France TĂ©lĂ©visions est nĂ©cessairement plus complexe. D’autant plus qu’au fur et Ă  mesure de l’extension du pĂ©rimĂštre du groupe, la contractualisation devient de plus en plus complexe. Le premier contrat 2001–2005 a incontestablement permis, d’une part, de doter le groupe France TĂ©lĂ©visions et l’ensemble de ses filiales d’un outil transversal de pilotage stratĂ©gique et de gestion et, d’autre part, de moderniser sa relation avec l’État–actionnaire et ses modalitĂ©s de gouvernance. Le nouveau contrat devra prĂ©senter les mĂȘmes avantages et prendre en compte les Ă©volutions rĂ©centes et futures du paysage audiovisuel français et international. Un document a Ă©tĂ© soumis Ă  votre commission des Finances en avril dernier. Proposition de COM 2006–2010 de France TĂ©lĂ©visions BaptisĂ©e Gagner le pari de la modernitĂ© », cette proposition de COM s’articule autour des axes suivants – la stratĂ©gie Ă©ditoriale. Dans le cadre de sa mission de service public, les objectifs Ă©ditoriaux prioritaires de France TĂ©lĂ©visions pourraient ĂȘtre dĂ©terminĂ©s en examinant la valeur ajoutĂ©e que l’entreprise peut apporter du point de vue de l’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral par rapport Ă  l’offre de tĂ©lĂ©vision privĂ©e, et ce suivant trois dimensions exhaustives les programmes diffusĂ©s, l’effet d’entraĂźnement exercĂ© sur l’industrie audiovisuelle et cinĂ©matographique et la prise en compte de tous les publics ; – la stratĂ©gie de dĂ©veloppement du groupe. L’examen de la stratĂ©gie de dĂ©veloppement du groupe devra tenir compte des mutations technologiques auxquelles celui-ci est confrontĂ©, et ce, tant en termes de pĂ©rimĂštre du service public que de modĂšle Ă©conomique associĂ© abandon de l’analogique, extension de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre, introduction de la haute dĂ©finition, tĂ©lĂ©vision sur mobile.... Plus prĂ©cisĂ©ment, il s’agira pour France TĂ©lĂ©visions de respecter le calendrier de dĂ©ploiement des 115 premiers sites de la TNT dĂ©fini par le CSA pour l’ensemble des chaĂźnes de la TNT et de s’engager, avec ses partenaires du multiplexe public, dans un plan de dĂ©ploiement complĂ©mentaire afin de contribuer au processus d’extinction progressif de la diffusion analogique qui dĂ©marrera en mars 2008 pour s’achever en novembre 2011. Par ailleurs, le groupe participera Ă  l’offre des chaĂźnes gratuites de la TNT par satellite. Enfin, France TĂ©lĂ©visions, qui a d’ores et dĂ©jĂ  diffusĂ© des programmes en haute dĂ©finition Ă  l’occasion des expĂ©rimentations, aura pour objectif de continuer Ă  diffuser un maximum de programmes en haute dĂ©finition ; – la stratĂ©gie de France TĂ©lĂ©visions outre-mer et en rĂ©gions. Concernant l’outre-mer en particulier, il s’agira autant d’examiner la stratĂ©gie de diffusion de la tĂ©lĂ©vision publique que la stratĂ©gie de RFO ; – le rĂŽle de France TĂ©lĂ©visions sur le plan international le contrat devra notamment prĂ©ciser les moyens permettant au groupe d’animer ses participations dans l’audiovisuel extĂ©rieur français ; – la modernisation de la gestion du groupe, qui devra notamment s’appuyer sur la recherche de synergies et la maĂźtrise des effectifs et de la masse salariale, en vue de parvenir Ă  l’équilibre financier. Le projet de COM 2006–2010, qui est en rĂ©alitĂ© une proposition de COM Ă©manant de l’entreprise publique et sur laquelle l’État–actionnaire a de toute Ă©vidence du mal Ă  se prononcer, n’est pas satisfaisant en l’état. Votre Rapporteur spĂ©cial s’étonne en particulier qu’on ait laissĂ© France TĂ©lĂ©visions Ă©laborer, seule et sans ligne directrice, une proposition de COM, qui reflĂšte la seule vision entreprenariale du groupe audiovisuel public
 et que l’État peut d’autant plus facilement juger insuffisante qu’il n’a en rien contribuĂ© Ă  son succĂšs. Incapables de fournir une analyse unique et une approche stratĂ©gique d’actionnaire, les diffĂ©rentes autoritĂ©s de tutelle sont les premiĂšres responsables des retards pris dans l’élaboration du COM. Ce constat rejoint d’ailleurs ceux, plus gĂ©nĂ©raux, d’absence de vision stratĂ©gique unifiĂ©e de l’État–actionnaire et de dĂ©ficience de la gouvernance publique dans la dĂ©finition de ce que devrait ĂȘtre une politique industrielle des mĂ©dias. Pour autant, les engagements d’économies sont trop faibles dans la proposition de France TĂ©lĂ©visions, et fondĂ©s en rĂ©alitĂ© sur des engagements de moindres dĂ©penses par rapport Ă  la tendance et non sur des Ă©conomies rĂ©elles. Dans le domaine de la gestion Ă©galement, les ambitions du groupe sont trop elliptiques. La maĂźtrise Ă©voquĂ©e de la masse salariale n’est assortie d’aucune prĂ©cision permettant d’en apprĂ©cier la vraisemblance. Les ambitions du groupe en matiĂšre de politique de ressources humaines et notamment d’évolution des mĂ©tiers de l’audiovisuel ne sont pas suffisamment explicitĂ©es, de sorte qu’aucun suivi prĂ©cis ne pourra en ĂȘtre effectuĂ©. Votre Rapporteur spĂ©cial estime, dans ces conditions, que chacun des objectifs d’amĂ©lioration de la gestion devrait ĂȘtre assorti d’élĂ©ments prĂ©cis permettant un suivi et une Ă©valuation. Surtout, le plan d’affaires sur la durĂ©e du COM prĂ©sentĂ© dans la proposition de France TĂ©lĂ©visions, plan qui est d’ailleurs fondĂ© sur une Ă©volution probablement sous-estimĂ©e des recettes publicitaires, aboutit Ă  un rĂ©sultat cumulĂ© avant impĂŽt du groupe dĂ©ficitaire de 235,8 millions pour la pĂ©riode 2006–2010... et ce, sans mĂȘme prendre en compte les besoins spĂ©cifiques ! Pour ces besoins sous-titrage en faveur des sourds et des malentendants, mise en place de la haute dĂ©finition
, France TĂ©lĂ©visions demande un financement complĂ©mentaire. Toutes les Ă©nergies doivent dĂ©sormais ĂȘtre mobilisĂ©es pour permettre l’approbation d’un projet de COM par le conseil d’administration de France TĂ©lĂ©visions en dĂ©cembre prochain, en vue de la consultation du comitĂ© d’entreprise par le groupe et du Parlement par le Gouvernement dĂ©but 2007. On a dĂ©jĂ  dit, en effet, que les retards pris rendaient artificielle la date de dĂ©part du COM 2006 fixĂ©e dans le projet d’avril dernier. Aussi l’objectif doit-il ĂȘtre de signer un COM pour la pĂ©riode 2007–2011, cohĂ©rente avec le terme du mandat actuel du prĂ©sident de France TĂ©lĂ©visions 2010, un prĂ©sident nouvellement nommĂ© n’ayant en tout Ă©tat de cause ni le temps ni les moyens de nĂ©gocier dĂšs son arrivĂ©e un nouveau COM avec l’État. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, diffĂ©rents groupes de travail ont Ă©tĂ© mis en place pour tenter d’aboutir d’ici la fin dĂ©cembre Ă  un vĂ©ritable projet opĂ©rationnel. Votre Rapporteur spĂ©cial souhaite en tout cas que le contrat d’objectifs et de moyens entre France TĂ©lĂ©visions et l’État puisse ĂȘtre rapidement conclu, pour que le groupe dispose, pour les annĂ©es Ă  venir, d’une lisibilitĂ© accrue tant sur ses objectifs que sur ses moyens. f Radio France Internationale un COM lointain mais plus que jamais nĂ©cessaireRadio France Internationale RFI ne dispose toujours pas de COM il s’agit, rappelons-le, d’une situation illĂ©gale. Mais cet Ă©tat de fait reflĂšte un problĂšme en rĂ©alitĂ© plus profond, une question prĂ©alable celle de la vision stratĂ©gique de l’État sur le rĂŽle et l’avenir de RFI. Certes, l’assainissement de la situation financiĂšre de la sociĂ©tĂ© a constituĂ© un prĂ©alable, ces derniĂšres annĂ©es, Ă  l’engagement d’une rĂ©flexion approfondie sur ses grands axes de dĂ©veloppement stratĂ©giques. Certes, un projet de contrat d’objectif et de moyen entre l’État et RFI est en cours de prĂ©paration. Parmi ses grands axes pourraient ainsi figurer la dĂ©finition de zones prioritaires de diffusion sur lesquelles RFI devra concentrer ses efforts, une rĂ©organisation de son dispositif en langues Ă©trangĂšres avec notamment le dĂ©veloppement de son offre sur l’internet, l’harmonisation de la ligne Ă©ditoriale de ses antennes, sa coordination avec les autres acteurs de l’audiovisuel extĂ©rieur ou encore la modernisation de sa gestion. Mais si les discussions avec les tutelles existent, elles n’ont pour l’instant pas permis de clarifier l’ensemble des questions stratĂ©giques de RFI, telles que les publics auxquels la sociĂ©tĂ© doit s’adresser, les zones d’actions dans lesquelles elle doit diffuser ses programmes, ou encore les langues et les supports de diffusion
 Sans rĂ©ponse claire Ă  ces questions, il est illusoire de croire que la conclusion d’un COM assurera l’avenir pĂ©renne de RFI. Votre Rapporteur spĂ©cial attend de l’État qu’il prenne ses responsabilitĂ©s pour moderniser ce grand groupe public audiovisuel. g TV5 Monde pour un COM supranational ?S’il n’existe pas de projet de contrat d’objectifs et de moyens entre l’État français et TV5 Monde, on signalera toutefois qu’une telle initiative vient d’ĂȘtre lancĂ©e au niveau multilatĂ©ral. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, elle pourrait dĂ©boucher sur la signature d’un contrat entre l’ensemble des gouvernements bailleurs de fonds de TV5 Monde et l’opĂ©rateur
 signe supplĂ©mentaire de la pertinence de l’outil contractuel dans le secteur de l’audiovisuel public. * * * CHAPITRE DEUXIÈME LES ACTEURS DE L’AUDIOVISUEL PUBLIC FACE AUX MUTATIONS DU SECTEUR Le secteur audiovisuel fait face Ă  une sĂ©rie de mutations qui influent fortement, par leur ampleur et leur coĂ»t, sur les entreprises audiovisuelles publiques numĂ©rique, haute dĂ©finition, tĂ©lĂ©vision mobile, interactivitĂ©, diversification des services, concurrences nationales et internationales Celles-ci, pour rester compĂ©titives et maintenir une offre publique de qualitĂ©, doivent opĂ©rer des choix stratĂ©giques, que l’État–actionnaire doit valider et dont il doit garantir le financement pĂ©renne. Il en va de l’avenir du service public audiovisuel. I.– UNE NÉCESSAIRE REFONDATION DE L’AUDIOVISUEL EXTÉRIEUR L’audiovisuel français extĂ©rieur fait l’objet de nombreuses critiques liĂ©es Ă  l’empilement des structures, aux coĂ»ts de fonctionnement, Ă  l’adĂ©quation insuffisante des modes de communication aux usages de chaque rĂ©gion du monde ou encore Ă  l’absence de synergies entre des intervenants Ă  vocations complĂ©mentaires. Si des synergies sont possibles entre tous ces acteurs, elles ne peuvent se mettre en Ɠuvre sans une unification du discours de l’État–actionnaire, dont la stratĂ©gie et les orientations apparaissent souvent opaques voire contradictoires. A.– UN PANORAMA FOISONNANT1.– Le constat unanime d’une certaine dispersiona La multiplicitĂ© des intervenants face Ă  l’absence de pilotageLa question du champ de l’audiovisuel extĂ©rieur est complexe et dĂ©licate. Si le groupe RFI et TV5 Monde assurent clairement une mission liĂ©e Ă  politique audiovisuelle extĂ©rieure de la France, la rĂ©flexion devient plus subtile quand on analyse le rĂŽle d’opĂ©rateurs comme MĂ©di 1 ou RMC Moyen-Orient, et quand envisage surtout d’y inclure des chaĂźnes comme France 24 et ARTE. Et l’on ne saurait oublier le rĂŽle pivot jouĂ© par Canal France International CFI et mĂȘme par le prestataire d’informations qu’est l’Agence France–Presse
 Aussi le panorama simple dessinant un audiovisuel extĂ©rieur composĂ© de trois opĂ©rateurs complĂ©mentaires RFI pour la radio, TV5 pour la tĂ©lĂ©vision et CFI pour la coopĂ©ration audiovisuelle est-il largement remis en cause par l’émergence de nouveaux intervenants et l’évolution profonde des supports de diffusion. France 24, qui Ă©chappe largement au contrĂŽle des administrations assurant la tutelle des opĂ©rateurs audiovisuels, se veut une chaĂźne d’information – dont la cible n’est pas la France et la langue pas forcĂ©ment française – plus qu’un opĂ©rateur extĂ©rieur
 lĂ  oĂč un organe comme TV5, par exemple, se prĂ©sente comme une chaĂźne francophone, gĂ©nĂ©raliste et multilatĂ©rale. Quant Ă  ARTE, elle est moins un opĂ©rateur extĂ©rieur de l’audiovisuel français que la rĂ©union d’une chaĂźne française et d’une chaĂźne allemande 29. Cependant, la vraie question n’est pas tant celle du nombre ou de la stratification des outils que de la cohĂ©rence entre ces diffĂ©rents acteurs. Or, cette mise en cohĂ©rence n’est pas assurĂ©e par les tutelles. L’audiovisuel extĂ©rieur souffre, Ă  l’évidence, d’une dĂ©ficience de pilotage politique et administratif. De plus, le Conseil de l’audiovisuel extĂ©rieur de la France ayant cessĂ© d’exister, certaines entreprises doivent parfois dialoguer avec deux, trois ou quatre administrations diffĂ©rentes, dont le discours n’est pas toujours clair et cohĂ©rent direction de l’audiovisuel de la direction gĂ©nĂ©rale de la coopĂ©ration internationale et du dĂ©veloppement DGCID du ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres, direction du dĂ©veloppement des mĂ©dias DDM du ministĂšre de la Culture et de la communication, direction du budget et Agence des participations de l’État du ministĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie. RFI est l’une des victimes les plus flagrantes de cet empilement des tutelles qui vient amplifier l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© des financements publics l’affectant dĂ©jĂ  subvention budgĂ©taire et affectation de redevance. b La complexitĂ© des circuits financiersL’absence de cohĂ©rence se ressent Ă©galement au niveau des types de financement. Si ARTE–France est financĂ©e grĂące Ă  la redevance audiovisuelle, RFI est dotĂ©e Ă  la fois par affectation du produit de la redevance et par subvention budgĂ©taire
 alors que TV5 Monde n’est subventionnĂ©e que par le programme Audiovisuel extĂ©rieur. Quant Ă  France 24, elle bĂ©nĂ©ficie d’un financement assurĂ© par un programme dĂ©diĂ© au sein de la mission MĂ©dias. Les circuits de financement se complexifient quand on considĂšre la place qu’occupe France TĂ©lĂ©visions elle-mĂȘme affectataire de l’essentiel du produit de la redevance dans ce systĂšme. France TĂ©lĂ©visions est, en effet, au cƓur de presque tous les dispositifs capitalistiques des opĂ©rateurs extĂ©rieurs. Le groupe public participe ainsi Ă  hauteur de 4 millions d’euros dans le budget de TV5 Monde, dont il possĂšde 57 % du capital, et il dĂ©tient 45 % du capital social de ARTE–France, cette derniĂšre Ă©tant actionnaire Ă  hauteur de 12,5 % dans TV5 Monde, de 11 % dans France 4 et de 25 % dans CFI
 CFI dont France TĂ©lĂ©visions dĂ©tient les 75 % restant depuis quatre ans et vers lequel le groupe a transfĂ©rĂ© toutes ses activitĂ©s de coopĂ©ration tĂ©lĂ©visuelle. France TĂ©lĂ©visions dĂ©tient de plus, Ă  paritĂ© avec TF1, la sociĂ©tĂ© anonyme France 24, ainsi que 23,69 % de Euronews 30. De plus, votre Rapporteur spĂ©cial tient Ă  souligner l’effet dĂ©vastateur des mesures de rĂ©gulation sur le programme Audiovisuel extĂ©rieur. Ce programme a ainsi subi un montant de rĂ©serve Ă©gal Ă  5 % des crĂ©dits, finalement annulĂ©s. La logique de rĂ©gulation uniforme par programme s’adapte mal Ă  la nature de ce programme, qui ne regroupe que des opĂ©rateurs industriels Ă  commencer par RFI et TV5, contrairement aux autres programmes du budget l’État qui comportent Ă  la fois des dĂ©penses de personnel, de fonctionnement, d’investissement et d’intervention. Cela oblige, en cas de rĂ©gulation sur le programme Audiovisuel extĂ©rieur, Ă  affecter nĂ©cessairement les crĂ©dits d’intervention, les effets d’un gel ne pouvant ĂȘtre reportĂ©s sur des crĂ©dits de fonctionnement. Le taux de gel devrait ĂȘtre le mĂȘme que celui appliquĂ© sur les salaires des agents publics. D’ailleurs, votre Rapporteur spĂ©cial tient Ă  rappeler que la Deutsche Welle allemande, qui est un opĂ©rateur radio et tĂ©lĂ©visuel et qui a pourtant connu un plan d’économies en 2000, conserve, avec un budget de 265 millions d’euros pour l’exercice 2004–2005, des moyens supĂ©rieurs aux dotations cumulĂ©es de TV5, CFI, RFI et MĂ©di 1. Quant au financement public de RFI, il s’élevait Ă  125,74 millions d’euros en 2005
 lĂ  oĂč celui du BBC World Service, la radio internationale britannique qui est son homologue outre-manche, est de 357,75 millions d’euros pour l’exercice 2004–2005. Cela Ă©tant, il est important de rappeler que la question des moyens ne peut ĂȘtre apprĂ©hendĂ©e indĂ©pendamment de celle des objectifs et des missions que l’on assigne aux opĂ©rateurs. c Une dimension multimĂ©dia » encore mal apprĂ©hendĂ©ePour assurer le rayonnement de ses idĂ©es, de sa culture et de sa langue dans le monde, la France doit s’appuyer sur les trois mĂ©dias de masse audiovisuels, complĂ©mentaires par leurs modes de consommation la radio, la tĂ©lĂ©vision satellitaire et l’internet. Si chacun des trois mĂ©dias dispose d’atouts propres et permet plus particuliĂšrement de toucher des publics et des zones spĂ©cifiques, c’est leur mise en cohĂ©rence qui constitue la clef du dĂ©veloppement des opĂ©rateurs de l’audiovisuel extĂ©rieur. En particulier, le modĂšle traditionnel de la radio internationale, nĂ© de la guerre froide et sur lequel repose encore largement l’organisation de RFI, ne correspond plus Ă  l’état du monde ni aux modes de consommation actuels de la radio 31. Il doit aujourd’hui ĂȘtre fondamentalement remis en question afin de s’adapter aux attentes de publics beaucoup plus exigeants qu’auparavant, dans le contexte d’une offre mĂ©diatique sans cesse croissante, en concurrence directe non plus seulement avec les autres grandes radios internationales, mais aussi avec des radios locales trĂšs professionnelles
 et surtout avec les mĂ©dias plus rĂ©cents tĂ©lĂ©vision, internet, et d’une certaine maniĂšre le tĂ©lĂ©phone mobile qui traversent dĂ©sormais les frontiĂšres et dont la consommation progresse chaque annĂ©e de façon soutenue. Votre Rapporteur spĂ©cial relĂšve d’ailleurs qu’il n’existe aucune politique de la prĂ©sence française sur l’internet et aucun outil performant pour diffuser les valeurs de la France, ses dĂ©bats, ses messages, ses positions, son regard sur le monde
 On rappellera que l’an dernier, le SĂ©nat avait dĂ©cidĂ© de supprimer la dotation allouĂ©e au projet de portail francophone IdĂ©es de France », que l’AssemblĂ©e nationale avait acceptĂ© de soutenir en maintenant la subvention budgĂ©taire proposĂ©e dans le projet de loi de finances pour 2006. Or, l’internet, par ses caractĂ©ristiques techniques, Ă©conomiques et sociologiques, est devenu en quelques annĂ©es un mĂ©dia transfrontiĂšre encore plus efficace que la tĂ©lĂ©vision et la radio. En touchant plus d’un milliard d’internautes fin 2006, il n’est plus rĂ©servĂ© aux pays trĂšs dĂ©veloppĂ©s d’AmĂ©rique du Nord, d’Asie et d’Europe. Toutes les Ă©tudes dĂ©montrent, en effet, que, parmi les Ă©lites Ă©conomiques et intellectuelles, et de plus en plus parmi les classes moyennes, l’utilisation de l’internet se banalise et se dĂ©veloppe trĂšs rapidement, y compris dans les pays Ă©mergents ou en dĂ©veloppement. 2.– Des missions enchevĂȘtrĂ©esa Une ambition trĂšs vasteÀ en croire le projet annuel de performances, l’audiovisuel extĂ©rieur vise deux objectifs majeurs – rendre les plus accessibles possible les programmes audiovisuels français aux publics Ă©trangers et Ă  nos compatriotes expatriĂ©s ; – favoriser la diversitĂ© culturelle et la dĂ©mocratisation des pays du Sud en soutenant la modernisation de leurs mĂ©dias. Intimidante est cette mission au regard du quotidien dans lequel les opĂ©rateurs de l’audiovisuel extĂ©rieur se dĂ©battent pour assurer leur survie et boucler leur budget chaque annĂ©e. De plus, les opĂ©rateurs de l’audiovisuel extĂ©rieur peuvent se voir assignĂ©s des missions trĂšs spĂ©cifiques, comme la promotion de la francophonie pour TV5 ou celle d’un point de vue français sur l’actualitĂ© du monde pour France 24
 sans que ces missions puissent toujours ĂȘtre traduites en objectifs opĂ©rationnels parfaitement clairs. b Les enjeux spĂ©cifiques de la coopĂ©ration audiovisuelle CFIDans le cadre de sa politique de coopĂ©ration, l’État s’est donnĂ© comme objectif de contribuer Ă  la diversitĂ© culturelle du monde, en aidant les pays du Sud Ă  construire leur propre industrie de l’image, et de favoriser la dĂ©mocratisation de ces pays en soutenant l’émergence de nouvelles gĂ©nĂ©rations de journalistes et de mĂ©dias indĂ©pendants. Forte de la reconnaissance de son expertise, la France noue ainsi des relations de confiance et assure une prĂ©sence au cƓur des systĂšmes mĂ©diatiques de ces pays. Pour ce faire, l’État finance notamment l’opĂ©rateur de coopĂ©ration audiovisuelle Canal France International CFI, partenaire de plus de cent tĂ©lĂ©visions publiques et privĂ©es dans le monde 32, qui occupe une place originale dans le dispositif mis en place pour soutenir l’influence française et promouvoir l’audiovisuel français dans les pays les plus dĂ©favorisĂ©s, grĂące notamment Ă  la fourniture de programmes français gratuits aux tĂ©lĂ©visions des pays du Sud banque de programmes CFI-Pro. Fin 2003, aprĂšs l’abandon de toute activitĂ© de diffusion, dĂ©sormais assurĂ©e en totalitĂ© par TV5 Monde, CFI a Ă©tĂ© recentrĂ© autour de deux mĂ©tiers la fourniture de programmes français aux pays Ă©mergents principalement en Afrique et la coopĂ©ration expertise, ingĂ©nierie, formation avec ces tĂ©lĂ©visions. L’objectif de cette rĂ©organisation est de confĂ©rer Ă  CFI le rĂŽle de coordinateur dans le domaine de la coopĂ©ration tĂ©lĂ©visuelle internationale et particuliĂšrement dans celui du conseil, de la formation, de l’assistance technique et de l’ingĂ©nierie en direction des pays Ă©mergents. Au-delĂ  et en complĂ©ment des financements engagĂ©s, notamment dans le cadre des Fonds de solidaritĂ© prioritaire FSP, CFI doit, pour mener Ă  bien ces nouveaux projets, rechercher des cofinancements multilatĂ©raux et des partenariats. Il reste essentiel de renforcer et d’amĂ©liorer la banque de programmes de CFI, en recherchant une meilleure adĂ©quation de l’offre de programmes Ă  la demande des tĂ©lĂ©visions partenaires, ce qui passe par une connaissance encore plus prĂ©cise, en amont des achats, des besoins rĂ©els de ces tĂ©lĂ©visions, et, en aval, par une mesure rĂ©guliĂšre des taux de reprise et de l’impact des programmes diffusĂ©s. Dans le cadre du plan d’économies de CFI, il est proposĂ© de rĂ©duire lĂ©gĂšrement la subvention du programme Audiovisuel extĂ©rieur Ă  19,5 millions d’euros en 2007 – 2,2 % par rapport Ă  2006. Ces crĂ©dits devraient permettre l’élaboration d’une stratĂ©gie de coopĂ©ration et la rationalisation de l’offre de CFI aux tĂ©lĂ©visions partenaires d’Asie, ainsi qu’une rĂ©flexion sur l’envoi de programmes Ă  partir d’autres supports afin de rendre la banque de programmes plus attractive pour les tĂ©lĂ©visions partenaires, tout en reconduisant les actions de coopĂ©ration et en assurant un meilleur suivi des manifestations sportives d’envergure internationale. L’offre des programmes en versions anglaise, portugaise et arabe devrait Ă©galement ĂȘtre accrue. c La place du partenariat franco-marocain MĂ©di 1Dans le mĂȘme esprit, l’État continue de soutenir, dans le cadre d’un partenariat Ă  long terme avec le Maroc, la radio maroco-française MĂ©di 1. Cette chaĂźne, prĂ©sente notamment au Maghreb, est une radio gĂ©nĂ©raliste bilingue français–arabe d’information internationale, de service et de divertissement, qui est nĂ©e en 1980 d’une volontĂ© politique commune des deux États 33. Elle couvre ainsi l’ensemble du bassin mĂ©diterranĂ©en occidental, c’est-Ă -dire le grand Maghreb. En outre, elle a nĂ©gociĂ© des reprises de ses programmes d’actualitĂ© sur de nombreuses stations FM en France. Son audience totale est d’environ 25 millions d’auditeurs, notamment en AlgĂ©rie oĂč elle est trĂšs suivie. Cette audience est probablement renforcĂ©e par sa prĂ©sence sur l’internet. Le soutien français passe par la compagnie internationale de radio–tĂ©lĂ©vision CIRT cette sociĂ©tĂ© française filiale Ă  100 % de la Sofirad est l’actionnaire français de MĂ©di 1. La CIRT porte la participation de 49 % du groupe Sofirad dans le capital de RMI Radio MĂ©diterranĂ©e Internationale, sociĂ©tĂ© de droit marocain dont le siĂšge est Ă  Tanger. Elle porte Ă©galement une participation de 35 % dans le capital de RĂ©gie 3, sociĂ©tĂ© de droit marocain qui est la rĂ©gie publicitaire de RMI et de la chaĂźne de tĂ©lĂ©vision marocaine 2M. La CIRT a pour fonction essentielle de gĂ©rer le personnel français dĂ©tachĂ© auprĂšs de RMI, soit 18 personnes journalistes et techniciens le programme Audiovisuel extĂ©rieur prĂ©voit de reconduire en 2007 la dotation de 1,07 million d’euros. Le projet medi 1 sat ÉvoquĂ© au plus haut niveau politique des deux pays Ă  l’automne 2001, ce projet de crĂ©ation d’une chaĂźne de tĂ©lĂ©vision satellitaire d’information franco-arabe centrĂ©e sur le Maghreb a progressĂ© Ă  partir de l’étĂ© 2003 et a trouvĂ© sa cohĂ©rence. Sa dĂ©finition est presque achevĂ©e, la chaĂźne devant ĂȘtre lancĂ©e d’ici la fin de l’annĂ©e. AdossĂ©e Ă  RMI, associant des journalistes français, marocains et du Maghreb, reposant sur une programmation originale en français et en arabe et ayant une vocation rĂ©gionale mĂ©diterranĂ©enne, MĂ©di 1 Sat a pour vocation de renouveler l’offre audiovisuelle dans le monde arabe, dominĂ©e par les chaĂźnes locales ou des chaĂźnes internationales basĂ©es dans le Golfe. Le plan de financement qui repose sur l’hypothĂšse d’une montĂ©e en puissance des recettes publicitaires fait apparaĂźtre pour les trois premiĂšres annĂ©es suivant le lancement un besoin incompressible de 25 millions d’euros de fonds propres et quasi-fonds propres Ă  rĂ©unir en partenariat entre la France et le Maroc. L’apport de la France est de 7,5 millions d’euros rĂ©partis comme suit – concours de 3 millions d’euros de l’Agence française de dĂ©veloppement AFD, en quasi-fonds propres, Ă  MĂ©di 1 Sat ; – apport de 3 millions d’euros, en fonds propres, de la Caisse des dĂ©pĂŽts et consignations au capital de la CIRT pour permettre Ă  celle-ci d’entrer au capital de MĂ©di 1 Sat ; – apport en fonds propres du programme Audiovisuel extĂ©rieur, sous forme de subvention de 1,5 million d’euros Ă  la CIRT pour la participation de celle-ci au capital de MĂ©di 1 Sat. L’apport en capital a Ă©tĂ© versĂ© en deux tranches, l’une fin 2004 l’autre en 2006 ce qui explique qu’aucun crĂ©dit ne soit prĂ©vu en 2007 sur ce programme. La CIRT porte ainsi la part française au capital de MĂ©di 1 Sat de 15 millions d’euros au total Ă  hauteur de 4,5 millions d’euros soit 30 %. CĂŽtĂ© marocain les actionnaires sont Maroc TĂ©lĂ©com et Fipar Holding, filiale de la Caisse des dĂ©pĂŽts marocaine 56 % du capital. La radio franco-marocaine RMI dĂ©tient pour sa part 14 % du capital. La chaĂźne prĂ©voit d’employer Ă  terme une soixantaine de journalistes dont la formation bĂ©nĂ©ficiera d’un appui de la France Ă  hauteur de 1 million d’euros sur trois ans 0,3 million d’euros ont Ă©tĂ© engagĂ©s en 2006. 3.– Une rationalisation est possiblea À l’ùre du multimĂ©dia, il faut mettre en synergie les acteurs de l’audiovisuel extĂ©rieur Chacun des opĂ©rateurs de l’audiovisuel extĂ©rieur ayant des forces et des faiblesses propres, il est raisonnable de croire que des synergies sont possibles. Elles passent soit par le renforcement des coopĂ©rations existantes y compris celles avec l’AFP et les chaĂźnes de France TĂ©lĂ©visions, soit par la mise en place de synergies nouvelles. Cette derniĂšre orientation est indispensable au moment oĂč France 24 va s’inscrire dans un paysage audiovisuel dĂ©jĂ  riche en intervenants. La chaĂźne française d’information internationale doit notamment renforcer ses partenariats avec l’AFP pour l’achat d’images et de dĂ©pĂȘches et pour la mise en place de correspondants audiovisuels dans quelques bureaux de l’agence ; avec l’Agence d’images internationale AITV, agence de presse de RFO, pour l’achat d’images ; ou encore avec TV5, RFI et les chaĂźnes parlementaires. Mais s’il est crucial que tous les acteurs travaillent ensemble, la rĂ©flexion sur les synergies ne saurait s’en tenir aux seuls Ă©changes de prestations et de services entre les opĂ©rateurs existants. Votre Rapporteur spĂ©cial considĂšre, Ă  plus long terme, que l’intĂ©gration de chaque mĂ©dia autonome au sein de structures multimĂ©dias » favorisant la diffusion simultanĂ©e d’un mĂȘme message sur plusieurs supports avec une seule unitĂ© de production et plusieurs outils de diffusion est une Ă©volution inĂ©luctable, qui doit guider la rĂ©forme du paysage audiovisuel extĂ©rieur de la France, quitte par exemple Ă  envisager un jour la crĂ©ation d’un groupe audiovisuel unique. b Il faut doter l’audiovisuel extĂ©rieur d’un pilotage politiqueCertes, la crĂ©ation de la mission interministĂ©rielle MĂ©dias dans le projet de loi de finances pour 2007 est de nature Ă  permettre aux diffĂ©rentes administrations chargĂ©es d’engager la dĂ©pense publique en matiĂšre d’audiovisuel extĂ©rieur de travailler de façon plus concertĂ©e. Mais, au-delĂ  de la question des sources de financement, le choix d’adosser TV5, CFI et maintenant France 24, Ă  France TĂ©lĂ©visions, de mĂȘme que l’existence d’une convention collective commune et de problĂšmes sociaux trĂšs liĂ©s Ă  RFI et Radio France, imposent un pilotage politique qui associe, au minimum, le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres et le ministĂšre de la Culture et de la communication. Faute de formalisation, ce pilotage ne fonctionne pas aujourd’hui de façon satisfaisante, alors mĂȘme que la DDM pourrait de son cĂŽtĂ© mobiliser les opĂ©rateurs nationaux tout en assurant une Ă©volution harmonieuse de l’ensemble du secteur
 tandis que la DGCID serait de son cĂŽtĂ© en mesure d’analyser la demande des publics Ă©trangers et de mettre son rĂ©seau au service des opĂ©rateurs. Votre Rapporteur spĂ©cial soutient pour ce faire la recrĂ©ation – sous une forme rĂ©novĂ©e – du Conseil de l’audiovisuel extĂ©rieur de la France CAEF, dispositif qui n’a plus Ă©tĂ© rĂ©uni depuis 1996 du fait de sa lourdeur. Aujourd’hui, les rĂ©unions interministĂ©rielles ponctuelles et les consultations entre services ne suffisent pas Ă  assurer une coordination propre Ă  permettre d’anticiper sur les problĂšmes et d’impulser une vĂ©ritable stratĂ©gie cohĂ©rente. Afin de renforcer l’information du Parlement et de servir de support Ă  l’unification du discours de l’État et Ă  la mise en cohĂ©rence des diffĂ©rents opĂ©rateurs de l’audiovisuel extĂ©rieur, votre Rapporteur spĂ©cial propose la crĂ©ation d’une annexe annuelle au projet de loi de finances jaune ou document de politique transversale sur l’activitĂ© et les moyens de l’audiovisuel extĂ©rieur. Ce document unique retracerait, bien au-delĂ  du seul programme Audiovisuel extĂ©rieur, les crĂ©dits publics affectĂ©s, directement ou indirectement, aux opĂ©rateurs audiovisuels et comporterait une information actualisĂ©e sur les synergies mises en Ɠuvre entre les diffĂ©rents intervenants et sur le positionnement des tutelles de chaque entreprise. B.– RADIO FRANCE INTERNATIONALE UNE MUTATION INÉLUCTABLE1.– Le recul du financement public n’est pas la traduction d’une stratĂ©gieIl est proposĂ© de rĂ©duire la subvention du programme Audiovisuel extĂ©rieur Ă  69,63 millions d’euros en 2007 – 3,2 % par rapport Ă  la loi de finances initiale pour 2006, alors que l’affectation du produit de la redevance audiovisuelle augmente de 1,2 %, Ă  57,72 millions d’euros. Au total, le soutien de l’État Ă  Radio France Internationale RFI s’inscrit, pour la premiĂšre de son histoire, en rĂ©gression – 1,2 % par rapport Ă  2006 pour atteindre 127,35 millions d’euros. La baisse du budget de RFI est d’autant plus inĂ©dite qu’elle contraste avec la hausse moyenne de la redevance audiovisuelle + 2,5 %. Cette proposition, inscrite dans le projet annuel de performances PAP pour 2007, est expliquĂ©e par une Ă©conomie annuelle pĂ©renne de 5 millions » d’euros sur la facture ondes courtes TDF. Cet argument doit ĂȘtre relativisĂ©, l’économie sur TDF ayant dĂ©jĂ  Ă©tĂ© largement consommĂ©e, dans la mesure oĂč le budget 2006 n’avait Ă©tĂ© Ă©quilibrĂ© qu’en anticipant 2,4 millions d’euros sur les ondes courtes. AprĂšs le gel au titre des mesures pour les banlieues 0,21 million d’euros et de la rĂ©serve de 5 % 2,38 millions d’euros, l’économie rĂ©siduelle se trouve plus qu’entiĂšrement absorbĂ©e, le total des ressources publiques s’établissant Ă  125,4 millions d’euros en 2006 contre 128 millions d’euros prĂ©vus en loi de finances initiale. L’exercice 2006 risque donc dĂ©jĂ  d’ĂȘtre dĂ©ficitaire en exploitation. Et il sera lourdement dĂ©ficitaire en termes comptables, puisque la nĂ©gociation avec TDF a conduit Ă  accepter, en contrepartie de la baisse des tarifs, un abandon de crĂ©ances de 10,9 millions d’euros qu’il faudra passer en perte exceptionnelle sur l’exercice. Du point de vue de l’entreprise, la justification de cet abandon de crĂ©ances disparaĂźt dĂšs lors que l’État rĂ©cupĂšre de maniĂšre indirecte l’économie rĂ©alisĂ©e par RFI qui en Ă©tait la contrepartie. Cette situation aboutit donc un rĂ©sultat paradoxal la renĂ©gociation Ă  la baisse des ondes courtes avec TDF se traduirait en fait par un appauvrissement de RFI ! Pour justifier la diminution proposĂ©e des subventions Ă  RFI, le PAP 2007 mentionne, de façon un peu plus convaincante, que le groupe dispose encore de marges d’économies potentielles importantes, ce qui permet une diminution de sa dotation budgĂ©taire ». Mais cette maniĂšre de faire rĂ©vĂšle aussi une forme d’hypocrisie votre Rapporteur spĂ©cial s’étonne, en effet, de ce que la diminution des crĂ©dits budgĂ©taires intervienne sans qu’une feuille de route claire ne soit donnĂ©e Ă  la direction du groupe, par exemple dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens. En particulier, votre Rapporteur spĂ©cial souligne que, pour financer l’indispensable effort de rĂ©organisation en profondeur, les marges de redĂ©ploiement reposent essentiellement sur des coĂ»ts de personnel rĂ©dactions en langue Ă©trangĂšre, rĂ©daction en français, personnels techniques. Elles ne dĂ©gageraient donc des Ă©conomies significatives que par l’intermĂ©diaire d’un plan social
 que les tutelles ont jusqu’ici toujours exclu. Cette situation ne peut qu’inquiĂ©ter au vu de la somme de qualitĂ©s et de talents rĂ©unis au sein du groupe RFI. Pour autant – comme on l’a exposĂ© plus haut –, le contexte technologique et financier oblige RFI Ă  Ă©voluer en profondeur et Ă  adapter sa politique de gestion des effectifs. On prĂ©cisera que, si les prĂ©visions d’exĂ©cution du budget 2006 font Ă©tat de recettes et de dĂ©penses fixĂ©es Ă  130,21 millions d’euros, le rĂ©alisĂ© 2005 a portĂ© les dĂ©penses Ă  131,49 millions d’euros dont 64,5 millions d’euros pour la masse salariale, 27,7 millions d’euros pour la diffusion et 9,64 millions d’euros pour les programmes pour seulement 130,78 millions d’euros de recettes. 2.– Une situation sociale toujours tendueLa question des effectifs est Ă©videmment une dimension qui, loin d’ĂȘtre nouvelle, continue de peser fortement dans les marges de manƓuvre et les perspectives de rĂ©forme de RFI. Au 31 dĂ©cembre 2005, l’entreprise employait personnes dont 795 CDI contre un an plus tĂŽt dont 809 CDI. La masse salariale des cinq derniĂšres annĂ©es a Ă©voluĂ© de 53,89 millions d’euros en 2001 Ă  61,92 millions d’euros en 2005. En 2005, 918 pigistes et 431 cachetiers ont travaillĂ© pour le compte de RFI, dont 586 Ă  l’étranger. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, le seul objectif tenable de rĂ©duction des effectifs sans recourir Ă  un plan social est de l’ordre de – 2 % par an. Au-delĂ , les tutelles devront prendre leurs responsabilitĂ©s et mener des rĂ©formes de plus grande ampleur. D’autant que la situation sociale reste tendue dans l’entreprise. On rappellera qu’à la suite du conflit de fĂ©vrier 2004 Ă  Radio France et RFI, les accords de levĂ©e de grĂšve prĂ©voyaient la mise en place d’un nouvel instrument salarial NIS applicable aux journalistes dĂšs 2005. Or, les nĂ©gociations qui ont eu lieu en octobre 2005 sur le NIS applicable aux journalistes de RFI ont Ă©tĂ© la raison principale de la tension sociale provoquĂ©e par les reprĂ©sentants des personnels techniques et administratifs PTA, ces derniers estimant que ce nouvel outil crĂ©ait un dĂ©sĂ©quilibre salarial entre les catĂ©gories de personnels. Le coĂ»t d’application du NIS aux journalistes s’est Ă©levĂ© Ă  euros pour la fin de l’annĂ©e 2005, la date d’effet de l’accord d’entreprise ayant Ă©tĂ© fixĂ©e au 1er juillet 2005. En 2006, on mentionnera la journĂ©e de mobilisation syndicale du 7 mars 2006, oĂč certaines organisations syndicales avaient dĂ©posĂ© un prĂ©avis de grĂšve ayant pour objet de s’associer Ă  la journĂ©e nationale liĂ©e au contrat premiĂšre embauche et qui a mobilisĂ© 5,2 % des personnels. Huit jours de grĂšve ont Ă©galement eu lieu du 28 mars au 12 avril, suite aux prĂ©avis dĂ©posĂ©s par l’ensemble des organisations syndicales de RFI 15 % en moyenne des personnels Ă©taient grĂ©vistes, avec une plus forte mobilisation les premiers jours du mouvement. La revendication portait principalement sur le nombre d’intĂ©grations en CDI des salariĂ©s en CDD, au cachet ou Ă  la pige, le principe d’un plan d’intĂ©gration ayant Ă©tĂ© prĂ©vu par accord d’entreprise du 8 dĂ©cembre 2005. Les nĂ©gociations ont abouti Ă  la signature d’un accord d’entreprise, signĂ© le 12 avril 2006 par la majoritĂ© des organisations syndicales de RFI. Cet accord subordonne les intĂ©grations en CDI Ă  des conditions d’anciennetĂ© et de rĂ©gularitĂ© de collaboration. Le plan d’intĂ©gration prĂ©voit deux Ă©tapes l’intĂ©gration en CDI de 53 salariĂ©s dont 23 au 1er juillet 2006 et 30 au 1er janvier 2007 et une nĂ©gociation avec les organisations syndicales en octobre 2006 portant sur des intĂ©grations en CDI supplĂ©mentaires 16 au minimum, rĂ©parties en 2007 et 2008. Ces intĂ©grations auront pour effet d’augmenter la masse salariale des permanents, avec application des dispositions conventionnelles, notamment celles concernant les Ă©volutions salariales dans le cadre des commissions paritaires annuelles. Le coĂ»t annuel s’élĂšve en 2006 Ă  euros. La contrepartie de ces intĂ©grations est la mise en place d’une organisation du travail conduisant Ă  un moindre recours aux CDD ou aux pigistes. Une rĂ©flexion est Ă©galement en cours au sein des directions et rĂ©dactions afin de mettre en place des systĂšmes de planification des absences congĂ©s, RTT avec le mĂȘme objectif de rĂ©duire l’appel aux CDD. 3.– Des orientations stratĂ©giques dĂ©terminantes pour l’avenir de RFIDans ce contexte, l’objectif du groupe ne devra plus ĂȘtre de rechercher une couverture mondiale par la voie hertzienne, mais d’optimiser l’impact de ses programmes, zone par zone, Ă  partir d’une analyse lucide du meilleur outil multimĂ©dia compte tenu des forces et des faiblesses de RFI. Ce processus doit conduire Ă  mettre fin Ă  l’éparpillement actuel des moyens, autour de deux principes – une prĂ©sence hertzienne renforcĂ©e diffusion 24h/24, dans des langues adaptĂ©es, enrichie de programmes de proximitĂ© dans les zones oĂč RFI a – ou pourrait avoir – un impact significatif ; – une prĂ©sence multilingue et enrichie sur l’internet en direction de toutes les zones oĂč la diffusion hertzienne est condamnĂ©e Ă  la marginalitĂ©. Cela passe nĂ©cessairement par une poursuite de l’effort de rĂ©forme de l’offre de programmes en langues Ă©trangĂšres. Dans le cadre du plan RFI 2006-2009 », cette rĂ©forme devrait dĂ©boucher sur un rééquilibrage entre production radio et production multimĂ©dia dans chaque rĂ©daction pour pouvoir dĂ©gager des journalistes vers la production de contenus web. Quant Ă  la filiale RMC Moyen-Orient cf. encadrĂ© ci-aprĂšs, il est prĂ©vu qu’elle participe Ă  la mise en place, sur nouveau site RFI, de contenus en arabe, prĂ©sentĂ©s en deux langues arabe et français. RFI a Ă©galement annoncĂ© vouloir redonner la prioritĂ© Ă  l’information sur les magazines et programmes culturels. Avec ces orientations, la vocation europĂ©enne de RFI pourrait s’en trouver valorisĂ©e, sur la base de ses trois atouts majeurs en Europe ses frĂ©quences dans une quinzaine de grandes villes, ses rĂ©dactions en langues Ă  Paris et ses filiales europĂ©ennes. Cette approche de RFI sur l’Europe est radicalement diffĂ©rente de celle de la BBC, qui vient de supprimer sept langues le grec, le slovĂšne, le bulgare, le tchĂšque, le hongrois, le slovaque et le croate. Dans la mesure oĂč toutes les rĂ©dactions europĂ©ennes ont vu s’arrĂȘter au 30 mars 2006 la diffusion en ondes courtes vers l’Europe, celles qui n’ont pas la chance de se trouver reliĂ©es Ă  une antenne se trouvent dĂ©sormais sans moyen de diffusion autre que l’internet. Le maintien d’une Ă©mission de radio reste justifiĂ© dĂšs lors qu’on trouve un dĂ©bouchĂ© local Ă  la production de RFI. C’est ainsi qu’a Ă©tĂ© créée une filiale serbe, qu’une frĂ©quence est sollicitĂ©e Ă  Varsovie, ou encore que des partenariats sont en nĂ©gociation Ă  Skopje et Ă  Berlin. ParallĂšlement, l’amorce d’un rĂ©seau europĂ©en a Ă©tĂ© constituĂ©e et permet de solliciter des subventions de la Commission europĂ©enne. S’agissant des langues prioritaires que sont les grandes langues vĂ©hiculaires anglais, arabe, espagnol, portugais, RFI va chercher Ă  accroĂźtre leur nombre d’heures de diffusion pour construire de vĂ©ritables radios. Quant aux autres langues dont la communication est souvent malaisĂ©e, RFI devra s’appuyer de plus en plus sur l’internet pour viser des cibles jeunes, modernes et mobiles, et la production devra ĂȘtre profondĂ©ment modifiĂ©e en consĂ©quence. Pour autant, il semble que RFI souhaite ouvrir deux ou trois bureaux Ă  l’étranger en 2007, afin notamment d’installer un correspondant permanent Ă  PĂ©kin, en coopĂ©ration avec France Info. Au-delĂ , l’objectif de la direction de RFI devrait ĂȘtre de transformer cette entreprise bi–mĂ©dia » radio et internet en pĂŽle multimĂ©dia de rĂ©fĂ©rence de l’audiovisuel extĂ©rieur, le tout en français et en langues Ă©trangĂšres. Cela passe notamment par une reprise du dĂ©ploiement numĂ©rique de RFI, afin que la numĂ©risation de RFI soit vraiment effective et opĂ©rationnelle Ă  la fin de l’annĂ©e 2006. La diffusion numĂ©rique implique donc la banalisation des supports et la mise en valeur des programmes. De fait, il est nĂ©cessaire et urgent pour RFI de concentrer le maximum de moyens sur l’internet, notamment autour de son site dont l’architecture a Ă©tĂ© repensĂ©e en 2005. Quant Ă  la rĂ©daction, elle pourrait ĂȘtre rĂ©organisĂ©e en huit services et trois antennes une antenne Monde, une antenne Afrique et une nouvelle antenne MultimĂ©dia. Pour alimenter ces antennes, la rĂ©daction pourrait se structurer selon huit pĂŽles thĂ©matiques culture, sport, sciences et Ă©conomie et gĂ©ographiques France, Europe, Afrique et AmĂ©rique/Asie/Proche-Orient. RMC Moyen-Orient Créée en 1972, RMC Moyen-Orient est la filiale arabophone de RFI au travers de la SOMERA, sociĂ©tĂ© qui diffuse RMC Moyen-Orient. ÉcoutĂ©e par 15 millions d’auditeurs dans l’ensemble du Moyen-Orient et des pays du Golfe et du Maghreb, RMC Moyen-Orient est devenue une radio du groupe RFI fin 1996. BasĂ©e Ă  Paris, Ă  la Maison de la Radio, elle diffuse l’ensemble de ses Ă©missions en arabe sur le Moyen-Orient, les pays du Golfe et, depuis dĂ©but mai 1999, sur les pays du Maghreb. RMC Moyen-Orient est composĂ©e d’une Ă©quipe de plus de 80 journalistes et correspondants Ă  travers le monde, assistĂ©s de techniciens travaillant Ă  la numĂ©risation de la radio. En novembre 2005, la grille de programmes a Ă©tĂ© modifiĂ©e en profondeur et la part des reportages a Ă©tĂ© augmentĂ©e, de mĂȘme que le nombre de magazines et modules. L’objectif recherchĂ© a Ă©tĂ© d’accentuer l’ouverture Ă  l’international, non seulement parce que la rĂ©gion attend une information non exclusivement rĂ©gionale, mais Ă©galement parce que l’auditoire de RMC Moyen-Orient s’est Ă©largi Ă  d’autres zones que le Proche et Moyen-Orient grĂące Ă  l’internet. Le direct est dĂ©sormais privilĂ©giĂ©, l’une des novations les plus importantes ayant Ă©tĂ© l’introduction d’une tranche d’informations culturelles de 13 h 30 Ă  14 heures heures de Paris. Au niveau des programmes, une rĂ©vision complĂšte s’est accompagnĂ©e d’un important effort en direction des jeunes pour lutter contre le vieillissement de l’auditoire de la station un Ă©lĂ©ment de cette politique a Ă©tĂ© la crĂ©ation d’un prix RMC–MO Musique pour les jeunes musiciens du processus euro mĂ©diterranĂ©en. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, la SOMERA reste en nĂ©gociation pour Ă©tendre son rĂ©seau de diffusion en Irak, en Mauritanie, au Soudan, dans les territoires palestiniens et au Liban. Afin d’accompagner la chaĂźne dans son processus de rĂ©novation, il est proposĂ© que le programme Audiovisuel extĂ©rieur alloue Ă  RMC Moyen-Orient une dotation de 4,77 millions d’euros en 2007, soit euros de plus qu’en 2006 + 11,7 %. C.– TV5 MONDE L’OUTIL FRANCOPHONE1.– Les moyensCréée en 1984, TV5 Monde est un outil singulier au sein de l’audiovisuel extĂ©rieur. MĂ©dia gĂ©nĂ©raliste, multilatĂ©ral et francophone, TV5 associe une dizaine de chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision partenaires 34. Elle est la seule chaĂźne au monde sur laquelle on ne diffuse aucune production d’origine anglo-saxonne. PrĂ©sente dans 163,5 millions de foyers 35 soit une population totale de 603 millions de tĂ©lĂ©spectateurs potentiels hors critĂšres linguistiques, son audience cumulĂ©e hebdomadaire est passĂ©e de 73 Ă  73,5 millions de tĂ©lĂ©spectateurs entre 2004 et 2005, avec une cible fixĂ©e Ă  75 millions en 2008. La chaĂźne a passĂ© des accords de distribution avec plus de rĂ©seaux cĂąblĂ©s et 36 bouquets satellitaires. Elle est devenue le deuxiĂšme rĂ©seau mondial de tĂ©lĂ©vision aprĂšs MTV. Au cours des quatre derniĂšres annĂ©es, les effectifs des services fonctionnels de TV5 sont restĂ©s pratiquement stables, le poids des structures dans les effectifs permanents Ă©tant en diminution. L’augmentation des effectifs a essentiellement concernĂ© des personnels opĂ©rationnels pour accompagner le dĂ©veloppement de la chaĂźne. Au total, TV5 comptait 236 personnes en CDI, ainsi que 76 ETP en CDD, intermittents et pigistes. Avec une contribution qui reprĂ©sente 83,6 % des contributions des gouvernements partenaires, la France finance actuellement plus de 76,5 % du budget de TV5, sa contribution totale au budget 2006 d’un montant total initial de 91,4 millions d’euros Ă©tant de 70 millions d’euros, alors que le financement des gouvernements suisse, belge, et canado–quĂ©bĂ©cois se monte Ă  13,7 millions d’euros et que les ressources propres s’élevent Ă  7,6 millions d’euros dont 3,49 millions d’euros de recettes publicitaires. Au sein de la contribution française, la subvention de l’État, inscrite en loi de finances initiale pour 2006 parmi les crĂ©dits de la mission Action extĂ©rieure de l’État, s’élevait Ă  62,72 millions d’euros, comme celle de 2005 auxquels il faut ajouter une subvention exceptionnelle d’un million d’euros versĂ©e fin 2005. De plus, pour faire face aux charges exceptionnelles liĂ©es Ă  la mutation de son dispositif technique et Ă  sa rĂ©implantation dans de nouveaux locaux, TV5 Monde a, avec l’accord du ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres, mobilisĂ© l’ensemble des reliquats budgĂ©taires dont elle disposait 36, soit 2,1 millions d’euros. En dĂ©but d’annĂ©e 2006, le Gouvernement a imposĂ© une rĂ©duction de 0,23 million d’euros afin de contribuer au financement du plan banlieues », ainsi qu’un gel de 2,95 millions d’euros, dans le cadre de la rĂ©serve. Ce gel a Ă©tĂ© levĂ© partiellement au mois d’aoĂ»t, Ă  hauteur de 2 millions d’euros. Le montant de la subvention annuelle est donc en rĂ©duction de 1,18 million d’euros par rapport au montant initial. Au contraire, les autres partenaires de TV5 Suisse, CommunautĂ© Française de Belgique, Canada et QuĂ©bec, ainsi que France TĂ©lĂ©visions ont tous accordĂ© un glissement de 2,5 % sur leurs contributions annuelles. Le QuĂ©bec et le Canada ont, par ailleurs, consenti des mesures nouvelles Ă  hauteur de euros, principalement destinĂ©es au dĂ©veloppement du sous-titrage. Aussi le dĂ©ficit prĂ©visionnel en 2006 devrait-il correspondre pratiquement au maintien du gel de la subvention du ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres. Or, il semble difficile pour TV5 de rĂ©duire ses dĂ©penses davantage, l’essentiel de son budget Ă©tant constituĂ© de coĂ»ts fixes, contractuels et pluriannuels. Ses seules dĂ©penses variables rĂ©sident dans ses coĂ»ts de programmes, dĂ©jĂ  limitĂ©s. Une dĂ©gradation de la programmation aurait immĂ©diatement des consĂ©quences sur le niveau des abonnements et des recettes publicitaires, et creuserait encore le dĂ©ficit. Sans Ă©voquer les risques d’éviction de la chaĂźne de ses rĂ©seaux de distribution, si son intĂ©rĂȘt commercial diminue. Le dĂ©ficit prĂ©visionnel Ă©quivalant au montant des capitaux propres, il pourrait devenir nĂ©cessaire de recapitaliser l’entreprise si une solution n’est pas trouvĂ©e pour rĂ©sorber le dĂ©ficit avant la clĂŽture des comptes. Dans ce contexte, l’annĂ©e 2007 sera cruciale pour TV5. AprĂšs deux annĂ©es 2004 et 2005 de trĂšs faible augmentation et, pour la premiĂšre fois en 2006, une rĂ©gression de la dotation française, votre Rapporteur spĂ©cial insiste sur le fait qu’une nouvelle diminution de la dotation, concomitante par exemple au lancement de France 24, constituerait tout Ă  la fois une atteinte aux engagements pris par la France, un renoncement dĂ©finitif au plan de dĂ©veloppement stratĂ©gique adoptĂ© en 2005 et fondĂ© sur un effort important de sous-titrage des programmes et un dĂ©sengagement de la chaĂźne francophone de certains marchĂ©s. Le projet de loi de finances pour 2007 propose opportunĂ©ment de relever la subvention française Ă  TV5 Monde, dĂ©sormais imputĂ©e sur le programme Audiovisuel extĂ©rieur, Ă  65,27 millions d’euros + 4,5 % par rapport Ă  la loi de finances pour 2006. 2.– Les orientations stratĂ©giquesIl est en effet crucial que les moyens financiers soient donnĂ©s Ă  TV5 Monde, pour respecter le plan stratĂ©gique 2006–2009 qui avait Ă©tĂ© adoptĂ© par la ConfĂ©rence des ministres responsables de TV5 de septembre 2005, Ă  Bruxelles. Ce plan est construit autour des axes suivants – la consolidation du rĂ©seau mondial de distribution de la chaĂźne, notamment via les nouvelles technologies ; – une meilleure adaptation des signaux aux diffĂ©rentes zones de diffusion grĂące notamment Ă  l’augmentation du sous-titrage ; – un renforcement de l’identitĂ© et de l’attractivitĂ© de la chaĂźne grĂące Ă  l’amĂ©lioration de sa programmation. En particulier, il est essentiel de continuer Ă  sous-titrer les Ă©missions dans la langue du pays, parce qu’il s’agit d’une bonne stratĂ©gie permettant aux non francophones de pouvoir accĂ©der aux programmes. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, cette stratĂ©gie a pour effet de multiplier de 3 Ă  10 l’audience des Ă©missions sous titrĂ©es. De plus, la communication de la chaĂźne doit devenir plus offensive, afin de faire connaĂźtre le plus largement possible ce qu’est TV5, la puissance de son rĂ©seau, l’originalitĂ© de ses programmes, leurs horaires de diffusion et la façon d’y accĂ©der dans les diffĂ©rentes zones. Une politique de marque ambitieuse et une information sur les programmes renforcĂ©e, en particulier grĂące au dĂ©veloppement des partenariats mĂ©dias, devraient permettre de sĂ©duire davantage de tĂ©lĂ©spectateurs. Enfin, d’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, TV5 pourrait ĂȘtre amenĂ©e Ă  rĂ©duire le nombre des interventions d’information environ 18 journaux par jour, la qualitĂ© Ă©tant toujours prĂ©fĂ©rable Ă  la quantitĂ©. Certes, l’information ne coĂ»te pas vraiment cher sur TV5 environ 12 millions d’euros par an car celle-ci s’appuie sur les programmes et les journalistes des chaĂźnes partenaires, TV5 ne disposant que de quatre Ă©quipes de reportage et d’un seul studio. Mais il serait profitable de concevoir des journaux mieux adaptĂ©s aux crĂ©neaux horaires de chaque zone de rĂ©ception. Trois ou quatre journaux par rĂ©gion pourraient suffire largement, si la qualitĂ© et la spĂ©cificitĂ© de ces journaux sont amĂ©liorĂ©es. D.– FRANCE 24 LE NOUVEL ACTEUR1.– La naissance d’une idĂ©e originaleVotre Rapporteur spĂ©cial a rappelĂ©, Ă  de nombreuses reprises, son attachement au projet de la chaĂźne d’information internationale, qui est incontestablement un enjeu majeur pour notre diplomatie et pour le pluralisme de l’information mondiale. Sans revenir sur la genĂšse de ce projet, on rappellera qu’en crĂ©ant une sociĂ©tĂ© anonyme Ă  directoire et conseil de surveillance dĂ©tenue Ă  paritĂ© entre elles, TF1 et France TĂ©lĂ©visions se sont associĂ©s pour mettre en Ɠuvre un projet commun offrir au public une vision française sur l’actualitĂ© internationale et contribuer Ă  renforcer la prĂ©sence de la France dans le monde. Du fait des objectifs qui lui sont assignĂ©s, la cible prioritaire de la chaĂźne a Ă©tĂ© fixĂ©e sur les dĂ©cideurs Ă©conomiques et politiques, les professionnels des mĂ©dias, et plus gĂ©nĂ©ralement le grand public ». Passer des objectifs gĂ©nĂ©raux Ă  une stratĂ©gie opĂ©rationnelle est assurĂ©ment dĂ©licat. Le contenu des valeurs » qui seront vĂ©hiculĂ©es par la chaĂźne, laquelle ne saurait ĂȘtre apprĂ©hendĂ©e comme un outil d’État, tourne autour de trois idĂ©es reproduire et montrer la diversitĂ© du monde ; favoriser le pluralisme, le dĂ©bat et la confrontation des idĂ©es ; mettre en avant la culture et l’art de vivre de la France. Reste Ă  mettre en Ɠuvre cette ambition. La signature d’une charte » par les journalistes de France 24 doit en assurer une forme de garantie. 2.– Des moyens Ă  mobiliser dans le cadre d’une forte synergie On ne doit donc pas oublier la forte ambition vĂ©hiculĂ©e par ce projet proposer au monde un regard diffĂ©rent. Cette ambition implique la mobilisation de moyens consĂ©quents. Dans un contexte de contrainte budgĂ©taire touchant aussi l’audiovisuel extĂ©rieur, la question des partenariats, qui a Ă©tĂ© Ă©voquĂ©e prĂ©cĂ©demment, occupe une place cruciale, propre d’une part Ă  rassurer sur la place de France 24 au sein de l’audiovisuel français, et, d’autre part, Ă  garantir des synergies profitables Ă  l’ensemble des acteurs publics. Le schĂ©ma ci-aprĂšs illustre cette politique de partenariat. PARTENARIATS DE FRANCE 24 Source France 24Mais indĂ©pendamment de la politique de partenariats, les moyens ne sauraient ĂȘtre trop faibles. Ayant considĂ©rĂ© que cette chaĂźne participera au rayonnement international de la France, l’État a ainsi dĂ©cidĂ© de contribuer Ă  son financement, en contrepartie de la mission d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral qu’elle exercera. En 2006, les crĂ©dits votĂ©s au titre de la loi de finances initiale s’élĂšvent Ă  65 millions d’euros 37, imputĂ©s pour 12 millions d’euros en dĂ©penses d’investissement et pour 53 millions d’euros en dĂ©penses de fonctionnement. Dans le projet de loi de finances, il est prĂ©vu de doter le programme ChaĂźne française d’information internationale de 70 millions d’euros en 2007 + 7,7 %. Cela Ă©tant, un avenant Ă  la convention de subvention signĂ© entre l’État et la chaĂźne le 24 juillet 2006 a fixĂ© le budget de France 24 Ă  47 millions d’euros pour 2006 et Ă  86 millions d’euros pour 2007 correspondant Ă  l’indexation de 80 millions d’euros en valeur 2005. Le budget 2007 sera donc financĂ© Ă  hauteur de 70 millions d’euros par les crĂ©dits inscrits dans le projet de loi de finances pour 2007 et de 16 millions d’euros par ceux ouverts en loi de finances pour 2006 et non utilisĂ©s par la chaĂźne. Ces derniers permettront notamment de financer les surcoĂ»ts liĂ©s Ă  l’anglais. En 2006, il est prĂ©vu que les crĂ©dits soient utilisĂ©s Ă  hauteur de 29 % sur les programmes, de 20 % sur la technique, 6 % sur la distribution, de 18 % sur le fonctionnement et de 27 % pour le lancement de la chaĂźne. En 2006, 235 personnes ont Ă©tĂ© recrutĂ©es, dont 160 journalistes, et 20 personnes supplĂ©mentaires devraient l’ĂȘtre en 2007. 3.– Une diffusion Ă  l’étranger et sur le territoire françaisIl est essentiel d’assurer Ă  France 24 la distribution et la diffusion la plus large. Votre Rapporteur spĂ©cial se rĂ©jouit notamment que France 24 et TV5 Monde coopĂšrent Ă©troitement pour l’organisation de leur distribution afin de minimiser les coĂ»ts et d’accroĂźtre la diffusion des deux chaĂźnes. Par ailleurs, des contrats de diffusion avec les organismes gestionnaires des satellites couvrant les zones de diffusion de la chaĂźne seront conclus. Des contrats de reprise des programmes seront Ă©galement conclus dans chaque pays de diffusion entre France 24 et les opĂ©rateurs de bouquets satellitaires, les cĂąblo-opĂ©rateurs et tous autres distributeurs de services audiovisuels. Enfin, les programmes de France 24 devraient ĂȘtre accessibles par l’internet Ă  haut dĂ©bit. Des difficultĂ©s spĂ©cifiques se posent nĂ©anmoins pour l’Afrique, oĂč trĂšs peu de foyers seront matĂ©riellement en mesure de recevoir France 24 cĂąble, satellite ou internet, Ă  l’exception de l’Afrique du Sud. La cible privilĂ©giĂ©e devrait alors ĂȘtre l’Europe et le Proche et Moyen-Orient. L’objectif d’une couverture optimale en cĂąble et satellite pour l’AmĂ©rique, l’Asie et l’OcĂ©anie est fixĂ© Ă  2009. Quant Ă  la question de la diffusion sur le territoire national, elle continue de faire dĂ©bat pour certains acteurs de l’audiovisuel. Elle est pourtant dĂ©sormais tranchĂ©e tout en n’ignorant pas les difficultĂ©s liĂ©es Ă  la diffusion de la publicitĂ©, votre Rapporteur spĂ©cial continue de croire normal qu’une chaĂźne financĂ©e par l’argent du contribuable soit aussi accessible depuis la France. En n’oubliant pas que la France est la premiĂšre destination mondiale des touristes une partie de ces 72 millions d’étrangers peut apprĂ©cier de retrouver France 24. La distribution de la chaĂźne sur la France sera assurĂ©e dans le cadre de contrats de reprise des programmes principaux afin d’en assurer la diffusion par satellite en mode numĂ©rique et par le cĂąble. Pour autant cette question impliquait certaines adaptations, en particulier au niveau des relations concurrentielles et de la diffusion publicitaire en France. Les prĂ©cisions attendues sont intervenues le 13 octobre 2006, la direction gĂ©nĂ©rale de la consommation, de la concurrence et de la rĂ©pression des fraudes DGCCRF ayant autorisĂ© la chaĂźne Ă  ĂȘtre diffusĂ©e en France tout en commercialisant des spots publicitaires dans tous les pays oĂč elle sera diffusĂ©e. La chaĂźne ne diffusera pas de publicitĂ© nationale mais seulement des publicitĂ©s transnationales, c’est-Ă -dire les mĂȘmes spots diffusĂ©s partout, comme les chaĂźnes internationales CNN, BBC World ou Al-Jazira. Concernant l’autorisation de diffusion en France, France 24 avait obtenu en 2005 une premiĂšre autorisation de la DGCCRF pour sa diffusion mondiale, Ă  l’exception de la France, car le projet ne prĂ©voyait alors pas de diffusion de la chaĂźne en France 38. La DGCCRF a dĂ» vĂ©rifier si la diffusion de la chaĂźne en France allait avoir un impact sur la concurrence en France au sein du marchĂ© tĂ©lĂ©visuel et si la diffusion de spots publicitaires pouvait avoir un impact sur le marchĂ© publicitaire en France. Ainsi a-t-il Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© l’internalisation de la rĂ©gie de France 24, laquelle mĂšnera sa propre politique commerciale en matiĂšre de vente d’espaces publicitaires. Ces engagements auront donc pour effet d’empĂȘcher tout lien entre la politique commerciale publicitaire dĂ©veloppĂ©e par les rĂ©gies de TF1, France 2 ou France 3 et celle dĂ©veloppĂ©e par la rĂ©gie publicitaire de France 24. Ces dispositions permettront notamment d’écarter le risque de renforcement de la position dominante de TF1 sur le marchĂ© de la publicitĂ© tĂ©lĂ©visĂ©e. La chaĂźne devrait ĂȘtre lancĂ©e dĂ©but dĂ©cembre 2006 sur le cĂąble et le satellite, aprĂšs l’avoir Ă©tĂ© sur l’internet. Elle diffusera deux programmes principaux un programme principal en français, diffusĂ© prioritairement en Europe dont la France et dans les pays du Maghreb et en Afrique, et un second programme, composĂ© dans un premier temps de 75 % de programmes en anglais et de 25 % de programmes en français, diffusĂ© prioritairement en Europe dont la France, en Afrique et au Proche et Moyen Orient. Par ailleurs, des dĂ©crochages en arabe sur le Proche et Moyen Orient devraient intervenir dans le courant de l’annĂ©e 2007. D’autres dĂ©crochages en espagnol par exemple et l’extension de la diffusion en Asie, en AmĂ©rique latine et en AmĂ©rique du Nord pourront ĂȘtre envisagĂ©s dans les annĂ©es Ă  venir. Votre Rapporteur spĂ©cial souhaite le meilleur succĂšs Ă  cette chaĂźne, qui devra Ă  la fois trouver sa voie originale, rester indĂ©pendante et travailler en harmonie avec les acteurs historiques de l’audiovisuel extĂ©rieur. E.– ARTE UNE PLACE SINGULIÈRE1.– Un positionnement original et bien ancrĂ© dans le paysage audiovisuelComme on l’a expliquĂ©, ARTE est un mĂ©dia dont la place au sein de l’audiovisuel extĂ©rieur est dĂ©licate Ă  apprĂ©hender. Elle est davantage la rĂ©union d’une entreprise française et d’une entreprise allemande, tournĂ©e vers la France et l’Allemagne, qu’un outil de rayonnement extĂ©rieur de notre pays. Pour autant, on a dĂ©jĂ  montrĂ© combien les synergies entre ARTE et les autres acteurs de l’audiovisuel extĂ©rieur la plaçaient – malgrĂ© elle peut-ĂȘtre – au sein du systĂšme plutĂŽt qu’à sa marge. De mĂȘme, l’émergence d’une vocation plus europĂ©enne contribue Ă  faire Ă©voluer son positionnement au sein du paysage audiovisuel 39. Ainsi un partenariat vient-il d’ĂȘtre signĂ© pour deux ans avec le service public belge de la RTBF pour lancer ARTE Belgique, le 25 septembre dernier, sur les rĂ©seaux cĂąblĂ©s de la CommunautĂ© française de Belgique Wallonie et Bruxelles. La RTBF est ainsi devenue le premier membre associĂ© d’ARTE auprĂšs des fondateurs ARTE France et ARTE Deutschland depuis 1995 l’ouverture de cette fenĂȘtre rĂ©gionale » belge attĂ©nue ainsi le regard franco-allemand de la chaĂźne et l’unicitĂ© de son signal. De mĂȘme, ARTE rĂ©flĂ©chit avec la RTVE en Espagne Ă  la crĂ©ation d’une chaĂźne composĂ©e pour moitiĂ© de programmes d’ARTE doublĂ©s en espagnol. Ces Ă©volutions lui ouvrent peut-ĂȘtre des perspectives nouvelles afin de renouveler son positionnement tout en consolidant son identitĂ© franco-allemande. Cela Ă©tant, ses rĂ©sultats sont tout Ă  fait apprĂ©ciables, ARTE continuant Ă  fournir des programmes de qualitĂ© Ă  un public significatif. MalgrĂ© un tassement d’audience en 2005, elle continue de rencontrer une vĂ©ritable audience supĂ©rieure ou Ă©gale Ă  un million de tĂ©lĂ©spectateurs en prime time qui ne trouvent pas auprĂšs de la vaste concurrence une meilleure rĂ©ponse Ă  leurs attentes. En France, la part de marchĂ© a lĂ©gĂšrement rĂ©gressĂ© en 2005 dans un contexte concurrentiel croissant, marquĂ© par l’arrivĂ©e des nouvelles chaĂźnes de la TNT. AprĂšs une annĂ©e 2004 exceptionnelle Ă  3,8 %, ARTE a ainsi obtenu une part de marchĂ© de 3,5 % sur l’annĂ©e 2005. En Allemagne, ARTE est diffusĂ©e sur le cĂąble et le satellite, et donc confrontĂ©e Ă  une forte concurrence plus de 30 chaĂźnes. Les scores de la chaĂźne ne sont donc pas comparables Ă  ceux obtenus en France, mĂȘme si la croissance est rĂ©guliĂšre depuis 2003 la part de marchĂ© est ainsi passĂ©e de 0,57 % en 2003 Ă  0,65 % en 2004 et 0,71 % en 2005. Bref, ARTE fĂ©dĂšre toujours plus de tĂ©lĂ©spectateurs autour de ses programmes en 2005, elle a atteint en France un nombre record d’émissions de plus de tĂ©lĂ©spectateurs 356 contre 200 en 2001. En Allemagne, les rĂ©sultats de 2005 sont Ă©quivalents Ă  ceux de 2001, qui Ă©tait la meilleure annĂ©e jusqu’alors en terme de nombre d’émissions dont l’audience a Ă©tĂ© supĂ©rieure Ă  tĂ©lĂ©spectateurs. 2.– Le financement des orientations pour 2007Le budget prĂ©visionnel pour 2007 sera prĂ©sentĂ© au vote du conseil de surveillance Ă  la fin dĂ©cembre 2006. Il est proposĂ© de porter l’affectation du produit de la redevance audiovisuelle revenant Ă  ARTE–France Ă  214,33 millions d’euros en 2007, en progression de 2,8 % par rapport Ă  2006. En cohĂ©rence avec le COM actuellement en discussion, cet accroissement des crĂ©dits doit servir Ă  poursuivre les prioritĂ©s suivantes – la poursuite et l’accĂ©lĂ©ration du dĂ©ploiement sur le territoire de la TNT afin de contribuer au processus d’extinction progressif de la diffusion analogique qui devrait dĂ©marrer en mars 2008 pour s’achever en novembre 2011. ARTE participera Ă  l’offre des chaĂźnes gratuites de la TNT par satellite ; – le dĂ©veloppement des programmes en haute dĂ©finition HD. ARTE qui a d’ores et dĂ©jĂ  diffusĂ© des programmes en HD Ă  l’occasion des expĂ©rimentations lancĂ©es par le CSA, continuera Ă  diffuser un maximum de programmes en HD ; – la consolidation de son effort en faveur de la production française de crĂ©ation, notamment de fiction. Cet effort se combine avec la contribution de la chaĂźne Ă  la politique de relocalisation des tournages, notamment les fictions ; – le sous-titrage des programmes pour les personnes sourdes et malentendantes au titre de la loi du 11 fĂ©vrier 2005 40. Face Ă  l’importance de ces enjeux, l’augmentation de 2,8 % de la redevance affectĂ©e est-elle suffisante ? Une augmentation de 3,5 % aurait Ă  coup sĂ»r garanti l’accomplissement de l’essentiel des missions fixĂ©es par l’État Ă  ARTE France. Rappelons que la ressource publique constitue la quasi-totalitĂ© du chiffre d’affaires d’ARTE France, puisque la chaĂźne culturelle europĂ©enne ne dispose pas de ressources publicitaires et ne peut donc pas compenser une moindre Ă©volution de la ressource publique par des augmentations de recettes annexes le sponsoring ou le parrainage restant marginaux. Au demeurant, ARTE France ne bĂ©nĂ©ficiant plus du report de 1,35 million d’euros reçu en 2006, la hausse rĂ©elle du budget s’apprĂ©cie Ă  hauteur de 2,09 % elle couvrira essentiellement la nouvelle grille, le dĂ©ploiement de la TNT jusqu’à 80 % de la population, les dĂ©penses incontournables telles le renouvellement du bail ou l’augmentation de masse salariale et le dĂ©veloppement de la HD. En autofinancement, ARTE France continuera son effort sur les nouveaux supports et les nouvelles technologies internet, VOD, mobile, ADSL
. 3.– Une menace sur le dĂ©veloppement Ă  moyen termeDĂšs 2007, le budget rĂ©el d’ARTE ne devrait donc pas lui permettre de financer la montĂ©e en puissance du sous-titrage, ni suffire Ă  la mise en place d’un accord d’intĂ©ressement ou au renforcement de la communication. L’entreprise aura Ă©galement du mal Ă  tenir pleinement son rĂŽle de soutien Ă  la crĂ©ation, ARTE France Ă©tant dans l’impossibilitĂ© d’augmenter ses investissements pour les coproductions de documentaires internationaux, lesquelles nĂ©cessitent aujourd’hui un investissement de euros par programme
 lĂ  oĂč ARTE investit euros en moyenne 41. Dans ces conditions, comment ARTE pourra-t-elle demeurer la chaĂźne de rĂ©fĂ©rence du documentaire crĂ©ation ? Le secteur de la fiction est Ă©galement un enjeu crucial de dĂ©veloppement. ARTE France coproduit ou achĂšte une trentaine de tĂ©lĂ©films de 90 minutes par an. Elle reste fidĂšle Ă  sa ligne Ă©ditoriale qui met en avant l’exigence du point de vue et l’originalitĂ© du traitement pour imaginer des films au ton et au style singuliers. Attentive Ă  l’apparition de nouvelles formes de rĂ©cit, elle tente Ă©galement d’explorer de nouveaux formats en contribuant au renouvellement de la fiction sĂ©rielle en France. Mais alors que TF1 peut engager plus de 3 millions d’euros par tĂ©lĂ©film, que France 2 et France 3 engagent rĂ©guliĂšrement entre 1,5 et 2 millions d’euros, l’apport d’ARTE se situe autour de euros. Les moyens d’ARTE consacrĂ©s Ă  la fiction restent ainsi en deçà de ses ambitions. D’autant que la fiction n’a pas Ă©chappĂ© Ă  une remise en question face aux nouvelles technologies internet, DVD, VOD, tĂ©lĂ©phonie ses audiences vieillissantes et ses coĂ»ts importants ont provoquĂ© une rĂ©flexion de fond sur les moyens de rajeunir le public des tĂ©lĂ©films sans perdre ses adeptes plus ĂągĂ©s
 tout en produisant des sĂ©ries dans l’air du temps 42. Aussi ARTE est-elle confrontĂ©e Ă  une forte prĂ©occupation sur son financement Ă  moyen terme, son budget Ă©tant calĂ© sur l’augmentation de la redevance, ressource qui croĂźt Ă  un rythme insuffisant pour le marchĂ© audiovisuel. En particulier, les chaĂźnes concurrentes pourront bĂ©nĂ©ficier de l’ouverture du secteur de la grande distribution Ă  la publicitĂ© Ă  la tĂ©lĂ©vision, ce qui accentuera le dĂ©crochage d’ARTE des conditions du marché  D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, il y a dĂ©sormais un dĂ©calage d’au moins 3 Ă  4 % par an entre l’augmentation du coĂ»t de grille d’ARTE et l’évolution du marchĂ©. Ce seul Ă©cart doit ĂȘtre Ă  mĂȘme de faire comprendre que les besoins de financement du secteur audiovisuel public ne sont pas formulĂ©s de maniĂšre dĂ©raisonnable, sans avoir conscience de la rĂ©alitĂ© budgĂ©taire du pays ils correspondent Ă  une rĂ©alitĂ© Ă©conomique, qui est celle du marchĂ© mondialisĂ© dans lequel nos entreprises Ă©voluent. Leur donner les moyens de tenir leur rang et de relever la compĂ©tition, c’est garantir des leviers importants de dĂ©veloppement, eux-mĂȘmes porteurs de croissance et d’emploi. * * * II.– FAIRE DE LA NOUVELLE OFFRE DE TÉLÉVISION UNE CHANCE POUR LE SERVICE PUBLIC A.– LES ENJEUX DU SECTEUR1.– Les rĂ©ussites et les dĂ©fis de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre a Un lancement rĂ©ussiLa tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre TNT a Ă©tĂ© lancĂ©e le 31 mars 2005 aux yeux de tous, il s’agit d’un vrai succĂšs. Au 30 aoĂ»t 2006, un peu plus de 4 millions d’adaptateurs numĂ©riques dont 3,1 millions vendus et plus de louĂ©s ou mis Ă  disposition ont Ă©tĂ© commercialisĂ©s en France, soit un taux d’équipement estimĂ© Ă  13 % des foyers français et plus de 20 % des foyers situĂ©s dans les rĂ©gions couvertes par la TNT. On estime que 6 millions de foyers seront Ă©quipĂ©s Ă  la fin de l’annĂ©e 2006. 40 % des foyers français ont accĂšs aujourd’hui Ă  l’intĂ©gralitĂ©, parfois Ă  quelques exceptions prĂšs, des chaĂźnes en clair de la TNT, puisque au-delĂ  des 4 millions de foyers Ă©quipĂ©s d’un rĂ©cepteur TNT, 1 million de foyers reçoivent une offre numĂ©rique par cĂąble ou par ADSL, et prĂšs de 5 millions de foyers sont abonnĂ©s au satellite. LE NOUVEAU PAYSAGE HERTZIEN DEPUIS LE DÉMARRAGE DE LA TNT ChaĂźnes gratuites ChaĂźnes payantes TF1 M6 Canal Plus programmes en clair Direct 8 Europe 2 TV W9 NT1 NRJ 12 TMC BFM TV I>TĂ©lĂ© Gulli France 2 France 3 France 4 France 5 ARTE La ChaĂźne parlementaire Canal Plus AB1 Canal J Canal Plus CinĂ©ma Canal Plus Sport PlanĂšte LCI Paris PremiĂšre TF6 TPS Star Eurosport France b L’offre gratuite pour tous est triplĂ©eÀ l’issue des appels aux candidatures du CSA de 2001 et 2004, l’offre gratuite sur la TNT se compose de – 6 chaĂźnes dĂ©jĂ  diffusĂ©es par la voie hertzienne terrestre en mode analogique, dont quatre de service public 43 ; – 3 chaĂźnes dĂ©jĂ  prĂ©sentes sur le cĂąble et le satellite, dont une de service public W9 44, TMC 45 et La ChaĂźne Parlementaire, cette derniĂšre reprenant en alternance les programmes de LCP–AN et de Public SĂ©nat sur un canal partagĂ© et dont la dotation est inscrite au sein de la mission Pouvoirs publics dans le projet de loi de finances pour 2007 ; – 8 chaĂźnes créées spĂ©cialement pour la TNT, dont une de service public France 4 46, et Direct 8 47, NRJ 12 48, NT 1 49, BFM TV 50, Europe 2 TV 51, I>TĂ©lĂ© 52 et Gulli 53. Par ailleurs, certaines chaĂźnes payantes comportent des plages en clair diffusĂ©es en MPEG-2 et reçues sur les adaptateurs de la TNT Canal Plus, TPS Star et Paris PremiĂšre. c L’offre payante complĂ©mentaireEn complĂ©ment de l’offre gratuite, la TNT propose 11 chaĂźnes payantes AB1, Canal+, Eurosport, LCI, Paris PremiĂšre, TF6 et TPS Star, Canal J groupe LagardĂšre, Canal+ CinĂ©ma, Canal+ Sport et PlanĂšte 54. En application de l’article 30-2 de la loi relative Ă  la libertĂ© de communication, les chaĂźnes choisissent librement leurs distributeurs qui doivent se dĂ©clarer prĂ©alablement Ă  la commercialisation de l’offre auprĂšs du CSA. Deux offres payantes de la TNT sont actuellement proposĂ©es respectivement par TPS et Canal Plus. Les adaptateurs fournis par ces deux groupes dans le cadre de leurs offres permettent aussi de recevoir les 18 chaĂźnes gratuites de la TNT. Le rapprochement CanalSat / TPS AnnoncĂ© en dĂ©cembre 2005, le ministĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie a finalement autorisĂ©, fin aoĂ»t 2006, le rapprochement de CanalSat et de TPS
 sous condition du respect de 59 engagements permettant de remĂ©dier aux problĂšmes de concurrence soulevĂ©s par l’opĂ©ration sur les marchĂ©s de l’audiovisuel. La dĂ©cision, accompagnĂ©e de l’avis du Conseil de la concurrence, a Ă©tĂ© publiĂ©e dans l’édition Ă©lectronique du Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la rĂ©pression des fraudes du 15 septembre 2006. Sa mise en ligne a facilitĂ© la transparence de l’initiative. De mĂȘme, les avis du CSA et de l’AutoritĂ© de rĂ©gulation des communications Ă©lectroniques et des postes ARCEP en date du 23 mai 2006 ont Ă©tĂ© rendus publics, et diffusĂ©s sur les sites internet de ces autoritĂ©s. La France Ă©tait l’un des derniers grands pays europĂ©ens oĂč coexistaient deux plateformes satellitaires de tĂ©lĂ©vision payante. Il n’y en aura bientĂŽt plus qu’une seule, rĂ©unie au sein de Canal Plus France » et regroupant 9,5 millions d’abonnements et 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Dans un premier temps, TF1, M6 et TPS Star seront rendues accessibles aux abonnĂ©s de CanalSat. De leur cĂŽtĂ©, les abonnĂ©s de TPS auront accĂšs Ă  Canal Plus Le Bouquet ». Dans un second temps, une nouvelle offre sera constituĂ©e autour de thĂ©matiques comme le cinĂ©ma, le sport, la jeunesse, les documentaires ou la musique. Cette nouvelle offre devrait ĂȘtre proposĂ©e aux abonnĂ©s de CanalSat et de TPS Ă  des conditions de prix inchangĂ©es. Afin de veiller au respect de rĂšgles de la concurrence et Ă  la suite des analyses et des recommandations du Conseil de la concurrence, 59 engagements ont Ă©tĂ© pris pour une durĂ©e maximale de 6 ans par le groupe Canal Plus auprĂšs des pouvoirs publics, afin de garantir que l’opĂ©ration n’aura d’effets nĂ©gatifs sur aucun des marchĂ©s concernĂ©s. Ils rĂ©pondent aux objectifs suivants – faciliter l’accĂšs des opĂ©rateurs de tĂ©lĂ©vision et de vidĂ©o Ă  la demande VOD aux droits sur les contenus audiovisuels attractifs, en particulier les films français et amĂ©ricains, et les manifestations sportives. À cette fin, Canal Plus s’engage notamment Ă  limiter la durĂ©e des futurs contrats cadres avec les grands studios amĂ©ricains Ă  3 ans au maximum, Ă  renoncer Ă  exploiter les droits VOD en exclusivitĂ©, Ă  garantir un accĂšs non discriminatoire au catalogue de Studio Canal, Ă  limiter la part des films issus de ce catalogue dans les acquisitions de la future entitĂ©, et Ă  renoncer Ă  solliciter des offres couplĂ©es pour diffĂ©rentes catĂ©gories de droits cinĂ©matographiques ou sportifs. Par ailleurs, le groupe s’engage Ă  rĂ©trocĂ©der dans le cadre de mises en concurrence, les droits audiovisuels en clair sur les sĂ©ries et sur le sport, que la nouvelle entitĂ© pourrait dĂ©tenir et qu’elle n’exploiterait pas ; – mettre Ă  disposition de tous les distributeurs d’offres de tĂ©lĂ©vision payante qui le souhaitent plusieurs chaĂźnes de qualitĂ© qui permettront le dĂ©veloppement d’offres attractives. Seront ainsi mises Ă  disposition des tiers des chaĂźnes comme TPS Star, Sport Plus ou Teletoon. En outre, Canal Plus sera accessible en numĂ©rique Ă  tout opĂ©rateur qui le souhaiterait ; – permettre aux chaĂźnes conventionnĂ©es indĂ©pendantes en langue française d’ĂȘtre reprises au sein des offres satellitaires du nouveau groupe. La proportion actuelle, dans les offres du groupe, des chaĂźnes thĂ©matiques qui ne sont contrĂŽlĂ©es ni par le groupe, ni par l’un des actionnaires minoritaires du nouvel ensemble LagardĂšre, TF1, M6, sera au minimum prĂ©servĂ©e, y compris dans l’offre de base. Cette garantie sera assurĂ©e tant en nombre de chaĂźnes qu’en chiffre d’affaires. En outre, les sociĂ©tĂ©s TV NumĂ©ric et AB Groupe se sont dĂ©clarĂ©es auprĂšs du CSA, fin 2005, comme distributeurs commerciaux des chaĂźnes payantes de la TNT. TV Numeric a annoncĂ© qu’il devrait lancer avec AB Groupe en novembre 2006 une offre commerciale sur la TNT. Toutes les chaĂźnes de la TNT sont comprises dans les offres des cĂąblo-opĂ©rateurs. Les offres d’abonnement au satellite et par ADSL intĂšgrent quant Ă  elles une grande partie des chaĂźnes en clair de la TNT TF1, M6 ou Canal Plus + ne sont toutefois pas proposĂ©es dans certaines offres. Par ailleurs, la totalitĂ© des fournisseurs de services de tĂ©lĂ©vision par ADSL propose progressivement Ă  leurs abonnĂ©s actuels et systĂ©matiquement Ă  leurs nouveaux abonnĂ©s des modems compatibles avec la TNT, permettant d’accĂ©der aux chaĂźnes en clair de la TNT et aux chaĂźnes de leur offre de tĂ©lĂ©vision par ADSL avec un seul appareil. Votre Rapporteur spĂ©cial souhaite qu’une solution juste soit trouvĂ©e Ă  la question de la numĂ©rotation des chaĂźnes sur les diffĂ©rentes formules de rĂ©ception des chaĂźnes prĂ©sentes sur la TNT. Le CSA a Ă©tĂ© saisi de cette question 55, certaines chaĂźnes rĂ©clamant une mĂȘme numĂ©rotation sur tous les bouquets de diffusion. Ainsi, la ChaĂźne parlementaire porte le numĂ©ro 13 sur la TNT, mais est numĂ©rotĂ©e 24 sur le cĂąble Noos, distribuĂ©e sur le canal 35 de CanalSat Ă  proximitĂ© des chaĂźnes d’information en continu et sur le canal 51 de TPS Ă  proximitĂ© de KTO et Beur TV. Les exemples pourraient ĂȘtre multipliĂ©s, NRJ 12, BFM TV ou Direct 8 ayant formulĂ© des demandes d’harmonisation des numĂ©rotations. Il serait en effet logique que cette numĂ©rotation soit cohĂ©rente avec le rang qui a Ă©tĂ© attribuĂ© aux chaĂźnes nouvelles, par tirage au sort, sur les dĂ©codeurs TNT. On ne peut qu’espĂ©rer qu’une solution Ă©quitable sera trouvĂ©e. d Le dĂ©ploiement de la TNT lever les incertitudes sur la couverture de 85 % de la population en 2007LancĂ©e le 31 mars 2005 pour 35 % de la population, la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre se dĂ©ploie par phases successives et couvre plus de 58 % de la population depuis le 15 juin dernier et 64 % de la population depuis le 18 octobre phase 4. Ce taux devrait ĂȘtre portĂ© Ă  70 % au printemps 2007 phase 5 et atteindre 85 % avant la fin de l’annĂ©e 2007 phase 6. Cependant, Ă  la fin 2006, le plus facile » aura Ă©tĂ© fait, avec notamment les 75 premiers Ă©metteurs concernant les zones du territoire pour lesquelles le rĂ©amĂ©nagement des frĂ©quences pose le moins de difficultĂ©. Les derniers Ă©metteurs, censĂ©s permettre de couvrir 85 % de la population, concernent des zones posant des problĂšmes beaucoup plus complexes, en particulier les zones frontaliĂšres. Sur certaines de ces zones, la planification ne permet pas de dĂ©gager les six frĂ©quences nĂ©cessaires. Au demeurant, pour la plupart des observateurs et des techniciens, la couverture Ă  l’issue de l’ouverture des 115 sites sera en rĂ©alitĂ© de l’ordre de 80 %, soit significativement moins que l’objectif de couverture de 85 % de la population. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, des retards sont d’ores et dĂ©jĂ  certains – l’ouverture des sites de Bergerac, Ussel et Valence en phase 4 devrait ĂȘtre dĂ©calĂ©e de quelques semaines et des incertitudes pĂšsent sur le respect du calendrier de la phase 5 printemps 2007 ; – l’ouverture des 21 sites de la phase 6 prĂ©vus dans le Nord et l’Est de la France, qui est conditionnĂ©e par les accords de coordination aux frontiĂšres, est un vrai sujet de prĂ©occupation. Suite Ă  la confĂ©rence rĂ©gionale des radiocommunications de 2006, l’Agence nationale des frĂ©quences et le CSA poursuivent les travaux afin de dĂ©finir en commun avec nos voisins un schĂ©ma de transition vers le numĂ©rique dans ces zones. Par ailleurs, au sein mĂȘme des zones correspondant Ă  80 % ou 85 % de la population, des disparitĂ©s locales trĂšs fortes devraient ĂȘtre constatĂ©es entre les dĂ©partements. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, certains dĂ©partements seront couverts Ă  95 % Ă  l’issue de la phase 6
 et d’autres Ă  seulement 5 %. À l’heure actuelle, certains dĂ©partements ont mĂȘme un taux de couverture proche de 0 %. Face au caractĂšre choquant de ces disparitĂ©s territoriales, votre Rapporteur spĂ©cial juge essentiel d’accĂ©lĂ©rer le dĂ©ploiement de la TNT
 ce qui pose deux questions celle du nombre de réémetteurs nĂ©cessaires et celle du taux d’équipement des Français. On peut estimer que les conditions du passage au numĂ©rique ne seront rĂ©unies qu’avec, Ă  la fois, une couverture du territoire en rĂ©seaux numĂ©riques supĂ©rieure ou Ă©gale Ă  95 % de la population et un taux minimum d’équipements en numĂ©rique des foyers de 85 % ce taux pouvant ĂȘtre estimĂ© Ă  30 % en France aujourd’hui. S’agissant du nombre de réémetteurs, on estime qu’il faudrait réémetteurs complĂ©mentaires pour passer de 80 Ă  90 % de la population couverte, et encore supplĂ©mentaires pour atteindre 95 ou 96 %. Atteindre ce dernier objectif correspondrait Ă  un coĂ»t supplĂ©mentaire compris en 2 et 2,5 millions d’euros par chaĂźne pour les chaĂźnes de la TNT visant une couverture nationale complĂšte, s’ajoutant aux 3 Ă  3,5 millions d’euros par chaĂźne nĂ©cessaires au dĂ©ploiement des 115 sites. e Comment couvrir 100 % du territoire mĂ©tropolitain ?C’est pourquoi il ne sera possible de parvenir Ă  une couverture Ă  100 % du territoire français qu’au travers, Ă  la fois, d’une extension de la couverture numĂ©rique en TNT et d’une utilisation complĂ©mentaire des autres vecteurs de tĂ©lĂ©vision, Ă  commencer par le satellite. D’une part, le projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur prĂ©sentĂ© plus loin prĂ©voit les conditions propres Ă  faciliter l’extension de la couverture de la TNT au-delĂ  des obligations pesant sur les chaĂźnes. Ainsi, afin d’encourager les Ă©diteurs Ă  Ă©tendre la couverture de leurs services au-delĂ  des 85 %, un mĂ©canisme incitatif est proposĂ© les autorisations de diffusion des services nationaux de tĂ©lĂ©vision par voie hertzienne terrestre en mode numĂ©rique pourraient ĂȘtre prorogĂ©es par le CSA, dans la limite de cinq ans, en contrepartie des engagements complĂ©mentaires souscrits par ces Ă©diteurs en matiĂšre de couverture du territoire en diffusion hertzienne terrestre. D’autre part, et conformĂ©ment au souhait exprimĂ© par le PrĂ©sident de la RĂ©publique le 4 mai 2006, votre Rapporteur spĂ©cial approuve le choix de mettre en place, dĂšs cette annĂ©e, une offre par satellite permettant d’accĂ©der, partout en France et sans abonnement, aux chaĂźnes gratuites de la TNT, afin de complĂ©ter la couverture du territoire, notamment dans les zones d’ombre » de la TNT 56. D’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, on ne peut que plaider pour une utilisation complĂ©mentaire des diffĂ©rents vecteurs de tĂ©lĂ©vision numĂ©rique hertzien terrestre, satellite, filaire cĂąble ou ADSL la plus large possible. Des mesures d’accompagnement spĂ©cifiques et d’aides aux foyers les plus dĂ©favorisĂ©s sont Ă©galement prĂ©vues lors de l’extinction de la diffusion analogique. Accompagner la transition vers le numĂ©rique Le fonds d’accompagnement du numĂ©rique FAN a pour objet de financer l’équipement en terminaux de rĂ©ception des services de tĂ©lĂ©vision des mĂ©nages situĂ©s dans des zones circonscrites oĂč, en raison de contraintes techniques, il serait nĂ©cessaire de procĂ©der Ă  l’extinction anticipĂ©e et sans pĂ©riode de simulcast de la diffusion analogique. Le Premier ministre a dĂ©cidĂ©, en avril 2005, la crĂ©ation d’un groupe de travail sur le dĂ©ploiement de la TNT. ConfortĂ©e par l’adoption le 24 mai 2005 par la Commission europĂ©enne de sa communication sur le mĂȘme thĂšme, cette initiative a abouti au constat que le dĂ©ploiement de la TNT sur le territoire mĂ©tropolitain se heurte Ă  une pĂ©nurie de frĂ©quences dans certaines rĂ©gions, en particulier dans les rĂ©gions frontaliĂšres du Nord et de l’Est de la France. La propagation des ondes s’affranchissant des frontiĂšres, l’accĂšs au spectre nĂ©cessite d’ĂȘtre Ă©quitablement partagĂ© » dans ces rĂ©gions entre les pays limitrophes. Or, la diffusion en mode analogique accaparant dĂ©jĂ  une part importante de cette ressource, il peut s’avĂ©rer impossible d’identifier dans ces zones un nombre suffisant de frĂ©quences pour lancer la TNT sans Ă©teindre prĂ©alablement tout ou partie de la diffusion en mode analogique. Cette pĂ©nurie de frĂ©quences est Ă©galement observĂ©e Ă  l’intĂ©rieur du territoire, dans certaines zones particuliĂšres couvertes par des Ă©metteurs situĂ©s Ă  des endroits de convergence de brouillages venus de plusieurs sites Ă  trĂšs forte puissance. Une des solutions consiste en l’extinction anticipĂ©e de certains réémetteurs analogiques secondaires couvrant une population limitĂ©e, situĂ©s dans les zones concernĂ©es, de façon Ă  rĂ©utiliser les frĂ©quences ainsi libĂ©rĂ©es pour lancer la TNT sur des sites de forte puissance pour une population beaucoup plus importante. Cette solution, qui implique nĂ©cessairement un basculement avancĂ© vers la TNT dans les zones concernĂ©es, et ce sans pĂ©riode de simulcast, n’est cependant envisageable que si les autoritĂ©s nationales garantissent la continuitĂ© de rĂ©ception des services de tĂ©lĂ©vision et donc l’équipement des foyers rĂ©sidant en terminaux numĂ©riques adaptĂ©s. Le Gouvernement a donc dĂ©cidĂ© d’instituer et de financer un rĂ©gime d’aide pour l’équipement des foyers en terminaux de rĂ©ception des services de tĂ©lĂ©vision dans les zones oĂč la mise en Ɠuvre d’une telle solution s’imposerait. ConcrĂštement, pourront bĂ©nĂ©ficier des aides individuelles accordĂ©es dans le cadre de ce rĂ©gime les foyers ayant acquittĂ© la redevance audiovisuelle ou Ă©tant exonĂ©rĂ©s de celle-ci, qui se verraient privĂ©s de programmes de tĂ©lĂ©vision du fait de l’extinction d’un réémetteur analogique sans pĂ©riode de simulcast, c’est-Ă -dire les foyers situĂ©s dans les zones d’extinction anticipĂ©e de la diffusion analogique, telles que prĂ©cisĂ©ment dĂ©finies par le CSA, et recevant les services diffusĂ©s par la seule voie hertzienne terrestre. Les foyers ayant dĂ©jĂ  souscrit, Ă  la date d’extinction, une autre offre de rĂ©ception des services de tĂ©lĂ©vision par voie filaire cĂąble, ADSL
 ou satellitaire ne seront donc pas Ă©ligibles au dispositif. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, la mesure pourrait concerner foyers, rĂ©partis dans des zones se situant pour l’essentiel dans le Nord et l’Est de la France. En application du principe de neutralitĂ© technologique, les foyers Ă©ligibles resteront libres de choisir leur mode de rĂ©ception de substitution TNT, cĂąble, satellite, ADSL
. Dans tous les cas de figure, l’aide accordĂ©e n’aura pour effet de permettre la rĂ©ception des services de tĂ©lĂ©vision que sur deux terminaux au plus par foyer. Le rĂ©gime d’aide doit ĂȘtre financĂ© par l’État et, le cas Ă©chĂ©ant, les collectivitĂ©s territoriales concernĂ©es. La participation financiĂšre de l’État est assurĂ©e au moyen du fonds d’accompagnement du numĂ©rique, pour l’abondement duquel le Parlement a provisionnĂ© 15 millions d’euros sur le budget gĂ©nĂ©ral de l’État en loi de finances rectificative pour 2005. Les crĂ©dits ainsi provisionnĂ©s n’ont pas encore Ă©tĂ© engagĂ©s. NotifiĂ©e en fĂ©vrier 2006 Ă  la Commission europĂ©enne, conformĂ©ment aux rĂšgles relatives aux aides d’État, la mesure est en cours d’instruction par la Commission. Une utilisation rapide de ces crĂ©dits pourra ĂȘtre lancĂ©e suite Ă  la confĂ©rence rĂ©gionale des radiocommunications du 16 juin 2006 et aux nĂ©gociations bilatĂ©rales en cours sur le schĂ©ma de transition de la diffusion analogique vers la diffusion numĂ©rique aux frontiĂšres avec les pays voisins l’Allemagne, la Suisse et la Belgique essentiellement. ParallĂšlement, le Gouvernement a dĂ©cidĂ© d’instituer une mesure Ă  plus long terme d’accompagnement de la transition vers la radiodiffusion numĂ©rique. La mesure ainsi projetĂ©e vise Ă  Ă©viter que nombre des foyers parmi les moins aisĂ©s ne se trouvent, suite Ă  l’extinction totale du signal analogique au profit de l’émission du seul signal numĂ©rique, dans l’impossibilitĂ© de recevoir un quelconque service de tĂ©lĂ©vision Ă  l’aide de leur actuel Ă©quipement de rĂ©ception. Elle consiste concrĂštement en l’institution d’un fonds d’aide Ă  l’équipement des foyers Ă  faibles ressources en moyens de rĂ©ception de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique, permettant l’attribution d’une aide individuelle modulĂ©e en fonction des capacitĂ©s contributives de ses bĂ©nĂ©ficiaires, Ă  savoir des particuliers exonĂ©rĂ©s de redevance audiovisuelle et ne recevant les services de tĂ©lĂ©vision que par la voie hertzienne terrestre en mode analogique. Ce projet figure Ă  l’article 5 du projet de loi relative Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur. f Les enjeux du projet de loi tĂ©lĂ©vision du futur »Le projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur a Ă©tĂ© dĂ©libĂ©rĂ© en conseil des ministres le 26 juillet dernier et dĂ©posĂ© au SĂ©nat. Il vise Ă  mettre en place le cadre juridique pour assurer le basculement complet de l’analogique au numĂ©rique au plus tard le 30 novembre 2011. Les principales dispositions du projet de loi Ce projet de loi, qui s’inscrit dans le cadre de l’ambition fixĂ©e par le PrĂ©sident de la RĂ©publique de faire de la France l’un des pays les plus avancĂ©s dans le domaine du numĂ©rique, repose sur deux principes fondamentaux – Le basculement inĂ©luctable de l’analogique vers le numĂ©rique ne peut avoir lieu que si, pour chaque Français, les conditions, c’est-Ă -dire tant la couverture que l’équipement, sont rĂ©unies pour qu’il reçoive la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique. Pour les plus dĂ©munis, ceux qui n’ont pas les moyens de s’équiper, un fonds d’aide sera créé. Le lancement d’une offre gratuite par satellite permettra Ă  100 % de la population de recevoir les chaĂźnes gratuites de la TNT sans abonnement dans les zones oĂč la TNT ne sera pas diffusĂ©e par voie hertzienne terrestre. L’offre proposera ces chaĂźnes avec la mĂȘme numĂ©rotation que celle utilisĂ©e pour la diffusion par voie hertzienne terrestre. – Le passage au numĂ©rique sous toutes ses formes doit prĂ©server les grands Ă©quilibres Ă©conomiques du monde de l’audiovisuel la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre, la tĂ©lĂ©vision en haute dĂ©finition et la tĂ©lĂ©vision mobile personnelle doivent en particulier participer au dĂ©veloppement de la crĂ©ation audiovisuelle et cinĂ©matographique. Le basculement complet de l’analogique au numĂ©rique dĂ©butera le 31 mars 2008 et aura lieu progressivement par zones gĂ©ographiques. L’utilisation du dividende numĂ©rique » sera guidĂ©e par les principes suivants – toute frĂ©quence libĂ©rĂ©e par l’arrĂȘt de la diffusion analogique d’une chaĂźne de tĂ©lĂ©vision fera l’objet d’une rĂ©affectation expresse Ă  l’autoritĂ© gestionnaire par le Premier ministre avant toute nouvelle assignation et aprĂšs une consultation publique. – lorsque les trois chaĂźnes privĂ©es basculeront complĂštement de la diffusion analogique Ă  la diffusion numĂ©rique, les sociĂ©tĂ©s qui contrĂŽlent ces chaĂźnes pourront faire la demande d’une autre chaĂźne au CSA qui veillera au respect de certaines conditions dont les obligations en matiĂšre de soutien Ă  la production cinĂ©matographique et audiovisuelle. – les contrats d’objectifs et de moyens de France TĂ©lĂ©visions et ARTE prĂ©ciseront les modalitĂ©s de mise en Ɠuvre, en particulier pour la diffusion en haute dĂ©finition des chaĂźnes de service public. Les six chaĂźnes de service public diffusĂ©es sur la TNT seront portĂ©es Ă  sept avec la diffusion de France Ô. Le projet de loi cherche Ă  favoriser tous les acteurs de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre dans le cadre des attributions de frĂ©quences concernant la haute dĂ©finition et la tĂ©lĂ©vision mobile personnelle. En accĂ©lĂ©rant sensiblement le calendrier de la fin de la diffusion analogique qui dĂ©marrera dans les premiĂšres zones gĂ©ographiques concernĂ©es en mars 2008, le projet de loi permettra aux nouvelles chaĂźnes de la TNT d’ĂȘtre effectivement reçues par tous les Français et d’accroĂźtre ainsi leur audience. Le projet de loi prĂ©voit que les nouveaux moyens de diffusion des programmes que sont la haute dĂ©finition et la tĂ©lĂ©vision mobile personnelle contribueront Ă  la crĂ©ation audiovisuelle française par une hausse de la contribution au COSIP, le compte de soutien Ă  l’industrie des programmes audiovisuels. Saisi par le ministre de la Culture et de la communication, le Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel a rendu son avis le 11 juillet 2006 et exprimĂ© son accord avec les objectifs du projet de loi, en ce qu’il comporte un dispositif plus rĂ©aliste que celui prĂ©vu par la loi du 9 juillet 2004 pour l’extinction de la diffusion des services de tĂ©lĂ©vision par voie hertzienne terrestre en mode analogique et en ce qu’il traduit la volontĂ© de favoriser l’émergence de nouveaux dĂ©veloppements pour la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique. Le CSA a nĂ©anmoins rappelĂ© que la diversification des opĂ©rateurs et le dĂ©veloppement de modes de diffusion propres Ă  accroĂźtre l’offre tĂ©lĂ©visuelle proposĂ©e aux tĂ©lĂ©spectateurs doivent ĂȘtre recherchĂ©s avant tout autre objectif. Un Ă©quilibre doit donc ĂȘtre trouvĂ© afin que les mesures tendant Ă  favoriser le dĂ©veloppement de la TNT n’aboutissent pas Ă  renforcer la position des acteurs les plus puissants. L’avis du CSA formule Ă©galement certaines observations sur les modalitĂ©s prĂ©vues pour l’extinction de la diffusion analogique, sur le dĂ©veloppement de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique et sur le dĂ©ploiement de la tĂ©lĂ©vision du futur. Le CSA s’est notamment interrogĂ© sur la proportionnalitĂ© des avantages accordĂ©s aux chaĂźnes nationales analogiques. En effet, l’attribution des frĂ©quences aprĂšs appel aux candidatures est l’un des principes fondamentaux du droit de l’audiovisuel. La justification rĂ©side donc non seulement dans l’appartenance des frĂ©quences radioĂ©lectriques au domaine public de l’État mais surtout dans le respect des principes constitutionnels de pluralisme et d’égalitĂ© de traitement, qui supposent que les autorisations soient dĂ©livrĂ©es Ă  l’issue d’un appel aux candidatures et pour une durĂ©e limitĂ©e 57. Le CSA a demandĂ© des garanties sur la disposition prĂ©voyant l’attribution aux groupes qui contrĂŽlent les chaĂźnes nationales analogiques privĂ©es TF1, Canal + et M6 d’une chaĂźne supplĂ©mentaire, Ă  l’extinction de l’analogique. Le renforcement de la position des acteurs historiques de l’analogique pourrait fragiliser la situation Ă©conomique des nouveaux entrants et provoquer ainsi des effets induits de concentration sur le marchĂ© de la tĂ©lĂ©vision gratuite. Par rapport Ă  l’avant-projet sur lequel le CSA a Ă©tĂ© consultĂ©, le projet de loi dĂ©finitif comprend trois amĂ©liorations principales la suppression de la deuxiĂšme phase du calendrier d’extinction et la prolongation de 5 ans qui lui Ă©tait attachĂ©e, la facultĂ© donnĂ©e au CSA de renĂ©gocier les conventions d’autorisation Ă  chaque Ă©chĂ©ance de prolongation et la possibilitĂ© de ne pas donner suite Ă  une demande de chaĂźne supplĂ©mentaire dont le service paraĂźtrait constituer un risque pour le pluralisme du paysage audiovisuel existant. Le Conseil avait Ă©galement estimĂ© que le calendrier d’extinction prĂ©vu devait ĂȘtre adaptĂ© pour l’outre-mer, oĂč le dĂ©ploiement de la TNT n’a pas encore commencĂ© et oĂč les dates d’extinction de l’analogique devraient ĂȘtre amĂ©nagĂ©es dans chacune des collectivitĂ©s concernĂ©es. En concertation avec la dĂ©marche du CSA 58, les ministres de l’Outre-mer et de la Culture et de la communication ont confiĂ© au prĂ©sident du comitĂ© stratĂ©gique pour le numĂ©rique, M. Jean-Michel Hubert, une mission d’évaluation, d’analyse et de proposition sur les modalitĂ©s de dĂ©veloppement de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique outre-mer. Cette mission, qui doit aboutir sur un rapport avant la fin de l’annĂ©e, devra notamment Ă©valuer la pertinence outre-mer de l’ensemble des technologies la voie hertzienne terrestre, le satellite, le cĂąble, l’ADSL et les technologies sans fil. L’enjeu ultime reste de permettre Ă  l’ensemble des Français d’avoir accĂšs, dans les meilleurs dĂ©lais, aux chaĂźnes gratuites de la TNT. Parce que cet objectif de 100 % de couverture numĂ©rique rĂ©pond Ă  une double prĂ©occupation d’une part, assurer Ă  l’ensemble de nos concitoyens l’accĂšs aux chaĂźnes gratuites de la TNT, qu’elles soient publiques ou privĂ©es ; d’autre part, accĂ©lĂ©rer la migration des tĂ©lĂ©spectateurs vers le numĂ©rique de façon Ă  mettre en place les conditions d’une extinction de la diffusion analogique devenue inutilement coĂ»teuse. 2.– Les tĂ©lĂ©visions locales en plein essorIl existe aujourd’hui en France mĂ©tropolitaine et outre-mer 32 services de tĂ©lĂ©vision locale diffusĂ©s par voie hertzienne en mode analogique et une centaine de services diffusĂ©s sur les canaux locaux du cĂąble. La France est nĂ©anmoins trĂšs en retard par rapport Ă  ses voisins europĂ©ens et Ă  l’AmĂ©rique du nord elle tente depuis quelques annĂ©es de multiplier les appels Ă  candidature pour l’attribution de frĂ©quences analogiques et, surtout, de rĂ©server une place Ă  ces chaĂźnes sur la TNT. Le Gouvernement a initiĂ© un plan de relance pour ces services, accompagnĂ©, depuis 2005, de nombreux appels aux candidatures lancĂ©s par le CSA pour des diffusions en mode analogique et rĂ©cemment en mode numĂ©rique. a Relancer et amĂ©liorer le financement des tĂ©lĂ©visions localesDepuis 2004, un ensemble de mesures lĂ©gislatives et rĂ©glementaires favorables au dĂ©veloppement des tĂ©lĂ©visions locales ont Ă©tĂ© prises. Ces mesures se sont traduites par des adaptations du dispositif de contrĂŽle des concentrations, l’amĂ©nagement d’une fiscalitĂ© plus incitative, l’adaptation de l’environnement rĂ©glementaire ou des modalitĂ©s d’ouverture des secteurs interdits de publicitĂ© tĂ©lĂ©visĂ©e 59. Ainsi, cinq chaĂźnes locales 60 ont confiĂ©, dĂ©but 2005, la commercialisation de leur espace publicitaire extralocal Ă  une nouvelle rĂ©gie, TĂ©lĂ©visions locales et rĂ©gionales associĂ©es TLR AssociĂ©es, créée Ă  l’initiative des sociĂ©tĂ©s Socprint rĂ©gie du groupe Socpresse, InterdĂ©co rĂ©gie du groupe Hachette et des chaĂźnes locales. D’autres chaĂźnes locales pourraient prochainement les rejoindre, constituant ainsi un rĂ©seau susceptible d’attirer les annonceurs nationaux. b Achever le dĂ©ploiement en analogique hertzienLe dĂ©ploiement des tĂ©lĂ©visions locales hertziennes analogiques s’est poursuivi. Ces tĂ©lĂ©visions locales sont classĂ©es en quatre catĂ©gories selon leur spĂ©cificitĂ© gĂ©ographique le CSA a attribuĂ© de nouvelles frĂ©quences pour des services diffusĂ©s par voie hertzienne en mode analogique dans chacune de ces catĂ©gories. Au titre des tĂ©lĂ©visions de ville » prĂ©sentes dans les grandes agglomĂ©rations d’abord 61, huit nouvelles chaĂźnes 62 ont Ă©tĂ© autorisĂ©es par le CSA en 2005. Le 4 juillet 2006, Rennes CitĂ© MĂ©dia l’a Ă©galement Ă©tĂ© sur l’agglomĂ©ration de Rennes. DĂ©sormais, parmi les aires urbaines comptant plus de habitants, le cas trĂšs particulier de Paris mis Ă  part, seules celles de Douai–Lens, Toulon, Rouen, Metz et Nancy ne disposent pas en 2006 d’une chaĂźne locale 63. Les tĂ©lĂ©visions dites de pays » 64 sont dĂ©sormais au nombre de quatre TV8 Mont-Blanc, TLP Luberon, TL7 Loire et, depuis juin 2006, TĂ©lĂ©paese Haute-Corse. Au titre des tĂ©lĂ©visions de proximitĂ© 65, le CSA a autorisĂ© deux nouvelles chaĂźnes Canal 15, diffusĂ©e en VendĂ©e Ă  La Roche-sur-Yon
 en canal partagĂ© avec TV VendĂ©e, Ă©galement diffusĂ©e Ă  Saint-Gilles Croix-de-Vie. Enfin, le modĂšle des tĂ©lĂ©visions d’outre-mer est trĂšs diffĂ©rent du fait d’une spĂ©cificitĂ© gĂ©ographique et d’un format plus gĂ©nĂ©raliste. Parmi les dĂ©partements d’outre-mer 66, la Guadeloupe fait figure d’exception avec cinq chaĂźnes. En dehors des canaux de RFO et des chaĂźnes cryptĂ©es du groupe Canal Plus, la seule chaĂźne locale existante Ă  ce jour est Tahiti Nui TV, dont l’opĂ©rateur est l’office des postes et tĂ©lĂ©communications de PolynĂ©sie française. Dans le contexte de l’extinction progressive de la diffusion analogique, il n’y aura plus de nouvelle autorisation hertzienne analogique au-delĂ  des appels Ă  candidatures dĂ©jĂ  lancĂ©s. c Poursuivre la diffusion des tĂ©lĂ©visions locales sur le cĂąbleLe cĂąble, qui n’est pas soumis au problĂšme de la raretĂ© des frĂ©quences, est devenu le premier vecteur de diffusion de chaĂźnes locales environ 2 millions de tĂ©lĂ©spectateurs bĂ©nĂ©ficient du service antenne ou sont abonnĂ©s Ă  une offre Ă©largie 67. Le montant total des budgets des canaux locaux est de l’ordre de 20 millions d’euros et le poids financier des collectivitĂ©s territoriales demeure souvent prĂ©pondĂ©rant 68 puisque ces derniĂšres fournissent en moyenne 50 % des ressources des chaĂźnes locales du cĂąble. En contrepartie, le canal local est tenu, en gĂ©nĂ©ral, d’assurer une mission de service public. La conclusion d’un contrat d’objectifs et de moyens permet alors de formaliser les engagements rĂ©ciproques de la chaĂźne et de la collectivitĂ©. La deuxiĂšme source de revenus des canaux locaux est constituĂ©e par les redevances versĂ©es par les cĂąblo-opĂ©rateurs, qui reprĂ©sentent environ 25 % de leur budget. TrĂšs rĂ©cemment, le lancement de la chaĂźne Paris Cap’ par le groupe Hersant MĂ©dias a Ă©tĂ© fortement mĂ©diatisĂ© et tĂ©moigne du dynamisme de la tĂ©lĂ©vision locale sur le cĂąble. DiffusĂ©e depuis le 23 octobre 2006, la chaĂźne, prĂ©sente sur le bouquet de base du rĂ©seau cĂąblĂ©, se prĂ©sente comme gratuite et interactive et vise un public de foyers Ă  Paris et dans la premiĂšre couronne. d Encourager le dĂ©veloppement des chaĂźnes locales en TNTVotre Rapporteur spĂ©cial souhaite que les pouvoirs publics prennent toutes les dispositions pour que les chaĂźnes locales soient rapidement disponibles sur la TNT. En vue de l’ouverture Ă  la diffusion en mode hertzien numĂ©rique des tĂ©lĂ©visions locales, le ministre de la Culture et de la communication a donnĂ© son accord au CSA le 19 janvier 2006 pour la mise en Ɠuvre d’une solution permettant de lancer, sur l’ensemble du territoire, des tĂ©lĂ©visions locales en TNT. L’accord a Ă©tĂ© donnĂ© pour qu’une chaĂźne de service public France 4 soit dĂ©placĂ©e du multiplexe R1, dont les caractĂ©ristiques techniques sont plus adaptĂ©es Ă  la diffusion de chaĂźnes locales, vers un autre multiplexe
 libĂ©rant ainsi la place nĂ©cessaire Ă  la diffusion d’une chaĂźne locale. Une telle solution permet de libĂ©rer un canal par site, qui pourra ĂȘtre utilisĂ© par les chaĂźnes locales, ou dans certains cas par France 3 afin d’assurer l’adĂ©quation nĂ©cessaire du dĂ©crochage local reçu au bassin de population. Cette initiative est diversement apprĂ©ciĂ©e, certaines chaĂźnes nationales se plaignant qu’une frĂ©quence bĂ©nĂ©ficiant d’une couverture nationale soit allouĂ©e pour des utilisations locales et gĂąche » ainsi les ressources disponibles
 Ces chaĂźnes plaident gĂ©nĂ©ralement pour une solution alternative via l’utilisation des frĂ©quences adjacentes » 69. Dans le mĂȘme temps, les reprĂ©sentants des tĂ©lĂ©visions locales rejettent l’hypothĂšse des frĂ©quences adjacentes ». Ils ont Ă©galement Ă©crit au ministre et au prĂ©sident du CSA pour regretter la lenteur du lancement des appels aux candidatures pour les services locaux en TNT au plan national et leur demander de respecter les engagements annoncĂ©s
 qui ne semblent pas se traduire par des Ă©volutions notables Ă  ce jour. Quelle que soit la solution choisie, votre Rapporteur spĂ©cial plaide pour parvenir Ă  une diffusion rapide de ces chaĂźnes sur la TNT afin d’encourager ces mĂ©dias Ă©mergents donc fragiles. À ce titre, la constitution d’un groupement d’intĂ©rĂȘt Ă©conomique regroupant toutes les chaĂźnes locales autorisĂ©es constituerait un Ă©lĂ©ment positif. De plus, le projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur prĂ©voit que les Ă©diteurs de services locaux de tĂ©lĂ©vision pourront dorĂ©navant faire jouer leur droit Ă  une diffusion intĂ©grale et simultanĂ©e en mode numĂ©rique de leur programme analogique Ă  tout moment, et notamment, Ă  l’inverse du cadre juridique actuel, hors appel aux candidatures. Les dispositions introduites dans ce projet de loi permettront aux tĂ©lĂ©visions locales de bĂ©nĂ©ficier d’une garantie de diffusion numĂ©rique jusqu’à la fin de leur autorisation analogique et en tous les cas au moins jusqu’au 31 mars 2015. Enfin, s’agissant du cas particulier de la rĂ©gion parisienne, le CSA a identifiĂ© des frĂ©quences disponibles en propre pour des services locaux et a lancĂ©, en octobre 2005, une consultation publique sur le dĂ©ploiement de la TNT en rĂ©gion parisienne. Il a reçu 35 contributions provenant essentiellement d’éditeurs de services de tĂ©lĂ©vision, d’éditeurs de presse, d’organisations professionnelles, de diffuseurs, d’opĂ©rateurs de tĂ©lĂ©communication, de collectivitĂ©s locales. Suite Ă  cette consultation, le CSA a dĂ©cidĂ© de lancer, le 25 juillet 2006, un appel Ă  candidatures pour quatre tĂ©lĂ©visions locales en mode numĂ©rique sur un multiplexe pour des services couvrant une population supĂ©rieure Ă  10 millions d’habitants, impliquant des conventions pour ces chaĂźnes sur le modĂšle des chaĂźnes nationales. Le 10 octobre 2006, le CSA a dĂ©cidĂ© de reporter la date limite de remise des dossiers de candidature au 13 novembre 2006 au lieu du 16 octobre 2006, date initialement prĂ©vue. Les autorisations devraient ĂȘtre dĂ©livrĂ©es en mai au lieu de mars 2007 pour une date probable de dĂ©marrage du multiplex avant la fin 2007. Parmi les candidats probables, l’alliance de TF1 et de La Poste a notamment Ă©tĂ© trĂšs commentĂ©e. La Caisse d’épargne, qui est l’un des premiers investisseurs dans la tĂ©lĂ©vision locale en France, devrait Ă©galement participer Ă  cet appel d’offres. 3.– Renouveler le soutien Ă  la production audiovisuelle indĂ©pendantea Un dispositif rĂ©glementaire protecteurVotre Rapporteur spĂ©cial rappelait, l’an dernier, la nĂ©cessitĂ© de dresser un bilan objectif des dĂ©crets Tasca ». En 2001, en effet, paraissaient, Ă  l’initiative de Madame Catherine Tasca, ministre de la Communication, des dĂ©crets qui allaient bouleverser le paysage audiovisuel dans les rapports entre producteurs et diffuseurs. L’objectif Ă©tait alors de favoriser la crĂ©ation d’une production originale. Le dĂ©cret du 9 juillet 2001 70 dit dĂ©cret production » limite en particulier la dĂ©tention des droits de diffusion du radiodiffuseur, dans la durĂ©e de la fenĂȘtre de diffusion comme dans le nombre de passages Ă  l’antenne. Il prĂ©voit ainsi que le diffuseur n’acquiert des droits que pour une diffusion en exclusivitĂ© intervenant dans un dĂ©lai maximal de 18 mois Ă  compter de la diffusion de l’Ɠuvre. Toutefois, le contrat initial d’acquisition de l’Ɠuvre peut prĂ©voir un droit d’option prioritaire et exclusive au profit du diffuseur pour des diffusions supplĂ©mentaires. Dans ce cas, le prix de ces rediffusions doit ĂȘtre fixĂ© dans le contrat initial. La durĂ©e totale des droits est de 42 mois au maximum, et l’Ɠuvre ne peut ĂȘtre diffusĂ©e plus de trois fois dans cette pĂ©riode. Les dĂ©crets prĂ©voient Ă©galement un Ă©quilibre entre production dĂ©pendante » et production indĂ©pendante » dont l’objectif premier est de favoriser l’existence de producteurs indĂ©pendants. Pourtant, la complexitĂ© du paysage audiovisuel français et la multiplication des participations croisĂ©es rendent parfois les critĂšres retenus quelque peu artificiels. On rappellera que le secteur de la production audiovisuelle est en apparence Ă©clatĂ© puisqu’il compte plus de 670 entreprises de production de stock, majoritairement de trĂšs petite taille, et un peu plus d’une vingtaine d’entreprises de production d’émissions de flux. Le chiffre d’affaires du secteur en 2005 est de l’ordre de plus de 2,2 milliards d’euros, dont plus de 1,2 milliard d’euros rĂ©alisĂ©s par le secteur de la production de programmes de stock et environ 1 milliard d’euros rĂ©alisĂ©s par les producteurs de programmes de flux 71. La totalitĂ© de la production de programmes de stock est aidĂ©e par le compte de soutien aux industries de programmes COSIP, gĂ©rĂ© par le centre national de la cinĂ©matographie. Globalement, le volume horaire d’Ɠuvres audiovisuelles aidĂ©es par le COSIP a progressĂ© en 2005 de + 1,2 % 72. En 2005, sur les 187,1 millions d’euros accordĂ©s par le COSIP Ă  l’ensemble des entreprises de production, 18,6 millions d’euros l’ont Ă©tĂ© Ă  des producteurs implantĂ©s en rĂ©gion. Et sur l’ensemble des producteurs aidĂ©s par le COSIP 674 en 2005, 656 sont des producteurs indĂ©pendants au sens du dĂ©cret Tasca 73. b Un bilan global est nĂ©cessaireAfin de procĂ©der au nĂ©cessaire travail de bilan sur le dispositif rĂ©glementaire en vigueur, une contribution a Ă©tĂ© demandĂ©e par le ministre de la Culture et de la communication, en novembre 2004, Ă  l’Observatoire de la production audiovisuelle. En janvier 2005, un groupe de travail a Ă©tĂ© constituĂ© au sein de l’Observatoire afin de rĂ©aliser un diagnostic commun Ă  l’ensemble des acteurs producteurs, diffuseurs, distributeurs, sociĂ©tĂ© des auteurs sur les consĂ©quences de la mise en Ɠuvre de la rĂ©glementation de 2001. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, l’analyse du groupe de travail confirme que cette rĂ©glementation a bien permis de dĂ©velopper la production, principalement inĂ©dite, tous genres confondus, ainsi que le secteur d’entreprises de production indĂ©pendante. Les chaĂźnes semblent donc avoir trouvĂ©, dans ce cadre rĂ©glementaire, les moyens de dĂ©velopper une programmation identitaire et dĂ©pendante tout en renforçant leurs apports dans les entreprises de production indĂ©pendantes. Ainsi, les donnĂ©es recueillies par le groupe de travail montrent, qu’entre 2000 et 2004, les investissements des chaĂźnes dans les Ɠuvres audiovisuelles ont progressĂ© de 27 % tant en volume financier de 610 Ă  771 millions d’euros qu’en volume horaire de heures Ă  heures. Ces investissements ont Ă©tĂ© consacrĂ©s dans une trĂšs grande proportion Ă  la production d’Ɠuvres d’expression originale française et inĂ©dite. D’autre part, l’étude rĂ©vĂšle que les sommes investies, et dĂ©sormais comptabilisĂ©es dans les obligations de production, en dĂ©penses d’écriture et de dĂ©veloppement ont plus que doublĂ© en quatre ans le dĂ©veloppement de la crĂ©ation française s’en trouve donc renforcĂ©. Enfin, il ressort du constat Ă©tabli par le groupe de travail que le durcissement des mesures rĂ©glementaires relatives Ă  l’indĂ©pendance suppression des parts de coproduction, limitation de la durĂ©e des droits n’a pas pĂ©nalisĂ© le financement de la production. On constate nĂ©anmoins que la part rĂ©servĂ©e Ă  ces dĂ©penses par rapport aux dĂ©penses totales a diminuĂ© au profit de celles consacrĂ©es aux Ɠuvres dĂ©pendantes. Pour autant, les auditions menĂ©es par votre Rapporteur spĂ©cial ont aussi rĂ©vĂ©lĂ© que certaines attentes existaient parmi les acteurs de l’audiovisuel pour faire Ă©voluer ce cadre rĂ©glementaire. Il semble notamment que le groupe de travail n’ait pas examinĂ© l’impact de l’ensemble des mesures contenues dans la rĂ©forme de juillet 2001, notamment en ce qui concerne la circulation des droits. Cet aspect mĂ©riterait pourtant d’ĂȘtre approfondi. Votre Rapporteur spĂ©cial souhaite donc que la position du ministre sur les rĂ©sultats du groupe de travail prenne en compte la question des droits. Sans remettre en cause le systĂšme ni basculer dans un rĂ©gime comparable Ă  celui de la BBC laquelle possĂšde la totalitĂ© des droits sur son catalogue, une Ă©volution Ă©quilibrĂ©e est possible pour adapter la relation entre production et diffusion aux mutations du secteur audiovisuel. B.– FRANCE TÉLÉVISIONS UN PARI POUR LA MODERNITÉTous les paris comportent leur part de risque. En baptisant Gagner le pari pour la modernitĂ© » leur proposition de nouveau contrat d’objectifs et de moyens, les responsables de France TĂ©lĂ©visions savent qu’ils prennent un risque. La volontĂ© du nouveau prĂ©sident de France TĂ©lĂ©visions de rĂ©concilier exigences de service public, crĂ©ativitĂ© et accĂšs Ă  un large public est, en effet, ambitieuse. Mais ce risque est lĂ©gitime et raisonnĂ©. Il correspond Ă  une certaine idĂ©e du service public, dont votre Rapporteur spĂ©cial approuve le principe et salue les orientations. Pour permettre Ă  cette ambition de se concrĂ©tiser, il reste Ă  l’État et Ă  l’entreprise Ă  formaliser, le plus rapidement possible, les missions et les engagements Ă  horizon 2010 dans un nouveau contrat d’objectifs et de moyens, afin que France TĂ©lĂ©visions dispose d’une feuille de route claire et prĂ©cise pour gagner le pari de la modernitĂ© »... Pour l’y aider, il est proposĂ© de porter l’affectation du produit de la redevance audiovisuelle revenant Ă  France TĂ©lĂ©visions Ă  millions d’euros en 2007 TTC, soit une progression de 2,5 % par rapport Ă  2006. 1.– Le groupe France TĂ©lĂ©visions un nouvel Ă©lana Le bon bilan de la prĂ©sidence TessierLa direction de France TĂ©lĂ©visions a hĂ©ritĂ© d’une situation contrastĂ©e mais globalement saine les indicateurs financiers sont positifs et le groupe s’est engagĂ©, conformĂ©ment Ă  son contrat d’objectifs et de moyens signĂ© pour la pĂ©riode 2001–2005, dans une dynamique d’optimisation des ressources qui a portĂ© ses fruits. Le groupe a amĂ©liorĂ© sa situation financiĂšre depuis 2000 et les principaux indicateurs financiers de France TĂ©lĂ©visions confirment en 2005 la relative bonne santĂ© financiĂšre du groupe, grĂące Ă  des performances de gestion qui ont permis d’amĂ©liorer encore les capitaux propres et ont maintenu une trĂ©sorerie positive dans un contexte financier contraint. Le rĂ©sultat net consolidĂ© part du groupe s’élĂšve Ă  23,9 millions d’euros, proche de celui arrĂȘtĂ© en 2004 25,4 millions d’euros. Les capitaux propres du groupe se sont Ă©tablis Ă  418 millions d’euros et la trĂ©sorerie nette a Ă©voluĂ© positivement, s’élevant Ă  112 millions d’euros en fin de pĂ©riode contre 91,5 millions d’euros Ă  fin 2004, soit + 23 %. La structure financiĂšre de France TĂ©lĂ©visions a continuĂ© Ă  s’amĂ©liorer, avec un endettement de 222 millions d’euros et un ratio d’endettement net qui est passĂ© de 120 % en 1999, Ă  30,6 % en 2004 et 26 % en 2005. La capacitĂ© d’autofinancement s’est Ă©levĂ©e Ă  147 millions d’euros, permettant au groupe d’autofinancer ses investissements immobiliers et techniques. Le rĂ©sultat net de la filiale de distribution du groupe, France TĂ©lĂ©visions Distribution, s’élĂšve Ă  1,3 million d’euros en 2005, soit plus du double de celui de 2004, et le meilleur enregistrĂ© depuis sa crĂ©ation en 1991. Cela traduit particuliĂšrement la prioritĂ© donnĂ©e par le groupe Ă  la diversification de ses revenus. Par ailleurs, la mise en Ɠuvre du plan Synergia a permis de dĂ©gager 66,1 millions d’euros d’économies en 2005. On rappellera que le plan Synergia, prĂ©sentĂ© au conseil d’administration du 11 avril 2002, prĂ©voyait un plan d’économies et de synergies de 170 millions d’euros en cumulĂ© sur la pĂ©riode 2001–2005. Ces objectifs ont Ă©tĂ© dĂ©passĂ©s puisque ce sont 205 millions d’euros d’économies qui ont Ă©tĂ© dĂ©gagĂ©s sur la pĂ©riode du COM. Le groupe a Ă©galement poursuivi une politique de ressources humaines active. Les effectifs moyens annuels du groupe en pĂ©rimĂštre Ă©largi sont restĂ©s relativement stables entre 2004 et 2005, avec une progression limitĂ©e Ă  0,5 %. Cette Ă©volution intĂšgre le passage Ă  une diffusion 24h/24 de France 5, la crĂ©ation de France 4 et celle de France Ô. Sur le pĂ©rimĂštre du COM 2001–2005 stricto sensu, les effectifs moyens annuels sont Ă©galement stables par rapport Ă  2004, avec ETP. Des efforts ont Ă©tĂ© faits sur la rĂ©duction du recours au personnel non permanent dans l’ensemble des sociĂ©tĂ©s, et plus particuliĂšrement Ă  France 3 74. On signalera que le coĂ»t de grille consolidĂ© du groupe s’élĂšve Ă  millions d’euros, soit une progression de 3,3 % par rapport Ă  2004 Ă  pĂ©rimĂštre comparable. ÉVOLUTION DU COÛT DE GRILLE DES CHAÎNES DE FRANCE TÉLÉVISIONS DE 2002 À 2007 en millions d’euros 2002 2003 2004 2005 2006 PrĂ©visions 2007 France 2 680,5 712,8 730,7 741,9 774,4 812,7 France 3 692,6 706,4 728,5 749,8 756,4 774,6 France 4 – – – 10,8 13,6 15,5 France 5 84,7 90,1 96,7 103,7 106,5 111,5 RFO – – 71,7 152,6 156,9 160,6 Total groupe Observations France 4 a Ă©tĂ© lancĂ©e en mars 2005 et RFO a Ă©tĂ© intĂ©grĂ©e au groupe France TĂ©lĂ©visions au courant de l’annĂ©e 2004 et cette intĂ©gration n’a eu d’impact sur les comptes du groupe que sur le deuxiĂšme semestre le coĂ»t de grille annuel de RFO en 2004 est de 143,5 millions d’euros. Source France TĂ©lĂ©visions En termes d’audience, les chaĂźnes de groupe subissent, globalement, les mĂȘmes difficultĂ©s que les chaĂźnes privĂ©es du rĂ©seau hertzien, alors que la part de marchĂ© publicitaire de France TĂ©lĂ©visions 21,83 % s’est maintenue en 2005 + 0,06 %. Des audiences qui rĂ©sistent L’audience consolidĂ©e du groupe a rĂ©sistĂ© plutĂŽt efficacement Ă  la forte croissance de la concurrence. Ainsi, France TĂ©lĂ©visions a rempli en 2005 les objectifs du COM le groupe rĂ©alise 54,7 % d’audience cumulĂ©e quotidienne en 2005 contre 54,6 % en 2004 et un objectif de plus de 50 % dans le COM et 86,7 % d’audience cumulĂ©e hebdomadaire en 2005 contre 86,3 % en 2004 et un objectif de plus de 75 % dans le COM. NĂ©anmoins, sur l’ensemble de l’annĂ©e, la part d’audience globale du groupe recule puisqu’elle passe de 38,7 % en 2004 Ă  37,6 % en 2005. France 2 recule de 0,7 point avec 19,8 % de part d’audience moyenne. France 3 recule de 0,58 point avec 14,7 % de part d’audience, alors que France 5 continue sa progression. Toutefois, un redressement des audiences a Ă©tĂ© observĂ© Ă  partir du dernier trimestre 2005. L’analyse des performances des antennes de France TĂ©lĂ©visions peut ĂȘtre complĂ©tĂ©e par les rĂ©sultats des sites internet du groupe ces derniers ont enregistrĂ©, en moyenne en 2005, 8 millions de visites par mois soit une progression de 97 % par rapport Ă  2004 et 69 millions de pages vues par mois. Ils ont ainsi atteint un taux de pĂ©nĂ©tration de 12 % sur la population internaute contre 9 % en 2004, ce qui reprĂ©sente une moyenne de 2,3 millions d’internautes par mois soit + 45 % par rapport Ă  2004. Pour autant, dans un contexte de dĂ©veloppement exponentiel de l’offre, au travers du lancement de la TNT et de la croissance de la tĂ©lĂ©vision par ADSL, et d’augmentation de l’audience des chaĂźnes thĂ©matiques, on ne peut qu’ĂȘtre portĂ© Ă  croire que la baisse des audiences est inĂ©luctable. Elle est mĂȘme quasi mathĂ©matique, car plus les techniques Ă©volueront, plus les autres tĂ©lĂ©visions prendront de la place par exemple avec la tĂ©lĂ©vision sur tĂ©lĂ©phone mobile. Votre Rapporteur spĂ©cial estime donc essentiel de rendre possible Ă  terme une Ă©volution favorable des ressources publiques ou publicitaires, afin de maintenir la qualitĂ© des programmes. S’agissant des autres objectifs l’exĂ©cution du COM 2001–2005, ils ont Ă©tĂ© respectĂ©s tant en matiĂšre de politique Ă©ditoriale et de stratĂ©gie de dĂ©veloppement, de diversification et de partenariat qu’au niveau des relations avec les tĂ©lĂ©spectateurs. Sur le plan Ă©ditorial notamment, le groupe France TĂ©lĂ©visions a rempli l’ensemble de ses objectifs de diversitĂ© concernant son offre de programmes et de contribution Ă  la crĂ©ation audiovisuelle et cinĂ©matographique. L’investissement de France TĂ©lĂ©visions dans la crĂ©ation d’Ɠuvres audiovisuelles s’est accru sensiblement puisqu’il se situe en 2005 trĂšs au-delĂ  des objectifs fixĂ©s Ă  chacune des chaĂźnes par rapport Ă  leur chiffre d’affaires 19,11 % pour France 2, 19,96 % pour France 3 et plus de 28 % pour France 5. Par ailleurs, 54 films ont Ă©tĂ© coproduits en 2005 par les filiales cinĂ©ma du groupe, correspondant Ă  un montant global d’investissement de 53,8 millions d’euros. Un total de 394 films a Ă©tĂ© diffusĂ© en 2005 sur les antennes de France 2 et France 3. De mĂȘme, les Ă©missions tournĂ©es vers la culture, la connaissance et la dĂ©couverte, les programmes d’information, les magazines de reportage et d’investigation et les Ă©missions de services ont reprĂ©sentĂ© 56,8 % du volume total des Ă©missions de France 2, France 3 et France 5 en 2005, au-delĂ  donc de l’objectif de 50 %. France 2 et France 3 ont diffusĂ© 50 spectacles vivants en 2005, pour un objectif de 35 spectacles. Au total, prĂšs de heures de programmes d’information ont Ă©tĂ© diffusĂ©es en 2005, dont heures de journaux. b Les orientations stratĂ©giques de la prĂ©sidence CarolisFrance TĂ©lĂ©visions fait face Ă  de nombreux dĂ©fis stratĂ©giques, Ă©conomiques, sociaux sur lesquels les pouvoirs publics doivent se prononcer. De la dĂ©termination des prioritĂ©s et du financement des choix opĂ©rĂ©s dĂ©pendra l’avenir du groupe public au sein d’un paysage audiovisuel de plus en plus concurrentiel et de plus en plus tournĂ© vers l’approche multimĂ©dia. En liaison avec le COM qui doit ĂȘtre conclu le plus rapidement possible et que votre Rapporteur spĂ©cial a dĂ©jĂ  prĂ©sentĂ©, la nouvelle direction a mis en Ɠuvre un virage stratĂ©gique et Ă©ditorial ». On en retiendra quelques aspects plus particuliĂšrement importants. Sur le plan stratĂ©gique, tout d’abord, France TĂ©lĂ©visions est Ă©videmment en premiĂšre ligne pour le passage Ă  la TNT et le dĂ©veloppement du numĂ©rique. Pour rester fidĂšle Ă  ses missions de service public, le groupe devra avoir rapidement les moyens de s’inscrire dans cette nouvelle donne numĂ©rique », notamment pour reconquĂ©rir un public jeune qu’il a tendance Ă  perdre, pour maintenir des positions fortes et pour asseoir ainsi durablement son dĂ©veloppement. Cependant, la pĂ©riode transitoire du passage au numĂ©rique implique des surcoĂ»ts liĂ©s Ă  la double diffusion analogique / numĂ©rique que France TĂ©lĂ©visions doit, elle aussi, ĂȘtre en mesure de financer. Le coĂ»t de la diffusion analogique est actuellement de 192 millions d’euros par an. Les prĂ©visions pour les prochaines annĂ©es maintiennent ce coĂ»t stable en euros courants en estimant possible de faire en sorte que France 3 abandonne certaines dessertes locales au fur et Ă  mesure de l’élargissement de la couverture satellitaire numĂ©rique. Cette annĂ©e, la diffusion numĂ©rique de France 3 coĂ»tera, par exemple, environ 14 millions de plus que l’an dernier 11 millions pour la diffusion numĂ©rique terrestre et 3 millions pour la diffusion satellitaire, montant qui est appelĂ© Ă  doubler par la suite. Ces sommes, ajoutĂ©es Ă  celles de la diffusion analogique, pĂšsent lourdement et relativisent notamment l’augmentation de 2,5 % de la redevance affectĂ©e en 2007 Ă  France TĂ©lĂ©visions. Ainsi, le coĂ»t de la diffusion en numĂ©rique est estimĂ© Ă  15,1 millions d’euros pour le groupe en 2006, 26,6 millions d’euros en 2007, 37,4 millions d’euros en 2008, 40,4 millions d’euros en 2009 et 43,4 millions d’euros en 2010. Mais si l’augmentation de la ressource publique devra prioritairement ĂȘtre employĂ©e Ă  financer les surcoĂ»ts de double diffusion qui viennent d’ĂȘtre Ă©voquĂ©s, le groupe France TĂ©lĂ©visions estime ne pas ĂȘtre en mesure de faire face, sur ses ressources prĂ©visibles, Ă  certains chantiers spĂ©cifiques pour lesquels il demande un financement complĂ©mentaire et qui reprĂ©senteraient, d’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, un total de 272 millions d’euros sur la pĂ©riode 2006–2010 75. C’est notamment le cas du financement en coĂ»t de grille du sous-titrage en faveur des sourds et des malentendants et de la mise en place de la haute dĂ©finition, en particulier sur le plan des investissements. Les consĂ©quences de la loi pour l’égalitĂ© des chances La loi n° 2005-102 du 11 fĂ©vrier 2005 pour l’égalitĂ© des droits et des chances, la participation et la citoyennetĂ© des personnes handicapĂ©es impose d’adapter, pour les personnes sourdes ou malentendantes, la totalitĂ© des programmes de tĂ©lĂ©vision diffusĂ©s, Ă  l’exception des messages publicitaires, d’ici 2010. L’augmentation du volume des programmes sous-titrĂ©s va de pair avec une augmentation des budgets de sous-titrage. Le coĂ»t unitaire du sous-titrage augmente avec l’accroissement du volume offert, dans la mesure oĂč il s’étend aux Ă©missions les plus difficiles Ă  sous-titrer Ă©missions en direct ou enregistrĂ©es Ă  des heures proches de leur diffusion, magazines de dĂ©bat, pour lesquelles l’utilisation de techniques particuliĂšres et divers changements dans l’organisation seront nĂ©cessaires. Pour l’ensemble des programmes de flux, les chaĂźnes devront reconsidĂ©rer leur habillage antenne » afin que les sous-titres ne viennent pas masquer les informations Ă©crites incrustĂ©es Ă  l’écran horloge, nom d’un lieu ou d’une personne interrogĂ©e
. On prĂ©cisera, s’agissant de la chaĂźne ARTE, que cette derniĂšre favorise progressivement et de maniĂšre significative l’accĂšs des personnes sourdes et malentendantes aux programmes diffusĂ©s. En 2005, 30 % du volume de programmes 470 heures fourni par ARTE France Ă  la chaĂźne culturelle europĂ©enne a Ă©tĂ© sous-titrĂ© contre 7 % en 2004 110 heures. L’objectif est de passer Ă  50 % du volume en 2006, 75 % en 2007 et 100 % en 2008. Le surcoĂ»t est estimĂ© Ă  1,175 million d’euros. S’agissant de la question lĂ©gitime des sourds et des malentendants, on doit rappeler que, bien que des progrĂšs technologiques existent, il reste vrai que plus on sous-titre d’émissions en direct ou de dĂ©bats et plus le sous-titrage coĂ»te cher. Sous-titrer une Ă©mission de stock coĂ»te environ 15 euros la minute alors que sous-titrer une Ă©mission de flux en coĂ»te 35 Ă  45 euros, puisqu’il faut faire rĂ©pĂ©ter le texte dans un local phoniquement isolĂ© par une personne dont un ordinateur reconnaĂźt la voix. En dehors de la vĂ©lotypie, qui fonctionne assez mal, il n’existe pas d’autre moyen technologique pour rĂ©soudre cet aspect financier. Les chaĂźnes publiques sont, du reste, plus exposĂ©es que les chaĂźnes privĂ©es, dans la mesure oĂč elles diffusent beaucoup plus de dĂ©bats ou de directs et oĂč France TĂ©lĂ©visions diffuse heures de programmes contre pour chaque chaĂźne privĂ©e. Au vu des sommes en jeu estimĂ©es Ă  162 millions d’euros sur la pĂ©riode 2006–2010 et reprĂ©sentant un budget de l’ordre de 63 millions d’euros par an Ă  partir de 2010, votre Rapporteur spĂ©cial juge lĂ©gitime d’envisager soit des formes d’assouplissement de l’échĂ©ancier, soit une rĂ©flexion sur la part de ces heures que la redevance doit financer. S’agissant de la haute dĂ©finition HD, elle constitue indiscutablement le futur, certes encore lointain, de la tĂ©lĂ©vision. La tĂ©lĂ©vision publique ne peut se permettre de passer Ă  cĂŽtĂ© d’une telle Ă©volution et doit donc prĂ©parer dĂšs maintenant ce trĂšs important projet Ă©ditorial et industriel. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, le total des surcoĂ»ts de la HD reprĂ©senterait 71,8 millions d’euros sur la pĂ©riode 2006–2010 passant de 2,2 millions d’euros en 2006 Ă  9,5 millions d’euros en 2007, 15,4 millions d’euros en 2008, 21 millions d’euros en 2009 et 23,7 millions d’euros en 2010. Les dĂ©fis de la tĂ©lĂ©vision en haute dĂ©finition La tĂ©lĂ©vision en haute dĂ©finition TVHD est souvent prĂ©sentĂ©e comme un progrĂšs qualitatif sans prĂ©cĂ©dent depuis l’arrivĂ©e de la tĂ©lĂ©vision en couleur. Elle fait actuellement l’objet d’un dĂ©veloppement sur l’ensemble des supports de diffusion, aussi bien en France qu’à l’étranger. Certaines chaĂźnes analogiques TF1 et M6 se sont prĂ©parĂ©es au dĂ©veloppement de la TVHD en Ă©quipant leurs studios de production et en acquĂ©rant des programmes susceptibles d’ĂȘtre diffusĂ©s en HD. Les nouvelles chaĂźnes de la TNT ont Ă©galement fait part de leur intĂ©rĂȘt, comme NRJ 12 qui a annoncĂ© le lancement de programmes en HD dĂšs septembre 2006 mais aussi Direct 8 et BFM TV. AprĂšs des premiĂšres expĂ©rimentations en 2004, la TVHD est dĂ©sormais commercialement accessible en France avec deux offres de services HD payants sur des satellites proposĂ©es par TPS et Canalsat et plusieurs offres sur ADSL haut dĂ©bit. La diffusion de la HD par le cĂąble en est encore Ă  la phase d’expĂ©rimentations. Pour autant, la HD est encore loin d’ĂȘtre une rĂ©alitĂ© concrĂšte pour le grand public
 La vente de tĂ©lĂ©viseurs HD est certes en forte croissance depuis le dĂ©but de l’annĂ©e 2006. Mais si Ă©crans HD Ready ont Ă©tĂ© vendus entre janvier et avril 2006, il n’existe que trĂšs peu de programmes diffusĂ©s en HD. On prĂ©voit que 1,5 million d’écrans auront Ă©tĂ© vendus fin 2006, soit un taux de pĂ©nĂ©tration, en forte hausse, mais de seulement 6 % des foyers fin 2006 contre 1,8 % fin 2005. Cela Ă©tant, ce phĂ©nomĂšne s’inscrit dans un contexte europĂ©en porteur et l’ensemble des Ă©tudes s’accorde sur une pĂ©nĂ©tration rapide des tĂ©lĂ©viseurs HD, sous les effets conjuguĂ©s d’un succĂšs toujours croissant des Ă©crans plats, de la baisse des prix des Ă©crans HD, la multiplication des offres de programmes HD et l’apparition des DVD HD et lecteurs HD. On constate d’ailleurs que la TVHD connaĂźt un rĂ©el succĂšs dans les pays oĂč elle a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© lancĂ©e, en particulier aux États-Unis oĂč l’on comptait fin 2005 plus de 11 millions de foyers Ă©quipĂ©s en HD mais aussi en Australie, au Canada, en CorĂ©e du Sud et au Japon oĂč il est prĂ©vu que 16 millions d’écrans HD soient commercialisĂ©s en 2007. Par ailleurs, afin de permettre l’accĂšs de chacun Ă  ce nouveau format d’image appelĂ© Ă  se gĂ©nĂ©raliser, le Gouvernement a pris assez tĂŽt les dĂ©cisions qui permettaient l’introduction rapide de la HD sur la TNT. Il a ainsi dĂ©cidĂ© que le recours Ă  la norme MPEG–4, plus Ă©conome dans l’utilisation des frĂ©quences hertziennes, serait rendu obligatoire pour les chaĂźnes payantes de la TNT et les futurs services en HD, qu’ils soient gratuits ou payants. Les textes rĂ©glementaires ont Ă©tĂ© adoptĂ©s le 26 mai 2005. Le choix du MPEG–4 pour la diffusion des chaĂźnes payantes permet de libĂ©rer, sur les multiplexes planifiĂ©s pour la TNT, les ressources hertziennes nĂ©cessaires Ă  l’introduction prochaine de la HD sur ce support on estime que fin 2007, deux Ă  trois chaĂźnes devraient pouvoir ĂȘtre diffusĂ©es sur les multiplexes existants de la TNT, auxquelles pourraient s’ajouter trois chaĂźnes sur le multiplexe R5 aujourd’hui restĂ© libre. De plus, le projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur prĂ©voit les dispositions nĂ©cessaires pour permettre au CSA de lancer des appels aux candidatures spĂ©cifiquement destinĂ©s Ă  permettre la diffusion de services de TVHD sur la TNT. Il prĂ©voit aussi une majoration de la taxe affectĂ©e au COSIP pour une chaĂźne HD, ce qui permettra notamment d’aider la production des Ɠuvres en HD. En attendant, le CSA a autorisĂ©, en mai 2006, la conduite d’expĂ©rimentations pour la diffusion en clair de services de TNT en HD. Les premiĂšres expĂ©rimentations Ă  destination du public ont pu ĂȘtre rĂ©alisĂ©es entre juin et juillet 2006 Ă  l’occasion d’évĂ©nements sportifs tels que Roland Garros, retransmis en HD par France TĂ©lĂ©visions, et la Coupe du Monde, diffusĂ©e en HD par TF1 et M6. En outre, le CSA a dĂ©cidĂ© de lancer un avis de sĂ©lection destinĂ©, en prioritĂ©, aux chaĂźnes en clair de la TNT qui n’ont pu prendre part Ă  la premiĂšre vague de diffusion pour des expĂ©rimentations entre septembre 2006 et janvier 2007 dans les zones de Paris, Lyon et Marseille. Enfin, le ministre de la Culture et de la communication a informĂ© le CSA, qu’afin de pĂ©renniser la diffusion expĂ©rimentale des programmes de France TĂ©lĂ©visions et ARTE en HD, le Gouvernement, Ă  l’issue de cette seconde expĂ©rimentation, prĂ©empterait, en application de l’article 26 de la loi relative Ă  la libertĂ© de communication, les ressources radioĂ©lectriques nĂ©cessaires. Le groupe France TĂ©lĂ©visions s’est montrĂ© trĂšs actif pour prĂ©parer le dĂ©ploiement de ses chaĂźnes en haute dĂ©finition. BudgĂ©tairement, le passage Ă  la HD implique deux composantes de coĂ»ts supplĂ©mentaires les coĂ»ts de simulcast 76 et les investissements techniques supplĂ©mentaires, en prioritĂ© les rĂ©gies de diffusion. Le passage en HD du reste du parc de matĂ©riel des chaĂźnes, comprenant en particulier les moyens de l’information France 2 et France 3 et l’équipement des stations rĂ©gionales de France 3, est Ă©galement inĂ©luctable. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, les surcoĂ»ts de la HD par rapport au renouvellement en simple dĂ©finition pour France TĂ©lĂ©visions sont estimĂ©s entre 10 et 12 millions d’euros par an jusqu’en 2010. D’autre part, s’agissant de l’organisation du groupe France TĂ©lĂ©visions, il est impĂ©ratif de poursuivre les efforts de gestion entamĂ©s avec le prĂ©cĂ©dent contrat d’objectifs et de moyens, ainsi que l’intĂ©gration opĂ©rationnelle du groupe. Votre Rapporteur spĂ©cial rappelle que France TĂ©lĂ©visions devra rĂ©aliser de nouvelles Ă©conomies de fonctionnement et de structures. Comme le soulignait le directeur gĂ©nĂ©ral dĂ©lĂ©guĂ© du groupe, Thierry Bert, devant votre Commission 77 les restructurations, surtout gĂ©ographiques, sont toujours dĂ©licates. Elles devront ĂȘtre opĂ©rĂ©es dans le calme, sans drame, aprĂšs avoir convenu avec l’actionnaire de ce qu’il faut entendre par Ă©conomies, et en sachant que les Ă©conomies sur les simples frais de fonctionnement ne peuvent pas ĂȘtre trĂšs importantes ». L’ensemble des frais gĂ©nĂ©raux reprĂ©sente, en effet, 180 millions d’euros sur un budget de trois milliards d’euros. Au-delĂ , une rĂ©flexion sur l’évolution des ressources de France TĂ©lĂ©visions est inĂ©luctable. Si l’on met Ă  part la question de la redevance audiovisuelle, on constate surtout que la ressource publicitaire se dilue avec la croissance du nombre des opĂ©rateurs et des modes de diffusion cĂąble, satellite, TNT, offre ADSL, et demain tĂ©lĂ©phonie mobile. Certes, le prochain exercice de France TĂ©lĂ©visions bĂ©nĂ©ficiera de l’arrivĂ©e, sur le marchĂ© de la publicitĂ© tĂ©lĂ©visuelle, d’annonceurs nouveaux aux potentialitĂ©s trĂšs fortes. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, l’effet positif de l’ouverture des secteurs interdits en 2007 publicitĂ© pour la grande distribution 78 aura un impact tournant autour de 150 Ă  160 millions d’euros pour le marchĂ© tĂ©lĂ©visuel si l’on applique mĂ©caniquement la part de marchĂ© de France TĂ©lĂ©visions, l’espĂ©rance de gain tourne autour de 30 Ă  35 millions annuels. L’augmentation des recettes de publicitĂ© devrait donc ĂȘtre de l’ordre de 5 Ă  6 % entre 2006 et 2007. Du reste, la situation passĂ©e des derniĂšres annĂ©es rĂ©vĂšle une progression de 26,5 % des recettes de publicitĂ© et de parrainage entre 2001 et 2005. À horizon 2010, l’augmentation des recettes de publicitĂ© de France TĂ©lĂ©visions pourrait donc ĂȘtre bien supĂ©rieure aux prĂ©visions du groupe dans la proposition de nouveau contrat d’objectifs et de moyens transmise Ă  votre Rapporteur spĂ©cial. D’autant que des Ă©volutions du cadre rĂ©glementaire de la publicitĂ© ne doivent pas ĂȘtre exclues. Votre Rapporteur spĂ©cial n’est pas opposĂ© Ă  des mesures permettant mĂ©caniquement de faire croĂźtre les ressources propres des chaĂźnes publiques, en jouant notamment sur les coupures dans les Ă©missions de flux et en allongeant la durĂ©e de diffusion par heure glissante 79. Enfin, en mettant en Ɠuvre son virage Ă©ditorial, la nouvelle direction a opĂ©rĂ© des changements dĂšs la rentrĂ©e 2005, accentuĂ©s Ă  la rentrĂ©e 2006. Elle s’est ainsi engagĂ©e Ă  augmenter d’au moins euros sur 5 ans sa contribution Ă  la production d’Ɠuvres audiovisuelles françaises et europĂ©ennes. Cet effort important sera consacrĂ© notamment au financement d’Ɠuvres patrimoniales et doit permettre une programmation accrue de documentaires en premiĂšre partie de soirĂ©e, la mise en production de fictions françaises inĂ©dites avec la crĂ©ation de nouvelles cases, ainsi que le dĂ©veloppement de programmes culturels. Surtout, France TĂ©lĂ©visions s’est ainsi donnĂ©e pour objectif de mener une vĂ©ritable stratĂ©gie de bouquet », en jouant sur la complĂ©mentaritĂ© de ses diffĂ©rentes chaĂźnes et sur l’harmonisation de ses offres de programme France 2, France 3, France 4, France 5, RFO France Ô. L’objectif est donc de passer d’un patriotisme de chaĂźnes »  Ă  un patriotisme de groupe » en clarifiant la personnalitĂ©, le positionnement et la ligne Ă©ditoriale de chacune des chaĂźnes, et ce pour l’ensemble des genres de programmes 80. 2.– Les enjeux spĂ©cifiques des chaĂźnes du groupeEn 2007, France TĂ©lĂ©visions devrait bĂ©nĂ©ficier, par rapport Ă  la loi de finances initiale pour 2006, d’une augmentation de l’affectation du produit de la redevance de 2,5 %, avec une ressource proposĂ©e Ă  millions d’euros hors TVA. Le conseil d’administration de France TĂ©lĂ©visions a votĂ© le 2 fĂ©vrier 2006, lors de l’adoption des budgets de la sociĂ©tĂ© holding et du groupe, la rĂ©partition de la redevance entre les cinq sociĂ©tĂ©s, selon la clĂ© suivante RÉPARTITION DE LA REDEVANCE ENTRE LES CHAÎNES DE FRANCE TÉLÉVISIONS en millions d’euros Budget 2006 ClĂ© de rĂ©partition en % France 2 631,0 34,4 France 3 815,5 44,5 France 4 17,7 0,9 France 5 149,5 8,2 RFO 220,0 12,0 Total redevance d’exploitation 100 a France 2 grande chaĂźne gĂ©nĂ©ralisteLe projet de budget de France 2 pour 2007 devrait porter le total des produits d’exploitation Ă  millions d’euros, dont 460,9 millions d’euros de recettes de publicitĂ© et de parrainage + 7,2 %. Les charges atteindraient millions d’euros dont 694,7 millions d’euros pour les achats et 172,5 millions d’euros de charges de personnel, dĂ©gageant un rĂ©sultat d’exploitation prĂ©visionnel positif de 1,4 million d’euros. L’évolution prĂ©visionnelle du coĂ»t de grille 812,7 millions d’euros serait de 4,4 % en un an. La forte dĂ©pendance aux ressources propres rend cette chaĂźne particuliĂšrement fragile et sensible Ă  tout retournement de la conjoncture publicitaire. De plus, France 2 cherche Ă  produire beaucoup, en fictions notamment, ce qui impacte ses comptes. Sa vocation gĂ©nĂ©raliste l’oblige aussi Ă  se positionner sur des marchĂ©s cinĂ©ma et sport pour l’essentiel sur lesquels les coĂ»ts d’acquisition des droits connaissent une inflation importante. L’équation financiĂšre est donc complexe, d’autant que la trĂ©sorerie reste fragile. Certes le retour Ă  des rĂ©sultats positifs Ă  compter de 2000 a permis le redressement de la situation financiĂšre de la chaĂźne. Mais la trĂ©sorerie est restĂ©e nĂ©gative Ă  l’exception des exercices 2003 et 2005 et l’effort consacrĂ© aux programmes en 2006 s’est traduit par une dĂ©gradation de la trĂ©sorerie nĂ©gative de 5,8 millions d’euros. Le budget 2007 doit notamment garantir la qualitĂ© et la spĂ©cificitĂ© de l’offre Ă©ditoriale avec une grille fortement renouvelĂ©e 25 Ă©missions nouvelles ou modifiĂ©es, en place depuis la rentrĂ©e 2006 81. Le nouveau projet France 2 » vise Ă  crĂ©er la chaĂźne de rĂ©fĂ©rence de l’évĂšnement, de l’innovation et de la crĂ©ation. Les pratiques managĂ©riales, la communication interne et le dialogue social devront Ă©galement ĂȘtre renforcĂ©s avec la mise en place d’outils de management nouveaux. L’organisation de la chaĂźne sera Ă©galement adaptĂ©e une direction des technologies a Ă©tĂ© créée regroupant les directions technique et informatique et une direction artistique avec un poste de conseiller Nouveaux mĂ©dias sera rattachĂ©e Ă  la direction gĂ©nĂ©rale de France 2, afin de renforcer l’identitĂ© et la marque de la chaĂźne. b France 3 chaĂźne de la proximitĂ© et de la mĂ©diationLe projet de budget de France 3 pour 2007 devrait porter le total des produits d’exploitation Ă  millions d’euros, dont 298,1 millions d’euros de recettes de publicitĂ© et de parrainage. Les charges atteindraient millions d’euros dont 333,2 millions d’euros pour les achats et 433,8 millions d’euros de charges de personnel, dĂ©gageant un rĂ©sultat d’exploitation prĂ©visionnel positif de 3,1 millions d’euros. L’évolution prĂ©visionnelle du coĂ»t de grille 774,6 millions d’euros serait de 2,4 % en un an. On rappellera que la part des ressources publicitaires est environ deux fois plus importante dans le financement de France 2 que celui de France 3. La dĂ©pendance de France 3 Ă  la ressource publique est donc extrĂȘmement forte, puisque la chaĂźne rĂ©cupĂ©rera 44,5 % du produit de la redevance affectĂ© Ă  France TĂ©lĂ©visions en 2006, contre 34,4 % pour France 2. Cette dĂ©pendance oblige France 3 Ă  une gestion particuliĂšrement rigoureuse. En termes Ă©conomiques, France 3 doit notamment faire face au coĂ»t important de son rĂ©seau de proximitĂ© employĂ© Ă  l’élaboration des programmes rĂ©gionaux ou locaux coĂ»ts de production, de diffusion, charges de personnel ainsi qu’à la modernisation et au fonctionnement de sa filiĂšre de production. La filiĂšre de production de France 3, créée en 1974 lors du dĂ©mantĂšlement de l’ORTF, est dĂ©ployĂ©e sur six stations rĂ©gionales avec des moyens importants 470 personnes soit 10 % des effectifs de la chaĂźne. Son activitĂ© concerne environ 80 % du programme national de France 3, dans le domaine de la fiction, de la production de magazines, de la post-production, de la vidĂ©o mobile. Compte tenu de ses coĂ»ts structurels trĂšs importants, en matiĂšre de personnel notamment, et de sa localisation concentrĂ©e alors que la majeure partie des sites de production est situĂ©e en rĂ©gion parisienne, la filiĂšre de production de France 3 n’a jamais pu ĂȘtre compĂ©titive face au secteur privĂ©, l’activitĂ© production prĂ©sentant constamment des comptes nĂ©gatifs dans les comptes annuels de la chaĂźne. Ainsi en 2005, le rĂ©sultat Ă©conomique du producteur aprĂšs affectation d’une participation moyenne de 2,3 millions d’euros de frais gĂ©nĂ©raux, se situe environ Ă  – 1,6 million d’euros, comme en 2004. Un rapport de l’inspection gĂ©nĂ©rale des finances sur France TĂ©lĂ©visions datĂ© de janvier 2006 prĂ©conisait un schĂ©ma de dĂ©faisance respectueux des intĂ©rĂȘts de France TĂ©lĂ©visions et de ses salariĂ©s »  Sans retenir cette solution radicale, votre Rapporteur spĂ©cial approuve la dĂ©cision de la direction de faire de cette filiĂšre une activitĂ© commune dĂ©diĂ©e aux besoins du groupe, avec pour objectif de rapprocher rapidement ses coĂ»ts de ceux de la concurrence. À ce stade, les objectifs de France 3 en 2007 sont en liaison avec sa position de chaĂźne privilĂ©giant l’information rĂ©gionale, les programmes de proximitĂ© incluant le dialogue avec les tĂ©lĂ©spectateurs et les productions rĂ©gionales Ă  vocation nationale. Sa programmation s’enrichira de la production des antennes dĂ©centralisĂ©es, en phase avec les grands moments de la vie locale. Dans un souci de complĂ©mentaritĂ© avec les autres chaĂźnes du groupe, France 3 a dĂ©veloppĂ© dans sa grille de rentrĂ©e une offre nationale nouvelle, affirmant ses ambitions culturelles dans l’ensemble des genres et sa volontĂ© de conquĂ©rir de nouveaux publics. ImmĂ©diatement aprĂšs le programme de prime time, un nouveau magazine sur l’actualitĂ© culturelle est dĂ©sormais proposĂ©. Sa programmation en deux parties permettra Ă  la chaĂźne d’assurer pour la premiĂšre fois Ă  l’édition d’information nationale Soir 3 un horaire fixe Ă  23 heures. La recherche des jeunes publics se poursuivra, les programmes jeunesse occupant une place de choix dans la grille de France 3 avec 21 heures hebdomadaires diffusĂ©es et un volume total de heures en 2005. Cette offre est composĂ©e Ă  95 % de programmes d’animation France 3 est ainsi le premier partenaire de l’animation française, tant en termes d’investissement que de volume de diffusion, ce qui la place comme leader europĂ©en dans ce domaine. La diffusion des programmes rĂ©gionaux de France 3 La spĂ©cificitĂ© mĂȘme de France 3 implique de proposer effectivement Ă  chaque tĂ©lĂ©spectateur les programmes rĂ©gionaux de son lieu de rĂ©sidence. Alors qu’elle est censĂ©e ĂȘtre la pierre angulaire de l’existence de France 3, on dĂ©nombrait encore, en 2004, 33 % des foyers français prĂšs de 8 millions de personnes disposant d’un Ă©quipement de rĂ©ception sur lequel les programmes rĂ©gionaux de France 3 n’étaient pas prĂ©sents. Par ailleurs, les 115 sites d’émission TNT actuellement programmĂ©s ne remplaceront pas les Ă©metteurs analogiques et certaines locales ne disposeront vraisemblablement pas de l’émetteur appropriĂ©. La couverture TNT et les modalitĂ©s de dĂ©ploiement des Ă©metteurs vont donc induire des modifications dans les initialisations de nombreux foyers qui ne retrouveront plus leurs programmes rĂ©gionaux habituels. C’est pourquoi, si rien n’est fait, la moitiĂ© des foyers français ne sera plus en capacitĂ© de recevoir les programmes rĂ©gionaux de France 3 Ă  l’extinction de la diffusion analogique terrestre. Il est donc essentiel, pour la sociĂ©tĂ©, de diversifier ses modes de diffusion et, pour les tutelles, d’en mesurer les coĂ»ts. En effet, France 3 mobilise historiquement un rĂ©seau de diffusion analogique de 130 Ă©metteurs principaux et réémetteurs pour assurer la desserte hertzienne analogique de la quasi-totalitĂ© de la population mĂ©tropolitaine. France 3 supportera ainsi un coĂ»t de diffusion analogique terrestre de 66,7 millions d’euros en 2007. La chaĂźne supportera Ă©galement un coĂ»t de diffusion numĂ©rique terrestre de 7,3 millions d’euros en 2007, qui progressera Ă  11,6 millions d’euros en 2008 avec la mise en Ɠuvre des 115 sites. Ce coĂ»t continuera Ă  augmenter au rythme du dĂ©veloppement du rĂ©seau d’émission TNT. France 3 est donc vigilante Ă  ce que l’ouverture des sites TNT se traduise, sur chaque site d’émission, par la diffusion du programme rĂ©gional adaptĂ©. Mais elle reste en attente d’une solution technique et Ă©conomique acceptable, lui permettant aussi sur une dizaine de ces sites d’assurer en TNT, comme c’est le cas en analogique, l’offre simultanĂ©e de deux programmes rĂ©gionaux sur le site du Pic du Midi avec la diffusion des journaux rĂ©gionaux Midi PyrĂ©nĂ©es et Aquitaine. Pour assurer la diffusion analogique et numĂ©rique des programmes rĂ©gionaux, France 3 met en Ɠuvre des prestations spĂ©cifiques de transport des modulations depuis les sources de programmes nationaux et rĂ©gionaux tĂȘtes de rĂ©seau vers les sites d’émission. Les charges de transport supportĂ©es s’élĂšveront pour France 3 Ă  13,4 millions d’euros en 2007 pour atteindre 14,4 millions d’euros en 2008 Ă  l’issue du dĂ©ploiement des 115 sites. France 3 a engagĂ© avec TDF un plan de synergies entre les transports analogiques et numĂ©riques de ses modulations. Par ailleurs, la chaĂźne assure une distribution analogique par satellite de ses programmes au sein du bouquet analogique gratuit AB 3, avec un programme rĂ©gional France 3 Sat constituĂ© d’une sĂ©lection interrĂ©gionale des 24 journaux rĂ©gionaux proposĂ©s en diffusion terrestre. Le coĂ»t de ce service par satellite est en 2007 de 2,5 millions d’euros pour France 3. Le programme France 3, avec la sĂ©lection France 3 Sat, est Ă©galement proposĂ© sur les bouquets payants Canal Plus et TPS. De plus, dans le cadre du projet de couverture satellitaire complĂ©mentaire et gratuite des chaĂźnes de la TNT, France 3 doit veiller Ă  assurer progressivement la distribution simultanĂ©e des 24 journaux rĂ©gionaux, au fur et Ă  mesure de ses capacitĂ©s techniques et Ă©conomiques. Ce projet est estimĂ© pour France 3 Ă  un coĂ»t initial de 2,7 millions d’euros en 2007 et de 4,5 millions d’euros en annĂ©e pleine. Enfin, il est essentiel que France 3 soit distribuĂ©e sur tous les nouveaux supports, en y proposant au tĂ©lĂ©spectateur chaque fois que cela est possible son programme rĂ©gional. Sur l’internet, la chaĂźne a dĂ©clinĂ© son site national en sites rĂ©gionaux oĂč l’internaute retrouve et peut visionner le journal rĂ©gional le concernant. Sur ADSL, France 3 et FTVI demandent aux distributeurs d’assurer une offre de France 3 rĂ©gionalisĂ©e dans les offres tĂ©lĂ©visions. Quant au bouquet Free, il propose aux internautes la quasi totalitĂ© des programmes rĂ©gionaux. France 3 prĂ©pare Ă©galement la mise Ă  disposition des autres distributeurs ADSL de l’ensemble de ses programmes rĂ©gionaux. On rappellera que les services par cĂąble sont astreints aux obligations de must carry des programmes diffusĂ©s sur le site concernĂ©. Mais pour des raisons technico-Ă©conomiques, on observe que les opĂ©rateurs ne respectent pas complĂštement cette obligation si leurs offres analogiques reprennent bien le programme rĂ©gional concernĂ©, les offres numĂ©riques par cĂąble multiplexĂ©es Ă  un niveau national ne sont pas adaptĂ©es Ă  chaque tĂȘte de rĂ©seau, l’offre rĂ©gionale en restant Ă  la sĂ©lection France 3 Sat. Le lĂ©gislateur dĂ©cidera, Ă  l’occasion de la discussion du projet de loi relative Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur, si l’obligation de must carry de l’offre de tĂ©lĂ©vision publique par satellite, par cĂąble ou par ADSL doit couvrir la mise Ă  disposition des programmes rĂ©gionaux diffusĂ©s par voie hertzienne. c France 4 un an d’existenceIl est encore trop tĂŽt pour Ă©tablir un bilan de cette petite PME 26 ETP en 2006, 21 millions d’euros de budget, la petite derniĂšre » du service public de l’audiovisuel, lancĂ©e le 31 mars 2005 en remplacement de la chaĂźne Festival, au moment du dĂ©marrage de la TNT. Votre Rapporteur spĂ©cial continue de s’interroger sur son positionnement, compte tenu de la faiblesse de son budget. En 2007, France 4 bĂ©nĂ©ficiera de 17,7 millions d’euros de recette issue de la redevance, soit 0,9 % de la recette totale. Mais il n’est pas illĂ©gitime de craindre une dilution des ressources, nĂ©cessairement limitĂ©es, de la tĂ©lĂ©vision publique au dĂ©triment des chaĂźnes existantes et un dĂ©veloppement d’une inutile concurrence interne au groupe France TĂ©lĂ©visions. On peut Ă©galement craindre une trop grande segmentation de l’offre audiovisuelle publique. Il conviendra donc d’y ĂȘtre attentif. Les mesures d’audience sont encore trĂšs fragiles. Selon MĂ©diamĂ©trie, France 4 Ă©tait reçue via le cĂąble, le satellite et la TNT par 18,8 millions de personnes au 2Ăšme trimestre 2006, soit une augmentation de 5 % par rapport au 1er trimestre 2006. Parmi eux, on dĂ©nombre 4,2 millions de tĂ©lĂ©spectateurs la recevant par la TNT, soit + 28 % par rapport au 1er trimestre 2006. France 4 rassemble sur la pĂ©riode prĂšs de 3 millions de tĂ©lĂ©spectateurs par jour et 8,4 millions par semaine. Sur ce dernier indicateur, France 4 s’impose ainsi au deuxiĂšme rang des nouvelles chaĂźnes TNT les plus regardĂ©es par les tĂ©lĂ©spectateurs Ă©quipĂ©s, derriĂšre TMC 82. On signalera que France 4 diffuse une part significative de programmes ou de productions en collaboration avec le groupe France TĂ©lĂ©visions. La chaĂźne a pu bĂ©nĂ©ficier des redĂ©ploiements des droits acquis au sein du groupe et ainsi proposer une exposition et une meilleure exploitation de droits de diffusion des programmes par le biais des rĂ©trocessions entre chaĂźnes. Il est important de prĂ©ciser que de nombreux programmes, diffusĂ©s sur France 4 et produits ou acquis auprĂšs de distributeurs ou producteurs externes, ont pu se rĂ©aliser grĂące Ă  l’intervention des chaĂźnes du groupe, par un financement complĂ©mentaire dans la production captation de théùtre ou de festivals par exemple ou par l’autorisation de couloirs de diffusion pour des programmes sous droits France 2 ou France 3. d France 5 chaĂźne de diffusion et de partage des connaissancesFrance 5, qui a bientĂŽt douze ans, conserve une excellente image mais peut certainement se dĂ©velopper davantage. L’arrivĂ©e de la TNT en mars 2005, qui a permis Ă  France 5 de bĂ©nĂ©ficier d’un canal plein, a accru son exposition et renforcĂ© son rayonnement. La chaĂźne, Ă©galement accessible grĂące Ă  l’ADSL, au cĂąble et au satellite, propose dĂ©sormais des programmes 24h/24 et dĂ©veloppe de nouveaux rendez-vous en soirĂ©e. Le projet de budget de France 5 pour 2007 devrait porter le total des produits d’exploitation Ă  307,2 millions d’euros, dont 38,6 millions d’euros de recettes de publicitĂ© et de parrainage. Les charges atteindraient 304,4 millions d’euros dont 112,1 millions d’euros pour les achats et 18,1 millions d’euros de charges de personnel, dĂ©gageant un rĂ©sultat d’exploitation prĂ©visionnel positif de 2,8 millions d’euros. L’évolution prĂ©visionnelle du coĂ»t de grille 111,5 millions d’euros serait de 5,2 % en un an. Dans le contexte du passage en diffusion 24h/24, les effectifs permanents de la chaĂźne resteront maĂźtrisĂ©s, grĂące des redĂ©ploiements au sein des services. À ce stade, les objectifs de France 5 en 2007 visent Ă  amĂ©liorer l’attractivitĂ© de la grille de programmes en soirĂ©e, Ă  poursuivre l’optimisation et la modernisation de sa gestion des ressources humaines et Ă  assurer la pĂ©rennisation des orientations techniques mises en place par la chaĂźne. Les documentaires et les programmes pour la jeunesse restent un levier de dĂ©veloppement pour la chaĂźne. En complĂ©ment de sa grille, la chaĂźne a Ă©laborĂ© un site internet trĂšs riche Ă  destination de tous les publics et mĂšne de nombreuses expĂ©riences interactives consultation diffĂ©rĂ©e en VOD des Ă©missions. En outre, un site spĂ©cialisĂ© permet au monde Ă©ducatif de mieux utiliser les programmes de la chaĂźne en fonction des besoins d’enseignement. Enfin, » met Ă  la disposition des instituteurs et professeurs une plate-forme VOD de sĂ©quences illustrant les cours du CP Ă  la terminale en fonction des programmes scolaires d’une quinzaine de matiĂšres. Si la mesure d’audience pour la TNT est encore fragile, les Ă©tudes affichent une croissance de l’audience qui a permis une augmentation significative des performances publicitaires de soirĂ©e en mai et septembre 2006. Les rĂ©sultats sont globalement encourageants aux 10 millions de tĂ©lĂ©spectateurs quotidiens en journĂ©e et 25 millions de tĂ©lĂ©spectateurs diffĂ©rents par semaine s’ajoutent dĂ©sormais plus d’un million de tĂ©lĂ©spectateurs nouveaux conquis de 19 heures Ă  3 heures du matin. L’effet d’entraĂźnement créé par la TNT a permis Ă  France 5 d’augmenter simultanĂ©ment son audience encore insuffisante sur le cĂąble, le satellite et l’ADSL. e RFO chaĂźne de l’outre-mer et de la diversitĂ©On rappellera qu’à l’initiative conjointe du ministĂšre de la Culture et de la communication et du ministĂšre de l’Outre-mer, RFO a Ă©tĂ© intĂ©grĂ© au sein du groupe France TĂ©lĂ©visions en 2004. Cette intĂ©gration, rĂ©alisĂ©e dans un souci de rationalisation de l’organisation de RFO et du respect des spĂ©cificitĂ©s de cette entreprise, doit permettre au rĂ©seau de bĂ©nĂ©ficier de la dynamique d’un groupe important afin de poursuivre ses missions fondamentales assurer la continuitĂ© territoriale et renforcer la proximitĂ© avec les populations. Depuis, RFO s’est dotĂ© d’un nouvel habillage, qui marque lisiblement son appartenance au groupe. Le projet de budget de RFO pour 2007 devrait porter le total des produits d’exploitation Ă  263,6 millions d’euros, dont 24,8 millions d’euros de recettes de publicitĂ© et de parrainage. Les charges atteindraient 263,5 millions d’euros dont 2,5 millions d’euros pour les achats et 150,4 millions d’euros de charges de personnel, dĂ©gageant un rĂ©sultat d’exploitation prĂ©visionnel positif de 0,1 million d’euros. L’évolution prĂ©visionnelle du coĂ»t de grille 160,6 millions d’euros serait de 3,1 % en un an. FinanciĂšrement, RFO se caractĂ©rise par une grande dĂ©pendance Ă  la redevance prĂšs de 90 % de ses ressources et par le poids considĂ©rable des dĂ©penses de personnel dans ses charges prĂšs de 60 %. La maĂźtrise de la masse salariale est, pour RFO, un impĂ©ratif et la clef d’une bonne gestion pour cette chaĂźne dont l’effectif Ă©tait de ETP en 2005 dont permanents... en augmentation de 2,1 % par rapport Ă  2004. Votre Rapporteur spĂ©cial souligne que les logiques d’affectation de la redevance au sein de France TĂ©lĂ©visions sont parfois Ă©tonnantes. Ainsi, en 2005, la part de redevance allouĂ©e Ă  RFO a augmentĂ© de 3,5 % pour RFO alors que celle allouĂ©e Ă  France 2 n’a augmentĂ© que de 1,2 %. Alors que les attentes en termes de rationalisation sont fortes, il est paradoxal de constater que la croissance de la ressource publique affectĂ©e Ă  RFO est supĂ©rieure Ă  celle affectĂ©e aux autres chaĂźnes du groupe. Un travail de fond sur la bonne allocation des emplois au sein de RFO et sur le niveau de rĂ©munĂ©ration en liaison avec le poids de l’indexation demeure donc indispensable. Plus immĂ©diatement, il faut dĂ©velopper les synergies d’antennes avec les autres chaĂźnes du service public pour assurer une meilleure exposition des programmes ultramarins sur les antennes publiques mĂ©tropolitaines et profiter de la naissance de France 24 pour faire participer RFO Ă  l’offre d’actualitĂ©s internationales. Les objectifs de RFO en 2007 concernent aussi la relance de la production locale initiĂ©e en 2005 + 16,2 % en production de tĂ©lĂ©vision et consolidĂ©e en 2006, qui serait poursuivie dans les prochaines annĂ©es. La place des programmes de crĂ©ation documentaires, spectacle vivant, animation jeunesse, participation Ă  des projets de fiction dans les grilles serait Ă©galement renforcĂ©e. Face aux Ă©volutions technologiques qui favorisent l’émergence d’une nouvelle concurrence, locale et nationale, RFO doit se renouveler, se moderniser, dĂ©finir un nouveau positionnement et repenser ses missions de service public. Elle peut Ă©galement faire Ă©voluer sa mission de continuitĂ© territoriale en Ă©tudiant la possibilitĂ© de devenir en outre-mer l’opĂ©rateur de la diffusion numĂ©rique des chaĂźnes publiques mĂ©tropolitaines. Enfin, le dĂ©veloppement de France Ô est un projet mobilisateur. LancĂ©e en 2005, disponible sur le cĂąble et le satellite, la chaĂźne se veut un vĂ©ritable lien entre l’outremer et l’hexagone 83. L’enjeu pour 2007 sera d’enrichir l’offre de France Ô dans le sens d’une plus grande diversitĂ© du contenu, au-delĂ  mĂȘme de l’activitĂ© des communautĂ©s d’outre-mer. Comme annoncĂ© par le PrĂ©sident de la RĂ©publique, France Ô sera, en 2007, accessible sur l’offre de tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre de la rĂ©gion Île-de-France. Le projet Ă©ditorial de la chaĂźne est de permettre la rencontre et le dialogue entre les cultures et crĂ©er du lien social en participant Ă  la reconnaissance des hommes et des cultures ultramarines. Sa rĂ©ussite dans le cadre du passage sur la TNT constitue un enjeu important. * * * III.– À L’ÈRE DE L’IMAGE, LA RADIO A BESOIN D’UN SERVICE PUBLIC RENFORCÉ A.– LES ENJEUX DU SECTEURLe paysage radiophonique français est riche quantitativement comme du point de vue de la diversitĂ© des programmes et des contenus. Davantage pluraliste que dans bien d’autres pays, il a su Ă  la fois valoriser les outils de diffusion du service public de la radio un tiers des frĂ©quences et laisser les antennes associatives 25 % des frĂ©quences privĂ©es exister et se dĂ©velopper. Comme les autres mĂ©dias, la radio n’échappe toutefois pas aux prĂ©occupations liĂ©es aux sources de financement, dans un contexte de plus en plus concurrentiel et oĂč la ressource publicitaire peut ĂȘtre stimulĂ©e, comme Ă  celles liĂ©es aux mutations technologiques qui stimulent le secteur ou le poussent Ă  Ă©voluer. 1.– La poursuite du plan FM 2006 »Rappelons d’abord que, depuis une dizaine d’annĂ©es, les Ă©diteurs radiophoniques demandent de façon rĂ©currente l’accĂšs Ă  des frĂ©quences supplĂ©mentaires en vue de dĂ©velopper des antennes existantes ou crĂ©er de nouvelles radios. Ces demandes ont conduit en 1997 Ă  un audit de la bande FM rĂ©alisĂ© par le CSA, et en 2000 Ă  la restitution au CSA par Radio France de la trĂšs grande partie des 577 frĂ©quences dormantes » de Radio France. Ces frĂ©quences ont depuis Ă©tĂ© redistribuĂ©es par le CSA 84. Aujourd’hui, le secteur se voit Ă  nouveau contraint par l’absence de ressources disponibles en bande FM, sans espoirs – sinon marginaux – de rĂ©cupĂ©ration de frĂ©quences existantes. Si le lancement de la radio numĂ©rique devrait Ă  moyen terme permettre de rĂ©pondre aux besoins des opĂ©rateurs, les possibilitĂ©s techniques de rĂ©organiser la planification de la bande FM ont Ă©tĂ© mises Ă  l’étude, l’économie du secteur restant fondĂ©e sur la FM. En application d’une loi de 2004 85, le CSA a Ă©tĂ© autorisĂ© Ă  lancer une consultation contradictoire sur l’amĂ©nagement du spectre hertzien et l’élaboration d’un nouveau plan de frĂ©quences en vue d’un dĂ©veloppement optimal de la diffusion radiophonique au plan national, ainsi que sur l’optimisation de la diffusion et de la couverture des services associatifs, locaux, rĂ©gionaux et thĂ©matiques indĂ©pendants. La mĂȘme loi lui a donnĂ© la possibilitĂ© de proroger, si nĂ©cessaire et pour une durĂ©e maximale de deux ans, les autorisations radio arrivant Ă  Ă©chĂ©ance avant le 31 dĂ©cembre 2006. L’arrivĂ©e Ă  Ă©chĂ©ance entre 2006 et 2008 de 57 % du total des frĂ©quences FM affectĂ©es aux radios privĂ©es a donc Ă©tĂ© l’occasion de rĂ©examiner et d’amĂ©liorer la planification de la bande FM. Le CSA a ainsi créé, en 2005, le groupe de travail FM 2006 », chargĂ© notamment de prĂ©parer les appels aux candidatures pour les autorisations radio arrivant Ă  Ă©chĂ©ance avant le 31 dĂ©cembre 2006 86. Le CSA a Ă©galement lancĂ©, avec la DDM, une Ă©tude d’optimisation du spectre dans la bande FM, remise en dĂ©cembre 2005, qui a permis de dĂ©gager des pistes d’optimisation de la bande, en quantifiant les gains ainsi engendrĂ©s. ParallĂšlement, la consultation contradictoire prĂ©vue par la loi a Ă©tĂ© lancĂ©e le 12 octobre 2004 et s’est close le 31 janvier 2005. Le CSA a reçu 28 contributions provenant essentiellement d’organisations professionnelles, d’éditeurs et de diffuseurs techniques. Le lancement des appels Ă  candidatures a dĂ©butĂ© le 31 janvier 2006, par l’appel sur le Languedoc–Roussillon et la Corse, et se poursuivra jusqu’au mois de juillet 2007. Dans cinq comitĂ©s techniques radiophoniques, le CSA a dĂ©cidĂ© de proroger les autorisations pour une durĂ©e de deux ans. Pour le lancement des premiers appels Ă  candidatures gĂ©nĂ©raux sur les comitĂ©s techniques radiophoniques de Toulouse, Marseille, Rennes et Bordeaux, plus de 250 nouvelles frĂ©quences ont dĂ©jĂ  Ă©tĂ© dĂ©gagĂ©es par le CSA, soit une augmentation d’environ 15 % sur chacune de ces zones du nombre de frĂ©quences disponibles. Les ressources supplĂ©mentaires ainsi dĂ©gagĂ©es devraient permettre une amĂ©lioration substantielle de la couverture des radios privĂ©es mais aussi des rĂ©seaux de Radio France. En effet, l’État a demandĂ© dans une trentaine de cas l’attribution prioritaire de frĂ©quences Ă  Radio France pour l’amĂ©lioration de la couverture de France Inter, Le Mouv’ et France Bleu. En comparaison de ces effets finalement assez modestes, le passage au numĂ©rique reprĂ©sente Ă©videmment une opportunitĂ© de dĂ©veloppement bien plus importante pour la radio. 2.– La radio en route vers le numĂ©riqueAu-delĂ  du simple fait que la radio ne peut pas rester le seul mĂ©dia en analogique, l’intĂ©rĂȘt du passage au numĂ©rique pour la radio est triple – offrir un confort d’écoute amĂ©liorĂ©, un son numĂ©rique de haute qualitĂ© et des donnĂ©es associĂ©es aux programmes ; – apporter une solution Ă  la limitation actuelle de la couverture d’un certain nombre de radios ; – servir de levier de dĂ©veloppement et d’innovation pour l’industrie numĂ©rique française, en stimulant la recherche & dĂ©veloppement et les activitĂ©s industrielles sur le segment terrestre ou, le cas Ă©chĂ©ant, spatial, de la diffusion, ainsi que sur les terminaux de rĂ©ception. En raison de la grande variĂ©tĂ© des technologies de diffusion disponibles sur le marchĂ©, un cadre juridique technologiquement neutre a Ă©tĂ© dĂ©fini par la loi 87. Les procĂ©dures d’autorisation ont ainsi Ă©tĂ© adaptĂ©es aux caractĂ©ristiques des diffĂ©rentes technologies existantes 88. Cette neutralitĂ© ou cette souplesse vise Ă  ne pas prĂ©juger, d’une part, de la mise en Ɠuvre des technologies et frĂ©quences ce qu’on dĂ©signe souvent comme le principe de neutralitĂ© technologique et Ă  permettre, d’autre part, de mettre en Ɠuvre diffĂ©rents scĂ©narios 89. AprĂšs avoir longtemps fait Ă©tat de positions divergentes, notamment Ă  l’occasion de la consultation lancĂ©e par le CSA en 2005, les radios semblent aujourd’hui s’accorder sur la nĂ©cessitĂ© de lancer, Ă  un horizon proche, des services numĂ©riques sur des rĂ©seaux dĂ©diĂ©s. Ainsi, fin septembre 2006, un certain nombre de radios reprĂ©sentant l’essentiel du marchĂ© se sont rĂ©unies au sein du groupement pour la radio numĂ©rique. Elles ont appelĂ© au lancement de la radio numĂ©rique dĂšs 2007. Elles ont Ă©galement fait Ă©tat d’une position commune sur les conditions techniques souhaitĂ©es de ce lancement 90. De son cĂŽtĂ©, l’État a lancĂ© le 2 octobre dernier une consultation publique sur les normes techniques de diffusion Ă  retenir pour la radio numĂ©rique. Les rĂ©sultats de cette consultation permettront de prĂ©parer l’arrĂȘtĂ© Ă©tablissant les normes utilisables pour la radio numĂ©rique sur les bandes de frĂ©quences affectĂ©es au CSA. Plusieurs normes pourraient ĂȘtre retenues in fine. En effet, outre les rĂ©seaux dĂ©diĂ©s Ă©voquĂ©s prĂ©cĂ©demment, il paraĂźt souhaitable de permettre la prĂ©sence de services de radio sur des rĂ©seaux dĂ©ployĂ©s par d’autres services tels que les rĂ©seaux de TNT et les rĂ©seaux de tĂ©lĂ©vision mobile, ainsi que le prĂ©voit le projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur. De mĂȘme, il pourrait ĂȘtre nĂ©cessaire de permettre une numĂ©risation spĂ©cifique de la radio en ondes longues et courtes et de la bande FM, voire la couverture du territoire par une solution hybride satellitaire et terrestre. ParallĂšlement, le CSA a lancĂ© le 3 octobre dernier une consultation publique sur un projet de dĂ©ploiement de services de radio numĂ©rique sur la bande III pour des larges couvertures, dont les zones rurales et sur la bande L pour des couvertures plus restreintes, en zones denses, en vue du lancement d’appels aux candidatures pour la diffusion en mode numĂ©rique de services de radio locaux et nationaux. Cette consultation aborde Ă©galement l’organisation du dĂ©ploiement de ces nouveaux services. Votre Rapporteur spĂ©cial encourage pleinement ces Ă©volutions, pour lesquelles il rappelle nĂ©anmoins que la France n’est pas retard par rapport Ă  ses voisins. 3.– Le soutien aux radios locales Le soutien aux radios locales est ancien et constant. Les radios associatives accomplissent, en effet, une mission essentielle de communication sociale de proximitĂ© et prĂ©sentent une grande variĂ©tĂ© radios communautaires, confessionnelles, radios rurales et de pays, radios scolaires et pĂ©dagogiques, socio-Ă©ducatives, culturelles, de dĂ©couverte musicale
 Pour autant, la fragilitĂ© du tissu associatif implique une constante vigilance. Nombre de ces radios sont en effet vieillissantes et souffrent de problĂšmes de financement et de professionnalisation. C’est pourquoi, depuis plus de dix ans, le fonds de soutien Ă  l’expression radiophonique FSER accompagne le dĂ©veloppement des radios de proximitĂ© 91. Ses dĂ©penses n’ont cessĂ© de croĂźtre en raison de l’augmentation du nombre des radios Ă©ligibles 442 en 1993 Ă  562 en 2005. Ainsi, le total des subventions versĂ©es aux radios est passĂ© de 14 millions d’euros en 1993 Ă  24,2 millions d’euros en 2005, soit une hausse de 72 %. Chaque annĂ©e, ce sont environ 600 radios associatives qui bĂ©nĂ©ficient de l’aide du FSER, laquelle reprĂ©sente prĂšs d’un tiers de leurs ressources 92. ParallĂšlement, les recettes n’ont pas Ă©voluĂ© aussi rapidement et connaissent une stagnation depuis 2001. Il est alors apparu indispensable d’augmenter le rendement de cette taxe, lequel dĂ©pend pour 80 % des rĂ©gies des chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision. C’est pourquoi en 2005, six nouveaux paliers de taxation ont Ă©tĂ© ajoutĂ©s par le lĂ©gislateur au barĂšme de la taxe en vigueur pour la publicitĂ© tĂ©lĂ©visĂ©e. La rĂ©forme du FSER a surtout consistĂ©, tout en maintenant l’équilibre gĂ©nĂ©ral du systĂšme, Ă  amĂ©liorer le fonctionnement du fonds et Ă  en optimiser l’utilisation. Elle a permis de mettre le niveau des recettes du FSER en adĂ©quation avec le niveau des dĂ©penses et a permis de simplifier l’instruction des dossiers de demande et le versement des subventions. Le dĂ©cret n° 2006-1067 du 25 aoĂ»t 2006 prĂ©voit que les services de radio pourront se voir accorder trois subventions Ă  caractĂšre automatique subvention d’installation, subvention d’exploitation et subvention d’équipement ainsi qu’une subvention Ă  caractĂšre sĂ©lectif subvention sĂ©lective Ă  l’action radiophonique – la subvention d’installation sera accordĂ©e aux services de radio nouvellement autorisĂ©s par le CSA, en vue de contribuer au financement des dĂ©penses nĂ©cessaires au dĂ©marrage de l’activitĂ© radiophonique. Son montant ne pourra excĂ©der euros et elle ne pourra ĂȘtre accordĂ©e qu’une seule fois contre euros prĂ©cĂ©demment ; – la subvention d’exploitation sera attribuĂ©e aux services de radio qui en feront la demande au plus tard le 15 avril de l’annĂ©e suivant celle de la clĂŽture de l’exercice. Son montant sera fonction d’un barĂšme fixĂ© par arrĂȘtĂ© ; – la subvention d’équipement sera destinĂ©e Ă  financer, au plus, 50 % des projets d’investissement en matĂ©riel radiophonique d’un service de radio dans la limite de euros contre euros prĂ©cĂ©demment. Cette subvention sera quinquennale et pourra faire l’objet de deux demandes par pĂ©riode de cinq ans dans la limite financiĂšre prĂ©citĂ©e. Elle fera l’objet de deux versements, le premier sur devis et le second au vu des factures ; – la subvention sĂ©lective Ă  l’action radiophonique aura pour objet de soutenir les services de radio en fonction de leurs actions dans un certain nombre de domaines tels que la formation professionnelle et la consolidation des emplois, leurs actions culturelles et Ă©ducatives ou encore leurs efforts en faveur de l’intĂ©gration et de la lutte contre les discriminations. Le barĂšme de cette subvention sera fixĂ© par arrĂȘtĂ© conjoint des ministres chargĂ©s de la communication et du budget. Elle reprĂ©sentera au plus 25 % des subventions de fonctionnement. Si les trois premiĂšres subventions existent dĂ©jĂ  et ne feront l’objet que d’amĂ©nagements Ă  partir de 2007, la subvention sĂ©lective Ă  l’action radiophonique est nouvelle. Elle a pour principal objectif d’inciter les radios Ă  s’engager dans des domaines particuliĂšrement essentiels pour l’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral 93. Votre Rapporteur spĂ©cial approuve cette rĂ©forme, qui va dans le sens d’une amplification du soutien aux radios associatives locales
 Ă  l’heure oĂč les mĂ©dias de proximitĂ© s’installent dans notre paysage audiovisuel et au moment oĂč il est important de soutenir l’ensemble des initiatives qui participent Ă  la cohĂ©sion nationale. B.– LA SOCIÉTÉ RADIO FRANCERadio France est un bel outil. L’image vĂ©hiculĂ©e, depuis de nombreuses annĂ©es, d’une maison souvent touchĂ©e par les revendications sociales et les grĂšves Ă  rĂ©pĂ©tition, cache une rĂ©alitĂ© plus prĂ©sente encore celle d’une somme de talents dont la rĂ©union a trĂšs peu de points de comparaison dans le monde. C’est pourquoi votre Rapporteur spĂ©cial encourage le dĂ©veloppement des rĂ©novations mises en place depuis l’arrivĂ©e d’une nouvelle Ă©quipe de direction 1.– Une situation d’ensemble mĂȘlant atouts et fragilitĂ©sa Une situation sociale Ă  solidifierLe niveau moyen de l’emploi permanent s’établit au 30 juin 2006 Ă  ETP pour un total de rĂ©munĂ©rations et de charges de 245,59 millions d’euros dans le budget 2006. On soulignera que Radio–France s’engage, sur la pĂ©riode 2006–2009, Ă  se moderniser Ă  effectifs constants. Votre Rapporteur spĂ©cial salue l’objectif de la sociĂ©tĂ© de mettre en place, Ă  l’horizon 2009, une politique sociale moderne et efficace. Ne serait-ce que parce que les conflits sociaux rĂ©currents et leurs consĂ©quences sur les antennes font objectivement perdre des auditeurs et de la lĂ©gitimitĂ© Ă  la radio de service public. Ces grĂšves rĂ©pĂ©tĂ©es soulignent la fragilitĂ© du tissu social de la sociĂ©tĂ© et les difficultĂ©s qu’il y a Ă  faire Ă©voluer les relations du travail. On rappellera que les principaux mouvements sociaux des trois derniĂšres annĂ©es ont concernĂ© les journalistes janvier–fĂ©vrier 2004, les personnels techniques et administratifs avril 2005 et les personnels d’antenne des radios locales mars 2006. En outre, Radio France a connu des mouvements de grĂšve de courte durĂ©e 24h ou 48h issus de revendications nationales contrat premier embauche ou propres Ă  des entitĂ©s spĂ©cifiques 94. L’ensemble de ces mouvements se sont traduits par jours de grĂšve retenus en 2004, en 2005 et au cours des sept premiers mois de 2006. Votre Rapporteur spĂ©cial estime qu’un levier efficace et moderne de mobilisation des salariĂ©s de Radio France pourrait ĂȘtre la mise en place d’un accord d’intĂ©ressement, susceptible de favoriser et de mieux rĂ©compenser la performance des personnels. De mĂȘme, la politique salariale doit savoir allier les mesures d’augmentation gĂ©nĂ©rale et les mesures individuelles de valorisation de la performance. S’agissant des journalistes, Radio France a mis en place en 2005 un nouvel instrument salarial qui sera le vĂ©hicule des augmentations gĂ©nĂ©rales concernant ces salariĂ©s. Elle doit Ă©galement parvenir au rĂšglement de la question des disparitĂ©s, Ă  travers une redĂ©finition des grilles de carriĂšre des journalistes prenant en compte l’expĂ©rience acquise dans l’exercice de leur mĂ©tier. Par ailleurs, Ă  l’occasion de la modernisation des techniques et des technologies, une bonne gestion des compĂ©tences doit s’appuyer sur la formation professionnelle. Des nĂ©gociations seront ainsi engagĂ©es sur la mise en place du droit individuel Ă  la formation, prĂ©cisĂ© dans l’accord de branche applicable Ă  l’audiovisuel, et sur les possibilitĂ©s d’évoluer au sein de l’entreprise d’une filiĂšre professionnelle vers une autre. Plus largement, pour l’ensemble de ses mĂ©tiers, Radio France devrait mettre en place une vĂ©ritable gestion prĂ©visionnelle des emplois et des compĂ©tences passant par l’élaboration d’une cartographie des mĂ©tiers, la dĂ©finition de rĂ©fĂ©rentiels de compĂ©tences et la construction de parcours professionnels adaptĂ©s aux besoins futurs de l’entreprise. Une telle dĂ©marche s’appuiera sur une analyse de la pyramide dĂ©mographique propre Ă  chacun des mĂ©tiers et sur les estimations de dĂ©parts susceptibles d’en rĂ©sulter. Enfin, votre Rapporteur spĂ©cial salue la rĂ©organisation des instances reprĂ©sentatives intervenue cette annĂ©e, par voie d’accords entre la direction et les organisations syndicales principalement dans le cadre de protocoles préélectoraux conclus en mars 2006. Ces accords ont marquĂ© l’aboutissement d’une nĂ©gociation engagĂ©e en 2005 et restĂ©e bloquĂ©e, faute d’accord unanime. La nouvelle configuration se caractĂ©rise par la rĂ©duction du nombre de comitĂ©s d’établissement rĂ©gionaux, qui traduit l’alignement des pĂ©rimĂštres des comitĂ©s d’établissement sur l’organisation administrative rĂ©gionale de la sociĂ©tĂ©. Cette rĂ©forme participe ainsi Ă  l’objectif de conforter le dialogue social en assurant une reprĂ©sentation adĂ©quate des salariĂ©s des rĂ©gions et en dĂ©finissant un cadre Ă  mĂȘme de faciliter l’information et l’expression des salariĂ©s. Elle s’accompagne d’une refonte de l’ensemble des structures de reprĂ©sentation des salariĂ©s, la rĂ©organisation s’étendant au comitĂ© central d’entreprise, aux comitĂ©s d’hygiĂšne, de sĂ©curitĂ© et des conditions de travail, ainsi qu’aux dĂ©lĂ©guĂ©s du personnel. Le champ de dĂ©signation et de fonctionnement des dĂ©lĂ©guĂ©s syndicaux s’en trouvera modifiĂ© avec le mĂȘme souci de clarification. b La fragilitĂ© de l’audience et du marchĂ© publicitaireLa nouvelle direction a profondĂ©ment remaniĂ© les grilles, de mĂȘme que les Ă©quipes de direction et d’animation des antennes. En 2005–2006, 13 millions de personnes ont Ă©coutĂ© au moins un programme de Radio France au cours de la saison, pour une durĂ©e d’écoute quotidienne moyenne stable de 117 minutes. Le groupe reprĂ©sente 20,6 % de la consommation de la radio en part d’audience, en lĂ©ger retrait de 0,5 point par rapport Ă  2004–2005, Radio France n’ayant pas Ă©tĂ© Ă©pargnĂ©e par une Ă©volution plutĂŽt dĂ©favorable du mĂ©dia radio sur le marchĂ© français. Toutefois, France Inter 10,4 % d’audience se place en troisiĂšme position derriĂšre NRJ et RTL, France Info occupe la quatriĂšme place et le rĂ©seau France Bleu, la huitiĂšme. Avec 9,6 % d’audience cumulĂ©e, ce qui la place au 3Ăšme rang derriĂšre NRJ et RTL, France Inter est en retrait de 0,5 point par rapport Ă  2004–2005. Parmi les stations gĂ©nĂ©ralistes, seul RMC a progressĂ© en audience cumulĂ©e + 0,6 point. Avec une audience cumulĂ©e de 9,5 %, ce qui la place au 4Ăšme rang, France Info perd 0,2 point par rapport Ă  l’an dernier. Le rĂ©seau France Bleu enregistre, quant Ă  lui, une deuxiĂšme baisse avec une audience cumulĂ©e qui recule de 0,2 point pour se situer Ă  6,5 %. Par contre, avec une lĂ©gĂšre hausse d’audience cumulĂ©e 1,3 %, soit + 0,1 point, France Culture se maintient et gagne 2 minutes de durĂ©e d’écoute quotidienne par auditeur, Ă  92 minutes. Si France Musique voit son audience cumulĂ©e s’éroder lĂ©gĂšrement 1,5 %, soit – 0,2 point, la durĂ©e moyenne d’écoute ne cesse de s’amĂ©liorer et gagne 5 minutes cette annĂ©e pour atteindre 99 minutes. Or, la publicitĂ©, avec 43 millions d’euros, ne reprĂ©sente aujourd’hui que 8 % du budget global de Radio France. Les deux espaces de programme les plus ouverts Ă  la publicitĂ© sont les tranches de prime time de France Inter et France Info le 7h-9h et le 18h-20h. Ces Ă©crans, qui ont les meilleures audiences, sont les mieux vendus et gĂ©nĂšrent en consĂ©quence le chiffre d’affaires le plus important. Certes, comme votre Rapporteur spĂ©cial a eu plusieurs fois l’occasion de le rappeler, la trĂšs faible prĂ©sence de la publicitĂ© sur les antennes de Radio France est incontestablement un signe distinctif fort, trĂšs apprĂ©ciĂ© des auditeurs, et qui justifie prĂ©cisĂ©ment le financement par la redevance. Le temps consacrĂ© Ă  la publicitĂ© est largement infĂ©rieur au plafond moyen quotidien de 30 minutes par chaĂźne fixĂ© par le cahier des missions et des charges de Radio France. Sur France Inter, la part de publicitĂ© classique et du parrainage reprĂ©sente en moyenne 11 minutes 45 et sur France Info 16 minutes 31. Mais, les espaces consacrĂ©s Ă  la publicitĂ© classique sur les antennes de Radio France restent trop largement infĂ©rieurs Ă  ceux utilisĂ©s par la concurrence. À titre d’exemple, en 2005, sur les tranches 7h-9h et 18h-20h lĂ  oĂč la publicitĂ© occupe 6 minutes 30 du temps d’antenne de France Inter et 4 minutes de celui de France Info, les radios concurrentes disposent d’écrans publicitaires de 24 Ă  28 minutes. Cette situation va se trouver aggravĂ©e par l’ouverture Ă  la distribution du marchĂ© publicitaire de la tĂ©lĂ©vision l’an prochain le secteur de la distribution est aujourd’hui le client le plus important des rĂ©gies publicitaires et il est certain que les enseignes de distribution feront des arbitrages entre les mĂ©dias pour leur exposition publicitaire. Si les distributeurs n’accroissent pas le total de leurs investissements publicitaires, ce qui est probable, la radio subira un manque Ă  gagner qui pourrait atteindre jusqu’à – 10 % du chiffre d’affaires en 2007. Il faut donc aider Radio France, dont la situation sur le marchĂ© publicitaire est dĂ©jĂ  trĂšs entravĂ©e, Ă  rĂ©agir. Dans ce contexte, votre Rapporteur spĂ©cial estime primordial de donner Ă  Radio France les moyens de dynamiser ses recettes publicitaires. Élargir l’accĂšs de la publicitĂ© sur les antennes de Radio France La partie du cahier des charges relative Ă  l’accĂšs Ă  la publicitĂ© de Radio France remonte Ă  1975 la sociĂ©tĂ© n’est autorisĂ©e Ă  programmer et Ă  diffuser [que] des messages de publicitĂ© collective et d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral ». Cette limitation est totalement datĂ©e dans la mesure oĂč elle renvoie Ă  une Ă©poque oĂč la part du secteur public dans l’économie Ă©tait beaucoup plus importante. Ainsi, la base d’annonceurs de Radio France ne cesse de diminuer rĂ©duction annĂ©e aprĂšs annĂ©e du pĂ©rimĂštre du secteur public » et banalisation » Ă  terme des entreprises mutualistes. Votre Rapporteur spĂ©cial insiste sur l’absurditĂ© actuelle de cette rĂ©glementation qui autorise la publicitĂ© pour les filiales des mutuelles financiĂšres et qui aboutit ainsi Ă  permettre Ă  Radio France de faire de la publicitĂ© pour LCL et le CIC
 mais par pour la BNP ! À l’heure actuelle, le secteur des mutuelles financiĂšres et le secteur public reprĂ©sentent prĂšs de 60 % du chiffre d’affaires de Radio France, soit plus de 20 millions d’euros. Ce pĂ©rimĂštre inclut Gaz de France, qui a permis de rĂ©aliser plus de 2 millions d’euros de recettes l’an dernier
 alors que sa sortie du secteur public est dĂ©jĂ  engagĂ©e. Les perspectives Ă  moyen terme du marchĂ© publicitaire Ă  la radio Ă©tant trĂšs incertaines, la capacitĂ© de Radio France Ă  dynamiser ses recettes est mĂ©caniquement menacĂ©e. Surtout, au fur et Ă  mesure que le secteur public se rĂ©duit, Radio France rĂ©duit son champ d’action publicitaire, comme l’a dĂ©montrĂ© l’impact de la perte de France TĂ©lĂ©com sur les recettes. De mĂȘme, la perte des mutuelles financiĂšres et de leurs filiales se traduirait par 10 millions d’euros de manque Ă  gagner pour Radio France. Votre Rapporteur spĂ©cial plaide donc pour une modernisation du cahier des charges, ne serait-ce que pour permettre Ă  Radio France de maintenir ses recettes publicitaires Ă  un niveau soutenable. Une diversification des annonceurs permettrait d’attĂ©nuer la perception de saturation des antennes par des messages qui, on le constate aisĂ©ment, tournent souvent autour de l’assurance–vie ou des mĂ©canismes de type PrĂ©fon. En contrepartie de cette extension, la durĂ©e maximale moyenne 30 minutes pourrait ĂȘtre ramenĂ©e Ă  hauteur de l’existant. Votre Rapporteur spĂ©cial considĂšre notamment lĂ©gitime d’élargir le champ des annonceurs autorisĂ©s aux entreprises Ă  participation significative de l’État ou Ă  celles chargĂ©es d’une mission de service public. Une Ă©volution comparable pourrait Ă©galement intervenir s’agissant du secteur financier oĂč seule la publicitĂ© pour les mutuelles et leurs filiales est aujourd’hui autorisĂ©e par le CSA. Radio France aurait ainsi les moyens de faire progresser ses recettes de 3 % par an, alors qu’elles tendent Ă  plafonner. c Une gestion budgĂ©taire contrainteLe chiffre d’affaires de Radio France s’établit Ă  541 millions d’euros pour l’exercice 2005, en progression de 2,6 % par rapport Ă  2004. Cette Ă©volution porte Ă  hauteur de 2,3 % sur la ressource publique et de 5,3 % sur les recettes propres publicitĂ©, parrainage, ventes et prestations de services. L’annĂ©e 2005 porte le total des produits d’exploitation Ă  555,97 millions d’euros + 2,01 %, montant insuffisant pour couvrir des charges atteignant 558,75 millions d’euros + 2,05 %. Le rĂ©sultat d’exploitation est donc dĂ©ficitaire de 2,77 millions d’euros et le rĂ©sultat courant de 1,64 million d’euros. Avec un rĂ©sultat exceptionnel de 2,2 millions d’euros en 2005, le rĂ©sultat net de l’exercice est finalement lĂ©gĂšrement positif de 0,53 million d’euros. L’exĂ©cution de l’annĂ©e en cours aboutit, pour le moment, Ă  un total de ressources et de dĂ©penses de 567,07 millions d’euros dans le budget 2006 rĂ©visĂ©, dont 50 % avaient Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s au 30 juin 2006. Il est proposĂ© de porter l’affectation du produit de la redevance audiovisuelle revenant Ă  Radio France Ă  508,2 millions d’euros hors taxes en 2007, en progression de 2,65 % par rapport Ă  2006. Cette redevance couvre deux Ă©lĂ©ments l’activitĂ© gĂ©nĂ©rale de l’entreprise 502 millions d’euros et le plan de rĂ©habilitation de la Maison de la Radio 6,2 millions d’euros. Ces crĂ©dits sont en cohĂ©rence avec le projet de contrat d’objectifs et de moyens dĂ©jĂ  prĂ©sentĂ© et doivent permettre d’atteindre les objectifs fixĂ©s pour les annĂ©es 2006–2009. Il s’agira en particulier d’inscrire la stratĂ©gie de diffusion dans la perspective de sa numĂ©risation, tout en complĂ©tant la couverture analogique de certains programmes, et de renforcer l’offre de Radio France par des contenus enrichis et plus accessibles avec la mise en place de chaĂźnes thĂ©matiques dĂ©rivĂ©es et le dĂ©veloppement du portail web. D’une maniĂšre gĂ©nĂ©rale, votre Rapporteur spĂ©cial considĂšre que l’offre de Radio France dans un environnement multimĂ©dia ne peut se dĂ©velopper qu’en proposant de nouveaux services et donnĂ©es associĂ©es. Le dĂ©ploiement de la radio numĂ©rique doit ainsi ĂȘtre engagĂ© sans attendre. Radio France estime que la prĂ©sence de la radio dans la TNT, dĂ©jĂ  effective sur d’autres marchĂ©s europĂ©ens, permettrait d’une part de complĂ©ter l’offre gratuite dans des zones mal couvertes en proposant, sur un terminal unique, radio et tĂ©lĂ©vision gratuites 95, et d’éviter d’autre part que l’écoute fixe de la radio fasse, pour des raisons techniques, les frais de l’essor de certains terminaux au sein des foyers 96. Elle contribuerait aussi au renforcement de l’initialisation de la TNT. Quant au mode d’écoute que constitue l’internet 97, il est dĂ©sormais incontournable. Une amĂ©lioration des dĂ©bits d’accĂšs aux plates-formes de services et donc de la qualitĂ© perçue par les auditeurs sera recherchĂ©e, sous rĂ©serve de pouvoir compenser la hausse des dĂ©bits par une diminution des tarifs unitaires de la bande passante, afin de maintenir constant le pĂ©rimĂštre budgĂ©taire actuel, et d’assurer la cohĂ©rence entre cette offre et la prĂ©sence des programmes sur des offres ADSL en triple ou quadruple play, a priori gratuite pour Radio France. Surtout, la migration vers un rĂ©seau numĂ©rique dĂ©diĂ© doit ĂȘtre Ă©tudiĂ©e. Selon Radio France, la radio numĂ©rique ne sera un succĂšs que si elle assure Ă  la fois un accroissement et une diversification de l’offre, ainsi qu’une amĂ©lioration de la qualitĂ© et des fonctionnalitĂ©s, tout en garantissant une Ă©coute en mobilitĂ©, avantage encore spĂ©cifique et dĂ©cisif du mĂ©dia radio, ainsi qu’une continuitĂ© territoriale. Ces caractĂ©ristiques supposeront le dĂ©ploiement d’un rĂ©seau dĂ©diĂ©. Sans a priori sur la norme Ă  retenir, Radio France souhaite pouvoir y proposer gratuitement ses programmes actuels, afin de favoriser l’initialisation d’un tel rĂ©seau, ainsi que de nouveaux programmes thĂ©matiques dĂ©rivĂ©s, en cohĂ©rence avec la stratĂ©gie Ă©ditoriale. 2.– La poursuite de la rĂ©habilitation de la Maison de la RadioRadio France est aujourd’hui confrontĂ©e Ă  un projet immobilier d’une ampleur sans prĂ©cĂ©dent 309 millions d’euros sur 2005–2013 qui va structurer son fonctionnement pour les sept prochaines annĂ©es. L’essentiel des Ă©tudes et des choix immobiliers ont Ă©tĂ© faits et les travaux doivent commencer en 2007. L’enjeu est aujourd’hui de transformer ce qui a Ă©tĂ© au dĂ©part une contrainte, une obligation, en une opportunitĂ© de modernisation et de crĂ©ativitĂ©. Pour cela, Radio France doit disposer d’une vision claire sur le mode de financement du projet. Il revient dĂ©sormais Ă  l’État de se Un processus par Ă©tapesOn rappellera qu’à la suite des rĂ©sultats des Ă©tudes engagĂ©es depuis 1999 sur la rĂ©sistance au feu des bĂątiments de la Maison de la Radio, le prĂ©fet de police de Paris a notifiĂ© en 2003 sa dĂ©cision de n’autoriser la poursuite de l’exploitation de Radio France qu’à la condition expresse que les parties centrales en structure mĂ©tallique de l’immeuble soient Ă©vacuĂ©es tour, radiales et petite couronne afin d’y entreprendre des travaux permettant d’utiliser Ă  nouveau ces espaces dans les conditions de sĂ©curitĂ© requises. Le conseil d’administration de l’entreprise a pris acte de cette dĂ©cision prĂ©fectorale qui obligeait Radio France Ă  devoir Ă©vacuer mÂČ. Les dĂ©mĂ©nagements ont commencĂ© dĂšs novembre 2003 et se sont achevĂ©s Ă  la fin du mois de septembre 2004. ConformĂ©ment au calendrier approuvĂ© par la prĂ©fecture de police, l’ensemble de la zone centrale mĂ©tallique a Ă©tĂ© Ă©vacuĂ©. Au terme des discussions engagĂ©es avec les autoritĂ©s de tutelle, sur la base de nombreuses expertises, le conseil d’administration rĂ©uni le 29 septembre 2004 a approuvĂ© le schĂ©ma directeur de rĂ©habilitation de la Maison de la Radio et autorisĂ© le prĂ©sident Cluzel Ă  engager la procĂ©dure de dialogue compĂ©titif en vue du recrutement du maĂźtre d’Ɠuvre, Ă©cartant donc l’hypothĂšse de la construction d’un nouveau siĂšge. Suite Ă  cet appel europĂ©en Ă  candidature, le cabinet Architecture Studio a Ă©tĂ© dĂ©signĂ©, le 19 avril 2005, pour assurer la maĂźtrise d’Ɠuvre des travaux de rĂ©habilitation de la Maison de la Radio. b Le contenu du projetL’obligation rĂ©glementaire de mise en sĂ©curitĂ© incendie oblige Ă  un traitement de toutes les structures du bĂątiment, donc leur mise Ă  nu. Le projet prĂ©voit de conserver l’apparence extĂ©rieure imaginĂ©e par l’architecte Henry Bernard et de procĂ©der Ă  une profonde restructuration intĂ©rieure en phase avec les conditions de travail d’une radio publique moderne. Le bĂątiment futur s’ouvrira de plain-pied et la distribution intĂ©rieure de l’immeuble sera entiĂšrement repensĂ©e Ă  partir d’un espace central, l’atrium, pour faciliter la circulation du public et des collaborateurs. À l’extĂ©rieur, un espace paysager revalorisera son insertion dans la ville. Dans cette perspective, afin de faire disparaĂźtre le stationnement des vĂ©hicules au pourtour de l’immeuble, un parking souterrain sera construit, et son exploitation concĂ©dĂ©e. En outre, la rĂ©habilitation permettra de doter les formations musicales de Radio France d’une salle de concert de places. Il s’agit d’un apport dĂ©cisif Ă  la politique culturelle menĂ©e par Radio France en matiĂšre musicale. Radio France acteur majeur de la vie musicale Radio France est aujourd’hui un acteur de service public de tout premier plan pour la vie musicale française. Dans le respect de son cahier des missions et des charges, notamment des articles 27 Ă  29, elle s’est positionnĂ©e comme radiodiffuseur et producteur de musique vivante, mais aussi comme vecteur majeur de crĂ©ation de contenus, de promotion du patrimoine musical et culturel et de mise en valeur de la musique française, tout en affirmant une vocation pĂ©dagogique. Pour rĂ©aliser ces missions, Radio France s’appuie sur trois pĂŽles complĂ©mentaires – les quatre formations musicales deux orchestres, un chƓur et une maĂźtrise rĂ©unies au sein de la direction de la musique, Ă  travers la diversitĂ© et la cohĂ©rence de leurs saisons respectives, mais aussi leur action pĂ©dagogique et leur soutien direct Ă  la crĂ©ation ; – les chaĂźnes, Ă  travers l’information sur la vie musicale et culturelle, les Ă©missions d’analyse et de dĂ©cryptage, la programmation musicale, la rĂ©alisation de documentaires et de dramatiques, ainsi que la politique de partenariat avec des artistes, festivals, Ă©vĂ©nements ou institutions culturelles ; – les Ă©ditions et co-Ă©ditions Ă©crites, sonores, musicales et multimĂ©dia qui assurent le prolongement des antennes en renforçant les liens avec les auditeurs. Inutile de rappeler le niveau artistique exceptionnel des formations musicales, Ă  commencer par l’orchestre national de France et l’orchestre philharmonique de Radio France. Le nombre des invitations Ă  l’étranger et la frĂ©quentation des concerts parisiens indiquent clairement que les deux orchestres de Radio France se sont hissĂ©s aux tout premiers rangs des formations internationales. Qu’il s’agisse de la dĂ©fense du rĂ©pertoire, ou de la promotion de la musique contemporaine, la politique musicale de Radio France est l’une des plus dynamiques en Europe. DĂšs septembre 2006, l’identitĂ© des deux orchestres a Ă©tĂ© rĂ©affirmĂ©e, puisque chacun aura retrouvĂ© une salle spĂ©cifique avec le retour de l’orchestre philharmonique salle Pleyel. On signalera Ă©galement les huit week-ends porte ouverte », associant les formations permanentes de Radio France Ă  des formations et des artistes invitĂ©s, qui ont permis de faire dĂ©couvrir au public et aux auditeurs des Ɠuvres rares, voire inĂ©dites en France. La rĂ©cente nomination d’un directeur commun Ă  la direction de la musique et de France Musique permet d’assurer la complĂ©mentaritĂ© et la cohĂ©rence de la programmation des formations et de la politique Ă©ditoriale de la chaĂźne. Tout concert des formations est dĂ©sormais enregistrĂ© pour ĂȘtre diffusĂ© sur France Musique et proposĂ© Ă  l’étranger. La rĂ©habilitation de la Maison de la Radio permettra de construire un nouvel auditorium de places qui sera livrĂ© en 2010 et proposera tous les genres musicaux. L’auditorium, dont l’acoustique a Ă©tĂ© confiĂ©e Ă  des cabinets mondialement reconnus, permettra aux formations de rĂ©pĂ©ter et de jouer en public dans les mĂȘmes conditions acoustiques. Le studio 104 salle Olivier Messiaen continuera Ă  accueillir du public pour des concerts de 400 places et pourra ĂȘtre utilisĂ© pour renforcer les actions pĂ©dagogiques dĂ©jĂ  menĂ©es par les formations envers un public variĂ© de jeunes. Le studio 101, aujourd’hui utilisĂ© pour certaines Ă©missions de tĂ©lĂ©vision, sera dĂ©volu au chƓur. Les chaĂźnes ont pour objectifs de soutenir la crĂ©ation musicale et les nouveaux talents et renforcer leur rĂŽle d’organisateur et de promoteur d’évĂ©nements culturels. Toutes les musiques sont ainsi reprĂ©sentĂ©es Ă  Radio France, qui promeut plus particuliĂšrement les jeunes artistes. Comme les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes, la qualitĂ©, la diversitĂ© et la dĂ©couverte de talents nouveaux ont constituĂ© en 2005 le fondement de la politique musicale de France Inter, que ce soit au travers de ses Ă©missions ou de sa politique de partenariat avec les Victoires de la musique ou les plus grands festivals. En 2005, le rĂ©seau France Bleu a Ă©galement poursuivi sa politique de mise en valeur et de soutien aux jeunes talents de la chanson française, Ă  travers la remise du Talent France Bleu » et du TrophĂ©e France Bleu de la chanson » mais aussi l'organisation d’évĂ©nements scĂ©niques. Comme chaque annĂ©e, Le Mouv’ a couvert de nombreux festivals musicaux. Son antenne est ouverte aux artistes français et aux nouveaux talents francophones. Des artistes sont rĂ©guliĂšrement invitĂ©s en public et en direct au studio 108. De plus, pour la deuxiĂšme annĂ©e consĂ©cutive, FIP a organisĂ© un concert Ă  l’Olympia dans le cadre de la FĂȘte de la musique. Radio France dispose Ă©galement d’une direction qui gĂšre et dĂ©veloppe, en liaison avec les chaĂźnes et les formations musicales, un ensemble d’éditions Ă©crites, musicales, sonores et multimĂ©dia. Elle travaille en collaboration Ă©troite avec les Ă©diteurs et les maisons de disques, contribuant ainsi au soutien de l’édition sous toutes ses formes. Par ailleurs, l’INA Ă©tant dĂ©positaire du fonds des concerts de Radio France, un partenariat sera recherchĂ© entre les deux opĂ©rateurs publics pour dĂ©velopper un nouveau service associĂ© d’écoute en ligne et de tĂ©lĂ©chargement d’une sĂ©lection d’Ɠuvres et d’interprĂ©tations. c Une dĂ©pense importante mais nĂ©cessaireLe coĂ»t estimĂ© du projet en investissement s’élĂšve Ă  215,8 millions d’euros en euros courants hors parc de stationnement souterrain, dont respectivement 177,2 millions d’euros de travaux proprement dits, intĂ©grant une marge pour alĂ©as de 5 % 98. À ces investissements, il convient d’ajouter 25,1 millions d’euros au titre de la construction du parking. Le coĂ»t total du projet intĂ©grant la construction du parc de stationnement s’élĂšve donc Ă  240,9 millions d’euros. Compte tenu des coĂ»ts de fonctionnement liĂ©s notamment Ă  la location d’emprises extĂ©rieures, aux pertes de loyers, aux frais de maĂźtrise d’ouvrage et aux dĂ©mĂ©nagements, le coĂ»t total du projet peut ĂȘtre estimĂ© Ă  308,9 millions d’euros en euros courants sur l’ensemble de la pĂ©riode 2005–2013 334 millions d’euros en incluant le parking, mĂȘme si ce total agrĂšge des postes de nature trĂšs diffĂ©rentes. Le dĂ©tail de ces estimations et leur Ă©volution depuis 2005 sont prĂ©sentĂ©s dans le tableau ci-aprĂšs. COÛT TOTAL DE LA RÉHABILITATION DE LA MAISON DE LA RADIO en milliers d’euros courants – hors taxes 2005* annĂ©e 1 2006 annĂ©e 2 2007 annĂ©e 3 2008 annĂ©e 4 2009 annĂ©e 5 2010 annĂ©e 6 2011 annĂ©e 7 2012 annĂ©e 8 2013 annĂ©e 9 Total 2005-2013 Fonctionnement coĂ»ts liĂ©s Ă  l’évacuation de la zone interdite CoĂ»ts de la rĂ©habilitation Besoin de financement liĂ© aux locataires – 477 610 Fonctionnement hors amortissements 721 Investissement Total en euros courants –solution de base CoĂ»ts liĂ©s Ă  l’auditorium 41 75 43 – – – Total avec Auditorium en euros courants Total fonctionnement Total investissement * Remarque les coĂ»ts 2005 ont Ă©tĂ© majorĂ©s des euros versĂ©s dĂšs 2004 au titre de l’investissement. IV.– LE PATRIMOINE AUDIOVISUEL DE LA CONSERVATION À LA DÉMOCRATISATION DES ARCHIVES A.– L’INSTITUT NATIONAL DE L’AUDIOVISUEL UN OUTIL BIEN GÉRÉ ET OUVERT SUR SON ENVIRONNEMENT IMMÉDIAT1.– Une gestion efficaceComme on l’a dĂ©jĂ  rappelĂ©, l’Institut national de l’audiovisuel INA est passĂ© en quelques annĂ©es d’une situation de crise Ă  un assainissement de sa gestion lui permettant dĂ©sormais de jouer un rĂŽle majeur au sein du paysage audiovisuel français. L’INA affiche en 2005 de trĂšs bons rĂ©sultats budgĂ©taires, financiers et comptables. En 2005, le rĂ©sultat avant impĂŽt est positif de 0,67 million d’euros. C’est le rĂ©sultat de la politique de saine gestion pratiquĂ©e depuis 1999 et optimisĂ©e depuis 2003 par la mise en place d’outils de suivi de gestion et de prĂ©vision. La productivitĂ© de l’INA, mesurĂ©e par le revenu tirĂ© des activitĂ©s aprĂšs dĂ©duction des charges d’exploitation, poursuit sa progression puisqu’elle Ă©volue de – 1,48 million d’euros en 2003 Ă  + 1,3 million d’euros en 2005. L’INA affiche de bons rĂ©sultats financiers que ce soit en terme d’excĂ©dent brut d’exploitation passĂ© de 10,1 millions d’euros en 2003 Ă  15,3 millions d’euros en 2005, comme au niveau du rĂ©sultat net avant impĂŽt +0,7 million d’euros. Le total des recettes de l’INA s’élĂšve Ă  108,2 millions d’euros sur l’exercice 2005 en hausse de 5,3 % par rapport Ă  2004, alors que le budget votĂ© prĂ©voyait une croissance de 4,4 %. Cette augmentation est certes liĂ©e Ă  l’augmentation de 3,8 % de la redevance, mais Ă©galement Ă  une amĂ©lioration des recettes commerciales + 8,6 %. La masse salariale du personnel permanent au 31 dĂ©cembre 2005 est arrĂȘtĂ©e Ă  54,1 millions d’euros. L’effectif Ă©quivalent temps plein ETP Ă  la fin 2005 Ă©tait de 954,5, soit 10 ETP de plus qu’à la fin 2004. L’ETP moyen a Ă©voluĂ© de 16 postes entre 2004 et 2005 en lien avec l’accĂ©lĂ©ration du plan de sauvegarde et de numĂ©risation et l’extension du dĂ©pĂŽt lĂ©gal. L’état prĂ©visionnel des effectifs permanents dĂ©fini dans le COM 2005–2009, devrait porter les ETP Ă  980 Ă  la fin 2009, avec une stabilisation des frais de personnel Ă  hauteur de 55 % du total des produits et l’évolution de 0,3 Ă  0,25 du ratio effectifs fonctionnels/effectifs opĂ©rationnels. L’atteinte des objectifs opĂ©rationnels fixĂ©s par l’État Ă  horizon 2009 nĂ©cessite d’autre part la crĂ©ation d’une cinquantaine de nouveaux postes, tout en restant dans le mĂȘme effectif global entre 2005 et 2009. Votre Rapporteur spĂ©cial se rĂ©jouit de ces rĂ©sultats, signe d’une gestion raisonnable. Tournant la page d’une gestion particuliĂšrement critiquable qui avait fait l’objet d’observations trĂšs sĂ©vĂšres de la part de la Cour des comptes, l’INA a su amĂ©liorer ses procĂ©dures, sa gestion et son Ă©quilibre financier, tout en respectant les objectifs inscrits au contrat d’objectifs et de moyens. Le budget 2006 a Ă©tĂ© votĂ© sur un total de produit et de charges de 111,7 millions d’euros. Au 30 juin 2006, l’excĂ©dent brut d’exploitation s’élĂšve Ă  15,5 millions d’euros et le rĂ©sultat avant impĂŽt Ă  10,3 millions d’euros. Le rĂ©sultat 2006 devrait ĂȘtre amĂ©liorĂ© du fait du financement complĂ©mentaire inscrit au budget de l’INA dans le cadre de la rĂ©serve parlementaire 0,68 million d’euros. Le budget 2007 de l’INA sera prĂ©sentĂ© au conseil d’administration de dĂ©cembre. D’aprĂšs les informations recueillies par votre Rapporteur spĂ©cial, le compte de rĂ©sultat devrait porter les charges et les produits Ă  hauteur de 115,7 millions d’euros, en augmentation de 3,6 % et en liaison avec les objectifs du COM 2005–2009. Il est ainsi proposĂ© de porter l’affectation du produit de la redevance audiovisuelle revenant Ă  l’INA Ă  80,46 millions d’euros en 2007, en progression de 4 % par rapport Ă  2006. 2.– Une ouverture croissante vers le monde Ă©ducatif et culturelVotre Rapporteur spĂ©cial salue l’initiative, cohĂ©rente avec la revalorisation du rĂŽle de l’INA et sa situation de premier centre europĂ©en de formation aux mĂ©tiers de l’image et du son, consistant Ă  crĂ©er une Ă©cole de l’INA » dĂ©livrant un diplĂŽme validĂ© par l’État 99. L’INA forme dĂ©jĂ  plus de professionnels, Ă©lĂšves, Ă©tudiants 100 et apprentis 101 du secteur audiovisuel et multimĂ©dia chaque annĂ©e. Mais Ă  la diffĂ©rence du cinĂ©ma, la radio et la tĂ©lĂ©vision n’ont pas suscitĂ© l’émergence de lieux d’études supĂ©rieures de rĂ©fĂ©rence, bien que ces mĂ©dias influencent directement la sociĂ©tĂ© et forment le socle d’une culture populaire bien rĂ©elle. L’expĂ©rience acquise en matiĂšre de formation conduit ainsi l’INA Ă  ouvrir, dĂšs l’automne 2007, une formation initiale diplĂŽmante aux mĂ©tiers de production et de conservation de patrimoines audiovisuels et numĂ©riques. L’ouverture de l’école supĂ©rieure de l’audiovisuel et du numĂ©rique viendra renforcer la gamme des rĂ©ponses que l’INA apporte aux besoins transversaux de l’économie numĂ©rique, non couverts par l’offre actuelle, Ă  travers une formation supĂ©rieure professionnalisante. Le diplĂŽme comprendra deux spĂ©cialitĂ©s conservateur du patrimoine audiovisuel et numĂ©rique et producteur audiovisuel et numĂ©rique. Chacune de ces filiĂšres pourra accueillir jusqu’à 20 Ă©tudiants par promotion. Par la suite, des formations nouvelles seront introduites en liaison avec les mĂ©tiers de la culture, de la communication, de la connaissance et de la crĂ©ation. Aussi peut-on croire que les Ă©lĂšves de cette Ă©cole, qu’ils travaillent par la suite dans une entreprise directement liĂ©e au secteur audiovisuel ou bien plus largement dans le secteur du numĂ©rique, seront porteurs et transmetteurs d’une culture novatrice. Au centre de l’INA et des cercles universitaires et professionnels que l’Institut a su constituer autour de lui, les Ă©tudiants recevront les enseignements des spĂ©cialistes de l’INA, des enseignants–chercheurs associĂ©s et des professionnels rĂ©fĂ©rents du secteur audiovisuel français et international. L’INA s’associera pour ce faire Ă  des institutions internationales majeures du monde de l’enseignement supĂ©rieur en Europe, aux États-Unis, en Afrique et en Asie. Ainsi un partenariat a Ă©tĂ© conclu avec l’universitĂ© UCLA de Los Angeles, deux autres accords Ă©tant en voie de finalisation avec l’universitĂ© Carlos III de Madrid et l’universitĂ© de la Communication de Chine. B.– LES ENJEUX DE LA VALORISATION DU PATRIMOINE AUDIOVISUEL 1.– L’indispensable plan de sauvegarde et de numĂ©risation du patrimoineConstituant l’orientation stratĂ©gique la plus structurante, la sauvegarde du patrimoine audiovisuel français se poursuit par la collecte, l’enrichissement et l’exploitation des fonds. Dans ce cadre, le plan de sauvegarde et de numĂ©risation des fonds menacĂ©s de dĂ©gradation physico–chimique entrera dans une phase d’accĂ©lĂ©ration qui devrait permettre la sauvegarde intĂ©grale des collections Ă  horizon 2015, ainsi que leur conservation pĂ©renne. Sur un total de fonds patrimoniaux professionnels de l’ordre de 1,3 million d’heures, heures sont menacĂ©es Ă  des titres divers dĂ©gradation du support, obsolescence des Ă©quipements de lecture..., la nature des menaces variant selon les supports. La rĂ©ussite de ce plan est fondamentale, l’annĂ©e 2015 constituant l’échĂ©ance maximale de traitement des fonds pour minimiser les risques de perte des contenus. Les contraintes de calendrier impliquent donc un ordonnancement prĂ©cis des travaux, Ă  dĂ©faut de quoi toute heure non traitĂ©e sera irrĂ©mĂ©diablement sacrifiĂ©e. En parallĂšle aux travaux de sauvegarde et de numĂ©risation, il est tout aussi indispensable de mener des actions conservatoires destinĂ©es Ă  freiner la dĂ©gradation des supports et Ă  garantir la faisabilitĂ© des traitements ultĂ©rieurs transfert sur CD des bandes son de supports film, afin d’éviter un alourdissement important des coĂ»ts de traitement ultĂ©rieurs. Quant Ă  l’enrichissement des collections, il sera poursuivi par l’acquisition et la mise en valeur des fonds et par la stabilisation du pĂ©rimĂštre du dĂ©pĂŽt lĂ©gal 102, qui atteindra une taille critique reprĂ©sentative du paysage audiovisuel français. En 2005, le dĂ©pĂŽt lĂ©gal enregistre en numĂ©rique 48 chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision et 17 chaĂźnes de radio. En 2009, 100 chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision et 20 de radio seront captĂ©es et leur contenu sera accessible aux chercheurs dans six points d’accĂšs rĂ©gionaux, en plus de la bibliothĂšque nationale de France Ă  Paris. 2.– Le trĂšs beau succĂšs de la mise en ligne des archives Comment, enfin, ne pas revenir sur le formidable succĂšs 103 rencontrĂ© par le nouveau site internet 104 de l’INA ? Le 27 avril dernier, l’INA y a, en effet, mis en ligne heures de ses archives tĂ©lĂ©visĂ©es et radiophoniques, soit l’équivalent de la programmation d’une chaĂźne de tĂ©lĂ©vision pendant deux ans. Cette offre rĂ©solument citoyenne rĂ©pond Ă  deux objectifs – un objectif patrimonial permettre au plus grand nombre d’accĂ©der au patrimoine de la tĂ©lĂ©vision et de la radio. Tous les documents proposĂ©s en ligne sont donc au moins en partie gratuits en visionnage 80 % des documents en visionnage gratuit intĂ©gral ; – un objectif commercial gĂ©nĂ©rer des recettes dans l’optique d’un Ă©quilibre financier Ă  moyen terme, dans le respect rigoureux du droit d’auteur. Le tĂ©lĂ©chargement des documents est donc payant, les prix variant gĂ©nĂ©ralement de 1 Ă  8 euros. Votre Rapporteur spĂ©cial souligne que cette mise en ligne est – avec le sauvetage du patrimoine – l’autre fruit d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral des efforts engagĂ©s pour numĂ©riser les fonds. Rendue aujourd’hui disponible au plus grand nombre grĂące Ă  la technologie, notamment la progression de la connexion haut dĂ©bit, cette nouvelle offre de vidĂ©o Ă  la demande est donc un aboutissement dans la politique numĂ©rique de l’INA et une nouvelle dimension donnĂ©e Ă  ce service public enfin accessible facilement notamment par ceux qui paient la redevance ! MĂȘme si toutes les demandes particuliĂšres ne peuvent pas ĂȘtre satisfaites dans l’immĂ©diat, la taille de l’offre et sa diversitĂ© permettent a priori Ă  chacun de trouver matiĂšre Ă  dĂ©couverte. L’ergonomie du site a Ă©galement Ă©tĂ© conçue de maniĂšre Ă  fournir diffĂ©rents accĂšs, Ă  la fois pour les internautes dĂ©butants et pour les internautes avertis. L’offre Ă©ditoriale est Ă©galement trĂšs soignĂ©e, une archive du jour » Ă©tant renouvelĂ©e quotidiennement et des dossiers nouveaux toutes les semaines 105. Cette offre Ă©ditoriale se trouve renforcĂ©e par la mise en ligne d’une importante rubrique Ă©ducative, qui rĂ©pondra ainsi aux besoins particuliers des enseignants, parents d’élĂšves et surtout des jeunes gĂ©nĂ©rations qui pourront avoir accĂšs aux contenus par niveau scolaire. En termes financiers, les recettes liĂ©es Ă  l’achat sont supĂ©rieures aux estimations. On peut cependant remarquer qu’un faible nombre de visiteurs du site deviennent clients, le paiement sur internet et le tĂ©lĂ©chargement restant des barriĂšres pour nombre d’internautes, notamment les seniors. C’est donc pour monĂ©tiser » l’audience du site que l’INA a dĂ©cidĂ© d’inclure sur son site de la publicitĂ© Ă  partir de l’automne, publicitĂ© qui sera gĂ©rĂ©e par la rĂ©gie France TĂ©lĂ©visions PublicitĂ©. La mise en ligne d’une partie des archives de l’INA est Ă©galement le rĂ©sultat d’un travail de prĂšs d’un an pour Ă©tablir avec les sociĂ©tĂ©s de gestion collective reprĂ©sentant les diffĂ©rentes catĂ©gories d’ayants droit les conditions juridiques et financiĂšres de cette mise en ligne. Votre Rapporteur spĂ©cial se rĂ©jouit de ce que la mise en ligne de cette offre unique au monde par son volume ait renforcĂ© l’image de l’INA auprĂšs des professionnels en France et Ă  l’étranger. Au-delĂ  du monde de l’audiovisuel, elle a donnĂ© Ă  l’INA une notoriĂ©tĂ© publique qui va plus loin que la reconnaissance du logo incrustĂ© dans les images d’archives diffusĂ©es Ă  la tĂ©lĂ©vision... * * * CHAPITRE TROISIÈME REDÉFINIR LES AIDES POUR PRÉPARER LA PRESSE DE DEMAIN Les annĂ©es passent, le constat reste le mĂȘme la presse française, surtout la presse quotidienne, connaĂźt depuis maintenant quelques annĂ©es une crise profonde que le dispositif d’aides peine Ă  enrayer. Les remĂšdes appliquĂ©s jusqu’à prĂ©sent ont eu un effet plutĂŽt positif et les aides de l’État constituent un outil indispensable pour aider la presse nationale et rĂ©gionale Ă  conserver sa diversitĂ© et sa qualitĂ©. Mais cet effort ne permettra pas, Ă  lui seul, d’inverser la tendance. Toute la difficultĂ© pour l’élaboration de la politique publique de soutien Ă  la presse rĂ©side dans l’absence d’accord sur ce que sera la presse de demain. Car c’est Ă  la presse qui sera lue dans dix ou vingt ans qu’il faut penser
 sans quoi de nouveaux acteurs Ă©conomiques viendront remplacer les acteurs existants, et avec eux une histoire intiment liĂ©e Ă  l’essor de la dĂ©mocratie, un prestige symbolique du respect des libertĂ©s dans notre pays et une exigence qui font de la presse française une des plus indĂ©pendantes, rigoureuses et pluralistes au monde. Les diffĂ©rents acteurs commencent nĂ©anmoins Ă  prendre conscience de l’urgence et mettent de cĂŽtĂ© leurs divergences d’intĂ©rĂȘt pour rĂ©flĂ©chir ensemble aux mutations Ă  rĂ©ussir pour crĂ©er le quotidien du futur. L’État de son cĂŽtĂ© doit aussi s’interroger sur son rĂŽle et s’engager sans tabou dans une rĂ©flexion portant Ă  la fois sur ses aides Ă  la presse, importantes et diverses, et sur le cadre juridique global dans lequel Ă©volue la presse aujourd’hui. I.– LA PRESSE FRANÇAISE UN PANORAMA INQUIÉTANT A.– LA SITUATION ÉCONOMIQUE DE LA PRESSE UNE STAGNATION GÉNÉRALE CACHANT CERTAINES ÉVOLUTIONS INQUIÉTANTESLe chiffre d’affaires de la presse Ă©crite en 2005 a atteint 10,59 milliards d’euros soit une progression de seulement 0,2 % par rapport Ă  2004 ce qui traduit une rĂ©gression en termes rĂ©els de 1,7 %, la hausse des prix du PIB ayant Ă©tĂ© de 1,9 %. Mais les Ă©volutions, aussi bien des recettes de vente que des recettes publicitaires, sont trĂšs variables d’une catĂ©gorie de presse Ă  l’autre, ce qui oblige Ă  un examen plus minutieux. La presse gratuite d’information et d’annonces a vu son chiffre d’affaires en termes rĂ©els progresser de 5 % par rapport Ă  2004 pendant que dans le mĂȘme temps, celui de chaque grande famille de la presse payante diminuait en 2005 de – 0,4 % pour la presse locale Ă  – 3,9 % pour la presse nationale d’information. AprĂšs une annĂ©e 2004 euphorique, la presse gratuite poursuit donc son essor, avec un gain de 60 millions d’euros de chiffre d’affaires entre 2004 et 2005. Le phĂ©nomĂšne des gratuits » Les journaux gratuits d’annonces ou d’information culturelle existent de longue date. La rĂ©cente amplification du dĂ©veloppement des gratuits » est marquĂ©e par deux phĂ©nomĂšnes. D’une part, l’annĂ©e 2002 a vu la naissance en France de quotidiens gratuits d’information politique et gĂ©nĂ©rale 20 Minutes, Metro, Marseille Plus dont les titres se sont, depuis lors, multipliĂ©s, tout en Ă©tendant leur pĂ©rimĂštre gĂ©ographique de Paris vers les plus grandes villes de France. D’autre part, on observe l’apparition progressive de divers titres thĂ©matiques tels que Sport, TeleVision, ou Femme en ville, dont les pĂ©riodicitĂ©s varient hebdomadaires, bimensuels
. L’annĂ©e 2006 a vu l’apparition de nouveaux titres. Le groupe BollorĂ© a publiĂ© un quotidien gratuit du soir, Direct Plus. DĂ©but novembre, un quotidien gratuit du matin sera lancĂ©, Ă  Paris et en Île-de-France, coĂ©ditĂ© par le groupe Le Monde et le groupe BollorĂ©. Un quotidien sportif gratuit devrait voir le jour en 2007 MĂ©tro Sport deviendrait ainsi le second quotidien sportif en France et aurait pour mission de concurrencer le quotidien payant L’Équipe, premier quotidien national. La presse gratuite, notamment les quotidiens et magazines d’information, est le secteur le plus dynamique de la presse puisqu’il a rĂ©alisĂ©, en 2005, un chiffre d’affaire de 910 millions d’euros. La presse gratuite quotidienne d’information 130 millions de chiffres d’affaires estimĂ©s pour 2006 est, au sein de ce secteur, le segment le plus dynamique. Aujourd’hui, le marchĂ© français de la presse gratuite compte plus de 500 journaux et magazines – journaux d’information gĂ©nĂ©rale, magazines Ă©conomiques, magazines masculins et fĂ©minins, presse cinĂ©ma, presse tĂ©lĂ©, city magazines, petites annonces – dont 85 sont contrĂŽlĂ©s par l’Office de justification de la diffusion. Il semble que 90 % des Français connaissent au moins un gratuit, 79 % des Français consultent la presse gratuite, et 55 % des Français consultent rĂ©guliĂšrement des gratuits au moins deux fois par mois. 20 Minutes et MĂ©tro totalisent Ă  eux d’eux prĂšs de quatre millions de lecteurs. Metro est distribuĂ© du lundi au vendredi exemplaires et 20 Minutes est diffusĂ© Ă  exemplaires dans sept agglomĂ©rations. La cible prioritaire des gratuits est le public jeune, qu’ils ont conquis avec succĂšs un quart des lecteurs de 20 Minutes a entre 15 et 35 ans, et un tiers des 15-34 ans lit Metro ou 20 Minutes. Pour l’essentiel, les deux gratuits d’Île-de-France, Metro et 20 Minutes, ont sĂ©duit un public qui ne lisait pas rĂ©guliĂšrement de quotidiens. On prĂ©cisera que le modĂšle Ă©conomique de la presse gratuite est trĂšs diffĂ©rent de celui de la presse payante et il se diffĂ©rencie essentiellement dans les domaines de l’impression, de la distribution et de la promotion – l’impression n’est plus du ressort de l’imprimerie du journal mais est, soit confiĂ©e Ă  des imprimeries hors presse, soit nĂ©gociĂ©e d’une maniĂšre plutĂŽt avantageuse avec des imprimeurs presse ; – la distribution est assurĂ©e au moyen de prĂ©sentoirs ou par colportage, avec un personnel Ă  statut incertain et souvent prĂ©caire ; – la promotion de ces journaux fait l’objet de campagnes marketing particuliĂšres on peut voir des alliances avec des chaĂźnes de restauration rapide, voire des accords d’exclusivitĂ© de distribution comme le fait 20 Minutes avec la SNCF. Les plans de lancement des gratuits se proposent gĂ©nĂ©ralement un objectif d’équilibre financier Ă  trois ans. Ce fut le cas de Metro et 20 Minutes, de mĂȘme que de Lyon Plus ou Bordeaux 7. Cependant, les dates de rĂ©alisation de ces objectifs sont rĂ©guliĂšrement repoussĂ©es. Les investissements nĂ©cessaires au lancement d’un gratuit restent importants. Ils atteignent, selon les Ă©diteurs, 38 millions d’euros pour Metro, depuis le dĂ©but de sa parution, et 35 millions d’euros pour 20 Minutes. Bordeaux 7 prĂ©voit un investissement de 1 Ă  1,2 million d’euros sur trois ans. Et les perspectives financiĂšres Ă©tablies par les titres doivent ĂȘtre rĂ©visĂ©es rĂ©guliĂšrement du fait de l’arrivĂ©e de nouveaux quotidiens sur ce marchĂ©. Les revenus publicitaires des gratuits sont en constante progression. En 2004, sur les quelque 160 millions d’euros d’augmentation des recettes publicitaires, 90 millions vont au seul secteur de la presse gratuite toutes familles confondues. De nombreux grands annonceurs utilisent, Ă  prĂ©sent, ces supports dans leurs plans mĂ©dia. On peut redouter que le marchĂ©, sollicitĂ© par de plus en plus de supports, ne soit pas en mesure de satisfaire toutes les demandes. Sachant que la publicitĂ© est la seule ressource des journaux gratuits, il faudrait que ces investissements se dĂ©veloppent fortement pour Ă©viter que ne s’opĂšrent des transferts de la presse payante vers la presse gratuite. Si les publications gratuites bĂ©nĂ©ficient de certaines aides fiscales, comme l’exonĂ©ration de taxe professionnelle ou le mĂ©canisme de l’article 39 bis du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts, elles ne peuvent en revanche prĂ©tendre aux aides directes dont l’obtention est conditionnĂ©e par leur inscription auprĂšs de la Commission paritaire des publications et agences de presse, qui suppose une vente effective. Enfin, les publications gratuites peuvent employer des journalistes auxquels s’applique un abattement sur les cotisations sociales. Si les gratuits sont exclus du rĂ©seau de distribution des Nouvelles messageries de la presse parisienne NMPP, les diffuseurs de presse estiment que la captation du marchĂ© publicitaire par les gratuits est susceptible d’accentuer les effets d’une baisse des ventes au numĂ©ro de la presse quotidienne nationale. 32 % des lecteurs de 20 Minutes lisaient auparavant un quotidien. Ainsi, un journal comme LibĂ©ration constate qu’il a perdu des lecteurs avec l’émergence des gratuits ». Face Ă  ces enjeux, les quotidiens payants ont adoptĂ© des stratĂ©gies diffĂ©renciĂ©es – conclusion d’accords pour l’impression des titres Metro est imprimĂ© sur les rotatives de France Soir, et 20 minutes l’est en partie sur celles du Monde ; – dĂ©veloppement du rĂ©seau Villes Plus par les groupes Hachette Philippachi MĂ©dias et Socpresse et leurs quotidiens rĂ©gionaux, avec des stratĂ©gies prĂ©ventives ou dĂ©fensives permettant de capter les ressources publicitaires de Metro et 20 Minutes ; – participation au capital des gratuits prĂ©sence du groupe Ouest France dans le capital de 20 Minutes France et de l’éditeur du Parisien dans celui de À nous Paris ; – collaboration Ă  la publication La DĂ©pĂȘche du Midi vend ainsi Ă  l’édition toulousaine de 20 Minutes le contenu de plusieurs de ses pages sport » et guide culturel », les pages locales et rĂ©gionales du gratuit Ă©tant rĂ©digĂ©es par deux journalistes de 20 Minutes travaillant Ă  Toulouse ; La DĂ©pĂȘche assure la rĂ©gie publicitaire locale du gratuit et bĂ©nĂ©ficie du contact avec les annonceurs nationaux de 20 Minutes. Au contraire, le cycle baissier de la presse payante, Ă  l’Ɠuvre depuis l’an 2000, se poursuit. Si l’environnement Ă©conomique est restĂ© globalement le mĂȘme qu’en 2004, la situation s’est nettement dĂ©gradĂ©e avec un recul global de 2,3 % du chiffre d’affaires en volume en 2005. L’érosion des ventes qui avait connu un lĂ©ger rĂ©pit entre 2002 et 2004 s’est Ă  nouveau aggravĂ©e avec une chute en termes rĂ©els de 2,6 %. En particulier, le volume des recettes d’abonnement a diminuĂ© alors qu’il connaissait une progression soutenue depuis quinze ans. À la diffĂ©rence des annĂ©es antĂ©rieures, l’essor des recettes d’abonnement n’a pas pu compenser la dĂ©gradation des ventes au numĂ©ro. Le produit presse Ă©tant plus souvent dĂ©laissĂ©, les Ă©diteurs de presse continuent Ă  diversifier leurs activitĂ©s comme en tĂ©moigne la nouvelle progression de leur chiffre d’affaires hors presse + 7,7 % en valeur. La part du hors presse dans le chiffre d’affaires des Ă©diteurs de presse continue donc sa progression passant de 11,2 % Ă  12,6 %. Aucun secteur n’est Ă©pargnĂ© par cette lente Ă©rosion de la diffusion. Toutefois, la baisse du chiffre d’affaires pour les ventes au numĂ©ro n’est pas la mĂȘme selon les segments de presse payante. Si la presse locale d’information gĂ©nĂ©rale et politique s’en sort relativement bien avec une rĂ©gression contenue de – 0,6 %, la presse nationale d’information gĂ©nĂ©rale et politique accuse, elle, une chute de 3,8 %. En 2005, la presse nationale d’information enregistre une diminution de 2 % de son chiffre d’affaires par rapport Ă  2004. Atteignant 1,46 milliard d’euros, ce montant en valeur courante est mĂȘme infĂ©rieur Ă  son niveau de 1993
 Surtout, le chiffre d’affaires de la presse spĂ©cialisĂ©e technique et professionnelle recule encore de 1 %. Atteignant 1,03 milliard d’euros, il confirme les mauvais chiffres de 2002, 2003 et 2004. Cette stagnation s’explique pour l’essentiel par le niveau des ventes par abonnement qui progresse nĂ©anmoins de 0,7 % entre 2004 et 2005 et une baisse de 3,2 % des recettes publicitaires, lesquelles restent quasiment Ă  leur point bas de 1993. MĂȘme la presse magazine, qui a toujours paru en bonne santĂ©, souffre des tendances de consommation qui favorisent le dĂ©veloppement des nouveaux mĂ©dias par rapport aux mĂ©dias traditionnels. Elle traverse, elle aussi, une pĂ©riode de forte mutation, liĂ©e Ă  la place de l’internet, Ă  la nĂ©cessitĂ© de dĂ©velopper des nouveaux modĂšles Ă©conomiques, de faire Ă©voluer les organisations. GrĂące Ă  un nombre de titres en pleine croissance, elle rĂ©duit nĂ©anmoins la chute 106. B.– LA NÉCESSAIRE ÉVOLUTION DU SYSTÈME DE PRESSE FRANÇAISFace Ă  cette situation, l’ensemble des Ă©diteurs tente de rĂ©agir. Cela passe inĂ©vitablement par des recapitalisations parfois mal acceptĂ©es par des salariĂ©s craignant pour leur indĂ©pendance. Cela passe aussi par de nouvelles formules visant Ă  mieux rĂ©pondre aux attentes du lectorat. Il est souhaitable que ces nouvelles formules rencontrent ou reconquiĂšrent un nouveau lectorat afin que les quotidiens puissent trouver un nouveau souffle. Votre Rapporteur spĂ©cial estime que cette situation gĂ©nĂ©rale rend urgente et vitale une vraie rĂ©flexion de fond, de nature Ă  poser les bases concertĂ©es d’une rĂ©forme globale ambitieuse et ainsi casser la spirale des blocages actuels, en raison notamment de la situation dĂ©licate des messageries dans un contexte de baisse des diffusions et de baisse tendancielle des prix de vente, comme d’ailleurs des principes coopĂ©ratifs qui limitent l’évolution du systĂšme de distribution. Cela implique une modernisation des rĂ©seaux de diffusion. Il est essentiel pour la presse de mieux connaĂźtre son lectorat, ses attentes, les grandes Ă©volutions de l’information dans le monde. Or, aujourd’hui le lieu pour mener une telle rĂ©flexion, d’analyse et de prospective fait cruellement dĂ©faut Ă  la profession en France. La presse doit aussi trouver de nouvelles sources de financement. Plus fondamentalement, la presse semble ĂȘtre entre deux modĂšles Ă©conomiques, l’enjeu pour elle Ă©tant bien sĂ»r de survivre Ă  cette pĂ©riode de transition. L’indĂ©pendance des titres par rapport aux grands groupes de mĂ©dia, qui a longtemps Ă©tĂ© une chance, pourrait bien aujourd’hui devenir un handicap. À plus long terme, votre Rapporteur spĂ©cial reste convaincu que l’avenir de la presse passe par une dĂ©matĂ©rialisation accrue de sa diffusion. On a vu Ă  quel point les jeunes, c’est-Ă -dire les futurs lecteurs, se dĂ©sintĂ©ressaient de la presse Ă©crite quotidienne nationale et rĂ©gionale. Nous sommes, en effet, confrontĂ©s aujourd’hui Ă  une gĂ©nĂ©ration de l’écran plus que de l’écrit ». Il est indispensable que la presse anticipe cette Ă©volution en habituant ce public Ă  considĂ©rer les informations et les analyses estampillĂ©es par tel ou tel journal comme fiables. Face Ă  la multiplication des sources d’information, dont certaines notamment sur l’Internet ou sur le rĂ©seau de tĂ©lĂ©phonie mobile ne rĂ©pondent Ă  aucune norme professionnelle ou dĂ©ontologique, la principale difficultĂ© est de fiabiliser l’information et de la hiĂ©rarchiser. Pour cela, la presse quotidienne dispose incontestablement d’un avantage, d’une marque » quant Ă  la qualitĂ© et Ă  la crĂ©dibilitĂ© de l’information qu’elle transmet. Au risque de choquer, votre Rapporteur spĂ©cial tient Ă  souligner que le mĂ©tier premier d’une entreprise de presse n’est pas de produire du papier » mais bien de collecter l’information fiable, la hiĂ©rarchiser et l’analyser. C’est pourquoi les investissements dans les sites internet sont, selon votre Rapporteur spĂ©cial, absolument essentiels et il est regrettable que les Ă©diteurs ne fassent pas plus appel au Fonds de modernisation pour financer leurs projets. Par ailleurs, il peut ĂȘtre utile de revenir parfois sur la gratuitĂ© de l’accĂšs aux articles des quotidiens, qui conduit Ă  dĂ©valoriser le produit. La rĂ©flexion sur la rĂ©forme de l’organisation française de la presse est intense. Elle a fait l’objet de propositions variĂ©es, souvent intĂ©ressantes Ă  l’image de celles formulĂ©es par le syndicat de la presse quotidienne rĂ©gionale SPQR et le syndicat de la presse quotidienne nationale SPQN. Le 6 octobre dernier, le ministre de la Culture et de la communication a d’ailleurs confiĂ© une mission d’étude sur les conditions des Ă©volutions de la presse dans l’univers du numĂ©rique Ă  Marc Tessier, ancien directeur du CNC et de France TĂ©lĂ©visions. Son rapport, prĂ©vu pour janvier 2007, devra dĂ©gager des modĂšles de dĂ©veloppement de la presse prĂ©servant la labellisation de l’information et les grands Ă©quilibres Ă©conomiques. Le conseil de gĂ©rance des Nouvelles messageries de la presse parisienne NMPP a examinĂ©, jeudi 26 octobre 2006, un projet de plan stratĂ©gique », qui devrait ĂȘtre rendu public dans le courant du mois de dĂ©cembre et qui viserait Ă  atteindre, en 2010, points de vente de presse de proximitĂ©, soit environ de plus qu’aujourd’hui. Cette dĂ©marche fait suite Ă  l’accord signĂ© avec les NMPP pour multiplier les points de vente quotidiens PVQ dans des stations–service, des bureaux de tabac et autres lieux de proximitĂ©. Le Syndicat de la presse magazine et d’information SPMI vient Ă©galement de rendre publique, le 24 octobre dernier, une contribution sur la rĂ©forme de la distribution qui comporte 13 propositions. Votre Rapporteur spĂ©cial estime que cette sĂ©rie de propositions, la derniĂšre en date qui lui ait Ă©tĂ© transmise, est aussi une contribution importante au nĂ©cessaire dĂ©bat sur l’avenir de la presse et sur les moyens de faire Ă©voluer son cadre Ă©conomique, commercial et juridique. Les 13 propositions de rĂ©forme formulĂ©es par le SPMI – homogĂ©nĂ©iser les coopĂ©ratives ; – pondĂ©rer les voix des Ă©diteurs en fonction de l’importance de leur activitĂ© au sein des coopĂ©ratives ; – mutualiser entre sociĂ©tĂ©s de messageries les moyens dĂ©pourvus de valeur ajoutĂ©e commerciale ; – responsabiliser les Ă©diteurs par une dé–pĂ©rĂ©quation » au moins partielle des coĂ»ts rĂ©seau ; – concentrer chacun des trois niveaux de distribution sur sa fonction prioritaire ; – introduire dans la rĂ©munĂ©ration du niveau 2 des facteurs tels que les coĂ»ts rĂ©els et les prestations propres Ă  chaque unitĂ© ; – rĂ©munĂ©rer les diffuseurs par des taux de commission croissants ; – complĂ©ter cette rĂ©munĂ©ration par un encouragement Ă  la performance ; – sur–rĂ©munĂ©rer les emplacements prioritaires en fonction de critĂšres objectifs ; – multiplier les occasions de contact par le dĂ©veloppement rapide de rĂ©seaux de complĂ©ment ; – contrĂŽler les conditions faites au hors presse par la crĂ©ation d’un statut de tiers non sociĂ©taire » ; – reprendre et complĂ©ter les mesures GTI d’assortiment par les quantitĂ©s ; – enfin instaurer un droit d’usage du rĂ©seau. Le SPMI propose notamment d’optimiser les coĂ»ts de distribution, de dĂ©limiter le pĂ©rimĂštre de la presse quotidienne prise au sens de la pĂ©rĂ©quation aux quotidiens qui bĂ©nĂ©ficient de l’aide publique Ă  la distribution et de restaurer un climat de saine concurrence entre les messageries. Le syndicat souligne les vertus de la concurrence, si tant est qu’elle s’exerce dans des conditions constructives. Le SPMI considĂšre donc que les synergies et la mutualisation des moyens dĂ©pourvus de valeur ajoutĂ©e commerciale doivent ĂȘtre recherchĂ©es » et que les fichiers des messageries relatifs aux diffuseurs doivent ĂȘtre mis en commun. Pour faire Ă©voluer le systĂšme coopĂ©ratif, le SPMI envisage de favoriser l’homogĂ©nĂ©itĂ© des coopĂ©ratives par les barĂšmes. Il s’agirait de regrouper les spĂ©cificitĂ©s du mĂ©tier d’éditeur dans des coopĂ©ratives distinctes pour constituer des portefeuilles homogĂšnes, ce qui pourrait dĂ©boucher sur une rationalisation de l’organisation institutionnelle de la distribution. D’aprĂšs le SPMI, cette rationalisation peut aboutir par exemple Ă  la fusion opĂ©rationnelle des sociĂ©tĂ©s de messagerie Transports Presse et NMPP ». Le SPMI propose Ă©galement la modification du principe fondateur une entreprise, une voix », affirmĂ© par l’article 10 de la loi Bichet, et dĂ©nonce les conditions commerciales favorables dont bĂ©nĂ©ficie le hors presse ». Il propose deux solutions inclure le hors presse dans la sphĂšre coopĂ©rative ou, solution qui lui semble la plus adaptĂ©e, l’admettre comme tiers non sociĂ©taire ». En outre, le SPMI insiste sur la nĂ©cessitĂ© de rĂ©seaux diffĂ©renciĂ©s. La crĂ©ation d’un rĂ©seau de points de vente spĂ©cialisĂ©s serait, du point de vue de certains Ă©diteurs, une contrepartie Ă  l’acceptation de la rĂ©gulation des flux, et une rĂ©ponse adaptĂ©e aux particularitĂ©s de la presse de niche. Le SPMI estime que les messageries doivent poursuivre la mise en place concertĂ©e d’un rĂ©seau de points de vente complĂ©mentaires et de points de vente spĂ©cialisĂ©s dans les plus brefs dĂ©lais ». Le SPMI juge aussi que, pour ĂȘtre efficace, la mise en place de points de vente complĂ©mentaires et de points de vente spĂ©cialisĂ©s doit ĂȘtre envisagĂ©e d’emblĂ©e sous l’angle des assortiments ». AprĂšs la mise en place d’un assortiment initial basĂ© sur des titres rĂ©guliers, des nouveautĂ©s et des titres Ă  forte implantation locale, ce serait ainsi au dĂ©positaire de garantir dans le temps l’adĂ©quation de l’assortiment et sa limitation. Pour ĂȘtre Ă©quitable, la gestion de ces points de vente par le dĂ©positaire pourrait comprendre le principe d’une rotation permanente de 20 % du portefeuille des titres pour recueillir les rĂ©actions du marchĂ©. Par ailleurs, pour dĂ©sencombrer le rĂ©seau, le SPMI propose de rompre avec le dogme tous les titres dans tous les points de vente », au travers notamment de mesures de plafonnement des quantitĂ©s au point de vente et de mises Ă  zĂ©ro des titres non vendus. Enfin, le syndicat estime nĂ©cessaire de recentrer chaque niveau de distribution sur sa mission prioritaire et sa valeur ajoutĂ©e spĂ©cifique dans le but d’éclaircir et redĂ©finir le rĂŽle de chacun. D’aprĂšs le SPMI, les Ă©diteurs ne peuvent Ă  la fois atteindre leurs objectifs d’optimisation des coĂ»ts de distribution et renforcer chacun des trois niveaux de distribution dans leur organisation et leur fonctionnement actuels. Le niveau 1 messagerie pourrait alors ĂȘtre concentrĂ© sur une fonction logistique » et le niveau 3 diffuseurs amenĂ© Ă  plus de commerce. L’enjeu du niveau 2, pour les Ă©diteurs, serait de responsabiliser les dĂ©positaires Ă  la gestion d’une zone de chalandise. Mais, dans ce cadre, le SPMI souhaiterait une modification de la rĂ©munĂ©ration du niveau 2 axĂ©e sur les prestations offertes. Ces rĂ©formes offriraient l’occasion de redĂ©finir le coĂ»t des diffĂ©rents dĂ©pĂŽts et de repenser le systĂšme de rĂ©munĂ©ration des diffuseurs en les encourageant Ă  des actions commerciales. Ces propositions montrent Ă  la fois la complexitĂ© des problĂšmes Ă  rĂ©soudre et la volontĂ© des acteurs professionnels d’engager des rĂ©formes en profondeur. Ces propositions et celles des autres acteurs ne manqueront pas de provoquer le dĂ©bat. Il est clair qu’en 2007 et 2008, les responsables de la presse et les pouvoirs publics devront rĂ©ussir un Grenelle de la presse ». * * * II.– LES AIDES À LA PRESSE UN CALIBRAGE DÉLICAT, UNE ÉVOLUTION CONTRASTÉE Il faut toujours le rappeler la presse Ă©crite contribue de maniĂšre essentielle Ă  l’information des citoyens et Ă  la diffusion des courants de pensĂ©es et d’opinions. Ce support permet en effet une appropriation active de l’information, une mise en perspective des Ă©vĂ©nements, une confrontation des commentaires et des analyses, et Ă  travers cela, la construction d’une vĂ©ritable conscience culturelle et politique. La vitalitĂ© et l’avenir de la presse Ă©crite sont ainsi des enjeux majeurs de notre vie dĂ©mocratique. C’est la raison pour laquelle l’État s’attache, de longue date, Ă  garantir deux objectifs fondamentaux le dĂ©veloppement de la diffusion de la presse et la prĂ©servation de son pluralisme et de sa diversitĂ©, la modernisation du secteur constituant un objectif intermĂ©diaire. Les aides prennent la forme d’un renforcement des dĂ©penses fiscales avec des exonĂ©rations spĂ©cifiques aux entreprises de presse et d’un rĂ©examen des crĂ©dits inscrits au budget de l’État. Au titre de ces derniers, un total de 274 millions d’euros devrait ĂȘtre consacrĂ© aux aides Ă  la presse en 2007 sur le pĂ©rimĂštre de la mission MĂ©dias. Si l’on y ajoute les crĂ©dits d’aide au transport postal imputĂ©s – illogiquement dans l’esprit de la LOLF – sur la mission DĂ©veloppement et rĂ©gulation Ă©conomiques, le total des dĂ©penses budgĂ©taires est portĂ© Ă  435,7 millions d’euros pour 2007, soit une diminution de 3 % par rapport Ă  2006, laquelle s’explique principalement par un rĂ©ajustement des besoins rĂ©ellement nĂ©cessaires, sur la base de la consommation des crĂ©dits constatĂ©e les annĂ©es prĂ©cĂ©dentes et de la montĂ©e en puissance progressive des conventions cadres, et par un recentrage des aides sur l’information politique et gĂ©nĂ©rale. Les deux dĂ©penses principales restent l’aide au transport postal 237,7 millions d’euros et les abonnements de l’État Ă  l’AFP 109,4 millions d’euros. Quant aux dĂ©penses fiscales, elles se situent autour de 210 millions d’euros et s’expliquent par l’effet du taux de TVA de 2,1 % appliquĂ© aux publications de presse. Il convient de revenir sur ces diffĂ©rents dispositifs dont l’évolution des crĂ©dits s’explique souvent par des motifs spĂ©cifiques. AIDES BUDGÉTAIRES À LA PRESSE en milliers d’euros LFI 2006 CrĂ©dits 2006 aprĂšs rĂ©gulation PLF 2007 Abonnement de l’État Ă  l’AFP Aide au transport postal de la presse d’information politique et gĂ©nĂ©rale Aide Ă  la distribution et Ă  la promotion de la presse française Ă  l’étranger Aide Ă  la presse hebdomadaire rĂ©gionale Aide au portage de la presse Aide Ă  l’impression dĂ©centralisĂ©e des quotidiens 350 350 200 RĂ©duction du tarif SNCF pour le transport de presse Aide aux quotidiens nationaux d’information politique et gĂ©nĂ©rale Ă  faibles ressources publicitaires Aides aux quotidiens rĂ©gionaux, dĂ©partementaux et locaux d’information politique et gĂ©nĂ©rale Ă  faibles ressources de petites annonces Aide Ă  la modernisation sociale de la presse quotidienne d’information politique et gĂ©nĂ©rale Aide Ă  la modernisation de la distribution de la presse quotidienne nationale NMPP Aide Ă  la modernisation des diffuseurs de presse Aide Ă  la modernisation de la presse quotidienne et assimilĂ©e d’information politique et gĂ©nĂ©rale Aide au dĂ©veloppement des services en ligne des diffuseurs de presse 790 752 500 Total pour la mission MĂ©dias Aide au transport postal mission DĂ©veloppement et rĂ©gulation Ă©conomiques Total des aides Ă  la presse Remarque les crĂ©dits 2006 aprĂšs rĂ©gulation correspondent aux donnĂ©es disponibles au 1er octobre 2006 et prennent en compte l’impact de la rĂ©serve de prĂ©caution, des reports de 2005 sur 2006 et des annulations intervenues Ă  ce jour. On signalera notamment un report de 35 millions d’euros sur l’aide Ă  la modernisation de la presse quotidienne et assimilĂ©e d’information politique et CONFORTER LES ENGAGEMENTS EN FAVEUR DU PLURALISME ET LE DÉVELOPPEMENT DES CIRCUITS DE DISTRIBUTION ET DE DIFFUSIONL’État poursuit son effort pour assurer la cohĂ©rence de son action en faveur de la presse, sans entrer dans une logique de reconduction systĂ©matique des crĂ©dits mais en recherchant plutĂŽt un bon ciblage des aides, dans l’esprit de la LOLF. Le budget 2007 poursuit donc le recentrage de l’action sur le cƓur de cible » que constitue la presse quotidienne d’information politique et gĂ©nĂ©rale et calibre au plus juste des besoins les enveloppes de crĂ©dits L’aide au transport postal de la presse d’information politique et gĂ©nĂ©raleOn rappellera que le protocole d’accord, signĂ© le 22 juillet 2004, constituait l’aboutissement d’un long travail d’expertise et de concertation afin de dĂ©finir un nouveau cadre de relations entre l’État, la presse et La Poste. L’accord dĂ©termine les conditions de prise en charge, d’acheminement, de traitement et de distribution de la presse par La Poste pour la pĂ©riode 2005–2008. Il a pour ambition de garantir l’avenir du transport postal de la presse et de faire face aux enjeux qui s’y attachent. Il prĂ©voit ainsi une revalorisation progressive et maĂźtrisĂ©e des tarifs prĂ©fĂ©rentiels accordĂ©s Ă  la presse, nĂ©cessaire pour permettre Ă  La Poste de consolider sa situation financiĂšre dans un contexte marquĂ© par l’évolution de son environnement rĂ©glementaire, Ă©conomique et concurrentiel. En contrepartie, l’opĂ©rateur postal s’engage Ă  faire progresser son offre Ă  destination des Ă©diteurs de presse, en dĂ©veloppant des prestations mieux adaptĂ©es Ă  leurs besoins et en amĂ©liorant la qualitĂ© du service rendu. L’État reste attachĂ© Ă  ses objectifs premiers assurer le pluralisme de l’information et l’égal accĂšs des titres et des lecteurs Ă  l’abonnement postal, sur tout le territoire. Le nouvel accord traduit cependant une profonde rĂ©novation des modalitĂ©s de l’intervention publique. L’ancien systĂšme, dans lequel une subvention globale Ă©tait versĂ©e annuellement Ă  l’opĂ©rateur postal, fait place Ă  deux aides distinctes, correspondant Ă  des objectifs clairement identifiĂ©s – une aide Ă  l’exemplaire pour la diffusion postale de la presse d’information politique et gĂ©nĂ©rale, destinĂ©e Ă  favoriser le pluralisme de l’information en prĂ©servant l’avantage tarifaire spĂ©cialement rĂ©servĂ© Ă  ce type de presse ; – une aide Ă  l’exemplaire distribuĂ© en zones peu denses, compensant une partie des surcoĂ»ts liĂ©s Ă  l’acheminement dans les zones considĂ©rĂ©es et permettant ainsi le maintien d’un tarif Ă©gal sur tout le territoire. Les accords prĂ©voient que le soutien de l’État au transport postal de la presse devrait s’élever, au titre de chaque annĂ©e, Ă  242 millions d’euros. Comme votre Rapporteur spĂ©cial a dĂ©jĂ  eu l’occasion de le dĂ©plorer, deux inscriptions budgĂ©taires distinctes sont prĂ©vues en 2007, seule l’aide au pluralisme Ă©tant inscrite dans le programme Presse de la mission MĂ©dias Ă  hauteur de 76 millions d’euros. Ce montant a Ă©tĂ© Ă©tabli sur la base d’une estimation des trafics concernĂ©s en tenant compte des Ă©volutions tarifaires fixĂ©es par l’accord du 22 juillet 2004. Il doit permettre d’honorer les engagements de l’État pour l’aide au pluralisme. 2.– Les aides Ă  la diffusionLes grandes orientations de la politique en faveur du dĂ©veloppement de la diffusion de la presse sont maintenues, avec le souci d’adapter les aides Ă  l’éventuelle Ă©volution qualitative ou quantitative des besoins exprimĂ©s. Afin d’encourager la diffusion dans le monde de la presse française, vecteur de la pensĂ©e et de la culture de notre pays, un fonds d’aide Ă  l’expansion de la presse française Ă  l’étranger a Ă©tĂ© instaurĂ©. Les mutations profondes du secteur de la presse et les bouleversements du paysage gĂ©opolitique mondial ont conduit Ă  rĂ©former ce fonds, afin de mieux dĂ©finir les actions subventionnĂ©es et de gagner en efficacitĂ© en concentrant les aides sur des zones prioritaires. L’aide Ă  la distribution et Ă  la promotion de la presse française Ă  l’étranger, instituĂ©e par le dĂ©cret n° 2004-1311 du 26 novembre 2004, permet, d’une part, d’allĂ©ger le coĂ»t du transport Ă  l’étranger des titres concernĂ©s, et, d’autre part, d’encourager les efforts de prospection et de promotion commerciale engagĂ©s par leurs Ă©diteurs dans les zones prioritaires. L’aide sera dotĂ©e de 2,8 millions d’euros en 2007. L’aide Ă  la presse hebdomadaire rĂ©gionale d’information politique et gĂ©nĂ©rale est destinĂ©e Ă  favoriser la diffusion au numĂ©ro de cette forme de presse, qui joue un rĂŽle important d’information de proximitĂ© et d’animation du dĂ©bat local 107. Les crĂ©dits dĂ©diĂ©s Ă  ce dispositif s’élĂšveront en 2007, comme en 2006, Ă  1,42 million d’euros. Le dĂ©veloppement du portage reste un axe fort du soutien Ă  la diffusion. RĂ©servĂ©e Ă  la presse quotidienne, qui se trouve soumise aux contraintes particuliĂšres qu’impose une distribution rĂ©guliĂšre et trĂšs matinale, l’aide au portage de la presse permet de soutenir les Ă©diteurs qui s’efforcent de dĂ©velopper ce mode de diffusion afin de conquĂ©rir de nouveaux lecteurs. La dotation sera maintenue Ă  8,25 millions d’euros en 2007. 3.– L’aide Ă  l’impression dĂ©centralisĂ©e des quotidiens Un certain nombre de journaux recourent Ă  l’impression dĂ©centralisĂ©e en province. Cette technique prĂ©sente un triple intĂ©rĂȘt elle permet un bouclage plus tardif pour les quotidiens nationaux, amĂ©liorant leur attractivitĂ© pour le lecteur ; elle autorise, le cas Ă©chĂ©ant, la rĂ©alisation de pages locales dans les imprimeries satellites ; elle allĂšge les coĂ»ts de transport. Le dispositif vise donc Ă  rĂ©pondre aux difficultĂ©s spĂ©cifiques que rencontre le systĂšme coopĂ©ratif d’impression dĂ©centralisĂ©e des quotidiens nationaux, dont la pĂ©rennitĂ© est menacĂ©e par le retrait de plusieurs titres 108. Une rĂ©forme a Ă©tĂ© engagĂ©e en 2005 qui a permis de recentrer le dispositif sur les quotidiens d’information politique et gĂ©nĂ©rale. Compte tenu de cette cible plus restreinte, la dotation de l’aide a Ă©tĂ© fixĂ©e en 2007 Ă  euros. 4.– L’aide au transport de la presse par la SNCFCréée en 1948, l’aide au transport de la presse par la SNCF prend la forme d’une subvention versĂ©e annuellement par l’État Ă  l’entreprise ferroviaire, en compensation des rĂ©ductions de tarif qu’elle accorde aux sociĂ©tĂ©s de messageries et aux entreprises de presse qui lui confient leurs exemplaires. L’audit rĂ©alisĂ© en 2003 a confirmĂ© le constat, largement partagĂ©, d’une absence de lisibilitĂ© de l’impact de cette aide, qui n’a connu d’adaptation rĂ©elle ni aux Ă©volutions technologiques, ni aux changements des conditions Ă©conomiques du transport de la presse. La convention signĂ©e entre l’État et la SNCF en 2005 maintient le format global de l’aide tout en la recentrant sur l’acheminement des quotidiens d’information politique et gĂ©nĂ©rale dans le cadre d’un plan de transport annuel. En 2007, la participation de l’État au financement du plan de transport des quotidiens d’information politique et gĂ©nĂ©rale s’élĂšvera Ă  7,3 millions d’euros. 5.– Les aides au pluralismeL’engagement traditionnel des pouvoirs publics en faveur de la dĂ©fense du pluralisme sera poursuivi en 2007. L’aide aux quotidiens nationaux Ă  faibles ressources publicitaires vise Ă  soutenir des titres d’opinion qu’un accĂšs nĂ©cessairement limitĂ© au marchĂ© de la publicitĂ© rend Ă©conomiquement vulnĂ©rables et qui, pour la plupart, traversent une conjoncture financiĂšre particuliĂšrement difficile. L’objectif est de prĂ©server leur indĂ©pendance et leur contribution au pluralisme de l’information. Cette aide sera dotĂ©e en 2007 de 7,16 millions d’euros, consolidant les crĂ©dits votĂ©s en 2006. L’aide aux quotidiens d’information politique et gĂ©nĂ©rale Ă  diffusion rĂ©gionale, dĂ©partementale ou locale Ă  faibles ressources de petites annonces permet Ă©galement Ă  l’État de concourir au maintien du pluralisme et Ă  la prĂ©servation de l’indĂ©pendance des titres concernĂ©s. La dotation de cette aide sera maintenue en 2007 Ă  son niveau de 2006, soit 1,4 million d’euros. B.– ACCOMPAGNER LES MUTATIONS ET LA MODERNISATION DU SECTEURDans un contexte marquĂ© par l’essor accĂ©lĂ©rĂ© des nouvelles technologies de l’information et l’avĂšnement d’une culture de l’immĂ©diatetĂ© et de la gratuitĂ©, l’action des pouvoirs publics cherche Ă  accompagner les mutations profondes que connaĂźt la presse et Ă  l’épauler face aux dĂ©fis qu’elle doit relever pour assurer son avenir maĂźtriser ses coĂ»ts de fabrication, s’adapter aux attentes trĂšs Ă©volutives du lectorat, conforter son autonomie financiĂšre et sa capacitĂ© d’investir pour garantir son indĂ©pendance. 60 millions d’euros seront donc consacrĂ©s Ă  ces objectifs en 2007 afin que soient assurĂ©s le maintien du pluralisme de l’information et la vitalitĂ© du dĂ©bat L’aide Ă  la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne d’information politique et gĂ©nĂ©raleCréée en 2005, l’aide Ă  la modernisation sociale de la fabrication de la presse quotidienne d’information politique et gĂ©nĂ©rale a pour objet de soutenir les dĂ©marches de modernisation des processus de production et de rĂ©novation des relations du travail menĂ©es tant par la presse quotidienne nationale que par la presse quotidienne en rĂ©gion. Il s’agit, Ă  terme, de permettre aux entreprises de presse de mieux maĂźtriser leurs coĂ»ts de fabrication et leurs conditions d’exploitation, pour conforter l’indĂ©pendance Ă©conomique des titres. Dans ce contexte, les pouvoirs publics participent Ă  l’accompagnement social des restructurations mises en Ɠuvre en prenant partiellement en charge le coĂ»t des dĂ©parts anticipĂ©s qui peuvent en rĂ©sulter. S’agissant de la presse quotidienne nationale, le dĂ©cret n° 2005-1096 du 2 septembre 2005 et la convention cadre du 30 septembre 2005 entre l’État et la profession Ă  laquelle il renvoie dĂ©finissent les modalitĂ©s concrĂštes du soutien public Ă  cette dĂ©marche. DĂ©clinaisons de la convention cadre, les premiĂšres conventions entre l’État et les entreprises du secteur ont Ă©tĂ© signĂ©es. S’agissant de la presse quotidienne rĂ©gionale et dĂ©partementale, le dĂ©cret n° 2006-657 du 2 juin 2006 et les conventions cadres signĂ©es le 1er aoĂ»t 2006 dĂ©finissent le dispositif spĂ©cifique prĂ©vu pour les salariĂ©s de la presse quotidienne rĂ©gionale et dĂ©partementale. Les premiĂšres conventions entre l’État et les entreprises du secteur doivent ĂȘtre signĂ©es Ă  l’automne. Le montant global des crĂ©dits mobilisĂ©s au titre de cette aide s’élĂšvera en 2007 Ă  22,6 millions d’euros, compte tenu de la consommation des crĂ©dits constatĂ©e en 2006 et de la signature Ă©chelonnĂ©e des conventions. 2.– L’aide Ă  la modernisation de la distribution de la presse quotidienne nationaleLes coĂ»ts propres Ă  la distribution des quotidiens vendus au numĂ©ro sont assumĂ©s en France par une seule sociĂ©tĂ© de messageries, les Nouvelles messageries de la presse parisienne NMPP. Les NMPP supportent ainsi depuis plusieurs annĂ©es d’importants dĂ©ficits du fait des contraintes logistiques et d’urgence spĂ©cifiquement attachĂ©es Ă  leur activitĂ©, auxquelles s’ajoutent les conditions d’emploi et de rĂ©munĂ©ration propres Ă  la presse parisienne. La charge financiĂšre qui en rĂ©sulte fragilise le systĂšme coopĂ©ratif de distribution de la presse, qui repose sur la contribution solidaire des Ă©diteurs de quotidiens et de publications. Dans ce contexte, le dĂ©cret n° 2002-629 du 25 avril 2002 a instituĂ© une aide Ă  la distribution de la presse quotidienne nationale d’information politique et gĂ©nĂ©rale. L’objectif initial de cette aide Ă©tait d’accompagner le plan de modernisation mis en Ɠuvre par les NMPP pour la pĂ©riode 2000–2003, en couvrant une partie des surcoĂ»ts spĂ©cifiques occasionnĂ©s par le traitement des quotidiens nationaux d’information politique et gĂ©nĂ©rale, lesquels concourent tout particuliĂšrement Ă  la dĂ©fense du pluralisme et de la diversitĂ© de l’information. L’aide Ă  la distribution a Ă©tĂ© reconduite Ă  l’appui du nouveau plan de modernisation mis en Ɠuvre par les NMPP pour la pĂ©riode 2004-2007 dĂ©cret n° 2004-1310 du 26 novembre 2004. AprĂšs une annĂ©e 2005 difficile marquĂ©e par un nouveau retournement de conjoncture pour les NMPP, la poursuite du plan de modernisation appelle la consolidation de montant de l’aide publique en 2007, soit 8 millions d’euros, afin de permettre aux NMPP de rĂ©duire le dĂ©ficit de la branche quotidiens ». 3.– L’aide Ă  la modernisation du rĂ©seau des diffuseurs de presseLe dĂ©veloppement de la diffusion de la presse vendue au numĂ©ro dĂ©pend trĂšs largement de la qualitĂ©, de la capillaritĂ© et donc de l’efficacitĂ© du rĂ©seau de vente. Or, depuis plusieurs annĂ©es, le rĂ©seau des diffuseurs de presse est confrontĂ© Ă  de nombreuses difficultĂ©s. La rudesse des conditions de travail, l’augmentation du nombre et du volume des produits Ă  traiter et la relative modicitĂ© des rĂ©munĂ©rations, conjuguĂ©es au renchĂ©rissement des pas-de-porte » et Ă  l’augmentation des loyers en centre ville, contribuent Ă  expliquer la fragilitĂ© Ă©conomique du secteur et l’érosion tendancielle inquiĂ©tante du nombre des points de vente. La nĂ©cessitĂ© de consolider le rĂ©seau est reconnue par tous les acteurs concernĂ©s, notamment les Ă©diteurs et les sociĂ©tĂ©s de messageries. L’aide Ă  la modernisation de la diffusion, instituĂ©e en 2005, vient renforcer le plan global de consolidation du rĂ©seau mis en Ɠuvre par la filiĂšre elle-mĂȘme. Cette aide vise Ă  soutenir les diffuseurs de presse dans l’effort de modernisation qu’ils doivent accomplir pour dynamiser leur performance commerciale, dont dĂ©pend directement la diffusion de la presse vendue au numĂ©ro 109. L’aide de l’État prend la forme d’une subvention permettant la prise en charge partielle jusqu’à 30 % des investissements engagĂ©s par les diffuseurs pour l’acquisition d’équipements liĂ©s Ă  l’exposition de la presse. En 2006, le champ des investissements Ă©ligibles au titre de l’aide a Ă©tĂ© Ă©tendu Ă  certaines dĂ©penses liĂ©es Ă  l’informatisation des points de vente, nĂ©cessaire pour amĂ©liorer la gestion des flux et des stocks et la rĂ©activitĂ© commerciale du rĂ©seau. Pour l’annĂ©e 2007, les crĂ©dits dĂ©diĂ©s Ă  cette aide seront ramenĂ©s aux besoins constatĂ©s et atteindront 2 millions d’euros. 4.– L’aide Ă  la modernisation de la presse quotidienne et assimilĂ©e d'information politique et gĂ©nĂ©raleCréé en 1998, le fonds d’aide Ă  la modernisation de la presse quotidienne et assimilĂ©e d’information politique et gĂ©nĂ©rale permet d’accorder des subventions et des avances remboursables aux entreprises et agences de presse pour la rĂ©alisation de projets de modernisation. Depuis sa crĂ©ation jusqu’au 31 dĂ©cembre 2005, le fonds Ă©tait adossĂ© Ă  un compte spĂ©cial du TrĂ©sor lui-mĂȘme alimentĂ© par une taxe de 1 % sur certaines dĂ©penses de publicitĂ© hors mĂ©dias. Dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2006, il a Ă©tĂ© procĂ©dĂ© Ă  la budgĂ©tisation de ce fonds, conformĂ©ment aux rĂšgles de la LOLF. Dans ce contexte, la dotation budgĂ©taire nĂ©cessaire, compte tenu des besoins de modernisation du secteur, sera portĂ©e cette annĂ©e Ă  27 millions d’euros, dont 23 millions d’euros seront spĂ©cifiquement dĂ©diĂ©s aux projets de modernisation prĂ©sentĂ©s, Ă  titre individuel ou collectif, par les entreprises de presse. Les 4 autres millions soutiendront les actions de dĂ©veloppement du lectorat des jeunes. 5.– Le soutien au dĂ©veloppement du lectorat des jeunesDĂ©velopper la lecture de la presse par les jeunes reprĂ©sente un enjeu Ă©ducatif et dĂ©mocratique majeur. Le contact prĂ©coce avec la presse Ă©crite, d’information politique et gĂ©nĂ©rale notamment, contribue de maniĂšre Ă©vidente former la conscience politique et culturelle des futurs adultes, et dĂ©termine pour l’avenir leur comportement civique et leur engagement citoyen dans le dĂ©bat public. Le dĂ©veloppement du lectorat des jeunes constitue par ailleurs un enjeu crucial pour l’avenir de la presse elle-mĂȘme. Des Ă©tudes rĂ©centes montrent, en effet, que les habitudes de lecture en matiĂšre de presse Ă©crite s’acquiĂšrent et se fixent avant l’ñge de 18 ans la presse doit donc aujourd’hui conquĂ©rir les jeunes lecteurs pour assurer son lectorat de demain. Or le constat qui peut ĂȘtre dressĂ© aujourd’hui est celui d’une dĂ©saffection croissante du jeune lectorat pour la presse Ă©crite traditionnelle, au profit des autres mĂ©dias et, plus rĂ©cemment, de la presse gratuite. Dans ce contexte, les pouvoirs publics se sont engagĂ©s depuis 2005 dans une dĂ©marche rĂ©solue de soutien au dĂ©veloppement du lectorat des jeunes, en dĂ©bloquant Ă  cette fin une enveloppe de 3,5 millions en 2005 et de 4 millions en 2006 au titre du fonds d’aide Ă  la modernisation de la presse quotidienne et assimilĂ©e d'information politique et gĂ©nĂ©rale. AprĂšs une premiĂšre sĂ©rie de projets mis en route dans ce cadre en 2005, quatre nouveaux projets sont en cours de dĂ©finition. L’enveloppe de 4 millions d’euros accordĂ©e en 2006 sera donc reconduite l’an prochain. Les crĂ©dits correspondants seront mobilisĂ©s dans le cadre du fonds d’aide Ă  la modernisation de la presse quotidienne, s’ajoutant ainsi aux 22,6 millions d’euros dĂ©diĂ©s aux projets de modernisation des entreprises de presse. L’expĂ©rimentation et l’évaluation seront au cƓur de la dĂ©marche des pouvoirs publics et de la presse en la matiĂšre. 6.– L’aide au dĂ©veloppement des services en ligne des entreprises de presseLe dĂ©veloppement des services en ligne constitue un enjeu majeur pour les entreprises de presse, Ă  la fois pour inverser la tendance Ă  la baisse du lectorat et pour diversifier leurs sources de revenu. Les besoins sont importants, en particulier pour la presse spĂ©cialisĂ©e. L’aide au dĂ©veloppement des services en ligne a prĂ©cisĂ©ment pour objet de soutenir les projets des entreprises de presse visant Ă  offrir au public un accĂšs attractif et actualisĂ© aux contenus rĂ©dactionnels de leurs publications sur support numĂ©rique. Le fonds d’aide au dĂ©veloppement des services en ligne des entreprises de presse a Ă©tĂ© créé en 2004 pour prendre le relais du fonds presse et multimĂ©dia » mis en place en 1997. La premiĂšre annĂ©e de fonctionnement du nouveau fonds a pu ĂȘtre assurĂ©e en 2005 sans dotation budgĂ©taire, grĂące aux sommes correspondant au remboursement des avances antĂ©rieurement consenties au titre du fonds presse et multimĂ©dia », rĂ©cupĂ©rĂ©es par l’intermĂ©diaire d’un fonds de concours. En 2006, l’aide au dĂ©veloppement des services en ligne a eu besoin, pour la premiĂšre fois depuis 2002, d’un financement budgĂ©taire. Compte tenu des besoins prĂ©visionnels Ă  couvrir, une dotation budgĂ©taire de euros est nĂ©cessaire en 2007. C.– DÉVELOPPER DES DÉPENSES FISCALES PLUS EFFICACESComplĂ©ment indispensable des dĂ©penses budgĂ©taires, les dĂ©penses fiscales en faveur des mĂ©dias doivent aujourd’hui ĂȘtre intensifiĂ©es tout en ciblant mieux les catĂ©gories Ă  soutenir. 1.– Pour mieux remĂ©dier Ă  la sous-capitalisation de la presse amĂ©lioration du dispositif de l’article 39 bis A du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts et rĂ©duction d’impĂŽt pour la souscription au capitalLes entreprises de presse qui exploitent soit un journal quotidien ou hebdomadaire, soit une revue mensuelle ou bimensuelle consacrĂ©e pour une large part Ă  l’information politique bĂ©nĂ©ficient d’un rĂ©gime spĂ©cial de provisions destinĂ©es au financement de leurs investissements. Les provisions ainsi constituĂ©es, au cours des exercices clos entre le 1er janvier 1996 et le 31 dĂ©cembre 2006, sont soumises Ă  un double plafonnement – d’une part, elles sont limitĂ©es Ă  un pourcentage des bĂ©nĂ©fices 60 % pour les quotidiens et assimilĂ©s et 30 % pour les autres publications ; – d’autre part, les sommes dĂ©duites ne peuvent ĂȘtre utilisĂ©es que pour le financement d’une fraction 90 % pour les quotidiens et assimilĂ©s et 40 % pour les autres publications du coĂ»t de revient de certains investissements matĂ©riels, mobiliers, terrains, constructions, ainsi que les prises de participation majoritaires dans des entreprises d’imprimerie ou exploitant des rĂ©seaux de portage dĂšs lors que ces Ă©lĂ©ments d’actif sont strictement nĂ©cessaires Ă  l’exploitation du journal ou de la publication 110. Pour l’annĂ©e 2003, une centaine d’entreprises de presse ont eu recours Ă  cette provision spĂ©ciale. Le coĂ»t de ce dispositif a Ă©tĂ© Ă©valuĂ© Ă  moins de euros pour 2005 et 2006. Ce dispositif arrive normalement Ă  expiration le 31 dĂ©cembre 2006. C’est pourquoi, dans le cadre du prĂ©sent projet de loi de finances et conformĂ©ment Ă  l’annonce du Premier ministre le 11 mai dernier, le Gouvernement a voulu rĂ©pondre Ă  cette fragilitĂ© traditionnelle des entreprises de presse qu’est leur sous–capitalisation chronique. Le dispositif prĂ©vu Ă  l’article 39 bis A du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts CGI, devrait ainsi ĂȘtre prorogĂ©. En votant, le 19 octobre dernier, l’article 7 du projet de loi de finances pour 2007 111, notre AssemblĂ©e a acceptĂ© d’amĂ©nager ce rĂ©gime. Pour rĂ©pondre Ă  la sous–capitalisation de ces entreprises, l’article 7 proroge ainsi jusqu’en 2010 le rĂ©gime de provision fiscale pour les entreprises de presse, qui arrive Ă  Ă©chĂ©ance cette annĂ©e. Son champ d’application est Ă©largi Ă  certaines prises de participation dans les entreprises de presse ou dans celles dont l’activitĂ© principale est d’assurer des prestations dans les domaines de l’information, de l’approvisionnement en papier, de la production et de la distribution pour le compte des journaux ou publications. Lors de sa discussion du 19 octobre 2006, l’AssemblĂ©e nationale a adoptĂ© trois amendements prĂ©sentĂ©s par le Gouvernement. L’introduction de ces modifications permet d’instituer une rĂ©duction d’impĂŽt de 25 % au titre des sommes versĂ©es pour la souscription en numĂ©raire au capital de sociĂ©tĂ©s ayant pour activitĂ© principale l’édition de journaux quotidiens ou de publications d’information politique et gĂ©nĂ©rale entre le 1er janvier 2007 et le 31 dĂ©cembre 2009. Il s’agit lĂ  d’encourager les prises de participation au capital de ces entreprises et ainsi de favoriser la pĂ©rennitĂ© des groupes de presse. Cette initiative pourrait aider des titres comme les quotidiens L’HumanitĂ© et LibĂ©ration ou l’hebdomadaire Politis. Par ailleurs, les amendements adoptĂ©s Ă  l’AssemblĂ©e nationale harmonisent le champ de cette nouvelle rĂ©duction d’impĂŽt et celui de la provision pour entreprises de presse. C’est le pĂ©rimĂštre le plus large qui a ainsi Ă©tĂ© retenu par l’AssemblĂ©e nationale, correspondant au pĂ©rimĂštre actuel de la provision pour entreprises de presse, et ce afin de soutenir des entreprises qui en ont souvent bien besoin. Tout journal quotidien pourra ainsi bĂ©nĂ©ficier de la provision pour entreprises de presse, jusqu’ici rĂ©servĂ©e aux journaux d’information politique et gĂ©nĂ©rale. 2.– Le taux rĂ©duit de TVA applicable Ă  la presse pour une extension Ă  la presse en ligneCertaines livraisons, commissions et courtages portant sur les publications de presse 112, sont soumis Ă  la TVA au taux de 2,1 % dans les dĂ©partements mĂ©tropolitains y compris la Corse, et de 1,05 % dans les dĂ©partements de la Guadeloupe, de la Martinique et de la RĂ©union art. 298 septies du CGI. Les publications doivent remplir les conditions gĂ©nĂ©rales suivantes, prĂ©vues Ă  l’article 72 de l’annexe III au CGI 113 – prĂ©senter un caractĂšre d’intĂ©rĂȘt gĂ©nĂ©ral quant Ă  la diffusion de la pensĂ©e l’instruction, l’éducation, l’information, la rĂ©crĂ©ation du public ; – rĂ©pondre aux obligations de la loi sur la presse, et notamment porter l’indication du nom et du domicile de l’imprimeur, avoir un directeur de la publication dont le nom est imprimĂ© sur tous les exemplaires, avoir fait l’objet d’un dĂ©pĂŽt prĂ©vu aux articles 7 et 10 de la loi du 29 juillet 1881 ; – paraĂźtre rĂ©guliĂšrement au moins une fois par trimestre ; – faire l’objet d’une vente effective ; – ne pas consacrer plus de deux tiers de leur surface Ă  des rĂ©clames ou annonces, qu’il s’agisse d’une publicitĂ© en image ou en texte ; – ne pas ĂȘtre assimilables, mĂȘme si elles revĂȘtent l’apparence de journaux ou de revues, Ă  des publications telles que les feuilles d’annonces, prospectus, almanachs, horaires, programmes. Toutefois, certaines publications qui ne remplissent pas toutes ces conditions peuvent bĂ©nĂ©ficier des avantages fiscaux des publications de presse, Ă  la condition qu’elles ne servent pas directement ou indirectement Ă  la dĂ©fense d’intĂ©rĂȘts commerciaux ou professionnels. Il s’agit – des publications d’anciens combattants, de mutilĂ©s ou de victimes de guerre ; – des publications des organismes rĂ©gis par le code de la mutualitĂ© ; – des publications Ă©ditĂ©es par des associations luttant contre les atteintes ou menaces graves Ă  la dignitĂ©, Ă  la santĂ© et Ă  la vie humaines ; – des publications syndicales ou corporatives prĂ©sentant un caractĂšre d’intĂ©rĂȘt social publications des syndicats ou associations de salariĂ©s et des organismes mutualistes ; – des publications pĂ©riodiques Ă©ditĂ©es par l’administration de l’État ou par les Ă©tablissements publics administratifs de l’État. Le coĂ»t de ce dispositif s’élĂšve Ă  200 millions d’euros pour l’annĂ©e 2005 et est Ă©valuĂ© Ă  205 millions d’euros pour l’annĂ©e 2006 et 210 millions d’euros pour l’annĂ©e 2007. En l’occurrence, la croissance de la dĂ©pense fiscale ne tĂ©moigne naturellement d’aucun effort spĂ©cifique de la part des pouvoirs publics, mais traduit uniquement la croissance du chiffre d’affaires de la presse vendue, l’aide fiscale Ă©tant proportionnelle au montant des ventes. S’il s’agit d’un acquis solide, votre Rapporteur spĂ©cial estime nĂ©cessaire d’aller plus loin et de mettre fin Ă  l’iniquitĂ© liĂ©e Ă  l’exclusion des publications de presse en ligne de ce dispositif fiscal favorable. En effet, en leur Ă©tat actuel, les dispositions communautaires relatives Ă  la taxe sur la valeur ajoutĂ©e ne permettent d’appliquer un taux super–rĂ©duit qu’aux seuls journaux et pĂ©riodiques imprimĂ©s, et non aux publications sur support Ă©lectronique. En France, la presse en ligne se voit donc appliquer le taux normal de 19,6 %. Le taux super-rĂ©duit de 2,1 %, rĂ©servĂ© depuis 1977 aux quotidiens et assimilĂ©s, a Ă©tĂ© a Ă©tendu Ă  tous les pĂ©riodiques, depuis le 1er janvier 1989. Mais, mĂȘme cette mesure a Ă©tĂ©, jusqu’à il y a encore peu, mise en cause Ă  plusieurs reprises par la politique communautaire de rapprochement des taux de TVA, et finalement conservĂ©e inchangĂ©e. C’est pourquoi votre Rapporteur spĂ©cial regrette vivement que son amendement, prĂ©sentĂ© Ă  nouveau le 19 octobre dernier devant l’AssemblĂ©e nationale, ait dĂ» ĂȘtre retirĂ©. Cette modification paraĂźt nĂ©anmoins aussi lĂ©gitime que, espĂ©rons-le, inĂ©luctable. En application du principe de neutralitĂ© technologique des supports de mĂ©dias, votre Rapporteur spĂ©cial proposait en effet de ramener Ă  2,1 % le taux de TVA applicable aux publications de presse en ligne, afin de l’aligner sur celui appliquĂ© aux publications de presse sur papier. À l’heure oĂč l’équation Ă©conomique de la presse en ligne, en plein dĂ©veloppement, s’accommode en tout cas difficilement d’une fiscalitĂ© alourdie par rapport Ă  la presse classique », il est important, en cohĂ©rence avec les nĂ©gociations du Gouvernement français dans les enceintes communautaires, de pouvoir remĂ©dier Ă  cette inĂ©galitĂ© de traitement et d’éviter de pĂ©naliser les entreprises de presse Ă©crite pour lesquelles l’internet constitue un outil primordial de dĂ©veloppement. Un signe encourageant est que la France a obtenu de Bruxelles l’inscription, comme point divers au conseil Ecofin du 7 novembre 2006, de cette question. La discussion pourrait alors ĂȘtre rĂ©solue lors du conseil Ecofin du 28 novembre prochain, qui portera sur le paquet TVA et l’avenir de la directive du 7 mai 2002 concernant le rĂ©gime de TVA applicable aux services de radiodiffusion et Ă  certains services fournis par voie Ă©lectronique. Cette directive, qui devait initialement expirer le 30 juin 2006, prĂ©voit que les prestations de services Ă©lectroniques sont exemptĂ©es de TVA quand elles sont consommĂ©es en dehors de l’Union europĂ©enne, mais taxĂ©es quand elles le sont dans l’Union. En l’absence d’accord sur des mesures plus ambitieuses en matiĂšre de taxation, la Commission pourrait alors proposer a minima de la prolonger jusqu’au 31 dĂ©cembre 2008. Votre Rapporteur spĂ©cial espĂšre que les États–membres iront plus loin et qu’une solution pourra ĂȘtre trouvĂ©e pour la presse en ligne d’ici le vote du projet de loi de finances rectificative pour 2006. 3.– Hors presse, la TVA des publications des collectivitĂ©s et organismes Ă  but non lucratifOn mentionnera cette dĂ©pense fiscale Ă  titre subsidiaire puisqu’elle concerne des opĂ©rations de vente, commission et courtage portant sur les annuaires et les Ă©crits pĂ©riodiques ne constituant pas des publications de presse au sens de l’article 298 septies du CGI 114. Ceux-ci sont exonĂ©rĂ©s de TVA Ă  la double condition – que ces publications soient Ă©ditĂ©es par les collectivitĂ©s publiques ou par leurs Ă©tablissements publics ou par des organismes Ă  but non lucratif ; – que la publicitĂ© et les annonces ne couvrent pas plus des deux tiers de la surface totale de la publication et que l’ensemble des annonces ou de la publicitĂ© d’un mĂȘme annonceur dans l’annĂ©e ne soit pas supĂ©rieur au dixiĂšme de la surface totale des numĂ©ros parus dans cette annĂ©e. Le coĂ»t de ce dispositif pour l’annĂ©e 2005 s’élĂšve Ă  1 million d’euros, et est Ă©galement Ă©valuĂ© Ă  1 million d’euros en 2006 et 2007. III.– L’AGENCE FRANCE–PRESSE ENTRE REDRESSEMENT ET RÉORIENTATION A.– UNE RÉORIENTATION STRATÉGIQUEComme on l’a dĂ©jĂ  expliquĂ© en prĂ©sentant l’avenant au contrat d’objectifs et de moyens, l’Agence France–Presse AFP 115 est en train d’opĂ©rer le tournant stratĂ©gique de la vidĂ©o et du multimĂ©dia, puisqu’il a Ă©tĂ© dĂ©cidĂ© de rĂ©orienter sa stratĂ©gie vers les nouveaux mĂ©tiers en dĂ©veloppement, Ă  savoir – l’image l’AFP cherche Ă  renforcer son dispositif vidĂ©o. Aujourd’hui encore embryonnaire, le service AFP–VidĂ©o devrait se dĂ©velopper Ă  la fois en rĂ©gions et Ă  l’étranger, dans un nombre de bureau limitĂ©, dans lesquels des journalistes formĂ©s Ă  la vidĂ©o pourraient apporter des contributions sous forme de correspondances Ă  la rĂ©daction de France 24, mais aussi rĂ©aliser des reportages trĂšs courts sur certains aspects de l’actualitĂ© features ». L’agence orientera ses efforts dĂšs 2006 pour dĂ©velopper son offre, ses investissements et ses recettes vidĂ©o. De nouveaux postes, créés en prioritĂ© par redĂ©ploiement, et si besoin par embauche, seront consacrĂ©s Ă  cette activitĂ© ; – le multimĂ©dia l’agence doit disposer d’un systĂšme de production informatique adaptĂ©. Le projet de refonte informatique dit 2XML » repose sur les mĂ©ta–donnĂ©es, les descriptifs et les liens qui permettent d’associer textes, photos, infographies, graphiques et vidĂ©o, et de donner accĂšs Ă  des bases de donnĂ©es. C’est un projet structurant pour l’avenir de l’agence, qui doit ĂȘtre accĂ©lĂ©rĂ©. Les investissements consacrĂ©s Ă  la modernisation de l’agence seront privilĂ©giĂ©s durant cette pĂ©riode de maniĂšre Ă  dĂ©velopper la capacitĂ© de l’AFP Ă  livrer des contenus multimĂ©dia assemblĂ©s, notamment avec des contenus vidĂ©o, Ă  des clients de type portail internet ou opĂ©rateurs mobiles, et d’augmenter ainsi ses revenus. Cette rĂ©orientation stratĂ©gique s’explique notamment par le risque de pertes de positions de marchĂ© qui menace l’AFP face Ă  ses principaux concurrents mondiaux Reuters et Associated Press, lesquels disposent d’une offre vidĂ©o sur le segment de marchĂ© des tĂ©lĂ©visions et des sites internet de 50 Ă  70 vidĂ©os par jour. Par ailleurs, l’AFP ne peut rester passive face au dĂ©veloppement dans l’ensemble des pays dĂ©veloppĂ©s des accĂšs internet Ă  haut dĂ©bit et de la tĂ©lĂ©phonie mobile de troisiĂšme gĂ©nĂ©ration. B.– DES ÉQUILIBRES FINANCIERS ENCORE FRAGILESDans une situation financiĂšre difficile, l’État a acceptĂ© de revaloriser la convention État–AFP 116 et de maintenir une progression de ses abonnements supĂ©rieurs Ă  l’inflation, tandis que l’AFP a, de son cĂŽtĂ©, promis un retour Ă  l’équilibre financier dans le cadre du contrat d’objectifs et de moyens COM conclu en 2003, et ce grĂące Ă  un dĂ©veloppement de ses recettes commerciales et un effort soutenu de maĂźtrise de sa gestion 117. L’avenant de 2006 au COM doit permettre de relancer cet effort et votre Rapporteur spĂ©cial encourage l’AFP dans la conduite de son projet structurant et mobilisateur, dont la rĂ©ussite est conditionnĂ©e Ă  la poursuite du redressement d’une agence encore convalescente. Rappelons, en effet, que l’AFP a traversĂ© de 1997 Ă  2001 une crise financiĂšre sans prĂ©cĂ©dent dans l’histoire de cette institution 118, alors que jusque-lĂ , l’AFP avait toujours Ă©tĂ© capable d’accroĂźtre son chiffre d’affaires, certes Ă  un rythme irrĂ©gulier, mais toujours positif et en moyenne trĂšs significatif, et non uniquement imputable au relĂšvement des tarifs des clients français. En 2005, les produits d’exploitation 255,4 millions d’euros se sont ainsi amĂ©liorĂ©s de 2,7 millions d’euros + 1,1 % en un an, grĂące Ă  l’effet de l’accord avec Thomson sur la filiĂšre Ă©conomique + 0,7 million d’euros, l’accroissement de la progression des ventes photos + 1,3 million d’euros, l’augmentation du service gĂ©nĂ©ral hors convention de l’État + 0,6 million d’euros, et la progression du multimĂ©dia + 0,5 million d’euros, et ce malgrĂ© la non rĂ©alisation des prĂ©visions de recettes avec Softbank – 1 million d’euros en 2005. Par rapport Ă  2004, Ă  taux de change comparable, ces recettes sont en progression de + 9,1 millions d’euros soit + 3,7 %, dont 2,4 % de croissance pour la convention de l’État soit + 2,4 millions d’euros et 5 % de croissance en moyenne pour les recettes commerciales hors Ă©vĂšnements spĂ©ciaux soit + 7,5 millions d’euros 119. En terme d’activitĂ©, c’est la photo avec 30,6 millions d’euros de recettes en 2005 qui progresse le mieux par rapport Ă  2004 + 11,7 %, soit + 3,2 millions d’euros. Le rĂ©sultat net part du groupe s’élĂšve Ă  – 3,1 millions d’euros en 2005 contre – 5,5 millions d’euros en 2004, soit une perte nette divisĂ©e pratiquement par 2. Cette Ă©volution s’explique essentiellement par des dotations nettes aux amortissements et aux provisions en augmentation de + 1,5 million d’euros, ainsi que par une marge d’exploitation 2005 qui s’établit Ă  15,4 millions d’euros + 73 % par rapport Ă  2004 Ă  taux comparable. Ce rĂ©sultat a Ă©tĂ© rendu possible par des recettes d’exploitation en augmentation de 9,1 millions d’euros et des charges d’exploitation en augmentation de 2,6 millions d’euros + 1,1 %. En 2005, l’AFP prĂ©sente un rĂ©sultat d’exploitation positif de 3 millions d’euros, contre – 2 millions d’euros en 2004, soit une amĂ©lioration de la rentabilitĂ© d’exploitation de + 5 millions d’euros Ă  taux comparable. De mĂȘme, le rĂ©sultat financier s’établit Ă  + 1,7 million d’euros en 2005 contre – 4,3 millions d’euros en 2004. Cette amĂ©lioration de 6 millions d’euros est pour l’essentiel liĂ©e Ă  des paritĂ©s entre devises plus favorables, ce qui a permis de constater des reprises nettes de provisions favorables et de dĂ©gager des gains nets de change. Si 2005 affiche un rĂ©sultat exceptionnel Ă  – 6,2 millions d’euros contre + 1 million d’euros en 2004, cela s’explique principalement par les coĂ»ts liĂ©s Ă  la convention de dĂ©part en prĂ©retraite 7,9 millions d’euros 120. Une quote-part nĂ©gative de rĂ©sultat mise en Ă©quivalence pour les sociĂ©tĂ©s Fileas SA et Fileas Holding sur 2005 de – 1,2 million d’euros, compte tenu du redressement fiscal en cours de la sociĂ©tĂ© Fileas Holding. Les dettes financiĂšres hors dĂ©couverts s’élĂšvent Ă  39,4 millions d’euros Ă  fin 2005 contre 35,7 millions d’euros Ă  fin 2004, soit une augmentation des dettes de + 3,7 millions d’euros, dont + 4,5 millions d’euros au seul titre de l’emprunt crĂ©dit-bail sur le siĂšge social. Au cours de la mĂȘme pĂ©riode, la trĂ©sorerie active nette des dĂ©couverts bancaires est passĂ©e de 12,3 millions d’euros Ă  fin 2004 Ă  15,4 millions d’euros Ă  fin 2005, soit une augmentation de + 3,1 millions d’euros. L’endettement financier net du groupe s’élĂšve ainsi Ă  24 millions d’euros Ă  fin 2005 contre 23,4 millions d’euros Ă  fin 2004, soit une augmentation de l’endettement financier net de + 0,6 million d’euros. MĂȘme si la situation de l’AFP reste extrĂȘmement fragile, le contrat d’objectifs et de moyens, prĂ©sentĂ© plus haut dans ce rapport, a produit des effets vertueux, qui tiennent d’abord Ă  l’engagement fort de l’État. Le montant des abonnements de l’État Ă  l’AFP est en effet passĂ© de 100,2 millions d’euros en 2003 Ă  109,4 millions d’euros en 2007 montant proposĂ© dans le prĂ©sent projet de loi de finances, au titre du programme Presse de la mission MĂ©dias. S’agissant des charges, le contrat d’objectifs et de moyens initial prĂ©voyait de contenir la masse salariale Ă  202,7 millions d’euros 2007 contre 181,8 millions d’euros en 2003, engagement plutĂŽt modeste s’agissant d’un poste oĂč de nombreuses dĂ©rives avaient Ă©tĂ© constatĂ©es il y a quelques annĂ©es. NĂ©anmoins, votre Rapporteur spĂ©cial estime que l’avenant 2006 au COM est une occasion d’accentuer l’effort sur la masse salariale de l’agence. * * * AUDITION DU MINISTRE EN COMMISSION ÉLARGIE SĂ©ance du jeudi 2 novembre 2006 M. Pierre MĂ©haignerie, PrĂ©sident de la commission des Finances - Je tiens Ă  saluer ceux de nos collĂšgues qui ont pu ĂȘtre prĂ©sents en ce jour un peu spĂ©cial, juste aprĂšs la Toussaint. Nous allons aborder, en commission Ă©largie, l’examen des crĂ©dits de la mission MĂ©dias, du compte spĂ©cial Avances Ă  l’audiovisuel public et de l’article 63 rattachĂ©. Je suis heureux de coprĂ©sider cette rĂ©union avec HervĂ© de Charette et Dominique Richard. La commission Ă©largie est destinĂ©e Ă  favoriser la souplesse et le dynamisme des dĂ©bats. Je souhaite donc que chacun s’astreigne Ă  des interventions courtes, plutĂŽt sous forme de questions, afin d’éviter les travers habituels des discussions gĂ©nĂ©rales en sĂ©ance publique, qui se limitent souvent Ă  des monologues successifs. Une fois le Gouvernement parti, nous en viendrons aux amendements, en commençant par la commission des affaires culturelles, si elle le souhaite. M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la Culture et de la communication - Je suis trĂšs heureux de vous prĂ©senter aujourd’hui ce troisiĂšme projet de budget, le dernier de cette lĂ©gislature. Je me fĂ©licite qu’il soit examinĂ© en commission Ă©largie, car cette formule laisse plus de temps pour que s’engage un dĂ©bat approfondi entre le Gouvernement et la ReprĂ©sentation nationale. Dans le palmarĂšs que ne manquera pas d’établir le prĂ©sident Pierre MĂ©haignerie, j’espĂšre que j’obtiendrai, sinon la palme d’or, du moins un satisfecit pour la conduite de nos dĂ©bats et le respect de la diversitĂ© du Parlement
 Sans revenir sur les excellents rapports de Patrice Martin-Lalande et de Chantal BourraguĂ©, je me contenterai de replacer cet exercice 2007 dans une perspective pluriannuelle. Je n’ai pas besoin de vous rappeler la place Ă©minente et croissante que tient ce secteur dans la vie quotidienne de nos concitoyens ! Ce projet de budget traduit une politique identique Ă  celle que je mĂšne dans tous les domaines dont j’ai la charge une politique en faveur de la diversitĂ© culturelle, de la crĂ©ation, de l’emploi, de la multiplication des offres de programme et de la dĂ©fense du pluralisme. Le domaine des mĂ©dias connaĂźt des mutations rapides, parfois brutales, liĂ©es aux extraordinaires progrĂšs technologiques qui ont transformĂ© profondĂ©ment les usages. Nous devons non seulement les comprendre et les analyser, mais surtout les anticiper et les accompagner. Ce secteur n’avait jamais connu tant de mutations profondes et concrĂštes, qui impliquent autant de rĂ©formes et de modernisation de la part des pouvoirs publics. Premier exemple l’essor de l’internet, dĂ©sormais prĂ©sent dans la vie quotidienne et professionnelle des Français, dans plus d’un foyer sur deux, et majoritairement Ă  haut dĂ©bit. Ceux d’entre vous qui ont votĂ© la loi sur le droit d’auteur et les droits voisins dans la sociĂ©tĂ© de l’information peuvent ĂȘtre fiers d’avoir adaptĂ© notre lĂ©gislation pour protĂ©ger et garantir les droits des crĂ©ateurs, tout en permettant le dĂ©veloppement d’une offre lĂ©gale nouvelle. Les dĂ©crets d’application, en cours de rĂ©daction, font l’objet d’un travail interministĂ©riel intense. Notre objectif est qu’ils soient publiĂ©s entre la fin du mois de novembre et le dĂ©but de l’annĂ©e 2007 – je pense notamment au dĂ©cret portant crĂ©ation de l’AutoritĂ© de rĂ©gulation des mesures techniques, qui devrait permettre l’installation de cette AutoritĂ© au tout dĂ©but de l’annĂ©e 2007. DeuxiĂšme exemple, qui vient tout naturellement Ă  l’esprit celui de la tĂ©lĂ©vision. Jamais depuis vingt ans, le paysage audiovisuel français n’avait connu de tels bouleversements. Le lancement rĂ©ussi de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre a triplĂ© le nombre de chaĂźnes gratuites – elles sont passĂ©es de six Ă  dix-huit ! Ce n’est pas le fruit d’une gĂ©nĂ©ration spontanĂ©e, ni du seul progrĂšs technique, mais le rĂ©sultat d’une volontĂ© politique forte, en particulier des choix budgĂ©taires qu’il vous revient de dĂ©cider. Jamais une majoritĂ© n’avait autorisĂ© la crĂ©ation d’autant de chaĂźnes ! Le tĂ©lĂ©spectateur en a bĂ©nĂ©ficiĂ© grĂące Ă  une offre Ă©largie, de mĂȘme que le monde de la crĂ©ation et les entreprises de production, porteuses d’emplois et facteur essentiel dans l’attractivitĂ© de notre pays. Ces rĂ©sultats, Monsieur le prĂ©sident de la commission des finances, n’ont pas pour corollaire une explosion sans contrĂŽle des deniers publics. Mon propos n’est pas d’affirmer que mon budget est bon parce qu’il augmente ! Toutes les augmentations de ressources que je soumets Ă  votre approbation et Ă  votre contrĂŽle sont, en effet, flĂ©chĂ©es et clairement identifiĂ©es. Par exemple, je tiens autant que vous Ă  la dĂ©marche contractuelle les contrats d’objectifs et de moyens n’enlĂšvent rien Ă  votre contrĂŽle annuel ; ils permettent, au contraire, au lĂ©gislateur et aux entreprises publiques de l’audiovisuel, de dĂ©finir une stratĂ©gie sur plusieurs annĂ©es. À cela s’ajoute le flĂ©chage des dĂ©penses supplĂ©mentaires l’augmentation de 20 millions d’euros que vous avez votĂ©e en loi de finances rectificative a ainsi Ă©tĂ© directement affectĂ©e aux programmes d’Arte et de France TĂ©lĂ©visions, et leur a permis de passer Ă  la TNT dans de bonnes conditions. Je partage avec vous, Monsieur le prĂ©sident de la commission des finances, cette exigence que toute demande de financement supplĂ©mentaire corresponde Ă  une prioritĂ© clairement identifiĂ©e et productive. Sous l’impulsion du PrĂ©sident de la RĂ©publique, les choix budgĂ©taires de la majoritĂ© ont Ă©galement abouti Ă  la crĂ©ation de la chaĂźne française d’information internationale, France 24, qui commencera Ă  Ă©mettre dĂšs les premiers jours de dĂ©cembre. Elle offrira au monde un regard français sur une actualitĂ© internationale de plus en plus suivie par nos concitoyens. GrĂące Ă  l’implication des services de l’État et, aux travaux de votre mission d’évaluation et de contrĂŽle, nous avons enfin rĂ©formĂ© la redevance audiovisuelle en rationalisant son mode de recouvrement. Un bilan est en cours au sein du ministĂšre de l’économie et des finances. La progression des ressources disponibles a donnĂ© aux organismes de l’audiovisuel public les moyens de participer pleinement aux mutations technologiques en cours tout en renforçant la spĂ©cificitĂ© et la richesse de leurs programmes. Les prioritĂ©s fixĂ©es au secteur audiovisuel public pour 2007 sont, en effet, le dĂ©veloppement d’une offre de qualitĂ© en tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre et en haute dĂ©finition, mais aussi la sauvegarde du patrimoine. La progression de la dotation publique de France TĂ©lĂ©visions sera assortie de plusieurs prioritĂ©s. France TĂ©lĂ©visions devra tout d’abord renforcer la grille des chaĂźnes de la tĂ©lĂ©vision numĂ©rique terrestre, France 4, France 5 et France Ô dont le PrĂ©sident de la RĂ©publique a annoncĂ© la diffusion sur la TNT en Île-de-France. J’ajoute que le multiplexe public pourrait Ă©galement diffuser en province les chaĂźnes locales analogiques ainsi que certains dĂ©crochages de France 3, encore mal diffusĂ©s sur la TNT – il est grand temps que ce transfert se rĂ©alise ! DeuxiĂšme prioritĂ© l’accĂ©lĂ©ration du dĂ©ploiement de la TNT sur notre territoire. France TĂ©lĂ©visions devrait se montrer exemplaire en respectant Ă  la lettre le calendrier dĂ©fini par le CSA, qui a prĂ©vu une couverture de 85 % de la population, Ă  partir de 110 sites, d’ici Ă  la fin 2007. Mais le groupe devra Ă©galement poursuivre son dĂ©ploiement au-delĂ  de ces sites afin de complĂ©ter sa couverture, dans la perspective de l’extinction de la diffusion analogique prĂ©vue pour la fin 2011 dans le projet de loi relatif Ă  la modernisation de la diffusion audiovisuelle et Ă  la tĂ©lĂ©vision du futur, projet qui vous sera bientĂŽt soumis. TroisiĂšme prioritĂ© le dĂ©veloppement des programmes en haute dĂ©finition. France TĂ©lĂ©visions, qui a dĂ©jĂ  diffusĂ© des programmes sous cette forme, continuera Ă  diffuser un maximum de programmes haute dĂ©finition dans le cadre expĂ©rimental actuel, puis dans le cadre d’autre prĂ©emptions que le Gouvernement rĂ©alisera pour les chaĂźnes de service public. Comme vous le savez, Monsieur Descamps, j’ai pu assister Ă  la diffusion expĂ©rimentale en haute dĂ©finition de Paris Tours, une sorte de rĂ©pĂ©tition gĂ©nĂ©rale du Tour de France ! Le service public ne sera pas le laissĂ© pour compte des Ă©volutions technologiques. N’oublions pas non plus le sous-titrage des programmes pour les personnes sourdes et malentendantes la loi du 11 fĂ©vrier 2005 a en effet posĂ© le principe gĂ©nĂ©ral de l’adaptation de la totalitĂ© des programmes tĂ©lĂ©visĂ©s Ă  l’exception des messages publicitaires. Pour toutes les chaĂźnes publiques, cette adaptation doit avoir lieu dans un dĂ©lai maximum de cinq ans aprĂšs la publication de la loi. France TĂ©lĂ©visions devra ainsi rĂ©aliser le sous-titrage de l’ensemble des programmes rĂ©gionaux de France 3. Quant Ă  l’augmentation des dotations d’Arte France, elle permettra Ă  cette sociĂ©tĂ© de jouer un rĂŽle moteur dans les nouvelles technologies de la diffusion et de poursuivre ses efforts en faveur de la crĂ©ation. 2007 sera Ă©galement l’occasion de concrĂ©tiser les orientations dĂ©finies par le contrat d’objectifs et de moyens de Radio France, qui a Ă©tĂ© approuvĂ© par le conseil d’administration du 12 juillet dernier et qui est en cours d’examen par les commissions compĂ©tentes du Parlement. Je ferai le plus grand cas de vos remarques et je salue cette procĂ©dure qui vous associe davantage Ă  l’élaboration des contrats d’objectifs et de moyens. GrĂące Ă  votre vote, nous donnerons Ă  Radio France la possibilitĂ© de rĂ©aliser de nouveaux dĂ©veloppements, comme l’extension de la diffusion FM, le dĂ©ploiement de la radio numĂ©rique ou le dĂ©veloppement de chaĂźnes thĂ©matiques dĂ©rivĂ©es de nouveaux services, tout en confortant la mission de service public de ses sept chaĂźnes et de ses formations musicales. L’action en faveur du patrimoine est Ă©galement une prioritĂ© de la politique culturelle du Gouvernement. Dans cette nouvelle Ăšre numĂ©rique, cette prioritĂ© vaut aussi pour l’audiovisuel comme les prĂ©cĂ©dents, ce budget vise Ă  renforcer l’effort de sauvegarde et de mise en valeur de notre patrimoine audiovisuel, mission confiĂ©e Ă  l’Institut national de l’audiovisuel. Le contrat d’objectifs et de moyens de l’INA, signĂ© fin 2005, garantira l’accĂ©lĂ©ration du plan de sauvegarde et de numĂ©risation afin que l’ensemble des fonds audiovisuels soient numĂ©risĂ©s en 2015 ; par cohĂ©rence, le budget de l’audiovisuel public pour 2007 permettra de sauvegarder plus de 40 % du stock d’archives menacĂ©es. Radio France internationale, grande et belle maison, poursuit sa modernisation en renĂ©gociant le contrat qui la lie Ă  TDF, et doit dĂ©velopper son offre sur Internet. Le contrat d’objectifs et de moyens doit ĂȘtre l’occasion de dĂ©terminer une stratĂ©gie Ă©ditoriale adaptĂ©e au monde moderne, de trouver des synergies avec France 24, Ă  l’instar de la BBC World, et de garantir les moyens financiers appropriĂ©s – pour 2007, la part de financement de RFI issue de la redevance progresse de 1,2 %. Les radios associatives, seuls mĂ©dias de proximitĂ©, s’adressent en prioritĂ© Ă  des populations isolĂ©es leur rĂŽle social est donc primordial. Un dĂ©cret publiĂ© le 25 aoĂ»t dernier amĂ©liore le fonctionnement du fonds de soutien Ă  l’expression radiophonique le soutien public Ă  prĂšs de 600 radios associatives est ainsi dĂ©finitivement garanti. La politique de l’audiovisuel est aussi au service de l’emploi. Les mesures de crĂ©dit d’impĂŽt et l’intensification du partenariat entre l’État et les rĂ©gions – selon le principe 1 euro de l’État pour 2 euros des rĂ©gions » – donnent un fort effet de levier aux actions de l’État. La relocalisation des tournages en France a augmentĂ© de 35 % l’an dernier les rĂ©sultats des mesures que vous avez votĂ©es ne se sont pas faits attendre ! La diffusion de la presse Ă©crite, pilier de notre dĂ©mocratie, est confortĂ©e cette annĂ©e par l’augmentation de plus de 22 % des moyens qui lui Ă©taient consacrĂ©s il y a seulement deux ans. La faiblesse des fonds propres obĂšre la capacitĂ© d’investissement de la presse Ă©crite. Le prĂ©sent projet de loi de finances tend donc Ă  proroger jusqu’en 2010 le dispositif spĂ©cifique de provisions pour investissements dit du 39 bis » et a Ă©tendre le pĂ©rimĂštre des investissements Ă©ligibles Ă  la prise de participation dans d’autres entreprises de presse ou dans des entreprises intervenant dans la chaĂźne de fabrication. Par ailleurs, les entreprises investissant dans des publications d’informations politiques et gĂ©nĂ©rales pourront, avant la fin de l’annĂ©e, bĂ©nĂ©ficier d’une rĂ©duction de l’impĂŽt sur les sociĂ©tĂ©s Ă©gale Ă  25 % du montant des sommes versĂ©es au titre des souscriptions en numĂ©raires au capital de ces publications. Ces mesures renforcent l’attractivitĂ© de la presse quotidienne, qui est parfois confrontĂ©e Ă  des difficultĂ©s – je pense bien sĂ»r Ă  LibĂ©ration. FidĂšle Ă  son engagement en faveur du pluralisme, l’État accompagne la presse dans l’univers numĂ©rique. M. Marc Tessier me rendra en janvier les conclusions de la mission prospective qu’il mĂšne sur ce sujet et je rĂ©unirai alors l’ensemble des reprĂ©sentants de la presse Ă©crite. Le Gouvernement s’attache par ailleurs Ă  convaincre nos partenaires europĂ©ens qu’il faut appliquer Ă  la presse en ligne le taux rĂ©duit de TVA dont bĂ©nĂ©ficie la presse papier – ce thĂšme est Ă  l’ordre du jour du prochain conseil Ecofin. Les aides Ă  la presse Ă©crite doivent ĂȘtre consacrĂ©es en prioritĂ© Ă  son indĂ©pendance Ă©conomique. En 2007, 60 millions seront donc dĂ©diĂ©s au maintien du pluralisme et du dĂ©bat dĂ©mocratique et 22,5 millions seront mobilisĂ©s pour moderniser la fabrication de la presse. Comme les prĂ©cĂ©dents, ce budget est marquĂ© par une importante progression des aides Ă  la presse, par la rĂ©novation des dispositifs de modernisation et le renforcement des fonds propres des entreprises. Il illustre l’engagement fort de l’État pour prĂ©parer l’avenir d’un secteur dans lequel notre pays dispose de trĂšs nombreux atouts. M. HervĂ© de Charette, vice-PrĂ©sident de la commission des Affaires Ă©trangĂšres – Cette mission englobe trois programmes sous la responsabilitĂ© de ministres diffĂ©rents, mais coordonnĂ©s par le ministre de la culture n’y a-t-il pas un problĂšme de structure ? M. le Ministre – J’ai une vocation interministĂ©rielle ! M. HervĂ© de Charette, vice-PrĂ©sident de la commission – D’autre part, la commission des affaires Ă©trangĂšres trouve logique que le programme 115 concernant l’audiovisuel extĂ©rieur soit intĂ©grĂ© avec le programme 116 au sein de la mission action extĂ©rieure de l’État » comme c’était le cas l’an dernier. Pourquoi en a-t-il Ă©tĂ© dĂ©tachĂ© ? M. Dominique Richard, secrĂ©taire de la commission des Affaires culturelles – 2007 est une annĂ©e charniĂšre pour le paysage audiovisuel français. Nous ne pouvons que nous rĂ©jouir du succĂšs du lancement de la TNT 65 % de la population est dĂ©jĂ  couverte et 4 millions d’adaptateurs ont Ă©tĂ© vendus. De mĂȘme, France TĂ©lĂ©visions a renforcĂ© la complĂ©mentaritĂ© de ses chaĂźnes et changĂ© 20 % de ses programmes Ă  la rentrĂ©e. RĂ©jouissons nous aussi de la naissance imminente de France 24. L’augmentation du taux de remboursement des exonĂ©rations sociales et l’arrivĂ©e prochaine de la grande distribution dans la publicitĂ© permettent de rĂ©pondre aux besoins immĂ©diats de France TĂ©lĂ©visions. NĂ©anmoins, ce groupe doit financer le sous-titrage, le passage Ă  la haute dĂ©finition et l’augmentation du coĂ»t des programmes avec l’arrivĂ©e des tĂ©lĂ©coms sur le marchĂ©. Or, la ressource provenant de la redevance n’est guĂšre dynamique 116 euros en France contre une moyenne europĂ©enne de 195,4 euros. Il faut donc donner Ă  la tĂ©lĂ©vision publique les moyens de respecter l’exigence des diversitĂ©s culturelles. Au cours des prochains mois, notre rĂ©flexion devra porter sur la dĂ©finition de l’Ɠuvre audiovisuelle, la fluiditĂ© des droits et la lisibilitĂ© du service public. Enfin, je me fĂ©licite que le Parlement soit associĂ© au contrat d’objectifs et de moyens c’est un geste sympathique, bien qu’homĂ©opathique. M. Patrice Martin-Lalande, Rapporteur spĂ©cial de la commission des Finances – Alors que deux contrats d’objectifs et de moyens seulement ont Ă©tĂ© signĂ©s, accepterez-vous le principe d’un avenant permettant de les inflĂ©chir si nĂ©cessaire, comme nous le proposons par amendement ? France TĂ©lĂ©visions semble en retard – la premiĂšre mouture n’a Ă©tĂ© prĂ©sentĂ©e qu’en avril dernier et l’État doit intervenir rapidement. Le nouveau contrat dĂ©marrera-t-il vraiment en 2007 ? Tout dĂ©calage en la matiĂšre devra ĂȘtre actĂ©. Par ailleurs, les prĂ©visions de recettes publicitaires semblent sous Ă©valuĂ©es et les ambitions du groupe trop limitĂ©es par rapport aux exigences Ă©conomiques affichĂ©es dans le prĂ©cĂ©dent contrat. M. Pierre MĂ©haignerie, PrĂ©sident de la commission – L’évaluation est Ă  la base de toute politique. A-t-on procĂ©dĂ© Ă  une Ă©valuation internationale des diffĂ©rentes tĂ©lĂ©visions dans le monde ? De mĂȘme a-t-on comparĂ© nos aides Ă  la presse avec celles qui sont accordĂ©es pour nos partenaires europĂ©ens ? M. le Ministre – Les responsabilitĂ©s, M. de Charette, sont parfois partagĂ©es, mais toute dĂ©cision se fait sous l’autoritĂ© du PrĂ©sident de la RĂ©publique et du Premier ministre. Sur le lancement de la chaĂźne d’informations internationales, dont je suis fier, comme sur d’autres sujets, l’essentiel est d’additionner les Ă©nergies. La rĂ©forme de la redevance est essentielle vous en fixez le montant et c’est Ă  l’État d’apporter les ajustements nĂ©cessaires. Les contrats d’objectifs et de moyens sont l’occasion pour moi de discuter d’une stratĂ©gie de fonds avec les entreprises de l’audiovisuel public. Le concours du Parlement en la matiĂšre est trĂšs important – Ă  ce titre, je n’ai aucune objection Ă  l’idĂ©e d’avenants. Je tiens Ă  ce que les calendriers soient respectĂ©s. Nous y travaillons de maniĂšre active et partagĂ©e les services de l’État peuvent faire des propositions. Si nous recevons celles des grands groupes de l’audiovisuel public, nous fixons donc aussi des objectifs. Pour France TĂ©lĂ©visions, l’objectif est que le contrat d’objectifs et de moyens soit signĂ© en janvier 2007. En ce qui concerne la dĂ©clinaison annuelle de nos contrats, la traduction budgĂ©taire s’inscrit, comme pour Radio France, dans les recommandations et dans le contrat. Tant pour Arte que pour France TĂ©lĂ©visions, un travail intense est donc menĂ© par les sociĂ©tĂ©s concernĂ©es, mes services et ceux du ministĂšre des finances en vue d’une signature dĂ©but 2007. Il n’y a donc pas de retard. Pierre MĂ©haignerie m’a interrogĂ© sur l’évaluation internationale. Quelques semaines avant le lancement de France 24, j’ai rencontrĂ© les responsables de la BBC et de BBC World Ă  Londres. Nous nous plaçons dans une logique de ressemblance. Pour ce qui est de notre systĂšme d’aides Ă  la presse, le pluralisme des entreprises de presse et des structures capitalistiques est plus important en France que dans d’autres pays de l’Union europĂ©enne. Je pourrai vous fournir des informations complĂ©mentaires Ă  ce sujet. J’en viens aux ressources publicitaires et Ă  leur Ă©ventuelle sous-estimation. DĂ©but 2007, la publicitĂ© sur les chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision sera ouverte Ă  un nouveau domaine, celui de la grande distribution. La sagesse veut que l’on mesure l’impact de cette ouverture des recettes publicitaires avant toute nouvelle dĂ©cision. Il ne faut pas menacer des Ă©quilibres qui restent fragiles, notamment par rapport Ă  la presse Ă©crite. Le Gouvernement ne s’est donc fixĂ© aucune perspective d’évolution pour ces recettes, et de nouvelles coupures publicitaires ne sont pas Ă  l’ordre du jour. M. Pierre MĂ©haignerie, PrĂ©sident de la ommission – Je vous remercie. Il faut pouvoir aussi mesurer les consĂ©quences de la taxe sur les publicitĂ©s dans les boĂźtes aux lettres, qui a dĂ©jĂ  pour effet de reporter sur la presse une partie de la publicitĂ© des grandes surfaces. Mme Chantal BourraguĂ©, Rapporteure pour avis de la commission des Affaires culturelles – Comme M. Martin-Lalande, je me fĂ©licite de l’ambition affirmĂ©e de ce budget. La stabilitĂ© de la redevance ne constitue qu’une contrainte apparente, le nouveau mode de collecte et la compensation des dĂ©grĂšvements provoquant une augmentation des ressources de l’audiovisuel public. Je m’attarderai sur le rĂŽle de France 3 en rĂ©gions. Comme l’a rappelĂ© M. de Carolis devant la commission des affaires culturelles, France 3 est la chaĂźne de la proximitĂ© et s’affirme comme le reflet d’une France riche de sa diversitĂ©. C’est du reste la mission que lui assigne la loi du 30 septembre 1986 relative Ă  la libertĂ© de communication. La politique de rĂ©gionalisation accrue de France 3 illustre le virage Ă©ditorial » opĂ©rĂ© par le groupe France TĂ©lĂ©visions, afin que les programmes des chaĂźnes se complĂštent au lieu de se faire concurrence. Cette politique semble payer selon Mme Giard, directrice gĂ©nĂ©rale de France 3, France 3 est la seule chaĂźne Ă  avoir vu son audience progresser sur les trente-sept premiĂšres semaines de l’annĂ©e 2006. La chaĂźne se porte bien. Elle doit rester Ă  l’écoute des tĂ©lĂ©spectateurs en privilĂ©giant l’information rĂ©gionale, les programmes de proximitĂ©, mais aussi les productions rĂ©gionales Ă  vocation nationale. France 3 est une chaĂźne Ă  vocation rĂ©gionale depuis sa crĂ©ation, puisque Couleur 3 », la troisiĂšme chaĂźne de l’ORTF, a Ă©mis pour la premiĂšre fois en 1972. En 1983, les stations rĂ©gionales de la chaĂźne diffusent quotidiennement trois heures de leurs propres programmes avant 20 heures. En 2005, la diffusion des treize antennes rĂ©gionales a reprĂ©sentĂ© un volume global d’environ 14 000 heures, dont 6 500 heures d’information et 7 600 heures de programmes. France 3 mĂšne depuis des annĂ©es une politique de partenariat avec les collectivitĂ©s territoriales et les grands acteurs Ă©conomiques rĂ©gionaux, notamment grĂące au parrainage. Cette coopĂ©ration originale a permis l’ouverture de nouvelles locales », la production de documentaires rĂ©gionaux et la retransmission des dĂ©bats de certaines assemblĂ©es territoriales. Le budget de France 3 reflĂšte l’importance de sa prĂ©sence territoriale, mĂȘme s’il y aura toujours des dĂ©bats sur l’équilibre des moyens entre l’antenne nationale et les antennes rĂ©gionales, qui restent la raison d’ĂȘtre de France 3. La croissance des effectifs rĂ©gionaux est surtout liĂ©e Ă  la crĂ©ation de nouvelles antennes locales dans les villes moyennes de province. Pour mieux innover dans leurs programmes, les antennes rĂ©gionales rĂ©clament des moyens complĂ©mentaires hors budget de personnel. Leurs budgets sont assez stables ils oscillent entre 22 millions d’euros pour France 3 Alsace et 40 millions pour France 3 RhĂŽne-Alpes-Auvergne. Ces diffĂ©rences s’expliquent par le nombre de bureaux rĂ©gionaux d’information – un seul dans le premier cas, trois dans le second. Mais les budgets sont aussi Ă©tablis en fonction des objectifs de programme et des audiences de chaque antenne. Il conviendrait de mieux prendre en compte ce deuxiĂšme aspect. Les budgets publicitaires des antennes rĂ©gionales proviennent uniquement du parrainage publicitaire. Seuls 20 % de ces recettes sont reversĂ©s aux antennes, le reste revenant au budget publicitaire national. Il en est de mĂȘme pour les recettes publicitaires des sites internet rĂ©gionaux. Il faut rĂ©flĂ©chir Ă  un systĂšme plus dĂ©centralisĂ©, car les seules recettes extĂ©rieures abondant intĂ©gralement le budget des antennes rĂ©gionales sont liĂ©es aux partenariats avec les collectivitĂ©s qui se sont beaucoup dĂ©veloppĂ©s. Ce n’est pas souhaitable si l’on veut prĂ©server leur impartialitĂ©. Il faut saluer l’amĂ©lioration de la coordination entre antennes rĂ©gionales et nationale et avec les autres chaĂźnes de France TĂ©lĂ©visions un fonds d’intervention des programmes rĂ©gionaux encourage l’innovation et la crĂ©ation des missions interrĂ©gionales. Il finance des pilotes et des aides Ă  la production de magazines et documentaires en favorisant les projets coproduits par plusieurs rĂ©gions. Seul un renforcement de la qualitĂ© des Ă©missions produites en rĂ©gions permettra de dĂ©velopper les Ă©changes interrĂ©gionaux et les Ă©changes entre les rĂ©gions et le national. Il faut donc renforcer cette tendance. Certains programmes produits par les rĂ©gions sont dĂ©jĂ  repris par des chaĂźnes du groupe France 4 diffuse une Ă©mission mensuelle produite par France 3 Paris-Île-de-France-Centre. Pour terminer, je ferai le point sur quelques chantiers. Le premier est celui de la filiĂšre production de France 3 qui affichait un dĂ©ficit de 1,6 million d’euros en 2005. Un rapport de l’inspection gĂ©nĂ©rale des finances a recommandĂ© sa cession dĂ©but 2006, mais M. de Carolis a prĂ©fĂ©rĂ© engager sa rationalisation. À l’occasion de la nĂ©gociation du prochain contrat d’objectifs et de moyens, le succĂšs de ce chantier est fondamental France TĂ©lĂ©visions doit prouver qu’elle peut rĂ©former et amĂ©liorer sa productivitĂ© Ă  pĂ©rimĂštre budgĂ©taire constant. Le deuxiĂšme chantier est celui de la politique rĂ©dactionnelle Ă  l’heure de l’information instantanĂ©e. La pĂ©riode s’annonce tendue sur le plan politique, mais je tiens Ă  souligner le souci d’impartialitĂ© des responsables de l’information de la chaĂźne. La qualitĂ© des journaux de France 3 s’est amĂ©liorĂ©e, et ils rĂ©alisent une audience supĂ©rieure d’un tiers Ă  celle de France 2. La prĂ©sence de France 3 en rĂ©gions est un atout qui doit ĂȘtre bien maĂźtrisĂ© l’afflux d’images et d’informations est aussi un danger lorsque le journaliste oublie de prendre ses distances. L’audiovisuel public doit ĂȘtre exemplaire dans ce domaine et s’interroger sur la diffusion d’images violentes. Le troisiĂšme chantier, dont vous avez largement parlĂ©, consiste Ă  tirer le meilleur parti des nouveaux rĂ©seaux et services de tĂ©lĂ©communication. Les premiers rĂ©sultats sont d’ailleurs prometteurs. Les partenariats dĂ©veloppĂ©s avec les opĂ©rateurs ADSL en tĂ©lĂ©vision permettent de visualiser les antennes rĂ©gionales. Free est le premier opĂ©rateur Ă  avoir signĂ© un contrat avec France TĂ©lĂ©visions en ce sens 21 dĂ©crochages rĂ©gionaux sont aujourd’hui disponibles en simultanĂ© sur la freebox ». M. Pierre MĂ©haignerie, PrĂ©sident de la commission des Finances – Nous en sommes Ă  dix minutes. Mme la Rapporteure pour avis - Le quatriĂšme dĂ©fi est celui du coĂ»t budgĂ©taire des Ă©volutions technologiques, et le cinquiĂšme, celui de la mobilisation des ressources humaines, avec notamment la question du point d’indice. La dynamisation du personnel est un besoin. Il faut Ă©galement optimiser les relations entre les rĂ©dactions du groupe. Les premiers rĂ©sultats sont prometteurs. En conclusion, la commission des affaires culturelles a donnĂ© un avis favorable Ă  l’adoption de ces crĂ©dits. M. Pierre MĂ©haignerie, PrĂ©sident de la commission des Finances – Beaucoup de bonnes questions ont Ă©tĂ© posĂ©es mais je rappelle que, pour la qualitĂ© du dĂ©bat, le prĂ©sident de l’AssemblĂ©e nationale a souhaitĂ© que les interventions ne dĂ©passent pas cinq minutes. M. François Rochebloine, Rapporteur pour avis de la commission des Affaires Ă©trangĂšres – Je limiterai mon propos au volet extĂ©rieur de la mission mĂ©dias », Ă  savoir les programmes 115 et 116. Je vous informe que j’assure la prĂ©sidence d’une mission d’information créée au sein de la commission des affaires Ă©trangĂšres Ă  la demande du prĂ©sident Balladur, sur l’organisation et le financement de l’audiovisuel extĂ©rieur. L’éclatement institutionnel et la dispersion des moyens de l’audiovisuel extĂ©rieur nourrissent des critiques rĂ©currentes. Les rapports dĂ©noncent les changements de stratĂ©gies, l’absence d’instances de pilotage et la pluralitĂ© des structures, qui contrastent avec ce qui se passe chez nos voisins qui s’appuient sur un opĂ©rateur unique – la BBC au Royaume-Uni, la Deutsche Welle en Allemagne. La crĂ©ation d’un programme spĂ©cifique consacrĂ© Ă  l’audiovisuel extĂ©rieur constitue un progrĂšs. De quatre sources de financement, nous passons Ă  deux en 2007 la mission mĂ©dias » pour l’ensemble des opĂ©rateurs et la redevance pour le financement complĂ©mentaire de RFI. Quatre tutelles subsistent cependant Premier ministre, finances, culture et communication, affaires Ă©trangĂšres – dont on note l’absence ce matin. AuditionnĂ© au printemps 2003 par la mission d’information commune sur la CII, M. Aillagon voyait dans la crĂ©ation de la CFII une chance parce qu’elle permettra de rationaliser un paysage audiovisuel extĂ©rieur dĂ©sorganisĂ© et centrifuge ». Le choix de placer France 24 sous la tutelle du Premier ministre et de la doter d’un capital 50 % public et 50 % privĂ© ajoute Ă  la dĂ©sorganisation, d’autant que la multiplicitĂ© des tutelles ne s’accompagne d’aucune structure de coordination de nature Ă  assurer un pilotage stratĂ©gique. Dans son rapport 2002, la Cour des comptes dĂ©nonçait dĂ©jĂ  ce manque de coordination. Il existe pourtant un conseil de l’audiovisuel extĂ©rieur de la France – CAEF. Créé en 1989, il ne s’est pas rĂ©uni depuis 1996. Peut-on le rĂ©activer et quelles seraient ses compĂ©tences ? L’addition des montants consacrĂ©s aux programmes 115 et 116, auxquels il faut ajouter la contribution de la redevance Ă  RFI – et marginalement Ă  TV5 Ă  travers France TĂ©lĂ©visions – fait progresser le total des ressources publiques consacrĂ©es Ă  l’audiovisuel extĂ©rieur de 7,52 %. Mais cette progression, certes importante, est entiĂšrement concentrĂ©e sur France 24, et masque le fait que TV5 Monde et RFI connaissent depuis plusieurs annĂ©es une stagnation, sinon une rĂ©gression, de leurs moyens. Ainsi, pour la troisiĂšme annĂ©e consĂ©cutive, les ressources des opĂ©rateurs de l’audiovisuel extĂ©rieur, France 24 exceptĂ©e, connaissent une progression moyenne de 2,6 % seulement. Le fait que, RFI mis Ă  part, ces opĂ©rateurs ne bĂ©nĂ©ficient pas de la redevance entraĂźne une iniquitĂ© d’autant plus forte qu’ils sont soumis aux alĂ©as de la rĂ©gulation budgĂ©taire, ce qui freine toute stratĂ©gie de dĂ©veloppement pluriannuel. La rĂ©alitĂ©, que je dĂ©plore, c’est donc un audiovisuel public Ă  deux vitesses, au dĂ©triment de l’audiovisuel extĂ©rieur. Les chiffres parlent d’eux-mĂȘmes en 2007, RFO percevra 228,6 millions au titre de la redevance, et Arte 214,32 millions, mais le ministĂšre des affaires Ă©trangĂšres ne versera que 65,27 millions de subventions Ă  TV5, pour une couverture mondiale. En dĂ©pit de ce cadre budgĂ©taire trĂšs contraignant, la stratĂ©gie dĂ©ployĂ©e ces derniĂšres annĂ©es par TV5 est payante l’audience mondiale de la chaĂźne a continuĂ© de progresser de maniĂšre soutenue, le nombre de ses tĂ©lĂ©spectateurs ayant doublĂ© entre 2001 et 2005. TV5 doit avoir les moyens de maintenir son rang mondial et d’atteindre les objectifs fixĂ©s par sa tutelle. Elle ne doit donc pas subir une nouvelle fois la rĂ©gulation budgĂ©taire qui lui a Ă©tĂ© imposĂ©e en 2006. RFI a Ă©galement Ă©tĂ© victime de la rĂ©gulation budgĂ©taire, et l’équilibre de son budget n’a pu ĂȘtre atteint que grĂące Ă  une Ă©conomie rĂ©alisĂ©e lors de la renĂ©gociation du contrat ondes courtes » conclu avec TDF. RFI va mal, vous le savez, et l’exercice 2007 s’annonce difficile. Les efforts rĂ©alisĂ©s par la station n’ont pas les rĂ©sultats escomptĂ©s, en particulier en Europe. En rĂ©alitĂ©, au moment oĂč la plupart des radios peuvent ĂȘtre Ă©coutĂ©es n’importe oĂč dans le monde par le biais de l’internet. c’est la pertinence du concept de radio transnationale qui se pose. RFI est donc appelĂ©e Ă  dĂ©velopper une offre bi-mĂ©dia » multilingue, stratĂ©gie qui devrait faire l’objet d’un contrat d’objectif et de moyens avec l’État. J’en viens Ă  France 24, dont le lancement est prĂ©vu le 6 dĂ©cembre d’abord sur internet puis, trente-six heures plus tard, sur le cĂąble et sur le satellite. La chaĂźne Ă©mettra dans un premier temps sur deux canaux, pour l’un entiĂšrement en français et pour l’autre aux trois quarts en anglais. Chacun s’accorde sur la nĂ©cessitĂ©, pour la France, de disposer d’une chaĂźne d’information internationale, Ă  l’instar de BBC World, de CNN ou d’Aljazira; espĂ©rons seulement qu’il n’est pas trop tard. Le lancement de France 24 est un pari incertain, puisqu’une nouvelle chaĂźne a besoin d’une dizaine d’annĂ©es pour s’installer dans le paysage audiovisuel. Mais ce pari doit ĂȘtre gagnĂ©. Cela signifie avant tout rĂ©ussir Ă  faire coexister France 24 et TV5 Monde. France 24 est l’unique chaĂźne financĂ©e par les services du Premier ministre. La subvention prĂ©vue dans le projet de loi de finances pour 2007 est de 70 millions, mais le budget de la chaĂźne s’établira en rĂ©alitĂ© Ă  86 millions grĂące Ă  un report de crĂ©dits. À la diffĂ©rence des autres opĂ©rateurs de l’audiovisuel extĂ©rieur, France 24 bĂ©nĂ©ficie d’un rĂ©gime de faveur puisque la sociĂ©tĂ©, dĂ©tenue Ă  paritĂ© par TF1 et France TĂ©lĂ©visions, a signĂ© avec l’État une convention qui lui garantit jusqu’au 31 dĂ©cembre 2010 une subvention annuelle de 80 millions, valeur 2005. En application de la formule d’indexation prĂ©vue, 80 millions en 2005 valent automatiquement 86 millions en 2007, soit une augmentation de 7,5 %. On ne peut que se fĂ©liciter de cette visibilitĂ© budgĂ©taire, mais pourquoi l’État ne s’engage-t-il pas de la sorte avec TV5, CFI et RFI ? Il serait regrettable que la crĂ©ation de France 24 ajoute Ă  l’iniquitĂ© dont souffrent les opĂ©rateurs couverts par le programme 115. J’en viens aux questions que je souhaite poser au Gouvernement. Les deux premiĂšres concernent plus particuliĂšrement le ministre des affaires Ă©trangĂšres, mais peut-ĂȘtre pourrez-vous y rĂ©pondre, Monsieur le ministre. En premier lieu, quelles raisons s’opposent-elles au rattachement de France 24 au ministĂšre des affaires Ă©trangĂšres ? Par ailleurs, le Gouvernement serait-il favorable Ă  la rĂ©activation du CAEF et, si tel est le cas, avec quelles compĂ©tences et selon quel calendrier ? Ensuite, les opĂ©rateurs ne bĂ©nĂ©ficient pas tous de la redevance ; seriez-vous favorable Ă  ce que TV5 et France 24 en bĂ©nĂ©ficient au mĂȘme titre que Arte ? Pourriez-vous nous indiquer les grandes lignes et le calendrier d’application du contrat d’objectif et de moyens qui doit ĂȘtre conclu avec RFI ? Enfin, TV5 et France 24 sont financĂ©es par le contribuable et visibles en France, par diffusion satellitaire ; pourquoi ne seraient-elles pas disponibles gratuitement sur la TNT ? M. le Ministre – Je lirai le rapport que Mme BourraguĂ© a consacrĂ© Ă  France 3 avec un intĂ©rĂȘt particulier. La stratĂ©gie qui explique l’attrait de cette chaĂźne est double une programmation nationale particuliĂšrement rĂ©ussie et une proximitĂ© locale et rĂ©gionale. Ces deux volets ne peuvent ĂȘtre dissociĂ©s. D’autre part, il ne faut surtout pas concevoir France 3 comme une sorte de fĂ©dĂ©ration d’antennes rĂ©gionales sans concept global. Nous confirmerons cette stratĂ©gie dans le contrat d’objectif et de moyens. L’attrait de France 3, qui se traduit par une audience en forte progression, tient Ă  des programmes particuliĂšrement rĂ©ussis et Ă  des informations oĂč s’articulent le national et le rĂ©gional. Il faut poursuivre dans cette voie. Je souscris par ailleurs aux propos que vous avez tenus sur les filiĂšres de production. Mais si ce qui a Ă©tĂ© fait est trĂšs positif, nous devons aussi veiller Ă  ne pas dĂ©stabiliser la production indĂ©pendante française, notamment dans son volet fiction ». Un Ă©quilibre doit ĂȘtre respectĂ©, et nous en reparlerons lors de la nĂ©gociation du contrat d’objectif et de moyens. Je partage votre point de vue sur la nĂ©cessitĂ© d’articuler informations de proximitĂ© et stratĂ©gie nationale, spĂ©cificitĂ© qui assure la rĂ©ussite de France 3. Le fait que le Conseil des ministres siĂšge au moment oĂč vous vous rĂ©unissez rend difficile la prĂ©sence du ministre des affaires Ă©trangĂšres. Pour autant, nous travaillons Ă©videmment en Ă©troite collaboration sur l’ensemble des sujets que vous avez Ă©voquĂ©s, avec une parfaite identitĂ© de vues et je puis donc m’autoriser Ă  rĂ©pondre Ă  la place de M. Douste-Blazy. Si le budget de France 24 a Ă©tĂ© rattachĂ© aux services du Premier ministre, c’est que le lancement de toute nouvelle opĂ©ration suscite des craintes, chaque ministĂšre se demandant si les moyens nĂ©cessaires s’imputeront sur son budget. VoilĂ  pourquoi ce schĂ©ma a Ă©tĂ© retenu. M. le Rapporteur pour avis - Cela vaut pour la genĂšse du projet, mais qu’en sera-t-il de l’avenir ? M. le Ministre – Une Ă©volution est toujours possible, mais nous en sommes au lancement de la nouvelle chaĂźne, projet stratĂ©gique voulu par le PrĂ©sident de la RĂ©publique et par le Premier ministre. Il est exact que le CAEF ne s’est pas rĂ©uni rĂ©cemment. Il se rĂ©unira, car la concertation est toujours nĂ©cessaire. Je ferai le point Ă  ce sujet avec le Premier ministre et avec le ministre des affaires Ă©trangĂšres. La mission du Conseil est de mettre au point la stratĂ©gie de coordination des diffĂ©rentes entitĂ©s de l’audiovisuel extĂ©rieur. À cet Ă©gard, je rappelle que les missions de TV5 et de France 24 sont diffĂ©rentes. La vocation de TV5, c’est la diffusion de la langue française et la promotion de la francophonie. Le lancement de France 24 rĂ©pond Ă  d’autres objectifs. Vous avez Ă©voquĂ© un canal en français et un autre canal en langue anglaise ; vous auriez pu aussi Ă©voquer la diffusion en langue arabe, qui dĂ©butera en 2007, en mĂȘme temps d’ailleurs que les programmes en arabe de BBC world. L’enjeu est d’une extrĂȘme complexitĂ©, en ce qu’il suppose le recrutement de journalistes arabisants en nombre suffisant. M. le Rapporteur pour avis - Un budget de 86 millions devrait y suffire
 M. le Ministre – La dĂ©cision de lancer France 24 est une dĂ©cision stratĂ©gique le PrĂ©sident de la RĂ©publique et le Premier ministre souhaitent que la France dispose d’un outil de communication en langues Ă©trangĂšres Ă  diffusion mondiale. C’est pourquoi les programmes de la chaĂźne ont Ă©tĂ© conçus pour ĂȘtre interneto-compatibles ». Ils seront Ă©galement diffusĂ©s par le cĂąble et par le satellite. Je partage votre point de vue les synergies, dĂ©jĂ  prĂ©vues, entre RFI, l’AFP et France 24 doivent ĂȘtre renforcĂ©es. Il n’est pas prĂ©vu que TV5 et France 24 bĂ©nĂ©ficient d’une fraction du produit de la redevance. Pour TV5, ce serait en quelque sorte une redevance au carrĂ©, puisque la chaĂźne diffuse des Ă©missions provenant de chaĂźnes qui en ont elles-mĂȘmes bĂ©nĂ©ficiĂ©. VoilĂ  pourquoi, aujourd’hui, le financement de chaĂźnes par l’État est dĂ©connectĂ© de la redevance. Les chiffres sont, certes, toujours perfectibles, mais leur Ă©volution ne traduit aucun dĂ©sintĂ©rĂȘt de l’État pour Radio France Internationale, dont le rayonnement est exceptionnel et que nous soutenons. L’occasion m’est d’ailleurs donnĂ©e de rendre hommage Ă  ses Ă©quipes, d’une remarquable diversitĂ© rĂ©dactionnelle et linguistique. Nous travaillons Ă  l’élaboration d’un contrat d’objectif et de moyens pour RFI. M. le Rapporteur pour avis - Et qu’en est-il de la diffusion de TV5 et de France 24 sur la TNT ? M. le PrĂ©sident de la commission – Vous semblez estimer que les crĂ©dits manquent en tous domaines. Je vous suggĂšre donc, cher collĂšgue, de tenir une rĂ©union de coordination avec un certain membre de votre groupe qui ne cesse de rĂ©pĂ©ter que nous ne maĂźtrisons pas la dĂ©pense publique
 Sourires M. le Ministre – Les dĂ©penses que je vous propose correspondent Ă  une nĂ©cessitĂ© stratĂ©gique. M. le PrĂ©sident de la commission – Vous aurez compris, Monsieur le ministre, que ma remarque ne vous visait aucunement. M. le Rapporteur pour avis - La diffusion via la TNT n’est pas une question financiĂšre ! M. le Ministre – Comme je l’ai indiquĂ©, France 24 sera diffusĂ© par le cĂąble, par le satellite et par internet, mais la diffusion par la TNT n’est pas prĂ©vue. Des arbitrages ont dĂ» ĂȘtre rendus, l’objectif Ă©tant la couverture la plus large possible. C’est ce Ă  quoi nous travaillons. M. le PrĂ©sident de la commission – Je maintiens l’observation que j’ai faite et je constate que le rapporteur gĂ©nĂ©ral, prĂ©sent parmi nous, partage mon point de vue. On ne peut pratiquer le double langage. M. Jacques Myard – C’est ce que l’on appelle les partis charniĂšre
. M. le Ministre – Quoi qu’il en soit, chaque euro dĂ©pensĂ© pour la culture et la communication reprĂ©sente un investissement pour l’avenir de la France. De telles dĂ©penses, il convient donc d’user sans modĂ©ration. M. le PrĂ©sident de la commission – Une Ă©valuation critique me semble nĂ©cessaire dans tous les cas
 M. le Rapporteur spĂ©cial - J’ai supprimĂ© un certain nombre de questions pour aller plus vite, mais il en reste tout de mĂȘme quelques-unes. Quand signerez-vous, Monsieur le ministre, le contrat d’objectifs et de moyens entre Radio France et l’État ? Envisagez-vous, le cas Ă©chĂ©ant, de nĂ©gocier un avenant Ă  ce contrat, si l’environnement se modifie ? Envisagez-vous d’actualiser la dĂ©finition de la publicitĂ© autorisĂ©e sur les antennes de Radio France ? Il semble que le cadre rĂ©glementaire, qui date de 1975, ne soit plus d’actualitĂ©. S’agissant du COM d’Arte, sur quel calendrier de signatures pouvez-vous vous engager ? La rĂ©forme de la redevance est-elle un succĂšs ? Si l’on devait y toucher 
 M. Gilles Carrez, Rapporteur gĂ©nĂ©ral de la commission des Finances - À la baisse ? Sourires M. le Rapporteur spĂ©cial - 
Il ne faudrait le faire, me semble-t-il, qu’aprĂšs avoir Ă©puisĂ© les possibilitĂ©s de synergies et d’économies ouvertes par les COM et qu’aprĂšs avoir Ă©tĂ© au bout des remboursements de dĂ©grĂšvements ainsi que des possibilitĂ©s de perception sur des rĂ©cepteurs autres que les tĂ©lĂ©viseurs. S’agissant de la TNT, j’aimerais savoir oĂč en sont les accords transfrontaliers et si l’on atteindra bien, comme prĂ©vu, un taux de couverture de 85 % avant la fin de l’annĂ©e 2007. Quelles mesures seront-elles prises pour accroĂźtre le taux d’équipement des Français ? Comment fonctionne le fonds qui a Ă©tĂ© créé ? OĂč en est la rĂ©flexion sur la TNT outre-mer ? Pensez-vous rĂ©activer le Conseil de l’audiovisuel extĂ©rieur de la France ? Pour amĂ©liorer la vision du Parlement, je proposerai la crĂ©ation d’une annexe annuelle au projet de loi de finances sur l’activitĂ© et les moyens de l’audiovisuel extĂ©rieur. Pouvez-vous nous prĂ©ciser le calendrier du dĂ©ploiement de la radio numĂ©rique et nous dire oĂč en est la rĂ©allocation des frĂ©quences dans le cadre du projet FM 2006 ? Les aides Ă  la presse font encore le grand Ă©cart entre la mission Medias et la mission DĂ©veloppement et rĂ©gulation Ă©conomique, ce qui n’est pas normal. J’aimerais savoir pourquoi les crĂ©dits affectĂ©s au transport postal diminuent autant – moins 5,2 % – dans leur partie ministĂšre de l’industrie. Heureusement, ceux qui sont inscrits au ministĂšre de la Culture progressent de 6,3 %. Ils devraient ĂȘtre fondus ensemble dans le programme Presse. Concernant enfin la mission Avances Ă  l’audiovisuel public, quelles sont les raisons qui s’opposent Ă  un dĂ©coupage en autant de programmes que d’opĂ©rateurs, c’est-Ă -dire cinq ? M. le Ministre – Beaucoup de questions ! Le COM de Radio France sera signĂ© par le ministre du budget et moi-mĂȘme quand nous aurons recueilli les remarques et propositions de la commission des finances. Une procĂ©dure d’avenants Ă  ce COM paraĂźt logique et de bon sens en cas de modification de l’environnement de l’entreprise. Je connais les propositions de modifications du pĂ©rimĂštre de la publicitĂ© autorisĂ©e sur les antennes de Radio France formulĂ©es par le prĂ©sident Jean-Paul Cluzel, mais je ne veux pas dĂ©stabiliser le marchĂ© de la publicitĂ© au moment oĂč la publicitĂ© tĂ©lĂ©visĂ©e s’ouvre au secteur de la distribution. Je suis prudent sur ces questions. En tout Ă©tat de cause, la signature devrait avoir lieu au plus tard en dĂ©but d’annĂ©e prochaine. Je suis trĂšs heureux que vous Ă©voquiez la singularitĂ© d’Arte. C’est une source de fiertĂ©. Pour autant, je ne voudrais pas qu’Arte soit une sorte d’alibi culturel. C’est bien l’ensemble de l’audiovisuel public qui doit assumer une mission culturelle. Je souhaite que le COM d’Arte France soit signĂ© avant la fin de l’annĂ©e. En septembre, son prĂ©sident a lancĂ© le concept de mĂ©dia global et d’ Arte global ». C’est autour de l’approfondissement de ce concept que les discussions sont actuellement menĂ©es avec l’État. La stratĂ©gie future passe aussi par un approfondissement de la dimension europĂ©enne. J’aurai au dĂ©but de l’an prochain une rĂ©union de travail avec les ministres de la culture et de la communication des 25 pays de l’Union europĂ©enne ainsi qu’avec des reprĂ©sentants europĂ©ens de l’audiovisuel public. Pour toute entreprise audiovisuelle, je n’ai qu’une exigence que tout financement supplĂ©mentaire soit orientĂ© vers les programmes et vers le soutien Ă  la crĂ©ation et Ă  la diversitĂ©. S’agissant de la rĂ©forme de la redevance, les recettes pour 2005 ont Ă©tĂ© moindres que prĂ©vues malgrĂ© une augmentation de 1,3 % par rapport Ă  2004. Pour 2006, les nouvelles demandes d’exonĂ©rations pour non-dĂ©tention de tĂ©lĂ©viseurs provoqueront de nouveaux dĂ©grĂšvements. ParallĂšlement, le dispositif de contrĂŽle monte en puissance. Tout cela nous conduit Ă  ĂȘtre prudents dans nos prĂ©visions pour 2006 et 2007. C’est pourquoi nous avons dĂ©cidĂ© de reconduire en 2007 la mĂȘme somme qu’en 2006 2,3 milliards. Le bilan de la rĂ©forme est globalement positif. Sur le plan social, tout d’abord, dans la mesure oĂč un million de personnes supplĂ©mentaire – en majoritĂ© des personnes ĂągĂ©es et des Ă©rĂ©mistes – ont pu bĂ©nĂ©ficier d’une exonĂ©ration. L’adossement de la redevance Ă  la taxe d’habitation a en outre simplifiĂ© les choses pour le contribuable – en ce sens, cette rĂ©forme participe Ă  la nĂ©cessaire modernisation de l’administration. Il ne faut pas nier pour autant les difficultĂ©s que nous rencontrons, et tous les enseignements n’ayant pas encore Ă©tĂ© tirĂ©s, une nouvelle rĂ©forme ne paraĂźt pas d’actualitĂ©. Nous prĂ©voyons simplement un abondement, au budget gĂ©nĂ©ral, des recettes tirĂ©es de la redevance. L’important est de garantir Ă  l’audiovisuel public les ressources stables dont il a besoin. Je souhaite que la rĂ©flexion sur ce sujet se poursuive, notamment au regard de l’impact de la convergence des mĂ©dias, et des travaux de la mission conduite par Dominique Richard. Les comparaisons avec les autres pays europĂ©ens doivent Ă©galement nous Ă©clairer. S’agissant de la TNT, nous avons un objectif clair que l’ensemble de nos concitoyens bĂ©nĂ©ficie de cette rĂ©volution technologique, qui a triplĂ© le nombre de chaĂźnes gratuites. Depuis le 19 octobre, le taux de couverture est de 65 %. Nous voulons d’ici 2007 ouvrir les 115 sites programmĂ©s pour atteindre un taux de couverture de 80 %. Nous voulons aussi accĂ©lĂ©rer la mise en place de services complĂ©mentaires et lancer au plus tard au dĂ©but 2007 un bouquet satellitaire sans abonnement reprenant les chaĂźnes gratuites de la TNT. On pourra ainsi complĂ©ter la couverture terrestre dans toutes les zones oĂč cela est techniquement nĂ©cessaire. En ce qui concerne l’outre-mer, il me paraĂźt Ă©trange de mĂ©langer dans un mĂȘme agrĂ©gat les crĂ©dits de TV 5 et de RFO, et ceux de l’action extĂ©rieure de la France. Les objectifs ne sont pas les mĂȘmes. Pour l’audiovisuel outre-mer, l’objectif est politique assurer un Ă©gal accĂšs de tous, sur tout le territoire national, Ă  l’offre audiovisuelle. Mme Christine Boutin - TrĂšs bien ! M. le Ministre – S’agissant de la numĂ©risation et de la rĂ©allocation d’un certain nombre de frĂ©quences, je salue le travail considĂ©rable qui a Ă©tĂ© effectuĂ© par le conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel. Des frĂ©quences supplĂ©mentaires ont Ă©tĂ© trouvĂ©es, ce qui renforce d’autant la diversitĂ© de l’offre radiophonique française. La radio numĂ©rique est un enjeu important pour l’avenir du paysage audiovisuel français. La loi du 9 juillet 2004 a créé le cadre juridique. Une premiĂšre consultation a eu lieu, et le 3 octobre, le CSA en a lancĂ© une autre en vue d’un appel Ă  candidatures. De mon cĂŽtĂ©, j’ai dĂ©cidĂ©, avec le ministre dĂ©lĂ©guĂ© Ă  l’industrie, de recueillir l’avis des acteurs sur les normes techniques de diffusion. Je suis d’accord, Monsieur Martin-Lalande, sur l’idĂ©e de rassembler les informations concernant l’audiovisuel extĂ©rieur dans un document cohĂ©rent, qui pourrait ĂȘtre une annexe annuelle. Enfin, je n’ai pas d’objection au rapatriement, vers mon propre budget, des crĂ©dits du transport postal de la presse actuellement inscrits au budget de l’industrie. J’estime ĂȘtre un assez bon dĂ©fenseur de mes propres crĂ©dits
 M. le PrĂ©sident de la commission – Personne ne le contestera. M. le Ministre – J’aimerais d’ailleurs que mon budget soit proportionnel au nombre de sollicitations que je reçois de la part des dĂ©putĂ©s, le mardi et le mercredi ! Sourires M. le PrĂ©sident de la commission – D’oĂč la nĂ©cessitĂ© de mieux dĂ©limiter les compĂ©tences des uns et des autres. M. Didier Mathus – Il faut replacer l’examen de ce budget dans un contexte. Le paysage audiovisuel français est marquĂ©, quoi qu’on puisse en dire, par le trĂšs faible pluralisme des moyens d’information. Ceux-ci sont dĂ©tenus par un petit nombre de groupes trĂšs puissants – LagardĂšre, Dassault, Bouygues – qui ont tous des activitĂ©s dans d’autres secteurs. Nous sommes sans doute le seul pays dĂ©mocratique oĂč le patron d’un magazine peut ĂȘtre limogĂ© parce qu’une couverture a dĂ©plu au ministre de l’intĂ©rieur ! Cela crĂ©e un climat et un contexte bien particuliers, puisque ces groupes dominent Ă  eux seuls 70 % de l’information. Une telle faiblesse du pluralisme devrait ĂȘtre un sujet de prĂ©occupation pour l’État. Un second changement profond a rĂ©sultĂ© de la rĂ©volution numĂ©rique avec la dĂ©sagrĂ©gation des grands mĂ©dias fĂ©dĂ©rateurs et la possibilitĂ© de tailler sur mesure des mĂ©dias individuels – je pense notamment au dĂ©veloppement d’Internet, des blogs et des wikis. Les dĂ©fis qui attendent l’audiovisuel public sont donc colossaux ! Les ressources des groupes privĂ©s augmentent rĂ©guliĂšrement, et de façon spectaculaire, alors que le service public doit faire face aux rĂ©ductions budgĂ©taires. Je suis Ă©galement frappĂ© de l’incapacitĂ© rĂ©currente de l’État Ă  Ă©noncer clairement ses attentes, faute d’une formation et d’un cadre administratif et financier adaptĂ© et en dĂ©pit des sommes mises sur la table. Contrairement Ă  ce que beaucoup croyaient il y a vingt ans, l’audiovisuel public est essentiel peut-on faire confiance aux journaux de M. LagardĂšre pour nous informer sur Airbus et Ă  ceux de M. Dassault sur Rafale ? Nous avons besoin de mĂ©dias indiscutables et indĂ©pendants ! Sur des questions aussi essentielles que la santĂ© et l’environnement nous pourrons faire confiance aux mĂ©dias publics. HĂ©las, la crise d’identitĂ© actuelle n’est pas prĂšs de s’estomper. Par exemple, plus personne ne sait trĂšs bien Ă  quoi sert France 2 ! J’ajoute que les ressources budgĂ©taires croissent plus faiblement que les ressources propres, ce qui ne peut que conduire Ă  faire la part belle aux recettes publicitaires et Ă  l’audience, au dĂ©triment de l’indĂ©pendance de ces mĂ©dias et de leur esprit public. Ma question est donc la suivante quel est votre point de vue sur la loi que nous avons adoptĂ©e il y a quelques annĂ©es afin de dĂ©finir les parts respectives des recettes publicitaires et des ressources publiques de France TĂ©lĂ©visions. À quelle Ă©volution devons-nous nous attendre selon vous ? Il existe, en revanche, un domaine oĂč vous avez parfaitement rĂ©ussi le verrouillage et le noyautage de l’audiovisuel public. Dans les couloirs on ne croise plus que des anciens membres de cabinets ministĂ©riels et des gens qui ont proclamĂ© leur affinitĂ© avec l’UMP. Croyez-vous que ce soit bon au moment oĂč nous avons, plus que jamais, besoin d’un audiovisuel public indĂ©pendant ? Quel dommage, Ă©galement, de laisser Ă  l’abandon RFI dont le potentiel est pourtant extraordinaire. La radio est un mĂ©dia d’avenir, dont on connaĂźt dĂ©jĂ  la puissance en Afrique. Nous devons donc Ă©pauler RFI dans la pĂ©riode difficile qu’elle traverse. S’agissant de la crise de la presse Ă©crite, personne n’ignore les difficultĂ©s qui affectent LibĂ©ration, mais nous devons aussi nous soucier de L’HumanitĂ© et de France Soir – c’est tout un modĂšle traditionnel de la presse Ă©crite qui est aujourd’hui remis en cause. Notre dĂ©mocratie a besoin d’une information diversifiĂ©e, pluraliste et vivante. À cause du dĂ©veloppement des participations croisĂ©es, le nombre des acteurs de la presse Ă©crite a diminuĂ©. Face aux dĂ©fis technologiques de l’ùre numĂ©rique c’est un vĂ©ritable plan Marshall en faveur de la presse Ă©crite qu’il faudrait lancer. Faute de quoi, nous ne communiquerons bientĂŽt plus que par textos. Quelles sont, Monsieur le ministre, vos intentions en la matiĂšre. M. Patrick Braouezec – Je partage l’inquiĂ©tude de mon collĂšgue sur l’indĂ©pendance et la dĂ©ontologie des mĂ©dias. Je pense notamment Ă  la mĂ©diatisation Ă  outrance de certaines opĂ©rations policiĂšres sur les chaĂźnes publiques, mĂ©diatisation qui a suscitĂ© de trĂšs vives rĂ©actions de la part du service international des journalistes. À deux reprises, des journalistes ont Ă©tĂ© presque convoquĂ©s pour assister Ă  un dĂ©ploiement des forces de l’ordre digne d’une fiction tĂ©lĂ©visĂ©e. Comme l’ont soulignĂ© certains policiers, cette mĂ©diatisation peut ĂȘtre contre-productive et la campagne de 2002 a dĂ©montrĂ© tous les dangers d’une telle politique spectacle. Pouvez-vous nous indiquer votre position Ă  ce sujet, Monsieur le ministre ? J’en viens aux inquiĂ©tudes du syndicat national des journalistes de Radio France face aux nouvelles coupes budgĂ©taires qui ont Ă©tĂ© dĂ©cidĂ©es. Pour la premiĂšre fois, les journalistes de France Bleu, qui sont Ă©galement les correspondants de France Inter et de France Info, devront rĂ©duire le volume des informations ! Les reportages des radios locales reprĂ©sentent pourtant la moitiĂ© du temps d’antenne pour l’information. Quelle catastrophe pour une radio de service public pendant une annĂ©e Ă©lectorale ! Je prĂ©cise que cette situation a entraĂźnĂ©, le 26 septembre dernier, une grĂšve sans prĂ©cĂ©dent. J’en viens Ă  la TNT un des articles du projet de loi que vous nous prĂ©senterez bientĂŽt prĂ©voit l’attribution d’un bonus aux chaĂźnes historiques, M6, TF1 et Canal +, en Ă©change d’un abandon rapide de la frĂ©quence analogique. Un tel bonus n’est pas du goĂ»t des nouveaux entrants, AB Groupe, BFM TV, BollorĂ© et NRJ Group qui s’insurgent contre les risques de dĂ©stabilisation et de confiscation de la TNT. Les indĂ©pendants » ont d’ailleurs adressĂ© un courrier au Premier ministre, par lequel ils dĂ©noncent vivement le renforcement de la position dominante des trois groupes historiques ». En quoi une telle compensation pourrait-elle se justifier, Monsieur le ministre, puisque les extinctions de l’analogique ne seront validĂ©es que dans l’hypothĂšse oĂč l’équipement des foyers aura atteint une proportion telle que ces Ă©diteurs ne pĂątiront pas d’un passage au tout numĂ©rique », et puisqu’un canal bonus » a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© attribuĂ© aux trois chaĂźnes historiques lors du lancement de la TNT ? Les inquiĂ©tudes sont grandes, Monsieur le ministre, notamment dans ma circonscription oĂč de nombreux groupes sont implantĂ©s. M. Gilles Artigues - Je m’inquiĂšte, moi aussi, de la situation de la presse Ă©crite. Nous souhaiterions la tenue rapide d’états gĂ©nĂ©raux qui devraient Ă©galement concerner la presse rĂ©gionale, oĂč certains regroupements n’ont pas tenu bon. Dans ma ville de Saint-Étienne, l’imprimerie du groupe Le ProgrĂšs est appelĂ©e Ă  se fondre dans un ensemble plus vaste, sans doute au dĂ©triment de sa rĂ©activitĂ© et du service fourni aux lecteurs. J’ajoute que ce secteur est menacĂ© par l’arrivĂ©e sur le marchĂ© de quotidiens gratuits, d’abord Ă  Paris et maintenant en province. Qu’en pensez-vous Monsieur le ministre ? J’en viens Ă  la crĂ©ation de la CII pourquoi n’avez-vous pas saisi cette occasion pour rationaliser notre paysage audiovisuel extĂ©rieur, qu’il s’agisse de TV 5 Monde, de Canal France international ou de la radio en langue arabe de RMC, filiale de RFI ? Pourquoi ne pas avoir mutualisĂ© les moyens actuellement disponibles ? Il existe hĂ©las bien d’autres interrogations, notamment sur les zones non couvertes par la TNT ou par Radio bleu – je pense par exemple Ă  ma circonscription. Quelles mesures envisagez-vous, Monsieur le ministre, pour dĂ©velopper ces rĂ©seaux ? Sur quels critĂšres vous appuierez-vous ? Autre sujet d’inquiĂ©tude les centres de formation des apprentis, qui ne figurent pas dans ce projet de loi au motif qu’ils sont gĂ©rĂ©s par les chambres consulaires. Le groupe UDF a dĂ©posĂ© un amendement d’un montant modique et compatible avec votre volontĂ© de ne pas modifier l’assiette de la redevance. Je souhaiterais enfin Ă©voquer l’avenir des chaĂźnes indĂ©pendantes sur le cĂąble et le satellite qui ont Ă©tĂ© omises dans le projet de loi qui va venir en discussion devant le SĂ©nat. Vous avez prĂ©vu des avantages pour les opĂ©rateurs analogiques, oubliant que les chaĂźnes indĂ©pendantes placent elles aussi de grands espoirs dans les nouveaux modes de diffusion numĂ©rique. Elles n’ont pas Ă©tĂ© autorisĂ©es Ă  exploiter la TNT nationale et leurs chances d’accĂ©der Ă  la TNT locale sont minces. Il y va pourtant du maintien du pluralisme. M. Jacques Myard - Le français est un vecteur stratĂ©gique de notre influence, il est donc normal que nous nous appuyions sur lui ! Que pensez-vous donc de la diffusion par certains quotidiens nationaux de supplĂ©ments en langue Ă©trangĂšre ? Je pense notamment Ă  un grand quotidien national
 En avez-vous tenu compte dans l’attribution des aides Ă  la presse ? Je vois mal pourquoi les pouvoirs publics se feraient le relais d’une influence Ă©trangĂšre. M. Henri Nayrou - S’agissant des radios associatives le ministre a fait Ă©tat d’une augmentation de 1,45 % du fonds de soutien Ă  l’expression radiophonique mais est-il exact que le montant de la taxe sur laquelle le fonds est assis a crĂ» de 8 % par an ? OĂč est passĂ©e la diffĂ©rence ? La Cour des comptes n’a pas manquĂ© de pointer cette anomalie ! Est-il Ă©galement exact que cette taxe ait rapportĂ© 25,1 millions d’euros en 2005 alors que la commission chargĂ©e d’attribuer le fonds ne s’est prononcĂ©e que sur 24,75 millions d’euros et que le budget 2006 faisait Ă©tat de 23,75 millions d’euros ? Une fois encore, pourquoi une telle erreur ? Jugez-vous Ă©galement normal que les professionnels demandent de leur cĂŽtĂ© une enveloppe globale de 28 millions ? S’agissant de l’AFP quel est votre avis sur ses missions, ses moyens et son avenir ? Quel bilan dressez-vous du contrat d’objectifs et moyens signĂ© en novembre 2003 ? Comme nos collĂšgues l’ont dĂ©jĂ  soulignĂ©, la situation de la presse Ă©crite est dramatique – le rapport Le Ridant de 2004 l’a bien montrĂ© ! Les ventes des quotidiens ont chutĂ© de 2,1 % en 2005, et celles de magazines de 2,8 %. En 2006, la situation ne fait hĂ©las que se dĂ©grader encore selon le Financial Times, Internet est dĂ©jĂ  devenu le principal fournisseur d’informations pour les lecteurs europĂ©ens. En rĂ©ponse, vous n’avez Ă©noncĂ© que quelques mesures de prĂ©vention, et vous vous ĂȘtes bornĂ©s Ă  Ă©noncer des chiffres. Votre budget ne s’élĂšve qu’à 164,58 millions d’euros contre 172,33 l’an dernier, soit une baisse de 4,5 %. Vos mesures ne sont que des cautĂšres sur une jambe de bois ! RĂ©pondons en effet aux quatre questions des journalistes de base oĂč, quand, comment, pourquoi ? Pourquoi ? Tout le monde le sait ! Et je n’y reviendrai pas. Comment ? MalgrĂ© le sabotage actuel de ce levier de la dĂ©mocratie citoyenne, vous versez des aides Ă  des entreprises privĂ©es qui ne font pas du pluralisme et de la libertĂ© Ă©ditoriale l’une de leurs prioritĂ©s. De mĂȘme, oĂč est l’équilibre entre l’interventionnisme de l’État, ce tonneau des DanaĂŻdes, et le libĂ©ralisme qui incite Ă  la concentration et aux arrangements entre actionnaires aux dĂ©pens de l’intĂ©rĂȘt des lecteurs ? OĂč se trouvent les effets de levier ? Des aides ciblĂ©es ne seraient-elles pas plus efficaces qu’une aide gĂ©nĂ©rique Ă  la modernisation, vĂ©ritable supercherie budgĂ©taire ? Quant aux contrats d’objectifs et de moyens, personne ne sait de quoi demain sera fait ! M. le Ministre – L’action que nous menons en faveur de la presse, Monsieur Mathus, mĂ©rite mieux qu’une caricature sommaire. Notre objectif, c’est le pluralisme. D’une semaine sur l’autre, selon les circonstances, la concentration est crainte ou souhaitĂ©e. Je crois comprendre que vous la souhaitez
 Le pluralisme sous-tend toutes les mesures d’aide publique. Ainsi, la multiplication des chaĂźnes d’information avec la TNT est le fruit des dĂ©cisions prises par ce gouvernement. M. Didier Mathus - Vous n’y ĂȘtes pas pour grand-chose ! M. le Ministre – Si ! À l’époque, personne ne croyait que nous en serions capables, mais, Ă  la lumiĂšre des expĂ©riences effectuĂ©es Ă  l’étranger, nous avons permis le triplement du nombre de chaĂźnes gratuites. M. Didier Mathus – C’est la loi de 2000 qui l’a permis ! M. le Ministre – Aujourd’hui, les chaĂźnes d’information sont en pleine effervescence. Nous devons en anticiper les Ă©volutions, notamment numĂ©riques c’est pourquoi j’ai demandĂ© Ă  M. Tessier d’évaluer et, au besoin, de critiquer les modes d’aide actuels. Loin de toute incantation, nous agissons ! Le projet de loi porte prĂ©cisĂ©ment sur les ressources et les investissements nĂ©cessaires, notamment dans la presse Ă©crite. À l’ùre des nouvelles technologies, rien ne remplacera jamais la signature du journaliste c’est lui qui, en respectant la dĂ©ontologie, est le premier responsable de l’indĂ©pendance d’une publication et de la libertĂ© d’expression. M. le Rapporteur spĂ©cial – TrĂšs bien. M. le Ministre - Je suis choquĂ© que l’on puisse, en matiĂšre d’information, opposer l’audiovisuel public et privĂ©. Chaque rĂ©daction a son propre mode de fonctionnement ! Cela Ă©tant, l’audiovisuel public a certaines missions spĂ©cifiques. Vous nous reprochez d’ĂȘtre incapables d’en dĂ©finir la stratĂ©gie. Au contraire nous en accompagnons l’évolution et lui donnons les moyens d’accomplir sa mission. Quant Ă  l’affectation des uns ou des autres Ă  tel ou tel poste, la vie est faite de mouvement en politique comme dans les mĂ©dias, les gens changent de fonction au fil de leur carriĂšre. L’essentiel, c’est le respect de l’indĂ©pendance de chacun. Vous parlez de plan Marshall nous avons en effet considĂ©rablement augmentĂ© certaines aides. DĂšs que M. Tessier m’aura remis les conclusions de sa mission, j’ouvrirai une discussion avec l’ensemble de la presse, et le Parlement y sera associĂ©. Mon collĂšgue de Bercy ira dans les jours prochains Ă  Bruxelles dĂ©fendre la baisse de la taxation des services d’information en ligne. C’est une mesure essentielle qui doit permettre Ă  chaque rĂ©daction d’adapter sa diffusion et sa rĂ©munĂ©ration Ă  la rĂ©volution numĂ©rique. M. Braouezec Ă©voque le traitement de la violence dans les mĂ©dias. Chaque journaliste en est individuellement responsable. Il y a le besoin lĂ©gitime d’information, mais force est de reconnaĂźtre que l’image dĂ©clenche aussi parfois l’évĂ©nement. C’est Ă  chaque rĂ©daction de respecter les principes Ă©lĂ©mentaires de la dĂ©ontologie que je n’ai pas Ă  rappeler je ne suis pas un ministre de l’information ! M. Patrick Braouezec - Je faisais rĂ©fĂ©rence aux deux interventions policiĂšres qui ont eu lieu au petit matin aux TarterĂȘts et aux Mureaux en prĂ©sence des camĂ©ras, alors que les maires n’étaient mĂȘme pas avertis. M. le Ministre – Chacun sait bien ici que la prĂ©sence des camĂ©ras ne dĂ©pend pas de ceux qui sont filmĂ©s ! Les journalistes sont libres de traiter les sujets qu’ils veulent et de tendre leur micro en toute responsabilitĂ©. En matiĂšre de TNT, c’est notre action qui a permis la multiplication des nouveaux entrants. Toutes les chaĂźnes sont diffĂ©rentes et chacune a ses propres prioritĂ©s budgĂ©taires. Toutefois, des principes juridiques s’imposent. Ne dites donc pas n’importe quoi ! Si nous voulons ĂȘtre au rendez-vous du basculement numĂ©rique en 2011, certains ajustements sont nĂ©cessaires c’est pourquoi le Conseil d’État exige que des contreparties soient donnĂ©es aux chaĂźnes dont les durĂ©es d’autorisation sont rĂ©duites. Quant aux propositions des nouveaux entrants et des chaĂźnes indĂ©pendantes, je les examinerai avec attention. L’articulation de l’information nationale et locale est essentielle Ă  l’attractivitĂ© des chaĂźnes de Radio France, notamment France Bleue. M. Artigues Ă©voque les Ă©tats gĂ©nĂ©raux ; je choisis l’action et l’anticipation. Pour aboutir Ă  l’équilibre entre les chaĂźnes locales et nationales, une nĂ©gociation est en cours sur la modernisation sociale. Dans ce domaine complexe, c’est un prĂ©alable nĂ©cessaire Ă  toute restructuration ou concours direct. Si nous sommes prĂȘts Ă  examiner toute proposition, nous veillons Ă  agir. C’est pourquoi les crĂ©dits ont globalement augmentĂ©. Les baisses de certaines lignes ne sont dues qu’à la non-consommation constatĂ©e au cours des annĂ©es prĂ©cĂ©dentes. D’autre part nous anticipons l’évolution du comportement des consommateurs, en matiĂšre de journaux gratuits, par exemple, afin de savoir s’ils prĂ©cĂšdent un achat ou s’ils s’y substituent. Je rends d’ailleurs hommage Ă  toutes les rĂ©dactions, malgrĂ© les conflits qui peuvent exister entre les diffĂ©rents supports d’information. Vous parlez de mutualisation ; j’ai employĂ© le terme de synergie. Il est essentiel de crĂ©er des liens forts entre l’AFP, RFI et France 24. En outre, le rĂŽle des chaĂźnes indĂ©pendantes n’est pas Ă  nĂ©gliger – certaines d’entre elles seront d’ailleurs reçues au ministĂšre. Nous serons au rendez-vous de la haute dĂ©finition bien du retard a dĂ©jĂ  Ă©tĂ© rattrapĂ©. Comme pour le haut dĂ©bit, notre structure administrative est ici un atout. Le PrĂ©sident de la RĂ©publique a tracĂ© une feuille de route prĂ©cise, et notre calendrier est semblable Ă  celui de la Grande-Bretagne qui prĂ©pare son basculement pour 2012 nous fixons cette Ă©chĂ©ance Ă  novembre 2011. Le systĂšme est Ă©quivalent un basculement rĂ©gion par rĂ©gion, en fonction des constatations locales, l’objectif Ă©tant qu’il n’y ait pas de fracture numĂ©rique. J’étais il y a quelques jours en CorĂ©e, pays dont le systĂšme prĂ©sente des similitudes avec le nĂŽtre. En vue du basculement, la CorĂ©e a votĂ© une loi pour interdire progressivement la fabrication de postes analogiques. Cela a beaucoup choquĂ© les reprĂ©sentants de l’Ofcom, l’homologue britannique du CSA, avec qui j’ai eu l’occasion de m’en entretenir. J’en viens Ă  la question de Jacques Myard. Je n’ai pas Ă  dĂ©cider si un journal publie ou non un supplĂ©ment
 M. Jacques Myard – Il en a le droit. Je m’interroge simplement sur le fait que nous, contribuables, aidions Ă  la propagation d’une culture qui n’est pas la nĂŽtre. M. le Ministre – Il n’y a pas de raison de modifier le systĂšme des aides directes Ă  la presse parce qu’un journal, en l’occurrence Le Monde, dĂ©cide de publier en encart un extrait d’un journal Ă©tranger. M. Jacques Myard – Bien sĂ»r que si ! M. le PrĂ©sident de la commission – Tout le monde a bien compris la question de M. Myard, mais il n’est pas sĂ»r qu’elle soit partagĂ©e. M. Jacques Myard – On enfoncera le clou ! M. le Ministre – M. Nayrou a Ă©voquĂ© les radios associatives, auxquelles j’attache une grande importance. Le montant prĂ©visionnel du produit de la taxe alimentant le FSER est fixĂ© Ă  24,1 millions d’euros contre 23,75 millions en 2006. Il sera rĂ©parti entre prĂšs de 600 radios associatives qui remplissent une mission sociale de proximitĂ© et occupent une place particuliĂšre dans notre paysage radiophonique. J’ai assistĂ© Ă  leur congrĂšs il y a quelques semaines en Charente. Le principe de leur indĂ©pendance et de l’automaticitĂ© des aides est important. Une rĂ©forme a Ă©tĂ© conduite pour amĂ©liorer leur fonctionnement et optimiser l’utilisation de leurs ressources, en prĂ©servant l’équilibre gĂ©nĂ©ral du systĂšme. Un grand nombre de problĂšmes administratifs et financiers, comme les retards de versement, sont aujourd’hui rĂ©glĂ©s. J’en viens Ă  l’AFP. En dĂ©pit des dĂ©fis et des difficultĂ©s, l’AFP est l’une des trois premiĂšres agences de presse mondiales. C’est un atout pour le rayonnement de la France et pour le pluralisme de l’information dans le monde. Allez donc au siĂšge de l’AFP quand un Ă©vĂ©nement international important se produit, et regardez le nombre de journaux qui reprennent ses informations l’AFP est vĂ©ritablement une entreprise mondiale. Nous nous sommes engagĂ©s sur l’évolution de nos abonnements jusqu’en 2007 dans le cadre d’un COM qui a Ă©tĂ© signĂ© le 20 novembre 2003. Une nouvelle augmentation des abonnements de l’État Ă  l’AFP est prĂ©vue en 2007 ces derniers s’élĂšvent Ă  plus de 109 millions d’euros, soit une hausse de 1,6 %. L’AFP cherche Ă  se positionner sur les marchĂ©s de la vidĂ©o et du multimĂ©dia. Nous signerons donc un avenant. CautĂšre sur une jambe de bois, je vous laisse la responsabilitĂ© du propos. J’ai moi aussi la passion du pluralisme. Il y a des dĂ©fis, il faut agir avec subtilitĂ© pour rĂ©gler les problĂšmes. Je pense aux quotidiens Ă  faibles ressources publicitaires, comme La Croix ou L’HumanitĂ©, pour laquelle des dispositions spĂ©cifiques ont Ă©tĂ© prises. Des discussions sont en cours sur l’avenir de LibĂ©ration. C’est essentiel, car il s’agit du pluralisme de la presse. Si vous votez ce PLF, des mesures nouvelles pourront ĂȘtre consacrĂ©es Ă  des financements supplĂ©mentaires pour LibĂ©ration ou d’autres organes de presse. Sans interfĂ©rer dans les nĂ©gociations, je souhaite que l’avenir de ce quotidien soit assurĂ©. M. le Rapporteur pour avis - Depuis hier, la Roumanie, qui vient d’accueillir le sommet de la francophonie, ne reçoit plus TV5 monde. Il y a eu rupture de contrat avec le satellite Astra. Quel est votre sentiment lĂ -dessus ? M. le Ministre – Je vais voir comment y remĂ©dier. La diffusion extĂ©rieure s’opĂšre par le cĂąble et le satellite. Internet peut pallier des exclusions, mais ce n’est Ă©videmment pas une rĂ©ponse suffisante. Je vais regarder comment nous pouvons veiller Ă  la diffusion par satellite. M. le PrĂ©sident de la commission – Je remercie le ministre, et je salue l’effort personnel qui est le sien pour assurer les moyens du pluralisme. Je fais mien le souhait de mes collĂšgues de promouvoir les synergies, ainsi qu’une mutualisation des moyens et une simplification des structures partout oĂč cela est possible. Je remercie la presse, les rapporteurs et les intervenants. EXAMEN EN COMMISSION AprĂšs l’audition en commission Ă©largie de M. Renaud Donnedieu de Vabres, ministre de la Culture et de la communication, votre Commission a examinĂ©, au cours de sa sĂ©ance du 2 novembre 2006, les crĂ©dits de la mission MĂ©dias. Mission MĂ©dias Suivant l’avis favorable de votre Rapporteur spĂ©cial, elle a adoptĂ© ces crĂ©dits, et vous demande d’émettre un vote favorable Ă  leur adoption. * * * Article additionnel aprĂšs l’article 49 Votre Commission a ensuite examinĂ© un amendement II-96 de votre Rapporteur spĂ©cial, prĂ©voyant que le Gouvernement prĂ©sente, sous forme d’une annexe gĂ©nĂ©rale jaune », un rapport sur l’activitĂ© et les moyens de l’audiovisuel extĂ©rieur. Usant de la facultĂ© que l’article 38 du RĂšglement de l’AssemblĂ©e nationale confĂšre aux dĂ©putĂ©s d’assister aux rĂ©unions des commissions dont ils ne sont pas membres, M. HervĂ© de Charrette a rappelĂ© qu’il Ă©tait favorable Ă  ce qu’une cohĂ©rence soit trouvĂ©e au sujet de l’audiovisuel extĂ©rieur. PlutĂŽt que d’éclater les crĂ©dits entre deux programmes distincts, il serait souhaitable d’établir un rapprochement. En la matiĂšre, le seul bon remĂšde serait l’existence d’un seul programme, avec un seul ministre celui des Affaires Ă©trangĂšres. Si l’on peut comprendre que dans la phase initiale, il Ă©tait nĂ©cessaire d’afficher une volontĂ© politique forte, s’agissant de la chaĂźne d’information internationale et de l’audiovisuel extĂ©rieur, au bout de deux ans, cette distinction ne se justifie plus. L’adoption de l’amendement du Rapporteur spĂ©cial risque d’ĂȘtre un alibi pour maintenir cette prĂ©sentation des crĂ©dits. Votre Rapporteur spĂ©cial a rĂ©pondu que l’objet du document d’information en question dĂ©passe le problĂšme posĂ© par M. HervĂ© de Charrette. Ce document inclura d’autres Ă©lĂ©ments, comme le rĂŽle d’Arte ou celui de France TĂ©lĂ©visions. Votre Commission a adoptĂ© cet amendement. * * * Compte Avances Ă  l’audiovisuel public Votre Commission a examinĂ© un amendement II-97 de votre Rapporteur spĂ©cial, prĂ©voyant de diviser en cinq programmes les crĂ©dits de cette mission, pour que les parts de redevance affectĂ©es Ă  chaque sociĂ©tĂ© ressortent directement du vote du compte spĂ©cial. Votre Rapporteur spĂ©cial a soulignĂ© la nĂ©cessitĂ©, conforme Ă  la LOLF, que la mission ne se contente pas de distinguer l’affectation de la redevance entre tĂ©lĂ©vision, radio et patrimoine audiovisuel, mais que cette distinction soit opĂ©rĂ©e au profit de chacun des opĂ©rateurs financĂ©s par la redevance. Cela permettra de se passer du vote d’un article de seconde partie en loi de finances, vote redondant avec celui sur le compte. Votre Commission a adoptĂ© cet amendement. Puis, elle a adoptĂ© les crĂ©dits de la mission Avances Ă  l’audiovisuel public, ainsi modifiĂ©s, et vous demande d’émettre un vote favorable Ă  leur adoption. * * * Article 63 RĂ©partition, au profit des organismes de l’audiovisuel public, des ressources de la redevance audiovisuelle Texte du projet de loi Pour l’exercice 2007, la rĂ©partition entre les organismes du service public de la communication audiovisuelle, des recettes prĂ©visionnelles, hors taxe sur la valeur ajoutĂ©e, de la redevance audiovisuelle, est Ă©tablie comme suit France TĂ©lĂ©visions 1 879,52 millions € Radio France 508,20 millions € Radio France internationale 56,53 millions € ARTE-France 209,92 millions € Institut national de l’audiovisuel 78,80 millions € TOTAL 2 732,97 millions € ExposĂ© des motifs Le prĂ©sent article a pour objet de dĂ©finir, pour l’annĂ©e 2007, la rĂ©partition entre les organismes du service public audiovisuel des ressources prĂ©visionnelles de redevance audiovisuelle, en application de l’article 36 de la loi organique relative aux lois de finances. Observations et dĂ©cision de la Commission Suivant l’avis favorable de votre Rapporteur spĂ©cial, votre Commission a adoptĂ© cet article sans modification, et vous demande d’émettre un vote favorable Ă  son adoption. * * * AprĂšs l’article 63 Votre Commission a rejetĂ© un amendement de M. Didier Migaud prĂ©voyant que l’avis d’imposition de la redevance est Ă©mis avec celui de l’impĂŽt sur le revenu, votre Rapporteur spĂ©cial s’étant dĂ©clarĂ© dĂ©favorable. Articles additionnels aprĂšs l’article 63 Votre Commission a examinĂ© un amendement II-93 de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, prĂ©voyant d’exonĂ©rer du paiement de la redevance les centres de formation des apprentis. Votre Rapporteur spĂ©cial tout en dĂ©clarant comprendre la logique de cet amendement, a rappelĂ© qu’il existe une diffĂ©rence statutaire entre les centres de formation d’apprentis CFA et les Ă©tablissements scolaires. Par ailleurs, le code du travail prĂ©voit dĂ©jĂ  une possibilitĂ© d’exonĂ©ration, quand les CFA ont conclu une convention avec un ou plusieurs Ă©tablissements d’enseignement. Le PrĂ©sident Pierre MĂ©haignerie, tout en comprenant cet argument, a rappelĂ© que les centres de formation d’apprentis souffrent d’un vrai dĂ©ficit de considĂ©ration. MĂȘme s’il ne convient pas d’étendre, par principe, le champ des exonĂ©rations, il s’est dĂ©clarĂ©, compte tenu de la situation particuliĂšre de l’apprentissage, favorable, Ă  titre personnel, Ă  cet amendement. Votre Commission a alors adoptĂ© cet amendement. Puis, elle a examinĂ© un amendement II-98 de votre Rapporteur spĂ©cial, prĂ©voyant que les avenants aux contrats d’objectifs et de moyens seront transmis systĂ©matiquement au Parlement, dans les mĂȘmes conditions que les contrats eux-mĂȘmes. Votre Rapporteur spĂ©cial a soulignĂ© que l’exemple de France TĂ©lĂ©visions, oĂč des modifications lourdes du contrat d’objectifs et de moyens sont intervenues, montre tout l’intĂ©rĂȘt de la transmission des avenants aux contrats, Ă  des fins de contrĂŽle parlementaire. Votre Commission a adoptĂ© cet amendement. Votre Rapporteur spĂ©cial a alors prĂ©sentĂ© le projet de contrat d’objectifs et de moyens COM entre Radio France et l’État, transmis aux fins d’avis. Ce projet de contrat pour la pĂ©riode 2006–2009 a Ă©tĂ© approuvĂ© par le conseil d’administration de l’entreprise le 12 juillet dernier. Ce document, qui n’est peut-ĂȘtre pas parfait, ne mĂ©rite pas de reproches forts. Pour autant, il convient de considĂ©rer que – ce COM a bien Ă©tĂ© transmis aux commissions compĂ©tentes des deux assemblĂ©es, conformĂ©ment Ă  la loi ; – il convient aux deux parties signataires lesquelles n’attendent que l’avis de la Commission pour le signer ; – s’il n’est pas rĂ©volutionnaire, il a le mĂ©rite d’exister, six ans aprĂšs le vote de la loi et comporte des orientations tout Ă  fait positives en termes de service public et de gestion d’entreprise ; – il permet de trouver une solution acceptable pour le financement des lourds travaux de la Maison de la Radio, qui ne pĂ©nalise pas le dĂ©veloppement de l’entreprise et rend prĂ©visible les besoins de financements publics Ă  horizon 2013 ; – Radio France s’y engage Ă  moderniser sa politique sociale Ă  effectifs constants sur la durĂ©e du COM ; – il comporte enfin des indicateurs de performance, certes perfectibles, et parfois un peu littĂ©raires, mais qui sont sĂ©rieux et s’articulent bien avec ceux figurant dans le projet annuel de performances de la mission Avances Ă  l’audiovisuel public. Votre Commission a ensuite donnĂ© un avis favorable au contrat d’objectifs et de moyens de Radio-France. * * * AMENDEMENTS ADOPTÉS PAR LA COMMISSION AprĂšs l’article 49 Amendement II-96 rĂ©sentĂ© par M. Patrice Martin-Lalande, Rapporteur spĂ©cial au nom de la commission des Finances InsĂ©rer l’article suivant Le Gouvernement prĂ©sente, en annexe gĂ©nĂ©rale au projet de loi de finances de l’annĂ©e, un rapport annuel sur l’activitĂ© et les moyens de l’audiovisuel extĂ©rieur. Ce rapport retrace les crĂ©dits publics affectĂ©s, directement ou indirectement, Ă  des opĂ©rateurs audiovisuels et comporte une information actualisĂ©e sur les synergies mises en Ɠuvre entre les diffĂ©rents intervenants et sur le positionnement des tutelles de chaque entreprise. Article 36 État D Mission "Avances Ă  l’audiovisuel public" Amendement II-97 prĂ©sentĂ© par M. Patrice Martin-Lalande, Rapporteur spĂ©cial au nom de la commission des Finances I. Supprimer les programmes TĂ©lĂ©vision », Radio » et Patrimoine audiovisuel » II. CrĂ©er les cinq programmes suivants France TĂ©lĂ©visions », ARTE-France », Radio France », Radio France internationale » et Institut national de l’audiovisuel » III. En consĂ©quence, modifier ainsi les autorisations d’engagement et les crĂ©dits de paiement en euros Programmes + - TĂ©lĂ©vision Radio Patrimoine audiovisuel France TĂ©lĂ©visions nouveau ARTE–France nouveau Radio France nouveau Radio France internationale nouveau Institut national de l’audiovisuel nouveau TOTAUX SOLDE 0 EXPOSÉ SOMMAIRE L’an dernier, le compte de concours financiers Avances Ă  l’audiovisuel public Ă©tait prĂ©sentĂ© au Parlement sous la forme d’une mission monoprogramme, et ce en violation de la lettre comme de l’esprit de la LOLF. À la suite des critiques formulĂ©es par le Rapporteur spĂ©cial de la commission des Finances et de la dĂ©cision du Conseil constitutionnel du 29 dĂ©cembre 2005, cette mission est dĂ©sormais constituĂ©e de trois programmes regroupant les cinq opĂ©rateurs financĂ©s par le compte de concours financier le programme TĂ©lĂ©vision rĂ©unissant France TĂ©lĂ©visions et ARTE France, le programme Radio rĂ©unissant Radio France et Radio France internationale et le programme Patrimoine audiovisuel pour l’Institut national de l’audiovisuel. Si cette situation est dĂ©jĂ  plus satisfaisante, la logique de la LOLF doit ĂȘtre totalement respectĂ©e, chaque opĂ©rateur bĂ©nĂ©ficiant d’une affectation du produit de la redevance devant disposer d’un programme distinct. Cet amendement vise donc Ă  structurer la mission en autant de programmes que d’opĂ©rateurs c’est-Ă -dire cinq, et ce pour deux raisons principales – d’une part, un tel dĂ©coupage permettrait de se passer du vote, redondant avec celui sur le compte de concours financiers, de l’article de deuxiĂšme partie procĂ©dant Ă  la rĂ©partition du produit de la redevance entre les cinq opĂ©rateurs Ă  savoir l’article 63. En effet, les nouvelles possibilitĂ©s d’amendement ouvertes par l’article 47 de la LOLF rendent cet article superflu ; – d’autre part, il permettrait d’inciter Ă  une harmonisation poussĂ©e entre les dispositifs de performance de chaque programme et les contrats d’objectifs et de moyens que chaque opĂ©rateur doit, selon l’article 53 de la loi du 30 septembre 1986 modifiĂ©e, relative Ă  la libertĂ© de communication, signer avec l’État. Dans une perspective de revalorisation de cet outil indispensable que constitue le contrat, l’existence d’un programme par opĂ©rateur doit permettre d’établir un lien direct entre celui-ci et le projet annuel de performances prĂ©sentĂ© chaque annĂ©e au Parlement lors de l’examen du projet de loi de finances. La mission Avances aux organismes de l’audiovisuel public devrait, en consĂ©quence, ĂȘtre constituĂ©e d’un programme pour France TĂ©lĂ©visions, un pour Radio France, un pour Arte-France, un pour Radio France Internationale et enfin un programme pour l’Institut national de l’audiovisuel. AprĂšs l’article 63 Amendement II-98 prĂ©sentĂ© par M. Patrice Martin-Lalande, Rapporteur spĂ©cial au nom de la commission des Finances InsĂ©rer l’article suivant Dans la premiĂšre phrase de l’avant-dernier alinĂ©a du I de l’article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative Ă  la libertĂ© de communication, aprĂšs les mots contrats d’objectifs et de moyens », sont insĂ©rĂ©s les mots ainsi que les Ă©ventuels avenants Ă  ces contrats ». Amendement II-93 prĂ©sentĂ© par Mme Chantal BourraguĂ©, rapporteure pour avis au nom de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales des crĂ©dits des mĂ©dias, MM. Dominique Richard et Gilles Artigues InsĂ©rer l’article suivant Dans le d du 2° de l’article 1605 ter du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts, aprĂšs les mots l’État », sont insĂ©rĂ©s les mots ainsi que par les centres de formation des apprentis ». La perte de recettes pour les organismes publics de l’audiovisuel est compensĂ©e Ă  due concurrence par la crĂ©ation d’une taxe additionnelle aux droits visĂ©s aux articles 575 et 575 A du code gĂ©nĂ©ral des impĂŽts. LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES I.– Gouvernement Services du Premier ministre M. HervĂ© DIGNE, conseiller pour les mĂ©dias au cabinet du Premier ministre M. Patrick RAUDE, directeur du dĂ©veloppement des mĂ©dias DDM Mme Emmanuelle BENSIMON, sous–directrice de la communication audiovisuelle Ă  la DDM M. François CASADEBAIG, chef du bureau du rĂ©gime Ă©conomique de la presse et des aides publiques Ă  la DDM MinistĂšre des Affaires Ă©trangĂšres M. Philippe ÉTIENNE, directeur gĂ©nĂ©ral de la coopĂ©ration internationale et du dĂ©veloppement M. Richard BOIDIN, directeur de l’audiovisuel extĂ©rieur et des techniques de communication MinistĂšre de l’Économie, des finances et de l’industrie M. Nicolas CALCOEN, directeur–adjoint du cabinet du ministre M. Romain DUBOIS, conseiller technique au cabinet du ministre Mme Françoise MIQUEL, chef de la mission de contrĂŽle gĂ©nĂ©ral Ă©conomique et financier des sociĂ©tĂ©s du service public de la radio et de la tĂ©lĂ©vision M. Bruno BÉZARD, directeur gĂ©nĂ©ral–adjoint de l’Agence des participations de l’État APE M. SĂ©bastien MOYNOT, chef du bureau audiovisuel de l’APE M. Karim MAATOUG, chargĂ© d’affaires Ă  l’APE M. Philippe RAMBAL, responsable de la mission commune accueil aux directions gĂ©nĂ©rales des impĂŽts et de la comptabilitĂ© publique MinistĂšre dĂ©lĂ©guĂ© Ă  l’Industrie M. François LOOS, ministre dĂ©lĂ©guĂ© Ă  l’Industrie M. Matthieu GALLET, conseiller technique au cabinet du ministre dĂ©lĂ©guĂ© M. Ludovic BERTHELOT, chef du bureau Audiovisuel et multimĂ©dia Ă  la direction gĂ©nĂ©rale des entreprises MinistĂšre de la Culture et de la communication M. Renaud DONNEDIEU de VABRES, ministre de la Culture et de la communication Mme Laurence FRANCESCHINI, directrice–adjointe du cabinet du ministre Mme Karine BLOUET, conseillĂšre technique au cabinet du ministre M. Fayçal DAOUADJI, conseiller parlementaire MinistĂšre dĂ©lĂ©guĂ© Ă  l’AmĂ©nagement du territoire M. Christian ESTROSI, ministre dĂ©lĂ©guĂ© II.– AutoritĂ©s de contrĂŽle Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel CSA M. Dominique BAUDIS, prĂ©sident M. Francis BECK, conseiller Mme Marie-Laure DENIS, conseillĂšre M. Philippe LEVRIER, conseiller M. Denis RAPONE, directeur gĂ©nĂ©ral M. Manuel VAZQUEZ, directeur gĂ©nĂ©ral–adjoint M. Antoine GRÉZAUD, directeur de cabinet du prĂ©sident AutoritĂ© de rĂ©gulation des communications Ă©lectroniques et des postes ARCEP M. Jacques DOUFFIAGUES, membre du collĂšge Mme Gabrielle GAUTHEY, membre du collĂšge M. JĂ©rĂŽme ROUSSEAU, chef du service opĂ©rateurs et rĂ©gulation des ressources rares III.– Audiovisuel Groupe France TĂ©lĂ©visions M. Patrick de CAROLIS, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral M. Damien CUIER, directeur de cabinet du prĂ©sident M. Thierry BERT, directeur gĂ©nĂ©ral chargĂ© de la gestion, des finances et des ressources humaines M. RenĂ© MAISONNEUVE, directeur des ressources humaines M. Patrice DUHAMEL, directeur gĂ©nĂ©ral chargĂ© des antennes, du dĂ©veloppement et de la diversification M. Philippe BAUDILLON, directeur gĂ©nĂ©ral de France 2 Mme Maria SANCHEZ PEREZ, directrice financiĂšre de France 2 Mme GeneviĂšve GIARD, directrice gĂ©nĂ©rale de France 3 M. Roger GICQUEL, directeur gĂ©nĂ©ral–adjoint de France 3 M. Alain VAUTHIER, directeur de l’antenne de France 3 Mme Hayet ZEGGAR, directrice gĂ©nĂ©rale de France 4 M. Patrick COHEN, directeur financier de France 4 M. Claude-Yves ROBIN, directeur gĂ©nĂ©ral de France 5 M. Kim PHAM, directeur gĂ©nĂ©ral–adjoint de France 5 M. François GUILBEAU, directeur gĂ©nĂ©ral de RFO M. Yves GARNIER, directeur gĂ©nĂ©ral–adjoint de RFO Mme Anne GRAND D’ESNON, directrice des relations institutionnelles M. Philippe SANTINI, directeur gĂ©nĂ©ral de France TĂ©lĂ©visions PublicitĂ© Arte–France M. JĂ©rĂŽme CLÉMENT, prĂ©sident M. Jean ROZAT, directeur gĂ©nĂ©ral M. Fabrice REBOIS, directeur gĂ©nĂ©ral–adjoint Mme Muriel GUIDONI, dĂ©lĂ©guĂ©e gĂ©nĂ©rale aux relations institutionnelles Radio France M. Jean-Paul CLUZEL, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral M. Martin AJDARI, directeur gĂ©nĂ©ral dĂ©lĂ©guĂ© Institut national de l’audiovisuel INA M. Emmanuel HOOG, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral M. Max BENOIT, directeur dĂ©lĂ©guĂ© M. Olivier LOMBARDI, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral La ChaĂźne Parlementaire – AssemblĂ©e nationale M. Richard MICHEL, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral M. Claude BELLEI, rĂ©dacteur en chef Mme Eve-Lise BLANC-DELEUZE, secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale Groupe TF1 M. Patrick LE LAY, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral M. Jean-Michel COUNILLON, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral Groupe Canal Plus M. Bertrand MEHEUT, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral M. Alexandre BOMPARD, directeur des affaires publiques et des sports M. Olivier ZEGNA-RATA, directeur des relations extĂ©rieures Groupe M6 M. Nicolas de TAVERNOST, prĂ©sident du directoire M. Gilles BOYER, directeur des relations institutionnelles Groupe AB M. FrĂ©dĂ©ric LUSSATO, directeur dĂ©lĂ©guĂ© Groupe RTL M. RĂ©my SAUTER, prĂ©side–directeur gĂ©nĂ©ral M. Charles-Emmanuel BON, directeur du dĂ©veloppement M. Richard ARZT, journaliste Groupe NRJ M. Marc PALLAIN, prĂ©sident du directoire IV.– Audiovisuel extĂ©rieur TV5 Monde M. François BONNEMAIN, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral Radio France internationale RFI M. Antoine SCHWARTZ, prĂ©sident M. Jean-Claude BENOIST, secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral France 24 M. Alain de POUZILHAC, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral M. Jean–Yves BONSERGENT, directeur gĂ©nĂ©ral M. David–HervĂ© BOUTIN, directeur des relations extĂ©rieures V.– Presse Ă©crite M. Patrick ANDRÉ, directeur dĂ©lĂ©guĂ© des Messageries lyonnaises de presse M. Nicolas BEYTOUT, directeur de la rĂ©daction du Figaro M. Denis BOUCHEZ, directeur du Syndicat de la presse quotidienne nationale M. Michel COMBOUL, prĂ©sident du Syndicat de la presse quotidienne rĂ©gionale Mme Anne-Marie COUDERC, prĂ©sidente du Syndicat de la presse magazine d’information, directrice gĂ©nĂ©rale de la presse magazine France Hachette Filipacchi associĂ©s M. Philippe DI MARZIO, directeur de l’Union nationale des diffuseurs de presse M. Jean-Baptiste GIRAUD, prĂ©sident et directeur de la rĂ©daction d’Economie Matin Mme Haude d’HARCOURT, chargĂ©e des relations avec les pouvoirs publics au Syndicat de la presse quotidienne rĂ©gionale M. Bruno HOCQUART de TURTOT, directeur gĂ©nĂ©ral du Syndicat de la presse quotidienne rĂ©gionale M. Pierre LOUETTE, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral de l’Agence France–Presse M. Antoine LUDIER, directeur administratif et financier de l’Agence France–Presse Mme Pascale MARIE, directrice du Syndicat de la presse magazine d’information M. Francis MOREL, prĂ©sident du Syndicat de la presse quotidienne nationale, directeur gĂ©nĂ©ral du Figaro M. RĂ©my PFLIMLIN, directeur gĂ©nĂ©ral des Nouvelles messageries de la presse parisienne M. GĂ©rard PROUST, prĂ©sident de l’Union nationale des diffuseurs de presse VI.– Autres entreprises du secteur des mĂ©dias M. Thierry BERNARD, directeur de la communication de TDF M. Giuliano BERRETTA, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral de Eutelsat Communications M. Yves BLANC, directeur de la stratĂ©gie et des relations institutionnelles de Eutelsat Communications M. Jean-Paul BRILLAUD, directeur gĂ©nĂ©ral dĂ©lĂ©guĂ© de Eutelsat Communications M. Michel COMBES, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral de TDF M. Jean-Philippe COURTOIS, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral de Microsoft International M. Jean-François DUPAQUIER, directeur de TV Val d’Oise M. Yves GUILLEMOT, prĂ©sident–directeur gĂ©nĂ©ral d’Ubisoft M. Didier HICK, vice–prĂ©sident du groupe Thomson, accompagne de M. Jean-Luc ARCHAMBAULT M. Arnaud LACAUSSY, directeur de la rĂ©glementation et des Ă©tudes Ă©conomiques de SFR M. David LACOMBLED, directeur des relations institutionnelles de France TĂ©lĂ©com M. Éric LENSEIGNE, vice-prĂ©sident d’Alcatel, accompagnĂ© d’Alban de LOUVENCOURT M. Jean-Baptiste MARTIN et Mme Marie MITTERRAND, fondateurs de CasaDei Productions M. Nick STUBBS, managing director d’Astra Marketing France M. Antoine VILLENEUVE, directeur gĂ©nĂ©ral de la ChaĂźne jeunesse VII.– Autres personnalitĂ©s M. Louis de BROISSIA, sĂ©nateur de la CĂŽte d’Or M. Gilles CRÉMILLEUX, prĂ©sident du Syndicat professionnel des tĂ©lĂ©visions locales hertziennes M. Alain DELABY, directeur du cabinet OPERMIND, et M. Didier FOURNIER, directeur de GIP RECIA, chargĂ©s d’une Ă©tude sur la tĂ©lĂ©vision locale par le conseil rĂ©gional du Centre Mme Isabelle FALQUE-PIERROTIN, prĂ©sidente du Forum des droits de l’internet M. Jean-Michel HUBERT, prĂ©sident du Conseil stratĂ©gique des technologies de l’information M. Jean-Louis MISSIKA, auteur de La fin de la tĂ©lĂ©vision M. HervĂ© PONY, dĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral du Syndicat national de l’édition phonographique M. Jacques PESKINE, dĂ©lĂ©guĂ© gĂ©nĂ©ral de l’Union syndicale des producteurs de l’audiovisuel M. JoĂ«l de ROSNAY, prĂ©sident exĂ©cutif de Biotics International, auteur de La RĂ©volte du pronĂ©tariat Des mass mĂ©dia aux mĂ©dia des masses M. François SCELLIER, dĂ©putĂ© et prĂ©sident du conseil gĂ©nĂ©ral du Val d’Oise M. Franck SOLOVEICIK, prĂ©sident du syndicat des entreprises de la distribution des programmes audiovisuels * * *© AssemblĂ©e nationale 1 Voir le rapport d’information de MM. Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard sur la mise en Ɠuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er aoĂ»t 2001 relative aux lois de finances Doc. AN n° 3165, 15 juin 2006. 2 Voir le rapport d’information de MM. Michel Bouvard, Didier Migaud, Charles de Courson et Jean-Pierre Brard sur la mise en Ɠuvre de la loi organique n° 2001-692 du 1er aoĂ»t 2001 relative aux lois de finances Doc. AN n° 1554, mai 2004.3 Voir le commentaire de cet article dans le rapport gĂ©nĂ©ral de M. Gilles Carrez, Rapporteur gĂ©nĂ©ral de votre commission des Finances Doc. AN n° 3363, 12 octobre 2006, Tome II pages 109 Ă  124. 5 Dans le prĂ©sent projet de loi, il s’agit de l’article 63, rattachĂ© Ă  ce rapport spĂ©cial au titre de la mission Avances Ă  l’audiovisuel public. 6 Rapport d’information prĂ©sentĂ© par M. Patrice Martin-Lalande, RĂ©former la redevance, pour assurer le financement de l’audiovisuel français » Doc. AN n° 1019, juillet 2003.7 Une personne exonĂ©rĂ©e n’est pas assujettie Ă  l’impĂŽt, aucun rĂŽle n’est Ă©mis. Une personne dĂ©grevĂ©e voit son impĂŽt automatiquement pris en charge par l’État et un rĂŽle est Ă©mis. 8 Un million de foyers modestes qui payaient la redevance en 2004 ne l’ont plus payĂ© grĂące Ă  la rĂ©forme. Pour une prĂ©sentation complĂšte du dispositif de dĂ©grĂšvement, voir le rapport gĂ©nĂ©ral de M. Gilles Carrez sur le projet de loi de finances pour 2007 Doc. AN n° 3363, 12 octobre 2006, Tome II pages 317 Ă  320. 9 Se rĂ©fĂ©rer au rapport gĂ©nĂ©ral de M. Gilles Carrez, Rapporteur gĂ©nĂ©ral de votre commission des Finances, sur le projet de loi de finances rectificative pour 2005 Doc. AN n° 2720, dĂ©cembre 2005, pages 312 Ă  321. 10 Les articles des rĂŽles de taxe d’habitation et de redevance audiovisuelle ont Ă©tĂ© au titre de 2005 au nombre de dont pour la France mĂ©tropolitaine et pour les dĂ©partements d’outre-mer. S’agissant des entreprises, le dĂ©nombrement effectuĂ© porte sur celles ayant dĂ©clarĂ© au cours de la pĂ©riode considĂ©rĂ©e un montant de redevance audiovisuelle. Ce chiffre s’établit Ă  prĂšs de pour l’annĂ©e 2005, dont prĂšs de professionnels domiciliĂ©s dans les dĂ©partements d’outre-mer. 11 Cette prĂ©vision intĂšgre les mĂȘmes paramĂštres que ceux constatĂ©s pour 2006 les dĂ©grĂšvements, les contrĂŽles, l’impact dĂ©mographique et les Ă©volutions naturelles de la taxe d’habitation. Voir le commentaire de l’article 20 du projet de loi de finances dans le rapport gĂ©nĂ©ral de M. Gilles Carrez prĂ©citĂ© Doc. AN n° 3363, 12 octobre 2006, Tome II pages 317 Ă  320. 12 Voir le rapport gĂ©nĂ©ral de M. Gilles Carrez prĂ©citĂ© Doc. AN n° 3363, Tome II pages 314 Ă  316. 13 Voir le rapport spĂ©cial de M. Jean-Pierre Brard sur les crĂ©dits pour 2007 du programme Coordination du travail gouvernemental Doc. AN n° 3363, annexe n° 12. 14 Sur le fondement d’un audit rĂ©alisĂ© en 2004, le CSA a rĂ©alisĂ© en 2005 une rĂ©organisation complĂšte de sa direction des programmes et engagĂ© une refonte de ses mĂ©thodes et de ses outils informatiques de contrĂŽle. 15 Le total des crĂ©dits ouverts a ainsi baissĂ© de 39,7 millions d’euros en 2002 Ă  35,19 millions d’euros en 2006 – 11,4 % en euros courants. 16 En 2006, le CSA a mĂȘme Ă©tĂ© confrontĂ© Ă  un effet de ciseaux » d’un cĂŽtĂ©, le plafonnement des reports par la LOLF a rĂ©duit de prĂšs de 3 millions d’euros les crĂ©dits ouverts ; de l’autre cĂŽtĂ©, les charges locatives du CSA ont augmentĂ© de prĂšs de 2 millions d’euros entre 2005 et 2006 en raison de l’augmentation de prĂšs moitiĂ© du loyer de la Tour Mirabeau Ă  la suite du renouvellement du bail par les domaines et de l’assujettissement de ce bail Ă  la TVA. 17 Ces Ă©conomies rĂ©sultent notamment de la remise Ă  plat de l’ensemble des prestations techniques externes du CSA, Ă  la suite de l’intĂ©gration en juillet 2004 des agents auparavant mis Ă  disposition par TDF. 18 Elle comprend, sous l’autoritĂ© de son directeur, assistĂ© d’un chef de service, la sous-direction de la presse Ă©crite et de l’information, la sous-direction de la communication audiovisuelle, la sous-direction du dĂ©veloppement et de la sociĂ©tĂ© de l’information, un dĂ©partement des statistiques, des Ă©tudes, et de la documentation sur les mĂ©dias, ainsi qu’un secrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral. 21 Loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative Ă  la libertĂ© de Loi n° 2005-102 du 11 fĂ©vrier 2005 pour l’égalitĂ© des droits et des chances, la participation et la citoyennetĂ© des personnes handicapĂ©es. 23 Voir le compte-rendu fait, lors de la rĂ©union du 19 septembre 2006 de l’audition de M. Patrick de Carolis, prĂ©sident-directeur gĂ©nĂ©ral de France TĂ©lĂ©visions, sur l’exĂ©cution du COM de France TĂ©lĂ©visions. 24 Devenu le III de l’article 128 de la loi n° 2005-1720 du 30 dĂ©cembre 2005 portant loi de finances rectificative pour 2005. 25 Sur la pĂ©riode du COM, heures de tĂ©lĂ©vision et plus de heures de radio ont Ă©tĂ© sauvegardĂ©es et conservĂ©es sur supports numĂ©riques. Les objectifs dans ce domaine ont Ă©tĂ© dĂ©passĂ©s de prĂšs de heures sur la pĂ©riode du contrat. En ce qui concerne le dĂ©pĂŽt lĂ©gal des chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision et de la radio, la captation concernait, Ă  l’issue du contrat, 40 chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision et 17 radios. 26 Nombre d’indicateurs Ă  caractĂšre technique ou financier coĂ»t de l’heure restaurĂ©e, taux de captation numĂ©rique, coĂ»t de production d’une notice, coĂ»t d’une session de recherche Ă  l’InathĂšque, taux d’autofinancement de la formation ont disparu au profit d’indicateurs nouveaux, fortement orientĂ©s sur le contenu des actions numĂ©risation et protection des supports, pĂ©rimĂštre du dĂ©pĂŽt lĂ©gal, ouverture des fonds, capacitĂ© Ă  diplĂŽmer, rayonnement de la recherche, nouveaux territoires de production, effort de formation interne
 27 À savoir affecter plus de 75 % des dĂ©penses du plan de production et d’achats de programmes Ă  la production. 29 On prĂ©cisera, Ă  toutes fins utile, qu’Euronews, sociĂ©tĂ© basĂ©e Ă  Lyon mais dĂ©tenue par un groupement de tĂ©lĂ©visions publiques europĂ©ennes issues de l’UER, peut difficilement ĂȘtre rĂ©pertoriĂ©e au titre de l’audiovisuel extĂ©rieur, de mĂȘme – bien Ă©videmment –que la chaĂźne RFO, opĂ©rateur de l’outre-mer français. 30 La RAI italienne en dĂ©tient 21,3 %, la RTVE espagnole 18,5 %, la RTR russe 15,5 % et la SSR suisse 9 %.31 La radio, mĂ©dia relativement dĂ©clinant dans les pays dĂ©veloppĂ©s et Ă©mergents, reste en revanche un vecteur puissant dans les pays en dĂ©veloppement Afrique subsaharienne notamment et joue souvent un rĂŽle de premier plan dans les pays en situation de crise ou de post-crise. 32 Outre ce financement assurĂ© sur les crĂ©dits de la mission MĂ©dias, des actions sont menĂ©es dans le cadre du programme SolidaritĂ© Ă  l’égard des pays en dĂ©veloppement de la mission Aide publique au dĂ©veloppement avec l’objectif de favoriser une meilleure diffusion sur les Ă©crans du Sud des programmes que la France a aidĂ© Ă  exister Fonds Sud, Fonds Images Afrique. 33 Elle est principalement diffusĂ©e en ondes longues et en ondes courtes, mais aussi en modulation de frĂ©quence sur douze villes marocaines et par satellite Eutelsat 10° Est. 34 Ces chaĂźnes sont celles de France TĂ©lĂ©visions dont RFO, ARTE France, RTBF, TSR, Radio Canada, TĂ©lĂ© QuĂ©bec et le CIRTEF Conseil International des Radios–TĂ©lĂ©visions d’Expression Française. TV5 QuĂ©bec Canada est une chaĂźne Ă  part, sociĂ©tĂ© purement canadienne qui a l’obligation lĂ©gale de diffuser 15 % de programmes canadiens mais qui utilise plus de 60 % de programmes en provenance de France TĂ©lĂ©visions, contre 30 % en moyenne pour les autres chaĂźnes. 35 Dont 77,8 millions par le cĂąble, les rĂ©seaux MMDS ou l’ADSL et 85,7 millions en rĂ©ception satellitaire. L’Europe est le principal bassin d’audience de la chaĂźne avec 100,3 millions de foyers desservis pour 14,7 millions sur le contient amĂ©ricain, 17,3 millions en Asie, 16,4 millions en Orient, 14,8 millions en Le ministĂšre des Affaires Ă©trangĂšres avait, au cours d’exercices prĂ©cĂ©dents, accordĂ© Ă  TV5 Monde des versements exceptionnels visant notamment Ă  renforcer le sous-titrage, prioritĂ© stratĂ©gique de la chaĂźne. Mais, par prudence, sans l’assurance de la pĂ©rennisation de ces mesures et sans financement des autres partenaires, TV5 Monde n’avait que trĂšs partiellement mis en Ɠuvre les dĂ©penses correspondantes. 37 Rappelons que, dans un souci de bonne gestion des deniers publics, votre commission des Finances avait adoptĂ© l’an dernier un amendement rĂ©duisant de 10 millions d’euros les crĂ©dits prĂ©vus dans le projet de loi de finances pour 2006 dans la mesure oĂč un dĂ©marrage au 1er janvier lui semblait peu probable
 38 On rappellera que le projet avait Ă©tĂ© autorisĂ© par la DGCCRF le 25 mai 2005 et que les modalitĂ©s de son financement avaient Ă©tĂ© approuvĂ©es par la Commission europĂ©enne le 7 juin 2005. 39 Au-delĂ  des textes fondateurs traitĂ© du 2 octobre 1990 et contrat constitutif du 30 avril 1991, ARTE a rapidement privilĂ©giĂ© l’orientation europĂ©enne, tant dans l’origine de ses programmes dont 3. % viennent de pays europĂ©ens autres que la France et l’Allemagne, que dans les thĂšmes Loi n° 2005-102 du 11 fĂ©vrier 2005 pour l’égalitĂ© des droits et des chances, la participation et la citoyennetĂ© des personnes handicapĂ©es, posant le principe gĂ©nĂ©ral d’adaptation de la totalitĂ© des programmes tĂ©lĂ©visĂ©s, Ă  l’exception des messages publicitaires, dans un dĂ©lai maximum de cinq ans suivant sa publication, pour toutes les chaĂźnes publiques. 41 On signalera que, pour mieux financer ses films, ARTE France CinĂ©ma s’est associĂ©e avec la Sofica COFINOVA pour crĂ©er un fonds d’investissement destinĂ© Ă  renforcer son soutien Ă  la crĂ©ation cinĂ©matographique et Ă  donner une chance Ă  des Ɠuvres dont la faisabilitĂ© dĂ©pend de son intervention. Ces investissements viennent en complĂ©ment des investissements pratiquĂ©s par la filiale cinĂ©ma dans le cadre de la rĂ©glementation. Sur ces trois premiĂšres annĂ©es, ce fonds a dĂ©jĂ  soutenu 13 films. La moitiĂ© reprĂ©sente des premiers films et 9 ne bĂ©nĂ©ficiaient pas du soutien en coproduction d’une chaĂźne hertzienne. 42 Toutes les chaĂźnes gĂ©nĂ©ralistes, sans exception, ont dĂ©cidĂ© de prendre le virage de la sĂ©rie de 52 minutes et de 26 minutes, ou de formats plus courts. ARTE, qui a innovĂ© avec la sĂ©rie d’avant-soirĂ©e VĂ©nus & Apollon, doit Ă©galement ĂȘtre prĂ©sente sur ce terrain avec VĂ©nus & Apollon – saison 2 en 52 minutes. 43 TF1, France 2, France 3, France 5, ARTE, M6, France 5 et ARTE, chacune avec un canal plein 24h/24. 44 W9 appartient au groupe M6, qui a rĂ©orientĂ© la programmation de cette chaĂźne musicale Ă  destination des 15-34 ans vers une programmation de mini-gĂ©nĂ©raliste Ă  tendance TMC est une chaĂźne gĂ©nĂ©raliste qui s’adresse Ă  tous les publics. Elle est dĂ©tenue Ă  20 % par la principautĂ© de Monaco et Ă  paritĂ© par TF1 et AB pour les 80 % restant qui Ă©taient prĂ©cĂ©demment dĂ©tenus par PathĂ©, cette modification capitalistique ayant Ă©tĂ© autorisĂ©e par le CSA.46 France 4 est issue de la thĂ©matique Festival, complĂ©mentaire des autres chaĂźnes de France TĂ©lĂ©visions et contribuant Ă  renforcer l’offre culturelle et de spectacles vivants en direction des 25-49 ans. 47 Direct 8 est une chaĂźne gĂ©nĂ©raliste du groupe BollorĂ©, spĂ©cialisĂ©e dans la retransmission d’émissions en direct, d’évĂšnements, d’information, de divertissements, ainsi que la dĂ©couverte de nouveaux talents, de la culture et du cinĂ©ma. 48 NRJ 12 est une chaĂźne du groupe NRJ, ayant une programmation de mini-gĂ©nĂ©raliste Ă  destination des moins de 50 ans avec 40 % de musique, du cinĂ©ma, de la fiction et des jeux. 49 NT 1 est une chaĂźne du groupe AB qui diffuse de l’information, des magazines, du divertissement, de la fiction et du cinĂ©ma. Sa convention prĂ©voit des engagements d’investissement dans la production audiovisuelle et cinĂ©matographique dĂšs la premiĂšre annĂ©e, sans montĂ©e en charge. 50 BFM TV est une chaĂźne d’information Ă©conomique du groupe Nextradio, qui Ă©dite la radio Ă©ponyme. 52 I>TĂ©lĂ© est une chaĂźne d’information du groupe Canal +, auparavant proposĂ©e en payant sur le cĂąble et le satellite. 53 Gulli est une chaĂźne jeunesse créée par France TĂ©lĂ©visions et le groupe LagardĂšre, Ă  hauteur de 33 % et le groupe LagardĂšre 66 %. 54 PlanĂšte est un chaĂźne documentaire dĂ©tenue par les groupes Canal+ et France TĂ©lĂ©visions Ă  hauteur respective de 66 % et 34 %.55 Saisine rendue possible par la publication du dĂ©cret n° 2006-1084 du 29 aoĂ»t 2006 pris pour l’application de l’article 17-1 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 et relatif Ă  la procĂ©dure de rĂšglement de diffĂ©rends par le Conseil supĂ©rieur de l’audiovisuel. 56 Dans cette perspective, les coĂ»ts liĂ©s Ă  l’offre pour les chaĂźnes de service public de France TĂ©lĂ©visions et d’ARTE ont Ă©tĂ© prĂ©vus dans leur budget 2007 de ces sociĂ©tĂ©s nationales de production. 57 Lors de l’examen de la loi du 1er fĂ©vrier 1994 instaurant la reconduction simplifiĂ©e » des autorisations article 28-1 de la loi du 30 septembre 1986, le Conseil constitutionnel n’avait d’ailleurs validĂ© cette disposition qu’en raison des garanties dont elle Ă©tait entourĂ©e, notamment la durĂ©e limitĂ©e de la reconduction ainsi accordĂ©e, les possibilitĂ©s de non reconduction offertes au CSA et la nĂ©cessaire nĂ©gociation d’une nouvelle convention Ă  chaque reconduction. 58 Le CSA vient de lancer une consultation publique en vue du lancement d’appels Ă  candidatures pour des services de tĂ©lĂ©vision et de radio en mode numĂ©rique sur l’üle de la RĂ©union. 59 Depuis 2004, l’ouverture aux tĂ©lĂ©visions locales hertziennes de la publicitĂ© pour la grande distribution a favorisĂ© l’arrivĂ©e de nouveaux annonceurs, dans des proportions encore difficiles Ă  Ă©valuer, mais susceptible de gĂ©nĂ©rer des ressources non nĂ©gligeables pour ces chaĂźnes. 60 Il s’agit de TĂ©lĂ© Lyon MĂ©tropole, TĂ©lĂ© Toulouse, Clermont 1Ăšre, TV7 Bordeaux et Ces tĂ©lĂ©visions disposent en gĂ©nĂ©ral d’équipes de trente Ă  cinquante salariĂ©s dont une dizaine de journalistes. L’information est au centre de leur programmation et leur budget s’échelonne de 1 Ă  4 millions d’euros. 62 Canal 8 Le Mans, TV7 Marseille, 7L Montpellier, TĂ©lĂ© Miroir NĂźmes, Angers 7, TĂ©lĂ© Grenoble, OTV OrlĂ©ans et Touraine TĂ©lĂ©vision Tours. 64 Elles ont vocation Ă  couvrir un territoire Ă  dominante rurale, plus Ă©tendu que celui des tĂ©lĂ©visions de ville et elles s’adressent Ă  une communautĂ© prĂ©sentant une cohĂ©sion gĂ©ographique, culturelle, Ă©conomique ou sociale. DotĂ©es de structures plus petites et de moyens plus faibles, leur budget est gĂ©nĂ©ralement compris entre 1,5 et 2 millions d’euros et parfois pris en charge par les collectivitĂ©s locales, en Ă©change d’espaces publicitaires et de prestations diverses de DotĂ©es de structures encore plus petites et de moyens encore plus rĂ©duits, leur budget s’élevait, en 2003, Ă  euros pour TĂ©lĂ© Sud VendĂ©e et Ă  euros pour TĂ©lĂ© 102. Leur mode artisanal est difficilement reproductible. 66 Aux cĂŽtĂ©s des chaĂźnes publiques de RFO, coexistent des tĂ©lĂ©visions cryptĂ©es reprenant les programmes de Canal Plus et des tĂ©lĂ©visions locales privĂ©es en clair. On compte une chaĂźne privĂ©e en clair en Guyane et Ă  la RĂ©union deux Ă  la L’apparition de chaĂźnes locales sur le cĂąble remonte au dĂ©but des annĂ©es 1990 et leur nombre a suivi une progression relativement rĂ©guliĂšre depuis 1994. À ce jour, le CSA a conventionnĂ© environ 100 canaux Le statut juridique des titulaires d’autorisations est trĂšs variĂ© association 34 % des cas, commune 34 %, rĂ©gie municipale ou intercommunale 13 %, sociĂ©tĂ© d’économie mixte 8 %, sociĂ©tĂ© anonyme 7 %, syndicat intercommunal 4 %. 69 Il s’agit des frĂ©quences voisines de celles utilisĂ©es pour la diffusion analogique des chaĂźnes locales diffusĂ©es en mode SECAM.70 DĂ©cret n° 2001-609 du 9 juillet 2001 pris pour l’application du 3° de l’article 27 et de l’article 71 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 et relatif Ă  la contribution des Ă©diteurs de services de tĂ©lĂ©vision diffusĂ©s en clair par voie hertzienne terrestre en mode analogique au dĂ©veloppement de la production d’oeuvres cinĂ©matographiques et audiovisuelles. Ce dĂ©cret a Ă©tĂ© modifiĂ© par celui n° 2001-1329 du 28 dĂ©cembre 2001 afin d’ajouter un nouveau critĂšre permettant de qualifier les achats d’Ɠuvres audiovisuelles relevant de l’indĂ©pendance sont depuis lors exclues du dĂ©compte de la contribution Ă  la production indĂ©pendante, les achats effectuĂ©s, sous certaines conditions, auprĂšs d’entreprises contrĂŽlĂ©es par un Ă©diteur de services. 71 Les programmes dits de stock » sont ceux qui ont un caractĂšre crĂ©atif et patrimonial ; leur intĂ©rĂȘt ne s’épuise pas Ă  la premiĂšre diffusion. Par opposition, les programmes dits de flux » sont ceux qui n’ont pas vocation Ă  ĂȘtre rediffusĂ©s, il s’agit principalement d’émissions de plateaux, de divertissement ou d’information. 72 Voir le rapport spĂ©cial de M. Olivier Dassault sur les crĂ©dits pour 2007 de la mission CinĂ©ma, audiovisuel et expression radiophonique locale Doc. AN n° 3363, annexe n° 7. 73 Sont considĂ©rĂ©s comme producteurs dĂ©pendants ou liĂ©s Ă  des chaĂźnes, les producteurs dont un actionnaire ou groupe d’actionnaires qui dĂ©tient au moins 15 % du capital social ou des droits de vote de l’entreprise de production est Ă©galement actionnaire d’un ou de plusieurs diffuseurs hertziens, du cĂąble ou du satellite. 74 La conclusion d’un accord–cadre en 2005, visant Ă  intĂ©grer du personnel prĂ©caire sur des emplois justifiant une activitĂ© pĂ©renne, a abouti Ă  l’intĂ©gration de 165 ETP et Ă  une diminution concomitante des non permanents. 75 Ce total correspond Ă  l’estimation des financements supplĂ©mentaires demandĂ©s par France TĂ©lĂ©visions au titre non seulement du sous-titrage en faveur des sourds et des malentendants et de la mise en place de la haute dĂ©finition, mais aussi du surcoĂ»t liĂ© Ă  la chaĂźne Via Stella, du financement en coĂ»t rĂ©current de et ses problĂšmes spĂ©cifiques de RFO et France Ô. 76 SurcoĂ»ts Ă  payer pour l’achat de programmes externes fabriquĂ©s en HD et coĂ»t de location des canaux de diffusion par satellite. 78 C’est le dĂ©cret du 7 octobre 2003 qui a initiĂ© le processus d’ouverture de la publicitĂ© tĂ©lĂ©visĂ©e Ă  de nouvelles catĂ©gories d’annonceurs. Deux dates importantes sont prĂ©vues par le texte le 1er janvier 2004, oĂč l’ouverture est devenue totale pour la presse et partielle pour le livre, partielle et progressive pour la distribution, et le 1er janvier 2007 oĂč l’ouverture sera effective pour la distribution sur les six chaĂźnes gĂ©nĂ©ralistes hertziennes. Reste Ă  fixer la date d’ouverture de la publicitĂ© et la liste des mĂ©dias qui seront autorisĂ©s Ă  promouvoir les films de cinĂ©ma en salles. 79 Le comptabilisation des 12 minutes de publicitĂ© par heure se fait aujourd’hui par heure glissante, et non par heure d’horloge comme ailleurs en Europe, ce qui constitue un frein Ă  l’optimisation des Ă©crans aux heures de grandes Le premier symbole de ce nouvel esprit Ă©ditorial a Ă©tĂ© la mise en place, dĂšs septembre 2005, d’une bande annonce commune pour les soirĂ©es de France TĂ©lĂ©visions autopromotion croisĂ©e des programmes. 81 L’offre de fictions a Ă©tĂ© Ă©tendue afin de mieux identifier les trois cases de premiĂšre partie de soirĂ©e une fiction de prestige et de patrimoine le lundi ; un mercredi mĂ©langeant hĂ©ros rĂ©currents, tĂ©lĂ©films et sĂ©ries innovantes ; une soirĂ©e polars » le vendredi. 82 La chaĂźne recueille en moyenne sur le trimestre, une part d’audience de 0,3 % en ensemble journĂ©e sur le cĂąble, le satellite et la TNT. Sur son cƓur de cible affichĂ© les 25–49 ans, la chaĂźne affiche une part d’audience optimisĂ©e Ă  0,4 %. Elle a enregistrĂ© une croissance ininterrompue de sa part d’audience sur l’univers TNT entre avril et juillet. Ainsi, au cours du mois de juillet marquĂ© par les soirĂ©es en direct des Francofolies, du Festival d’Avignon, et la rediffusion hebdomadaire de Taratata, la part d’audience a atteint 0,9 %.83 La chaĂźne propose les Ă©missions, rĂ©alisĂ©es par les stations de RFO, au public mĂ©tropolitain avec un cƓur de cible que sont les tĂ©lĂ©spectateurs ayant des attaches outre-mer. Mais elle s’adresse Ă©galement au public hexagonal, Ă  qui elle cherche Ă  faire connaĂźtre la rĂ©alitĂ© de l’ On rappellera que le CSA est la seule autoritĂ© compĂ©tente pour la gestion et le contrĂŽle du spectre attribuĂ© Ă  la radiodiffusion et la dĂ©livrance des autorisations d’usage de ces Loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 relative aux communications Ă©lectroniques et aux services de communication audiovisuelle. 86 Pour appuyer les travaux de ce groupe, le CSA a fait dĂ©velopper un outil d’aide Ă  la dĂ©cision en matiĂšre d’optimisation de la bande FM, nommĂ© Algocast ». 88 Par exemple, les modalitĂ©s de sĂ©lection des services sont diffĂ©rentes selon qu’il s’agit de service multiplexĂ©s ou non, en simulcast avec un signal analogique ou À savoir l’extension des zones de couverture des services existants, l’enrichissement de l’offre de services par des donnĂ©es associĂ©es et des nouveaux programmes et, Ă  long terme, la migration gĂ©nĂ©ralisĂ©e de l’analogique vers le Elles ont ainsi appelĂ© Ă  l’utilisation rapide des ressources dĂ©gagĂ©es en bande IIIen estimant notamment prometteuses les capacitĂ©s des technologies de diffusion issues de la norme T-DAB, jugĂ©e dĂ©sormais trop peu efficace, c’est-Ă -dire le T-DMB et le T-DAB+.91 L’aide aux radios associatives, prĂ©vue Ă  l’article 80 de la loi relative Ă  la libertĂ© de communication, est attribuĂ©e par le ministre de la Culture et de la communication. Elle est accordĂ©e aux radios locales associatives accomplissant une mission de communication sociale de proximitĂ©, lorsque les ressources publicitaires de celles-ci sont infĂ©rieures Ă  20 % de leur chiffre d’affaires total. Le FSER est chargĂ© de la gestion de cette Les crĂ©dits du FSER figurent au sein du programme Soutien Ă  l’expression radiophonique locale. Ils sont dotĂ©s de 24 millions d’euros en 2007 contre 23,7 millions d’euros en 2006. Voir le rapport spĂ©cial de M. Olivier Dassault sur les crĂ©dits de la mission CinĂ©ma, audiovisuel et expression radiophonique locale pour 2007 Doc. AN n° 3363, annexe n° 7.93 Tels que la consolidation des emplois, la lutte contre les discriminations, les actions culturelles et Ă©ducatives ou encore, les efforts en faveur de l’environnement et du dĂ©veloppement local. 94 Notamment la fermeture de France Bleu Melun, la modification des programmes du rĂ©seau France Bleu, ou encore le fonctionnement de la rĂ©daction de France Bleu Breiz Comme c’est dĂ©jĂ  le cas sur le cĂąble, les bouquets satellitaire et l’offre triple play en Écoute en streaming, Ă  la demande ou en tĂ©lĂ©chargement, complĂ©mentaire des rĂ©seaux de diffusion en broadcast. 98 La consultation des entreprises chargĂ©es des travaux n’aura lieu que dĂ©but 2007. 99 L’objectif est de faire reconnaĂźtre le diplĂŽme au grade de Master par le ministĂšre de l’Éducation nationale d’ici Ă  la sortie de la premiĂšre promotion en juin 2008. Seront ainsi recrutĂ©s des Ă©tudiants d’un niveau minimum de Bac+ L’INA dĂ©veloppe des activitĂ©s de formation initiale qui vont du BTS Ă  l’enseignement supĂ©rieur. En 2006, il a mis en place un Master en partenariat avec TĂ©lĂ©com Paris et ouvrira une quatriĂšme option BTS sur les mĂ©tiers du montage HabilitĂ© Ă  collecter la taxe d’apprentissage, l’INA contribue au dĂ©veloppement de l’apprentissage dans le secteur audiovisuel en accueillant un nombre croissant d’apprentis en On rappellera que le patrimoine audiovisuel de l’INA a deux origines les fonds en provenance du dĂ©pĂŽt lĂ©gal et les fonds d’archives de tĂ©lĂ©vision et radio provenant des chaĂźnes publiques, auxquels il faut d’ailleurs rajouter un fonds d’actualitĂ©s cinĂ©matographiques. Les profils de ces deux fonds en termes de conservation sont trĂšs diffĂ©rents. Parce que le dĂ©pĂŽt lĂ©gal date de 1995, ses fonds ne connaissent pas de problĂšme particulier Ă  l’heure actuelle car ils sont en format bĂȘta SP ou sous fichiers numĂ©riques MPEG, ces fichiers Ă©tant eux-mĂȘmes reportĂ©s sur des disques optiques ou des supports magnĂ©tiques informatiques. 103 Ce lancement a Ă©tĂ© largement relayĂ© par la presse le jour mĂȘme et dans les semaines qui ont suivi, gĂ©nĂ©rant un encombrement du site
 qui a lui-mĂȘme fait la une des journaux. DĂšs le lancement, les internautes sont allĂ©s nombreux sur le site. Certains souhaitent revoir des moments de la mĂ©moire collective des petites phrases du gĂ©nĂ©ral de Gaulle
 Ă  Bonne nuit les petits »  en passant par les Shadoks ». D’autres viennent poussĂ©s par une curiositĂ© axĂ©e autour de centres d’intĂ©rĂȘts personnels extrĂȘmement La rĂ©activitĂ© de cette offre Ă©ditoriale vis-Ă -vis de l’actualitĂ© a Ă©tĂ© remarquĂ©e, s’agissant par exemple des dossiers sur le Liban ou sur Raymond Devos au moment de sa Des familles de titres connaissent cependant des Ă©volutions nĂ©gatives, depuis plusieurs exercices pour certaines Ă  l’image des magazines TV, qui reprĂ©sentent la part la plus importante de la diffusion les magazines TV subissent en 2005 une baisse de diffusion de 4,6 %, aprĂšs une baisse de 4,2 % en 2004. Les titres de jeunesse sont Ă©galement touchĂ©s par la baisse de la diffusion en 2005 – 9 % pour les titres adolescents – 6,5 % en 2004 et – 2 % pour les magazines enfants. La baisse de diffusion affecte Ă©galement les parentaux – 3,4 %, les titres sciences et dĂ©couverte – 8 %, la presse automobile – 9 % et les masculins – 12 %. 107 La rĂ©forme, introduite par le dĂ©cret n° 2004-1312 du 26 novembre 2004, a permis d’ouvrir cette aide aux publications rĂ©digĂ©es en langues rĂ©gionales en usage en France et de procĂ©der Ă  quelques amĂ©nagements techniques. 108 RĂ©gie par le dĂ©cret n° 2004-595 du 22 juin 2004, l’aide Ă  l’impression dĂ©centralisĂ©e des quotidiens succĂšde au fonds d’aide Ă  la transmission par fac-similĂ© dont l’objet n’était plus pertinent compte tenu de l’évolution des techniques de transmission des donnĂ©es et de la baisse de leur coĂ»t. 109 Cet effort appelle notamment la rĂ©novation du mobilier professionnel, avec l’acquisition de linĂ©aires permettant d’augmenter la surface d’exposition et ainsi d’amĂ©liorer la visibilitĂ© et l’attractivitĂ© des titres de presse prĂ©sentĂ©s Ă  la clientĂšle, avec, en outre, un impact positif sur les conditions de travail. 110 Elles concernent Ă©galement les investissements nĂ©cessaires Ă  la constitution de bases de donnĂ©es Ă  partir des informations contenues dans le journal ou la publication ainsi que l’acquisition du matĂ©riel nĂ©cessaire Ă  leur exploitation ou Ă  leur Voir le commentaire de cet article dans le rapport gĂ©nĂ©ral de M. Gilles Carrez, Rapporteur gĂ©nĂ©ral de votre commission des Finances Doc. AN n° 3363, 12 octobre 2006, Tome I pages 109 Ă  124. 112 Celles qui remplissent les conditions prĂ©vues aux articles 72 et 73 de l’annexe III au CGI, dans leur rĂ©daction issue du dĂ©cret n° 97-273 du 21 mars Pour bĂ©nĂ©ficier de ce rĂ©gime, les publications doivent aussi avoir obtenu un numĂ©ro d’inscription Ă  la Commission paritaire des publications et agences de presse et une dĂ©cision favorable du directeur des services fiscaux prise sur demande des Ă©diteurs intĂ©ressĂ©s. 114 Il s’agit d’une dĂ©pense rattachĂ©e Ă  titre subsidiaire Ă  la mission MĂ©dias puisque son affectation principale est la mission Sport, jeunesse et vie associative. 115 On rappellera que l’AFP, créée en 1957, constitue la seule agence mondiale non anglo-saxonne et contribue ainsi de façon trĂšs forte au pluralisme de l’information. Ses dĂ©pĂȘches sont reprises dans le monde entier et son rĂ©seau d’information est l’un des plus performants au monde. 116 En 2003, cette revalorisation a Ă©tĂ© rĂ©glĂ©e Ă  la fin de l’exercice aprĂšs adoption du COM. À partir de 2004, elle a Ă©tĂ© intĂ©grĂ©e aux rĂšglements trimestriels de l’État selon la facturation Ă©mise conformĂ©ment au COM. 117 De plus, l’AFP devrait accĂ©der au fonds d’aide Ă  la modernisation de la presse dĂšs En 18 mois, l’AFP a dĂ» absorber les consĂ©quences financiĂšres de la crĂ©ation globale de 218 postes, reprĂ©sentant 10 % des effectifs, rĂ©sultant Ă  la fois du lancement d’un plan de dĂ©veloppement finalement avortĂ© et du passage aux 35 heures. Le poids de la masse salariale sur le chiffre d’affaires a ainsi pĂ©nalisĂ© lourdement la marge d’exploitation. Sans oublier les effets du mĂ©canisme d’automaticitĂ© du dĂ©roulement des carriĂšres des journalistes liĂ©s Ă  un accord de 2000. Les efforts consentis sur la pĂ©riode 1991–1995 sur les charges de personnel ont ainsi Ă©tĂ© totalement annulĂ©s par la gestion de la pĂ©riode 1997–2001. Du reste, les effectifs supplĂ©mentaires ont Ă©tĂ© rĂ©partis en France, de maniĂšre dissĂ©minĂ©e et peu productive, et non Ă  l’étranger, oĂč ils auraient pourtant Ă©tĂ© plus rentables pour le dĂ©veloppement de l’activitĂ© de l’AFP. 119 Les plus fortes progressions par rapport Ă  2004 proviennent de l’international + 9,2 % avec des augmentations importantes pour le Moyen-Orient 19,1 %, l’Europe 12,7 %, l’AmĂ©rique du Nord et l’AmĂ©rique Latine 11,9 %, AFX 18,4 %. La France FilĂ©as et AFX France exclus progresse de 2,1 %. 120 En 2005, les effets de la convention de dĂ©part en prĂ©retraite ont Ă©tĂ© comptabilisĂ©s en charges exceptionnelles pour 7,9 millions d’euros compte tenu de leur niveau trĂšs Ă©levĂ© sur l’annĂ©e 2005 par rapport aux coĂ»ts de dĂ©part habituellement constatĂ©s par l’agence environ 4 millions d’euros par an. Ces frais Ă©taient normalement constatĂ©s en rĂ©sultat d’exploitation jusqu’alors.
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LaRoche-sur-Yon rĂ©serve 4 lieux dĂ©diĂ©s aux amoureux de la culture : les musĂ©es et salles de spectacles consacrĂ©s Ă  Ă©vĂ©nements culturels tel que le MusĂ©e Municipal ou le VendĂ©space. Tout en satisfaisant les attentes des familles, ils permettent aux Ă©tudiants d'apprendre, d'ĂȘtre bien prĂ©parĂ©s Ă  leurs examens et de s'instruire. L’Image railleuse, 2019A short summary of this paper36 Full PDFs related to this paperPeople also downloaded these PDFsPeople also downloaded these free PDFsPeople also downloaded these free PDFsRELATED PAPERSPrendre le temps Denis Ansel, Joseph Bey, Robert Cahen, Daniel Dyminski, Bernard Latuner, Guido Nussbaum, Germain Roesz, cat. expo., Saint-Louis, Fondation Fernet-Branca, Hardy, Godin-LaverdiĂšre, N. Perron, À la dĂ©couverte du fonds AlbĂ©ric Bourgeois 1876-1962 thĂ©matiques d’une sociĂ©tĂ© en transformation,1899-1957», Quand la caricature sort du journal Baptiste LadĂ©bauche 1878-1957, sous la dir. de Mtl, Fides, 2015, TOPICSRelated topicsRelated topics ABd5g.
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